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Le but de notre analyse consiste à identifier les éléments majeurs de la sécurité en Europe centrale dans le contexte de l’évolution du terme de sécurité et de la dynamique de l’environnement international. Pour ce faire d’une façon approfondie, nous avons recours à une approche théorique. En ce qui concerne la problématique de la sécurité de l’Europe centrale sur le plan théorique, une approche intégrée semble nécessaire car une seule théorie de la sécurité, de l’Europe centrale, des relations internationales ou de l’intégration européenne n’existe pas, mais nous avons recours à une problématique différenciée de l’intérieur. En conséquence, le chercheur se trouve amené à se référer à de nombreuses approches théoriques, puisant dans celles qui lui semblent les plus adéquates en fonction d’une partie des questions traitées et de leurs dimensions particulières, ce qui ne doit pas pour autant détruire la cohérence descriptive et explicative de l’ensemble de l’analyse en cours. C’est un défi car les modèles théoriques contemporains ne se basent pas sur une approche cohérente (p. ex. l’esprit d’un paradigme réaliste), mais ils engagent de nombreuses conceptions théoriques ce qui permet de détecter les variables fondamentales dépendantes ou indépendantes dans un contexte plus large, de la prise en compte des motivations, des préférences et des actions des acteurs sur les différents niveaux du système.

La sécurité est une catégorie clé pour comprendre les relations internationales contemporaines. C’est une notion qui recouvre un champ de plus en plus large de problématiques. Premièrement, la sécurité concerne le spectre qui s’élargit de la réalité internationale : ses aspects militaires, politiques, économiques, sociales et écologiques. Deuxièmement, elle se réfère aux différents niveaux d’organisation de la vie internationale (la sécurité nationale, régionale et globale ou la sécurité des États, des groupes sociaux et des unités). Compte tenu de cette complexité et de son évolution, il apparaît nécessaire de définir la structure de sécurité d’aujourd’hui et de l’adapter à notre objet de la recherche – l’Europe centrale.

La sécurité (latin : securitas) est un terme qui se compose de deux parties, sine (sans) et cura (peur, soucis, crainte). Nous pouvons dire que la sécurité signifie « manque de soucis et de sentiment de la peur ». Comprise ainsi, la sécurité s’applique non seulement aux États, mais aussi aux régions entières.

30 Les actions menées aujourd’hui pour assurer la sécurité créent un système complexe où se superposent de nombreux sous-systèmes interdépendants qui correspondent à des dangers différents et des systèmes de sécurité divers qui tentent d’y répondre. Au XXIe

siècle, nous distinguons la sécurité individuelle et collective (systèmes nationaux et régionaux), la sécurité extérieure et intérieure qui concernent à leur tour les différents domaines de la vie. Par conséquent les différentes sortes de la sécurité apparaissent. Quel que soient l’objet d’un système de sécurité donné, il y va toujours de minimiser au maximum les craintes et la peur sachant que l’assurance de la sécurité totale est impossible. Il est raisonnable d’aspirer à limiter des dangers circonscrits grâce à des systèmes de sécurité (en théorie et en pratique), mais il est illusoire d’espérer de le supprimer complètement.

Nous estimons que cette manière d’interpréter la situation internationale à l’aube du XXIe siècle offre un point de départ pertinent pour analyser et comprendre l’évolution de la sécurité en Europe centrale.

III.) Sources et méthodologie

Dans notre recherche, nous nous appuyons en majeure partie sur les sources écrites : un ensemble de la littérature académique et spécialisée (les rapports, les documents de travail, les revues spécialisées ou généralistes, la presse quotidienne). Pour approfondir le sujet, nous avons également analysé les documents officiels émanant des gouvernements, des organisations régionales et internationales. Comme une référence fondamentale de base, nous nous servons de la riche littérature scientifique sur la théorie de la sécurité.

Pour inscrire notre analyse dans la logique d’actualité et donc suivre et comprendre les événements les plus récents, outre les documents publics, nous interprétons des publications de fraîche date et des informations d’internet.

Au cours de dernières années, grâce à la participation à de nombreux séminaires et conférences concernant le sujet de cette recherche, nous avons pu approfondir la problématique abordée et connaître les différentes approches qui s’y référent. Le travail dans les archives de nombreuses institutions et organisations polonaises qui s’occupent de cette thématique nous a été aussi de grand secours.

Enfin, grâce aux personnes interviewées, nous avons pris connaissance des points de vue et d’interprétations, parfois, bien divergents d’événements historiques et ceux très récents.

La méthodologie utilisée est fondée sur l’approche interdisciplinaire propre aux études des relations internationales qui permet de croiser les différentes méthodes d’analyse

31 caractéristique pour les sciences sociales. Il s’agit de : l’observation, l’analyse et la critique des sources, la comparaison, l’analyse et la critique de la littérature sur le sujet concerné.

Nous présentons donc une vision essentiellement mais non exclusivement polonaise du sujet que renforcent les travaux occidentaux. C’est une vision d’un pays situé entre les deux superpuissances : la Russie (l’URSS dans l’histoire récente) et l’Allemagne. C’est donc le point de vue d’historienne centre-européenne que nous présentons sur les questions d’actualité et du passé interrogé pour mieux comprendre le présent, en vue de dessiner les perspectives pour l’avenir.

Notre génération, comme écrit Antony Todorov, fait partie de la génération pour laquelle « le communisme est un fait historique, il n’existe que par ouï-dire ; il est l’objet

d’une narration par les parents, par le manuel d’Histoire d’aujourd’hui, par les medias ».24

Le destin a décidé que l’existence physique de la génération à laquelle appartient l’auteur de cette thèse se passe en période de changements radicaux politiques, économiques et géostratégiques. « Mon Europe centrale » se retrouve entourée de nouveaux anciens voisins qui vivent aussi des métamorphoses, souvent positives parfois inquiétantes. Notre intention est de mettre en évidence les nouvelles relations qui s’instaurent entre les pays voisins, fondées sur la pleine souveraineté des acteurs devenus égaux dans les relations internationales. Sans oublier les anciens conflits gelés pendant un temps qui resurgissent et les nouveaux qui éclatent dans le voisinage (Balkans).

Pour répondre à la question posée dans le titre « Une nouvelle Europe ? », nous avons choisi de présenter un panorama des problèmes qui s’imposent au tournant du XXe

et du XXIe siècles. Claude Lévi-Strauss disait que l’historien doit passer des choses découvertes et dévoilées aux choses cachées. C’est aussi notre choix, par nécessité sélectif mais représentatif de notre travail. Ce voyage à travers les décennies et les questions majeures de la thématique abordée, dont le paysage temporel et factuel varie au cours de la réflexion, est une invitation à approcher la problématique abordée et à inciter les plus intéressés et les autres chercheurs à l’approfondir. Nous n’avons pas la prétention de rester exhaustif sur un tel sujet et considérons que chaque chapitre de notre thèse n’en est qu’une première approche proposé comme un point de départ et une matière à réflexion pour les recherches futures.

La problématique abordée est très complexe, ses articulations théoriques et pratiques difficiles à cerner, il a donc fallu opérer un choix dans la multitude des questions qu’elle pose. Comme tout choix, le nôtre est discutable et contestable, mais naturellement subjectif il se

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TODOROV Antony, Un clivage centré sur le passé communiste, Les clivages politiques en Europe centrale et

32 fonde sur notre souci d’aborder le sujet dans sa cohérence et son actualité à travers une vue panoramique large du plus grand nombre d’aspects qu’il implique.

Notre premier souci est de démontrer d’une manière claire les liens compliqués qui unissent la géopolitique et la sécurité dans la région, les différentes interrogations qu’une telle articulation implique et les choix qu’elle induit pour les relations internationales. Les problèmes majeurs et les situations stratégiques, les interconnexions entre la géopolitique, les systèmes de sécurité et la nouvelle architecture sont exposés avec les exemples concrets qui constituent, et non des propos théoriques, le fondement de nos conclusions.

IV.) Champ de la recherche (temps, acteurs)

Notre temporalité est double : d’une part, nous étudions la fin du XXe siècle qui recouvre les changements liés à l’effondrement du Rideau de fer ; d’autre part, nous mettons au centre de l’étude, l’époque du début du XXIe

siècle quand ces évolutions commencées à l’époque précédente s’enracinent et les nouveaux défis apparaissent.

Devant la complexité de l’analyse de la problématique de sécurité, nous nous bornons à l’étudier surtout dans sa dimension géopolitique.

L’étendue géographique de notre recherche est très vaste et c’est pourquoi nous avons décidé de nous concentrer sur un groupe de quatre acteurs centre-européens, à savoir la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque qui apparaissent sur la scène européenne comme le Groupe de Visegrád.

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V.) Présentation du plan

La thèse fondamentale de notre travail nous conduit à la constatation qu’il est possible, dans les conditions actuelles, de créer en Europe centrale un système optimal de sécurité qui selon le postulat ci-dessus, garantit les intérêts des tous les partis intéressés. Afin de prouver cette thèse, nous présentons la genèse de la situation actuelle de la sécurité européenne. Ensuite, nous décrivons les facteurs déterminants et les conditions les plus décisives de ce système. À la fin, nous formulons en argumentant un système de sécurité qui contient le modèle de sécurité en Europe centrale.

Notre thèse se composée de deux parties dont la logique est chronologique. L’enjeu de notre travail est d’abord d’exposer une analyse des questions qui surgissent à la fin du XXe

siècle et, dans la seconde partie, les problèmes actuels du début du XXIe

siècle. La première partie se compose de trois chapitres. Le premier est dédié à la définition de l’Europe centrale comme une région émergeante après la chute du Rideau de fer, à l’analyse approfondie de nombreux aspects de ce milieu de l’Europe, de sa situation politique, économique et internationale au cours des années 1990. Le deuxième chapitre est consacré à la redéfinition de la sécurité après la fin de la Guerre froide et au repérage de nouveaux défis qui s’imposent alors à l’Europe centrale et aux autres acteurs des relations internationales tels que les pays occidentaux, la Russie et les États-Unis. Le troisième chapitre aborde la renaissance de la coopération régionale et subrégionale dans cette partie du continent européen et ses conséquences majeures.

Dans la seconde partie, notre l’étude se concentre sur une nouvelle architecture de la sécurité au début du XXIe

siècle, les enjeux et les défis fondamentaux de la sécurité de l’Europe centrale. Le quatrième chapitre s’interroge sur le nouveau potentiel d’interaction qui évolue dans les relations entre les pays centre-européens et les plus importantes organisations de la sécurité dans le monde, ainsi que sur les conséquences de telles liaisons. L’objectif du cinquième chapitre est de présenter le processus de création d’un système optimal dans l’Europe centrale qui se caractérise par une situation géostratégique complexe et compliquée. Notre problématique s’articule ainsi autour de la question de la place et du rôle de l’Europe centrale dans le nouvel ordre européen de sécurité dans une réalité du XXIe

siècle, face à la globalisation et au terrorisme. Le dernier chapitre traite des questions d’actualité qui s’imposent à l’Europe centrale et exigent des réponses urgentes de sa part : le bouclier anti-missile, la question de Kaliningrad, la sécurité énergétique et sa place sur la scène européenne.

34 Notre principal objectif est de comprendre comment en cours des décennies la sécurité de l’Europe centrale a évolué à travers la situation géostratégique spécifique et les relations internationales que l’histoire a fait évoluer très rapidement. Notre recherche a aussi pour but d’analyser la construction de la nouvelle architecture de sécurité au commencement du deuxième millénaire et le rôle que peut y jouer la « Nouvelle Europe ».

En reprenant les lignes principales de notre thèse, les conclusions seront concentrées sur l’importance de la sécurité de l’Europe centrale pour tout le continent européen ainsi que pour l’ordre mondial.

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