• Aucun résultat trouvé

LA TRANSFORMATION DE L’EUROPE CENTRALE À LA SORTIE DU COMMUNISME

1.1 La définition de l’Europe centrale

1.2.1 Une transformation politique

Après l’effondrement du système communiste, la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie choisissent le chemin vers l’État de droit et de démocratie. Dans la majorité des pays, le régime communiste a été un système imposé de l’extérieur qui a perduré pendant presqu’un demi-siècle. Plus de trois générations ont vécu sous ce régime. En conséquence, toute la société a adapté certaines valeurs et des modes de comportement particuliers. Cela est principalement visible en Pologne où la période socialiste a apporté à certains milieux sociaux une chance d’améliorer leur situation, il s’agit notamment des paysans et des ouvriers.230 Dans la plupart des pays socialistes, la Seconde Guerre mondiale et les déportations de masse ordonnées par les Soviétiques231, ont provoqué une extermination brutale de l’intelligentsia, de l’aristocratie et de la bourgeoisie232

et, en conséquence, une restructuration totale de l’identité sociale. Durant des années, un modèle où l’État domine mais qui assure la sécurité et l’existence décent s’est enraciné dans les pays centre-européens.233

Cependant, dans la plupart des pays communistes, les sociétés souhaitaient voir changer le style et la manière de gouverner. Ils n’imaginaient ni les opportunités ni les dangers potentiels qui accompagnent d’habitude de tels changements. Malgré les incertitudes, les peuples soumis se sont prononcés en faveur de la démocratisation, des libertés et des droits

230 MINK Georges, La société postcommuniste : éléments d’approche, L’Europe centrale et orientale. Dix ans

de transformations…, op. cit., pp. 23-35.

231

Le 17 septembre 1939 l’URSS a agressé militairement la Pologne. L’Armée rouge a envahi les terrains orientaux polonais. Le 28 septembre 1939, le Troisième Reich et l’URSS ont signé à Moscou le pacte sur l’amitié et les frontières polonaises (pacte Ribbentrop - Molotov). En conséquence, l’Union soviétique a annexé les territoires orientaux de la Pologne (l’Ukraine et la Biélorussie occidentale). Les déportations de masse étaient une des formes de répressions sur ces territoires occupés. Les Allemands ont mis en place le plan de «

Sonderaktion » qui avait pour but de détruire l’intelligentsia polonaise. Les Soviétiques voulaient aussi éliminer

les élites polonaises de Kresy – Confins orientales (les terres à l’Est de la ligne Curzon). Durant « l’amitié

germano-soviétique », entre 1939-1941, par quatre vagues de déportation 1,5 – 2 millions des citoyens polonais

ont été transportés en Sibérie et en Asie centrale :

1. Le 10 février 1940 – la déportation de la population de Kresy, environ 140 000 personnes.

2. Les 13-14 avril 1940 – la déportation des familles des « ennemis du régime » : des fonctionnaires d’État, des militaires, des policiers, des enseignants, des activistes sociaux, des commerçants, des employés et des personnes déjà arrêtées par le NKVD (russe Narodnii komissariat vnoutrennikh diél, fr. Commissariat du peuple aux Affaires intérieures - police politique), environ 61 000 personnes.

3. Mai - juillet 1940 - la déportation des Juifs, des Biélorusses et des Ukrainiens, environs 80 000 personnes.

4. Mai - juillet 1941 - la déportation de l’intelligentsia, des familles des personnes arrêtées par le NKVD et de la main d’œuvre qualifiée, environ 85 000 personnes. CZERNIAKIEWICZ Jan, CZERNIAKIEWICZ Monika, Przesiedlenia ludności…, op. cit., pp. 35-109.

232 HOLZER Jerzy, Europejska tragedia XX wieku. II wojna światowa (La tragédie européenne du XXe siècle. La Seconde Guerre mondiale), Varsovie, 2005, pp. 260-288.

233

GRUSZCZAK Artur, Problemy rządzenia w krajach Europy Środkowowschodniej (Les problèmes de

131 de l’homme. Ils ont rêvé du « socialisme capitaliste », où l’État de droit et la sécurité sociale sont garantis, les perspectives du progrès économique deviennent réelles faisant disparaître le « marché du manque permanent ». Pourtant, la transformation du système implique des modifications identitaires importantes. La sécurité douillette et surveillée cède la place à l’environnement dynamique qui offre des possibilités de développement, mais expose aussi aux risques qu’implique la pression constante de la concurrence.234

Le début du changement pose beaucoup de problèmes aux pays concernés. Pour jeter les bases d’un nouveau système politique, il faut modifier radicalement la structure de l’État. Ce processus démarre subitement, souvent sans aucune préparation nécessaire. En Europe centrale, ce sont des événements importants et des tournants brusques qui ont déclenché la transformation. Les nouvelles élites n’avaient pas préparé des projets concrets pour réorganiser l’État, souvent elles n’étaient pas prêtes à prendre le pouvoir.

Tous les pays du l’ex-bloc socialiste ont hérité d’un modèle politique similaire, fondé sur un système parlementaire monopartite (souvent, les autres partis satellites avaient fonctionné provisoirement). Au pouvoir, le parti communiste gardait l’influence déterminante, fixant seul la composition et la direction du gouvernement. Par sa gouvernance, le parti unique réglait tous les aspects de la vie sociale, politique et économique.

Sur le plan légal et juridique, le peu d’adaptation du système socialiste aux nouveaux défis constituait un autre problème majeur. Remplies de déclarations idéologiques (y compris les garanties pour la pérennité du socialisme et la coopération fraternelle avec l’URSS), les constitutions des pays du bloc soviétique limitaient considérablement leur souveraineté.235 La loi et la jurisprudence (par exemple, le code pénal) comprenaient des aspects non-démocratiques (par exemple, elles ne protégeaient pas le citoyen, limiter de fait la liberté d’opinion, interdisaient les droits civiques tel le droit de rassemblement, etc.)236

. Les structures citoyennes indépendantes du pouvoir central telles que les associations, les syndicats et les partis politiques étaient prohibées.

234 ANTOSZEWSKI Andrzej, HERBUT Ryszard, Demokracje Europy Środkowej i Wschodniej w perspektywie

porównawczej (Les démocraties de l’Europe centrale et orientale dans une perspective comparative), Wrocław,

1997, pp. 37-45.

235 SOBOLEWSKA-MYŚLIK Katarzyna, Partie i systemy partyjne Europy Środkowej po 1989 r. (Les partis et

les systèmes des partis de l’Europe centrale après 1989), Cracovie, 1999, pp. 18-20.

236 WOJNICKI Jacek, Trudna droga do demokracji. Europa Środkowo-Wschodnia po 1989 roku, op. cit., pp. 100-112; POTEL Jean-Yves, La reconstruction d’États de droit en Europe centrale et orientale, La séparation

des pouvoirs - Comment former une nouvelle administration ?, Notes et études documentaires : Secrétariat Général du Gouvernement. Paris : La Documentation Française [en ligne], 2000, pp. 37-50. Disponible sur :

http://www.econbiz.de/Record/reconstruction-%C3%A9tats-droit-europe-centrale-orientale-s%C3%A9paration-des-pouvoirs-comment-former-une-nouvelle-administration-potel-jean-yves/10006516316

132 La nouvelle réalité pose la question de nouvelles élites censées vite remplacer les activistes communistes qui ont contrôlé la vie politique jusqu’à la rupture. Dans la majorité de pays, ces élites se regroupent autour des opposants au système communiste (la Solidarność en Pologne, le Fidesz et le MDF (Forum démocrate hongrois) en Hongrie, la Carte 77 et le Forum Citoyen en Tchécoslovaquie. Mais avec le temps, unis au début, ces milieux commencent à se différencier et à rivaliser.237

Cette diversification de nouvelles élites est particulièrement visible en Pologne, où l’opposition démocratique réunissait aussi bien les élites conservatrices, libérales et gauchistes. Dans ce contexte, beaucoup de petits et moyens partis voient le jour. Après cette explosion de la diversité, une consolidation politique s’opère dans tous les pays postsoviétiques. Ainsi, un équilibre caractéristique du système démocratique s’implante là, où un certain nombre « de forges des élites » a apparu.

La réussite du processus de transformation dépend des élites politiques qui doivent assumer la responsabilité et l’exercice du pouvoir et saurant profiter de manière judicieuse des conséquences provoquées par la chute du système communiste. Le fait de disposer des élites capables de s’emparer du pouvoir différencie les États de Visegrád des autres pays de la région. Formées en dehors des partis communistes, ces élites insistent sur la nécessité des transformations économiques et politiques. La diversification des élites politiques et économiques dépendant de la structure des anciennes élites communistes, on observe dans ce domaine, de différentes tendances. Dans les pays, où les élites communistes étaient diversifiées et divisées (Pologne, Hongrie) la substitution des vieilles élites par les nouvelles a duré plus longtemps. Dans les pays, où le pouvoir était fortement centralisé et les anciennes élites très homogènes, ce processus a été très violent.

L’Europe postcommuniste vit son passé sur les deux niveaux :238  niveau formel, c’est-à-dire :

la lustration ;239

la réhabilitation des victimes du stalinisme ;  niveau moral.

237 SOBOLEWSKA-MYŚLIK Katarzyna, Partie i systemy partyjne Europy Środkowej po 1989 r., op. cit., pp. 53-75; ANTOSZEWSKI Andrzej, HERBUT Ryszard, Demokracje Europy Środkowej i Wschodniej w

perspektywie porównawczej, op. cit., pp. 48-51.

238

STANISZKIS Jadwiga, Postkomunizm. Próba opisu (Le postcommunisme. Une tentative d’explication), Gdańsk, 2001, pp. 115-124.

239 En polonais lustracja, en anglais lustration. Il s’agit d’un processus qui a eu lieu dans les pays postcommunistes dans les années 1989-1991. C’est une procédure de vérification à laquelle sont soumis les hauts fonctionnaires, qui doit révéler si oui ou non ils ont travaillé pour le régime communiste.

133 La révision du passé sur ces deux plans se passe différemment dans chaque pays. Le règlement de comptes avec l’Histoire, dans son aspect formel, se fait avec plus ou moins de succès, mais son bilan moral reste ambigu.

La complexité des changements concernant tous les aspects de la vie : l’économie, la société, la politique, les institutions, les constitutions, la culture (totalement soviétisée240

), etc.241, est soumise à l’analyse approfondie, déterminée par un certain nombre d’indicateurs. Le taux de démocratisation est l’un de ces paramètres. Étudiés par Freedom House, une organisation internationale non-gouvernementale, il est calculé pour les pays en voie de transformation (actuellement 29 États) sur l’échelle de 1 à 7, suivant les critères suivants :

 la démocratisation des pouvoirs centraux : le caractère des gouvernements, la stabilité du système, l’efficacité, l’indépendance, la responsabilité des gouvernements face au pouvoir législatif, le contrôle civil des départements militaires ;

 les élections : la transparence des élections parlementaires, le multipartisme, le taux de participation dans les élections ;

 la société civile : les organisations non-gouvernementales, leur efficacité et leur stabilité, les conditions juridiques, la création des syndicats et des associations libres et indépendantes ;

 l’indépendance des médias : la liberté d’opinion, l’indépendance des journalistes, la presse privée et l’accès des personnes privées à l’Internet ;  l’administration locale : la décentralisation, les élections, l’étendue des

compétences des pouvoirs locaux, la transparence et la qualité des centres régionaux ;

 la justice : les réformes constitutionnelles, la protection des droits de l’homme, le code pénal, les droits des minorités nationales, l’égalité, la manière de traiter les prisonniers et les suspects, l’efficacité et l’indépendance de l’appareil de la justice ;

 la corruption : l’analyse publique de la criminalité, l’intervention du business dans le processus législatif, les conditions juridiques qui régissent les conflits d’intérêts, l’activité des organisations qui lutte contre la corruption.

240 MARÈS Antoine, Culture et politique étrangère des démocraties populaires, Paris, 2007, pp. 9-10.

241

DELWIT Pascal, DE WAELE Jean-Michel (sous la dir.), La démocratisation en Europe centrale. La

134 Un indice inférieur correspond à une valeur plus positive. Selon les indicateurs mentionnés, Freedom House présente une classification suivante des régimes :

Tableau 6 : Une classification des régimes selon le taux de démocratie, d'après Freedom House.

Facteur Classification d’un pays

1 - 2 Une démocratie stable 3 Une démocratie assez faible

4 Un pays dans une période de passage et les régimes hybrides

6 Une autocratie assez faible 7 Une autocratie stable

Source : Freedom House Report 2007, op. cit.

En 2006, Freedom House a publié les derniers indices pour l’Europe centrale. À la fin des années 1990, la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et les pays baltes appartiennent au groupe des leaders. La Russie et la Biélorussie sont en recul dans leur processus de libéralisation politique.

Tableau 7 : Le taux de la démocratisation d'après Freedom House.

Pays Régime politique

Valeur de taux de démocratisation

1997 1998 1999-2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Albanie

démocratie présidentielle et

parlementaire 4,25 4,5 4,25 4 3,75 3,75 3,75 3,75 3,5

Biélorussie autocratie 6 6,25 6,75 6,75 6,75 6,75 6,75 7 7

Bosnie et Herzégovine régime provisoire 6 5 5 4,75 4,25 3.75 3,5 3,25 3

Bulgarie régime provisoire 3,25 2,75 2,25 2 2 2 1,75 1,75 1,75

Croatie démocratie parlementaire 4 4,25 4,25 3,25 3,25 3,25 3,25 3 3,25 Rép. tchèque démocratie parlementaire 1,25 1,25 1,75 1,75 2 2 2 2 2 Estonie démocratie parlementaire 2 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,5 1,5 1,5 Lituanie démocratie parlementaire 2 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 Lettonie démocratie parlementaire 2 2 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75 1,75

Macédoine régime provisoire 3,5 3,5 3,5 3,75 4,5 3,5 3,5 3 3,25

Moldavie régime provisoire 3,25 3,5 3,25 3,25 3,5 3,75 4 4 3,75

Pologne démocratie parlementaire 1,5 1,25 1,25 1,25 1,25 1,5 1,5 1,75 1,75

Russie régime provisoire 3,5 3,5 4 4,25 4,5 4,75 5,5 6 6,25

Roumanie régime provisoire 3,25 3,25 2,75 3 3 2,75 2,75 2,75 2,75

Serbie et Monténégro régime provisoire - 5 5,5 7,75 3,75 3,75 3,5 - 3,25 Slovaquie régime provisoire 3,75 3,5 2,5 2,25 1,75 1,5 1,5 1,5 1,25 Slovénie démocratie parlementaire 2 2 2 1,75 1,75 1,5 1,5 1,5 1,5

Ukraine régime provisoire 3,25 3,5 3,5 4 4,5 4 4,25 - 3,25

Hongrie démocratie parlementaire 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25

135 L’indicateur des libertés citoyennes publié par la Banque mondiale constitue un autre système intéressant d’indices ; l’échelle des valeurs s’étend du –2,5 au 2,5, plus il y a des libertés citoyennes, plus l’indicateur monte. Cette étude concerne l’analyse des éléments suivants :

 les droits de l’homme et leur respect ;

 les libertés citoyennes (la liberté de la presse et de la parole, l’absence de censure, la liberté de manifester et la liberté de religion) ;

 la liberté de voyager ;

 la protection des libertés citoyennes par la société. Tableau 8 : L'indicateur des libertés citoyennes.

Pays

L'indicateur des libertés citoyennes

1996 1998 2000 2002 2003 2004 2005 Albanie -0,33 -0,26 -0,05 -0,04 -0,02 0,02 0,06 Biélorussie -0,97 -0,98 -1,21 -1,45 -1,42 -0,53 -1,68 Bosnie Herzégovine -1,14 -1,11 -0,37 -0,25 -0,19 0,15 -0,11 Bulgarie 0,16 0,4 0,15 0,56 0,5 0,57 0,59 Croatie -0,47 -0,3 0,38 0,46 0,47 0,46 0,51 Rép. tchèque 1,01 1,14 0,99 0,9 0,99 1,02 1,01 Estonie 0,74 0,82 0,89 1,05 0,99 1,1 1,05 Lituanie 0,72 0,84 0,95 0,89 0,99 0,98 0,9 Lettonie 0,5 0,72 0,76 0,91 0,94 0,96 0,89 Macédoine 0,18 0,06 -0,03 -0,29 -0,03 -0,02 0,03 Moldavie -0,19 -0,03 -0,01 -0,3 -0,38 -0,47 -0,49 Pologne 0,95 1,01 1,12 1,11 1,05 1,13 1,04 Russie -0,34 -0,26 -0,44 -0,52 -0,68 -0,79 -0,85 Roumanie 0,03 0,24 0,43 0,38 0,39 0,38 0,36 Serbie et Monténégro -1,3 -0,96 -0,32 -0,2 0,14 -0,89 -0,91 Slovaquie 0,36 0,45 0,9 0,92 0,97 1,09 1,04 Slovénie 0,95 0,92 0,98 1,1 1,09 1,13 1,08 Ukraine -0,37 -0,14 -0,39 -0,59 -0,59 -0,61 -0,26 Hongrie 1,01 1,15 1,14 1,17 1,09 1,16 1,1

Source : Worldwide Governance Indicators: 1996-2008 [Ressource électronique]. The World Bank Group,

1997-2009, [réf. 20.03.2009]. Disponible sur : http://info.worldbank.org/governance/wgi/pdf/wgidataset.xls. L’analyse de ces paramètres montre que la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et les pays baltes forment encore une fois un groupe leader, suivi de peu par la Slovaquie et la Slovénie.

Les changements démocratiques dans les pays de l’Europe centrale font naître le nouveau combat en faveur de la souveraineté nationale renaissante et l’évolution de la culture identitaire civile, les deux phénomènes étant étroitement liés. La société soutient les nouvelles institutions démocratiques tandis que ces dernières doivent fonctionner correctement pour

136 stimuler l’activité de la société civile.242 Le processus de transformation politique agit sur la société sur deux niveaux :

 l’environnement politique dans lequel la population évolue.243

Ainsi, certaines valeurs (par exemple, la sécurité sociale) ne sont plus prioritaires et sont remplacées par de nouveaux acquis (par exemple, l’initiative privée) ;

 l’économie qui change vite, les effets d’une thérapie de choc entraînant souvent :

 une décomposition sociale dramatique ;  des effets de l’inadaptation ;

 une paupérisation ;

 des phénomènes inconnus auparavant, comme par exemple le chômage. Les zones du chômage structurel apparaissent, ce qui a une forte influence sur l’auto-évaluation et la définition des rôles sociaux. La Pologne en fournit un bon exemple – en choisissant le chemin de transformation de choc (très rapide), elle risque de faire doubler l’indicateur de l’inégalité social.

Graphique 2 : La transformation politique dans les pays de l’Europe centrale.

242 WOJTASZCZYK Konstanty Adam, Transformacja ustrojowa w krajach Europy Wschodniej, Środkowej i

Południowej (La transformation systémique dans les pays de l’Europe centrale, orientale et du Sud), Transformacja ustrojowa państw Europy Środkowej i Wschodniej (La transformation systémique des pays de l’Europe centrale et orientale), éd. par ZIELIŃSKI Eugeniusz, Varsovie, 1996, pp. 12-14 et 133-144.

243

SOBOLEWSKA-MYŚLIK Katarzyna, Partie i systemy partyjne Europy Środkowej po 1989 r., op. cit., pp. 5-10.

Société

Transformation politique

Économie:

- inegalité des revenus - distribution du produit - seuil de pauvreté - structure des dépenses

Enironnement politique Société civile: - construction - participation Souverain du pouvoir

137 Graphique 2 : La croissance des inégalités des revenus des ménages pendant la période 1994-2002.

Notes: ** Right Hand Side (y+8) * Left Hand Side (x+5) x+5 = y+8

Source : PACI Pierella, SASIN Marcin J., VERBEEK Jos, Economic Growth, Income Distribution and Poverty in Poland

During Transformation [en ligne]. avril 2004, [réf. 16.03.2009]. Disponible sur :

http://siteresources.worldbank.org/INTISPMA/Resources/Training-Events-and-Materials/paci_sasin_verbeek_prw.pdf.

La rapidité des changements a favorisé une diversification sociale à la fin des années 1980. Les pays en transformation ont un profil social semblable. Les États qui possèdent le plus grand potentiel et dépendent économiquement, culturellement de la zone européenne subissent une diversification sociale moins importante. La plus grande différenciation des revenus des ménages a lieu dans les pays baltes qui ne bénéficient pas d’investissements nouveaux et dont la macroéconomie reste dans une situation catastrophique.

0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002

Mean log deviation, RHS** Coefficient de Gini, LHS*

138 Graphique 3 : Les changements dans la distribution du produit national (l'indicateur de Gini).

Source : World Economic Outlook Reports [Ressource électronique]. IMF Editions, octobre 2000. [réf.

20.03.2009]. Disponible sur : http://www.imf.org/external/pubs/ft/weo/2000/02/.

Les pays centre-européens qui souhaitent intégrer l’Union européenne connaissent l’augmentation de la pauvreté trois fois plus faible que l’Est de l’Europe, grâce à deux éléments suivants :

 des liens forts avec le marché européen ;

 une émigration qui conditionne l’indicateur national du chômage et le solde des transferts actuels dans une balance économique.

0 5 10 15 20 25 30 35 40

Les pays candidats de l'UE (sauf pays baltes)

Les pays baltes La Communauté des

États indépendants Tous les groupes

1993-1995 1987-1988

139 Graphique 4 : Le pourcentage de la population au-dessous du seuil de pauvreté.

Source : World Economic Outlook Reports, op. cit.

Une diversification rapide de la société s’accompagne également des changements au niveau de la consommation. En 1995, 20% de la population qui a les plus grands revenus limite les dépenses de consommation tandis que les investissements augmentent. Cette politique est efficace – deux ans plus tard, une crise passagère touche seulement les groupes sociaux moins bien situés. De surcroît, au début du XXIᵉ siècle, les plus riches peuvent augmenter leurs dépenses en consommation, tandis que le reste de la société est touché par une récession. 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50

Les pays candidats pour l'UE (sauf pays

baltes)

Les pays baltes La Communauté des États indépendants

Tous les groupes

1998 1987-1988

140 Graphique 5 : Les changements de la structure des dépenses des groupes sociaux

Source : PACI Pierella, SASIN Marcin J., VERBEEK Jos, Economic Growth, Income Distribution and Poverty in Poland During Transformation , op. cit.

Le diagramme ci-dessus ne prouve pas de façon suffisante la domination des facteurs strictement économiques dans les changements sociaux. Les indicateurs suivants sont aussi importants :

 la modification de l’identité sociale ;

 le développement de la responsabilisation à l’égard du pays ;  la nécessité de se montrer actif.

Ces caractéristiques sont toutefois plus difficiles à mesurer. Le tableau représentant la formation d’une société civile, publié par Freedom House, en fournit un bon exemple. Il prend en compte les éléments suivants :

 le nombre des organisations non-gouvernementales, non-profit et caritatives créées dès le début de la transformation ;

 l’activité sociale au sein des organisations non-gouvernementales ( le pourcentage de la société ) ;

 le fonctionnement des organisations non-gouvernementales antilibérales ;  le potentiel financier des organisations ;

 les sources de financement. -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 L 'a u g m enta tio n d e la c o n so m m a tio n m o y enne

L'augmentation de consommation pour les quintiles selectionnés

1 2 3

141 Une valeur inférieure correspond à une meilleure situation.

Tableau 9 : L'indicateur de participation de la société civile.

Pays

Valeur de l'indicateur de la société civile

1997 1998 1999-2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Albanie 4,25 4,5 4,25 4 3,75 3,75 3,75 3,25 3 Biélorussie 5,25 5,75 6 6,5 6,25 6,5 6,75 6,75 6,75 Bosnie et Herzégovine - 5 4,5 4,5 4,25 4 3,75 3,75 3,75 Bulgarie 4 3,75 3,75 3,5 3,25 3,25 3 2,75 2,75 Croatie 3,5 3,5 3,5 2,75 2,75 3 3 3 2,75 Rép. tchèque 1,5 1,5 1,5 1,5 1,75 1,5 1,5 1,5 1,5 Estonie 2,25 2,25 2,5 2,25 2 2 2 2 2 Lituanie 2,25 2 2 1,75 1,5 1,5 1,5 1,5 1,5 Lettonie 2,25 2,25 2,25 2 2 2 2 1,75 1,75 Macédoine 3,75 3,75 3,5 3,75 4 3,75 3,25 3,25 3,25 Moldavie 3,75 3,75 3,75 3,75 4 3,75 4 4 4 Pologne 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 Russie 3,75 4 3,75 4 4 4,25 4,5 4,75 5 Roumanie 3,75 3,75 3 3 3 2,75 2,5 2,25 2,25 Serbie et Monténégro - 5 5,25 4 3 2,75 2,75 - 2,75 Slovaquie 3,25 3 2,25 2 1,75 1,5 1,25 1,25 1,25 Slovénie 2 2 1,75 1,75 1,5 1,5 1,5 1,75 1,75 Ukraine 4 4,25 4 3,75 3,75 3,5 3,75 3 2,75 Hongrie 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25 1,25

Source : Freedom House Report 2007 [Ressource électronique]. 2007, [réf. 23.09.2007]. Disponible sur :

http://www.freedomhouse.org/template.cfm?page=1.

L’existence des structures sociales qui s’organisent horizontalement en Europe centrale, ce qui ne se fait pas dans les pays de l’Europe de l’Est, prouve que ces premiers s’inscrivent plus résolument dans la culture occidentale : les pays de Visegrád sont leaders dans ce processus de la sortie du « socialisme réel ».

Les constitutions des « démocraties populaires» se réfèrent à des institutions de l’État démocratique et aux droits de l’homme, mais en réalité, elles sont restées lettre morte.244

L’opposition au régime et même les institutions ecclésiastiques, pourtant financées et contrôlées par le régime communiste, en étaient une preuve patente. Cependant, les nouvelles démocraties possèdent certaines bases qui peuvent s’adapter à la réalité postsoviétique. Mais il reste à y travailler sur l’opinion publique pour qu’elle adhère aux nouvelles institutions, à rompre avec le monopole de l’État et du parti communiste. Le peuple politique devient de nouveau souverain, ce qui déclenche le devoir de passer les structures du pouvoir sous un

244

ELSTER Jon et al., Institutional design in post-communiste societies: rebuilding the ship at sea, Cambridge, 1998, p. 63.

142 contrôle de la société. Les pays en pleine transformation créent alors les institutions suivantes :

 les parlements à deux chambres ;  l’institution présidentielle ;

 les nombreux partis politiques ;  les grandes centrales syndicales ;

 les institutions nécessaires au fonctionnement de l’économie du marché.

Néanmoins, l’apparition des institutions politiques, des banques centrales, des bourses et des entreprises privées ne garantissent ni la sécurité sociale ni la stabilité