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II.3 Thermohydraulique

II.3.1 Thermohydraulique du cœur CABRI

II.3.1.1 L’échange thermique paroi-fluide

Le cœur de CABRI est une géométrie de faisceaux de crayons selon un réseau carré de pas 1,26 cm. Les crayons sont regroupés en assemblages posés et verrouillés sur une plaque de support du cœur en acier Inox (cf. fig. I.7 et I.8). Les principales caractéristiques du cœur sont présentées dans le tableau I.1 dans le chapitre I. Selon le flux thermique transmis au fluide et la température de gaine, le régime d’écoulement dans le cœur peut être très différent. La courbe de Nukiyama [31], établie à partir de régimes stationnaires d’un filament chauffé en vase, représentée en fig. II.4 trace le flux échangé en fonction de la température du filament. On identifie plusieurs régimes d’écoulements dont la configuration est également présentée en fig. II.4 : monophasique liquide, ébullition nucléée, ébullition de transition et ébullition en film. Tant que la température de paroi est inférieure à la température de saturation, le fluide reste monophasique. Le flux échangé est proportionnel à l’écart de température entre la paroi et le fluide en dehors de la couche limite, selon le coefficient conducto-convectif h rencontré précédemment. Lorsque la paroi s’échauffe au-delà de la température de saturation du fluide, des bulles peuvent alors se former sur la paroi dans les sites de nucléation dus à des imperfections de surface. Ce mode d’échange, appelé l’ébullition nucléée, est un mode de transfert bien plus efficace que l’échange monophasique, dans la mesure où le flux thermique sert à la fois à chauffer le liquide monophasique et à en vaporiser une petite partie, qui emporte loin de la paroi un excès d’énergie, par rapport à l’eau liquide voisine, correspondant à sa chaleur latente de vaporisation. Cette énergie est redéposée dans le liquide par condensation tant que celui-ci reste sous-saturé. Dans cette phase, le flux thermique échangé en paroi augmente. Si la température de paroi augmente, de plus en plus de sites de nucléation s’activent, et une part grandissante de l’eau se vaporise. Sous l’effet d’instabilités thermohydrauliques, les bulles fusionnent pour former des colonnes de vapeur et le flux échangé s’infléchit6. Si cette dynamique n’est pas stoppée, les colonnes de vapeur fusionnent également

pour former un film de vapeur isolant la paroi : c’est la crise d’ébullition, atteinte lorsque le flux atteint une valeur maximale appelée “flux critique”. On passe après cela en ébullition en film, où l’échange, maintenant très peu efficace, ne se fait que par conducto-convection dans la couche de vapeur. Cela est à l’origine d’une augmentation drastique de la température de paroi, celle-ci n’étant plus refroidie efficacement, et peut mener à sa destruction (fusion).

La courbe en fig. II.4 est obtenue pour un filament chauffant en vase, en l’absence de convec- tion forcée et pour des états quasi-statiques. Bien que les valeurs de coefficients d’échange dans chaque régime soient très dépendantes du flux de masse, de la géométrie, de la pression etc., la forme de la courbe de Nukiyama reste globalement conservée pour d’autres géométries et si- tuations. De nombreuses expériences ont été réalisées dans le but de construire des corrélations donnant le flux échangé pour chacun de ces régimes, par exemple : Dittus-Boelter pour l’échange convectif monophasique, Thom pour l’ébullition nucléée, Groeneveld pour le flux critique, Be- renson pour l’ébullition en film [25]. Il se trouve également que cette courbe peut être modifiée dans le cas d’excursions rapides de flux échangés en paroi, comme c’est le cas au cours des

6. Au sens mathématique du terme : la dérivée seconde s’annule, donc la dérivée première du flux par rapport à la température en paroi atteint un maximum puis diminue.

ONB DNB Point de Leidenfrost φ(W/m2) Tp− Tsat(°C) 5 ∼104 30 φcr 120 φmin Convection naturelle Ébullition nucléée Bulles isolées Colonnes de vapeur Ébullition de transition Ébullition en film

Figure II.4 – Courbe de Nukiyama typique pour de l’eau à 1 bar et régimes d’écoulement [26,30]

accidents de type RIA. Cela a fait très tôt l’objet de nombreuses études expérimentales [32–34] jusqu’à aujourd’hui où les mécanismes, bien qu’étant de mieux en mieux quantifiés, restent en- core mécompris et extrêmement complexes [8,35,36]. Ces aspects seront abordés et étudiés dans le chapitre VI. On se réfèrera néanmoins à cette courbe pour les calculs d’ordres de grandeur qui font l’objet de ce chapitre.

II.3.1.2 Le cœur de l’écoulement

En ce qui concerne le cœur de l’écoulement, les échanges de quantité de mouvement, de masse et d’énergie ont également été quantifiés expérimentalement [25]. Les expériences menées ont conduit à l’élaboration de corrélations qui permettent de fermer les équations de conservation de ces quantités pour les différentes phases. Elles sont aujourd’hui utilisées dans les outils de calcul scientifique.

Si l’eau dans le réacteur CABRI est en convection forcée, selon une vitesse axiale, des échanges de masse, de quantité de mouvement ou d’énergie peuvent également exister radialement dans la géométrie de faisceaux de crayons du cœur [37]. Ils sont dus à d’éventuels déséquilibres radiaux de pression, de vitesse ou de température. Si dans la majorité des cas ces échanges sont négligeables, ils peuvent devenir importants dans le cas de différences très marquées, par exemple des différences de puissance d’un assemblage à un autre. La boucle d’essais PERICLES a permis d’étudier ces phénomènes pour un réacteur à eau [37] et de confirmer l’importance de ces phénomènes dans le cas de différences de puissance importantes entre assemblages. Ce point fera l’objet de calculs d’ordres de grandeur en §II.3.3.