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DES TRANSITIONS A L’ISSUE D’ELECTIONS AVEC ALTERNANCES

LES PROCESSUS DE TRANSITIONS DEMOCRATIQUES EN AFRIQUE : ESSAI D’INTERPRETATIONS

A) ETATS DES LIEUX ET LOGIQUES DES TRANSITIONS AFRICAINES

I) UNE VASTE LITTERATURE ET DES RESULTATS MITIGES

1) DES TRANSITIONS A L’ISSUE D’ELECTIONS AVEC ALTERNANCES

La variable électorale est au cœur des processus de transition démocratique. La transition commence à partir de la préparation des élections pluralistes dans un contexte autoritaire. Elle une double vocation : permettre le renouvellement de l’équipe en place discréditée et permettre une participation ouverte à la compétition politique. Dans plusieurs cas de figure, la transition prend fin après l’organisation des élections et le changement d’équipe.

127 Garreton (M.A), Reconstruir la democracia, Santiago, Andante, 1987, p. 37.

128 Przeworski (A), Democracy and the Market, Cambridge, Cambridge University Press, 1991, p. 10.

Beaucoup de pays ont connu des élections pluralistes qui ont débouché sur des alternances à la tête de l’Etat, mais peu réussiront la prouesse politique de consolider ces acquis. Le Bénin ouvrira le « bal ». Pour ce pays beaucoup de publications ont été faites notamment en ce qui concerne la conférence nationale des forces vives de la nation.

Il est difficile de parler de transition démocratique en Afrique sans mettre un accent particulier sur le Bénin. Considéré comme le pays test des fameuses conférences nationales, sa transition est un modèle qu’il convient de rappeler ici le processus. Après des mois de contestations internes, de pressions externes et de tentatives d'ouverture, le président Mathieu Kérékou porté au pouvoir par un coup d'Etat le 30 octobre 1972, met fin au règne du parti unique, abandonne le « marxisme-léninisme» et convoque une « Conférence nationale des forces vives de la nation » qui devra servir de base à la définition d'un ordre nouveau. Celle-ci se tient du 19 au 28 février 1990 sous la direction de l'archevêque de Cotonou, Mgr de Souza.129

Ayant proclamé sa souveraineté et le caractère exécutoire de ses décisions, elle amorce le changement de régime. Après dissolution des anciennes instances « révolutionnaires », des institutions de transition sont mises en place : Nicéphore Soglo est élu Premier ministre d'un gouvernement d'intérim, un nouvel organe législatif (le haut Conseil de la République) est créé et des élections législatives et présidentielles prévues pour l'année suivante. Un an après, le 21 mars 1991, N. Soglo est élu président et ouvre officiellement la période du Renouveau démocratique.

Le Mali achèvera sa période de transition en juin 1992, après un processus électoral apaisé. Le processus malien est considéré comme un bon exemple à l’image de celui du Bénin, aussi bien par les observateurs que chez certains auteurs. Pierre Boilley130 souligne le rôle du générale Amadou Toumani Touré dans la gestion de la transition, et le mode de gestion du pouvoir du président Alpha Oumar Konaré. Face à l’incertitude des transitions, des réserves critiques

129 Cf Banégas (R), La démocratie à pas de caméléon : Transition et imaginaires politiques au Bénin, Paris Karthala,2003.

130Pierre (B), « Présidentielles maliennes : l'enracinement démocratique ? », Politique africaine 2002/2 (N° 86), p. 171-182

existent aussi dans l’appréhension du cas malien. A vu de l’évolution politique du pays, ces réserves sont aujourd’hui justifiées, eu égard aux évènements qui affecte le Mali depuis 2012.

A côté de ces deux pays longtemps considérés comme des modèles réussis de transition démocratique, le Niger, le Congo, Madagascar et la République Centrafricaine connaitront aussi des transitions réussies avec une particularité de présenter un avenir de consolidation en suspens et incertain.

Le Congo a fait recours à la conférence nationale pour sortir d’une dictature d’inspiration révolutionnaire et populaire à forte composante militaire. Selon Patrick Quantin, « la sortie de la dictature peut être considérée comme une opération formellement accomplie à l’issue du cycle électoral qui a pourvu le pays d’institutions nouvelles. »131

Au Niger la transition a été plus longue dans la mesure où elle ne s’achève qu’en 1993 suite aux élections présidentielles et législatives. La tenue de la conférence nationale au Niger a permis l’éclosion à la hâte de plusieurs partis politique132. Trente partis prennent part à la conférence nationale.

Il faut noter que la littérature consacrée aux transitions démocratiques pour la grande majorité reste assez descriptive au détriment d’une analyse de l’héritage autoritaire de ses régimes. Or, si dans plusieurs pays la transition a échoué ou a peiné à se réaliser, c’est par qu’il existe un va et vient permanent entre régime démocratique et restauration autoritaire. La frontière reste assez tenue. L’autre critique est l’utilisation extensive de la notion de transition démocratique. Cette utilisation a conduit au fait que plusieurs cas ont été caractérisés de transitions réussies du seule fait de l’organisation d’élections concurrentielles, sans prendre en compte la dimension institutionnelle.

A côté de ces cas évoqués comme transitions réussies avec tout l’aspect instable du phénomène, d’autres pays échoueront à organiser des élections permettant le passage d’un régime autoritaire à un démocratique. C’est la

131 Quantin (P), « Congo : transition démocratique et conjoncture critique, in Daloz (J-P) et Quantin (P), dir, op.cit, P139.

132 Diop (M-C) et Diouf (M), Les figures du politique en Afrique : des pouvoirs hérités aux

pouvoirs élus, Paris, Karthala et CODESRIA, 1999.

différence fondamentale entre les cas étudiés de transitions réussies et celles échouées.

Classer les différentes expériences de changements politiques notées en Afrique depuis 1990 en termes de « réussite » ou « d’échec » remet au devant de la scène la finalité des transitions démocratiques. Il est très reste imprudent de procéder à une telle classification sans tenir compte de l’aspect très réversible du phénomène. Les cas de transitions démocratiques réussies sont identifier et classer comme telle avec la prise en compte de l’élément « élections multipartites avec alternance. »

La transition à elle seule qui est un simple passage d’un régime autoritaire à un autre démocratique par le truchement d’élections multipartites et concurrentielles a concerné beaucoup de pays africains. Les uns et les autres se distingueront quelques années plus tard dans la phase de consolidation des acquis démocratiques.