i=1
Ai→ϕ
| {z }
ψϕ
ssiψϕ∈Thm(∅).]
Remarque. Il suffit de consid´erer un langage L qui contient un seul symbole de relation binaire, c’est-`a-direLens={∈}, pour obtenir le r´esultat pr´ec´edent de Church.
Par contre, les langages plus simples ne suffisent pas, comme le montre l’exercice suivant.
Exercice 5.4.6. SoitL={P, c}, o`uPest un pr´edicat unaire etcune constante.
1. D´eterminer lesL-structures finies et d´enombrables `a isomorphisme pr`es.
2. En d´eduire : deuxL-structuresMetNsont ´el´ementairement ´equivalentes si et seulement si
– M|=P cssiN|=P c, et
– M|=∃≥kx Qx ssiN|=∃≥kx Qx pour toutk∈Net toutQ∈ {P,¬P}.
3. Montrer qu’un L-´enonc´e ϕ est universellement valide ssi M |= ϕ pour touteL-structure finie. En d´eduire que la L-th´eorie vide est d´ecidable.
5.5 Les th´ eor` emes d’incompl´ etude de G¨ odel
Th´eor`eme 5.5.1 (Premier th´eor`eme d’incompl´etude de G¨odel). Soit T une Lar-th´eorie consistante, r´ecursive et contenant P0. Alors T n’est pas compl`ete.
D´emonstration. SiT´etait compl`ete, elle serait d´ecidable par 5.2.4, contredisant le th´eor`eme de Church.
Dans la suite, nous gardons les hypoth`eses du th´eor`eme 5.5.1, c’est-`a-dire T ⊇ P0 consistante et r´ecursive. Il existe donc un ´enonc´eψtel que niT `ψ ni T ` ¬ψ. Nous allons pr´esenter une am´elioration, due `a Rosser, qui en fournit un exemple.
Rappel : Dem(T) = {(#ϕ,##d) | dest une preuve formelle deϕdansT} est r´ecursif. Par le th´eor`eme de repr´esentabilit´e il existe une formule Σ1PT(x, y) qui repr´esente Dem(T)⊆N2.
Soit Neg : N → N une fonction primitive r´ecursive telle que Neg(#ϕ) =
#(¬ϕ) et Neg(x) = 0 sixn’est pas le code d’une formule. On choisit une fomule Σ1 ν(x, y) repr´esentant Neg, et on modifiePT en
PTR(x, y) :=PT(x, y)∧ ¬∃z≤y∃u(PT(u, z)∧ν(x, u)).
Consid´eronshRT(x) :=∃yPTR(x, y), puis ∆RT := ∆hR T.
Th´eor`eme 5.5.2 (Variante de Rosser du permier th´eor`eme d’incompl´etude).
SoitT ⊇ P0 consistante et r´ecursive. AlorsT 6`∆RT etT 6` ¬∆RT.
D´emonstration. On pose ∆ := ∆RT etm:= #∆. Par l’argument diagonal, on a donc
P0` ∃yPTR(m, y)↔ ¬∆
. (5.2)
Supposons T ` ∆. Alors il existe une preuve de ∆ dansT, autrement dit (m, p)∈Dem(T) pour unp∈N, d’o`uP0`PT(m, p). CommeT est consistante, pour tout p0 ∈ N on a P0 ` ¬∃u ν(m, u)∧PT(u, p0)
. Il suffit de noter que P0 ` (x ≤ p ↔ Wp
i=0x=i) pour d´˙ eduire que P0 ` PTR(m, p). Par (5.2), on a P0` ¬∆, d’o`uT ` ¬∆ (carT ⊇ P0). Contradiction.
SupposonsT ` ¬∆. Alors il existep∈Ntel que P0`PT(#¬∆, p). Comme T est consistante, pour tout p0 ∈ N on a P0 ` ¬PT(m, p0). Il s’en suit que P0` ¬∃yPTR(m, y), puisqueN est un segment initial de tout mod`ele deP0. Par (5.2), on aP0`∆, doncT `∆. Contradiction.
SoienthT(x) :=∃yPT(x, y) et ∆T := ∆hT.
Lemme 5.5.3. SoitT ⊇ P0 consistante et r´ecursive. AlorsT 6`∆T. D´emonstration. La preuve est similaire `a celle de 5.5.2 et laiss´ee en exercice.
Soita:= #(¬0 ˙=0)∈N. PourT une th´eorie r´ecursive (quelconque), on pose Coh(T) :=¬∃yPT(a, y).
Remarque. On aN |= Coh(T)si et seulement siT est une th´eorie consistante.
Th´eor`eme 5.5.4(Second th´eor`eme d’incompl´etude de G¨odel — sans preuve).
SoitT une th´eorie consistante r´ecursive contenant l’arithm´etique de Peano P. AlorsT ∪ {Coh(T)} ` ∆T. En particulier, T 6` Coh(T), c’est-`a-dire T ne d´ e-montre pas sa propre consistance.
Remarque 5.5.5. 1. Il suffit de demander queT contienneP0 plus tous les axiomes d’induction associ´es aux formulesΣ1, pour obtenir la conclusion du second th´eor`eme d’incompl´etude.
2. Il s’en suit qu’il n’est pas exclus que T ` ¬Coh(T). Ce sera le cas par exemple pour la th´eorie T0 = T ∪ {¬Coh(T)} qui est consistante par le th´eor`eme et qui ‘d´emontre’ sa propre inconsistance. Or, ce n’est pas cho-quant puisqueN 6|=T0. En effet, la ‘preuve’ de¬0 ˙=0en question provient d’un entier non standard.)
Ce n’est pas le cas de P, puisqueN |=P ∪ {Coh(P)}, plus g´en´eralement pour toute th´eorie r´ecursive T dontN est un mod`ele.
Id´ee de la preuve du second th´eor`eme d’incompl´etude.
La preuve compl`ete est tr`es longue et compliqu´ee. Nous nous contentons de donner les ´etapes principales.
– On repr´esente Dem(T) et Dem(P0) par des formules PT(x, y) et PP0 de mani`ere naturelle, en demandant
– `PP0 →PT; – `
∃yPT(#ϕ, y)∧ ∃yPT(#(ϕ→ψ), y)
→ ∃yPT(#ψ, y), de mˆeme pour
∃-intro au lieu du modus ponens et pour PP0 au lieu dePT.
– Nous avons vu dans la proposition 5.3.4 que pour tout ´enonc´e Σ1ϕ, on a N |=ϕ→ ∃yPP0(#ϕ, y). On consid`ere alors la th´eorie
P1:=P0∪ {ϕ→ ∃yPP0(#ϕ, y) | ϕ´enonc´e Σ1}.
La th´eorieP1 est r´ecursive, avecN |=P1.
– On montre (cette ´etape n’est pas tr`es dificile) : Soit T consistante et r´ e-cursive avec T ` P1, c’est-`a-dire T ` ψ pour tout ψ ∈ P1. Alors on a T∪ {Coh(T)} `∆T, et donc en particulier,T 6`Coh(T).
– On montre :P ` P1.
C’est dans la preuve de cet ´enonc´e o`u se trouve toute la difficult´e. `A la base, l’id´ee est tr`es simple. On montreP ` P1 ‘comme on a montr´eN |=P1’, en v´erifiant `a chaque ´etape que l’on peut tout faire en ne raisonnant que dans l’arithm´etique de Peano. Entre autre, il faut montrer une sorte de th´eor`eme de compl´etude dans Peano. Cela demande un travail consid´erable de codage.
Chapitre 6
Th´ eorie axiomatique des ensembles
Dans ce dernier chapitre du cours, nous formalisons la th´eorie des ensembles
`
a l’aide des outils que nous avons d´evelopp´es, c’est-`a-dire au premier ordre.
Nous travaillons dans le langageL=Lens={∈}, et nous consid´erons desLens -structuresU =hU;∈i(U commeunivers d’ensembles). Nous appelonsensemble tout ´el´ement de U. L’univers U, quant `a lui, est un ensemble au sens na¨ıf.
L’appartenance entre deux ensembles est donn´ee par le symbole de relation∈.
On peut alors former le langageLU (un ensemble au sens na¨ıf).
D´efinition. Une partie na¨ıveD deU est une classe s’il existe uneLU-formule ϕ=ϕ(x) telle queD=ϕ[U].
Notons que tout ensemblead´efinit une classeCa, donn´ee parϕ(x) :=x∈a.
Par l’axiome d’extensionalit´e, deux ensemblesaet bsont ´egaux siCa =Cb. Par abus de notation, nous utilisons parfois∈pour d´esigner l’appartenance (au sens na¨ıf) `a une classe, par exemple quand nous ´ecrivonsc ∈D au lieu de U |=ϕ[c], si D est d´efinie parϕ. Cela ne devrait pas cr´eer de confusion.
6.1 Les axiomes de Zermelo-Fraenkel
D´efinition. 1. Lesyst`eme d’axiomes de Zermelo-Fraenkel ZF est donn´e par les axiomes suivants : Axiome d’extensionalit´e, sch´ema d’axiomes de com-pr´ehension, axiome de la paire, axiome de la r´eunion, axiome des parties, sch´ema d’axiomes de remplacement, axiome de fondation, axiome de l’in-fini.
2. Si on ajoute l’axiome du choix (AC) au syst`eme ZF, on on obtient le syst`eme d’axiomes ZFC.
Remarque. L’axiome de fondation n’est pas toujours inclus dansZF.
Dans ce qui suit, nous discutons les axiomes en d´etail.
Axiome d’extensionalit´e (Ext) ∀x, y(∀z(z∈x↔z∈y)→x=y)˙ Il exprime que deux ensembles ayant les mˆemes ´el´ements sont ´egaux.
Notation. Nous ´ecrivons x⊆y comme abbr´eviation de∀z(z∈x→z∈y).
Ainsi, (Ext) ´equivaut `a∀x, y((x⊆y∧y⊆x)→x=y).˙
On observera que les cinq (sch´emas d’) axiomes suivants sont des cas parti-culiers de la compr´ehension globale.
Sch´ema d’axiomes de compr´ehension (Com)
Pour touteLens-formuleϕ=ϕ(v0, . . . , vn), un axiome de la forme
∀v1, . . . , vn+1∃vn+2∀v0(v0∈vn+2↔(v0∈vn+1∧ϕ(v0, . . . , vn))). Il exprime : siaest un ensemble etDune classe, alors la classe{b∈a | b∈D}
est un ensemble.
Voici quelques cons´equences de ces axiomes :
– Si a et b sont deux ensembles, on peut former leur intersection a∩b = {c∈a|c∈b}ainsi que leur diff´erencea\b={c∈a | c6∈b}.
– On obtient l’existence de l’ensemble vide, not´e∅. En effet, soita un en-semble arbitraire. Alors∅={c∈a| ¬c=c}. L’unicit´˙ e de∅ suit de (Ext).
– Sia6=∅est un ensemble, on obtient l’existence deT
b∈ab. Il suffit de choisir b0∈a, puis de remarquer que T
b∈ab={c∈b0| ∀x(x∈a→c∈x)}.
Remarque 6.1.1. L’antinomie de Russel devient un th´eor`eme dans ZFC. En effet, on a (Com) ` ¬∃x∀z z ∈ x. Sinon, {z | ¬z ∈ z} serait ´egalement un ensemble, ce qui est absurde.
L’axiome de la paire (Paire) ∀y1, y2∃x∀z(z∈x↔(z=y˙ 1∨z=y˙ 2)) Il exprime que siaetb sont deux ensembles, alors{a, b}est un ensemble.
D´efinition. La paire ordonn´ee (appel´ee aussi paire de Kuratowski) de deux ensemblesaetb est l’ensemble (a, b) :={{a},{a, b}}.
Lemme 6.1.2. Avec les axiomes que nous avons ´enonc´es jusqu’`a maintenant, on a :
1. Il y a une formule qui d´efinit la classe des paires ordonn´ees. De plus, il existe uneLens-formuleϕ(x, y)telle que l’on aitU |=ϕ[a, b]ssiaest une paire de Kuratowski de la formea= (b, c). Mˆeme chose pour la deuxi`eme composante.
2. On a (b, c) = (b0, c0)si et seulement si b=b0 etc=c0. D´emonstration. Exercice.
L’axiome de la r´eunion (S
) ∀y∃x∀z(z∈x↔ ∃w(z∈w∧w∈y)) Il exprime que pour tout ensemblea, la classeS
a:={z| ∃w(z∈w∧w∈a}
est un ensemble.
Notons qu’en combinant (Paire) et (S
), on peut montrer que la r´euniona∪b de deux ensemblesaetb est un ensemble.
L’axiome des parties (Parties) ∀y∃x∀z(z∈x↔z⊆y)
Il postule l’existence de l’ensemble des parties dea:P(a) ={b|b⊆a}.
Lemme 6.1.3. Les axiomes ´enonc´es jusqu’`a maintenant entraˆınent l’existence du produit cart´esien de deux ensembles aet b :a×b={(x, y)|x∈a∧y ∈b}
est un ensemble.
D´emonstration. Si x∈ a et y ∈ b, on a {x},{x, y} ∈ P(a∪b), d’o`u (x, y) ∈ P(P(a∪b)). On conclut par (Com), en utilisant le lemme 6.1.2.
On peut ´egalement d´efinir des triplets (x, y, z) := ((x, y), z), puis inductive-ment des n-uplets, via (x1, . . . , xn+1) := ((x1, . . . , xn), xn+1). On obtient alors a×b×c, et plus g´en´eralementa1× · · · ×an.
D´efinition. – Unerelation (binaire)Rest un ensemble de paires ordonn´ees.
On pose dom(R) :={x| ∃y(x, y)∈R}et im(R) :={y| ∃x(x, y)∈R}.
– Une fonction f est une relation qui est unique `a droite, c’est-`a-dire on a
∀x, y1, y2((x, y1)∈f∧(x, y2)∈f →y1=y˙ 2).
Remarque. – On note que dom(R) etim(R)sont bien des ensembles, car si(x, y)∈R, alorsx, y∈S S
R.
– Par d´efinition, nous identifions une fonction avec son graphe.
On ´ecrira f(x) = y au lieu de (x, y)∈ f. Parfois, pour x6∈ dom(f), nous posonsf(x) :=∅. Sia= dom(f) et im(f)⊆b, on ´ecritf :a→b.
Lemme 6.1.4. Soit a et b deux ensembles. Alors, avec les axiomes que nous avons ´enonc´es, on obtient :
1. {R|R est une relation avec dom(R)⊆aetim(f)⊆b} est un ensemble.
2. {f |f :a→b} est un ensemble.
3. Les fonctions forment une classe. On note Fn(x)une formule qui d´efinit cette classe.
D´emonstration. Exercice.
Remarque. Si I 6=∅ est un ensemble et (ai)i∈I est une famille d’ensembles, c’est-`a-dire donn´ee par une fonctionf avecdom(f) =I, alors la classeQ
i∈Iai= {g:I→S
i∈Iai| ∀z(z∈I→g(z)∈z)} est un ensemble.
D´efinition. On dit que F ⊆ U2 est une classe fonctionnelle s’il existe une LU-formuleϕ(x, y) qui d´efinitF telle que
U |=∀x, y1, y2(ϕ(x, y1)∧ϕ(x, y2)→y1=y˙ 2). La classe Dom(F) d´efinie par∃yϕest appel´ee ledomaine deF.
Notons qu’`a une classe fonctionnelle correspond une fonction na¨ıve (dont la classe fonctionnelle est le graphe et avec domaine la classe dom(F)).
Sch´ema d’axiomes de remplacement (Rem)
Pour touteLens-formuleϕ=ϕ(x, y, v1, . . . , vn), un axiome de la forme
∀v0, v1, . . . , vn[∀x, y1, y2(ϕ(x, y1, v)∧ϕ(x, y2, v)→y1=y˙ 2)
→ ∃vn+1∀y(y∈vn+1↔ ∃x(x∈v0∧ϕ(x, y, v))].
Il exprime que si F ⊆ U2 est une classe fonctionnelle et a un ensemble, alorsF[a] := {z | ∃u(u ∈ a∧(u, z) ∈ F)} est un ensemble. (Il est obtenu en
‘rempla¸cant’ tout ´el´ement deapar son image sousF.) Ces axiomes ne sont pas ind´ependants. En effet :
Lemme 6.1.5. 1. Le sch´ema (Rem) implique le sch´ema (Com).
2. (Paire) est une cons´equence des autres axiomes.
D´emonstration. Soitϕ(x) donn´ee. On poseF(x, y) := (x=y˙ ∧ϕ(x)). Alors{x∈ a|ϕ(x)}=F[a], d’o`u (1).
Quant `a (2), on se donne deux ensemblesaetb. On remarque que∅ ∈ P(∅) = {∅}, en particulier∅ 6=P(∅). On poseF(x, y) := ((x=∅∧y˙ =a)∨(x˙ =P(∅)∧y˙ =b)).˙ C’est bien une relation fonctionnelle. Pourc=P(P(∅)) ={∅,P(∅)}, on a alors F[c] ={a, b}.
Remarque. Nous pouvons travailler dans une expansion par d´efinition et utili-ser par exemple des symboles de relationx⊆y(binaire) etf :x→y(ternaire), des symboles de fonction x∪y, x∩y, x\y, Sy, P(y), {x, y}, (x, y), x×y, dom(R),im(R), la constante∅etc. dans les sch´emas d’axiomes (Com) et (Rem).
Par la proposition 3.3.2, cela ne change rien.
Rappelons que x est un ordinal si x est un ensemble transitif tel que la relation d’appartenance∈x×x d´efinit un bon ordre surx, c’est-`a-dire un ordre total bien-fond´e. (Cette derni`ere propri´et´e se dit ainsi :∀y(y∈ P(x)∧ ¬y=∅ →˙
∃z(z ∈ y∧z∩y=∅)).) On note Ord(x) une formule qui d´˙ efinit la classe des ordinaux. De mˆeme, on peut d´efinir la classe des cardinaux : Card(x) := Ord(x)∧
∀y(y∈x→ ¬∃f :y→xsurjective)
Notation. Dans la suite, nous utilisonsα, β, γetc. uniquement pour des ordi-naux, et nous ´ecrivons par exemple∀γϕau lieu de∀γ(Ord(γ)→ϕ).
L’axiome de fondation (AF) ∀x(¬x=∅ → ∃z(z˙ ∈x∧z∩x=∅))˙
Notons que (AF), avec l’axiome de la paire, entraˆıne que pour tout ensemble xon ax6∈x. En effet, sinon{x} contredirait (AF).
L’axiome de l’infini (AI) ∃x(∅ ∈x∧ ∀z(z∈x→z∪ {z} ∈x))
Il postule l’existence d’un ensemble contenant∅ et clos par ‘successeur’. De mani`ere ´equivalente, on pourrait postuler l’existence d’un ordinal infini (ou de ω).
On noteω le plus petit ordinal limite, et Lim(x) une formule qui d´efinit la classe des ordinaux limites.
Remarque 6.1.6. 1. SousZF, les ordinaux v´erifient les mˆemes propri´et´es que celles vues au premier chapitre du cours. De mˆeme les cardinaux, sous ZFC.
2. La classe des ordinaux n’est pas un ensemble (pareil pour les cardinaux).
[Sia= Ord, alorsaserait transitif et bien-ordonn´e par∈, donc un ordinal et alorsa∈a. Ora6∈apour tout ordinal.]
Lemme 6.1.7(Induction transfinie). SoitU |= ZFet soitϕ(x)uneLU-formule.
AlorsU satisfait la propri´et´e d’induction suivante :
ϕ(∅)∧∀γ(ϕ(γ)→ϕ(γ∪{γ})∧∀γ([Lim(γ)∧∀δ(δ∈γ→ϕ(δ))]→ϕ(γ))→ ∀γϕ(γ).
D´emonstration. Si U |= ϕ(∅)∧ ∀γ(ϕ(γ) → ϕ(γ∪ {γ})∧ ∀γ([Lim(γ)∧ ∀δ(δ ∈ γ→ϕ(δ))]→ϕ(γ)) etU |=¬ϕ[α] pour un ordinalα, il suffit de choisir un tel αminimal pour arriver `a une contradiction.
On peut ´egalement consid´erer des classes fonctionnellesF qui correspondent
`a des fonctions na¨ıves entre une classeD⊆Un etU.
Th´eor`eme 6.1.8(D´efinition par r´ecurrence transfinie). SoitGune classe fonc-tionnelle de domaineUn+1. Alors il existe une unique classe fonctionnelleF de domaineUn×Ordtelle que pour tout uplet d’ensembleswet tout ordinalαon aitF(w, α) =G(w, F {w}×α).
D´emonstration. L’id´ee est d’approximerFpar des fonctions. On montre d’abord que pour toutwet tout ordinalβ il existe une unique fonctionfw,β de domaine β telle que
fw,β(α) =G(w,{w} ×fw,β α) pour tout α < β.
L’unicit´e est claire par induction (transfinie).
Quant `a l’existence, on montrera par induction sur β :
∀w∃fw,β fonction de domaineβ:∀α(α < β→fw,β(α) ˙=G(w,{w} ×fw,βα))
| {z }
(∗)w,β
Siβ= 0, on posefw,β=∅.
Soitβ =β0+ 1 etfw,β0 une fonction satisfaisant `a (∗)w,β0. On posefw,β=fw,β0∪ {(β0, G(w,{w} ×fw,β0)}.
Soitβ un ordinal limite. On consid`ere l’ensemble suivant :
Xw,β :={f | ∃β0< β :f est une fonction satisfaisant (∗)w,β0 t.q. dom(f) =β0}.
Par (Rem) et unicit´e,Xw,β est un ensemble. ´Egalement par unicit´e,S
f0∈Xw,βf0 est donc une fonction qui convient.
On pose (w, β, y)∈F :⇔pour toute fonctionfde domaineβ+1 satisfaisant
`a (∗)w,β+1 on af(β) =y.
Exemples 6.1.9 (Applications de la d´efinition par r´ecurrence transfinie).
1. Les fonctions de l’arithm´etique ordinale (addition, multiplication et expo-nentiation ordinale) peuvent se d´efinir par r´ecurrence (voir la remarque 1.5.7).
2. La hi´erarchie des ℵ est donn´ee par une classe fonctionnelle ℵ : Ord → Card. En effet, il suffit d’appliquer la r´ecurrence transfinie `a la classe fonctionnelleG:U →U d´efinie comme suit :
– G(0) =ω;
– sif :α→β pour deux ordinauxα, β, alors G(f) =
(le plus petit cardinal> f(α0), siα=α0+ 1;
Sim(f), si dom(f) est un ordinal limite.
– sixn’est pas une fonction entre deux ordinaux, alorsG(x) =∅.
3. La hi´erarchie de von Neumann : par r´ecurrence sur α ∈Ord, on d´efinit une classe fonctionnelleα7→Vαvia
– V0=∅; – Vα+1=P(Vα) ; – Vλ=S
α<λVα pourλlimite.
Proposition 6.1.10 (ZF−(AF)). L’ordinal ω muni des op´erations ordinales (addition, multiplication et successeur), avec 0 = ∅ et < donn´e par ∈ est un mod`ele de P.
D´emonstration. Exercice.
6.2 Axiome du choix
L’axiome du choix (AC)
∀f[(Fn(f)∧ ∅ 6∈im(f))
→ ∃g(Fn(g)∧dom(g) ˙=dom(f)∧ ∀x(x∈dom(g)→g(x)∈f(x)))]
Il exprime que le produit d’une famille d’ensembles non vides est non vide.
D´efinition. Soitaun ensemble. On appellefonction de choix suraune fonction h:P(a)0:=P(a)\ {∅} →atelle queh(A)∈Apour toutA∈ P(a)0.
Proposition 6.2.1. (AC) est ´equivalent `a l’existence d’une fonction de choix pour tout ensemblea.
D´emonstration. Supposons (AC) et soitaun ensemble. Par l’axiome du choix, Q
A∈P(a)0A6=∅. Tout ´el´ement de ce produit est une fonction de choix sura.
R´eciproquement, soit (ai)i∈I une famille d’ensembles avecai 6=∅pour tout i ∈ I. Soit a = S
i∈Iai et h : P(a)0 → a une fonction de choix sur a. Alors h◦f ∈Q
i∈Iai, o`uf :I→ P(a)0,f(i) :=ai. Th´eor`eme 6.2.2. Dans ZF, son ´equivalents :
1. (AC) ;
2. le lemme de Zorn ;
3. le th´eor`eme de Zermelo (Wohlordnungssatz).
D´emonstration. (1)⇒(2) : Par l’absurde. Soit donchX, <iun ordre partiel in-ductif sans ´el´ement maximal. On consid`ere l’ensemble
T ={T ∈ P(X)|T est totalement ordonn´e par <}.
Comme il n’existe pas d’´el´ement maximal dansX, pour toutT ∈ T, l’ensemble B(T) :={x∈X |x > t∀t∈T} est non vide. Par (AC), il existe une fonction b:T →X telle queb(T)∈B(T) pour tout T ∈ T.
SoitGla classe fonctionnelle suivante :
– si g est une fonction avec dom(g) ∈ Ord et im(g) ∈ T, alors G(g) = b(im(g)) ;
– G(g) =∅sinon.
Par le th´eor`eme 6.1.8 il existe une classe fonctionnelle F de domanie la classe des ordinaux telle que F(α) =G(Fα) pour tout ordinal α. On v´erifie par induction queF(α)∈X pour toutαet
α < β⇒F(α)< F(β). (6.1) Par compr´ehension,OX :={x∈X | il existe un ordinalαtel que (α, x)∈F} est un ensemble.
En tant que fonction na¨ıve,Fest injective par (6.1). La classeF−1d´efinie par (x, α)∈F−1:⇔(α, x)∈F est donc une classe fonctionnelle. On aF−1[OX] = Ord, et Ord est un ensemble par remplacement. Ceci contredit la remarque 6.1.6(2).
(2)⇒(3) : Soita un ensemble. Il faut montrer quea admet un bon ordre. On consid`ere X := {(b, R) | b ∈ P(a) etRest un bon ordre sur b}. Il est facile `a voir queX est un ensemble (exercice).
SurX, on d´efinit un ordre partiel comme suit :
(b, R)≤(b0, R0) :⇔ b est un segment initial de (b0, R0) etR0b =R}.
Cet ordre est inductif. En effet, si (bi, Ri)i∈I est une partie totalement ordonn´ee deX, alors (b, R) := (S
i∈Ibi,S
i∈IRi) est un majorant de cette partie. Par le lemme de Zorn, il existe un ´el´ement (˜b,R)˜ ∈ X qui est maximal pour ≤. Si
˜b 6=a, il existe y ∈ a\˜b. On pose b0 = ˜b∪ {y} et R0 := ˜R∪ {(x, y) |x ∈˜b}.
Il est alors clair queR0 est un bon ordre surb0 qui prolonge celui sur ˜b, ce qui contredit la maximalit´e de (˜b,R).˜
(3)⇒(1) : Soitaun ensemble. Par hypoth`ese, apeut ˆetre bien-ordonn´e, disons par<. La fonction f : P(a)0 → a qui `a une partie non vide de a associe son plus petit ´el´ement est une fonction de choix sura. On conclut par la proposition 6.2.1.
Remarque 6.2.3 (Paradoxe de Skolem). Si ZFC est consistante, elle a un mod`ele (n´ecesairement infini, vu les axiomes). Comme Lens est d´enombrable, ZFC a donc un mod`ele d´enombrable Mpar le th´eor`eme de L¨owenheim-Skolem descendant. Mais il existe des ensembles non-d´enombrables dansM, par exemple ℵ1 ouR.
Explication :La notion de ‘d´enombrabilit´e’ d´epend du mod`ele de ZFC dans lequel on travaille. Elle est donc relative. ˆEtre d´enombrable au sens deMet l’ˆetre au sens du mod`ele de la th´eorie des ensembles (na¨ıf ) de fond n’est pas la mˆeme chose. Qui plus est, l’ensemble de baseM deMest un un ensemble du point de vue na¨ıf, et une classe propre du point de vue deM.
Plus g´en´eralement, la notion de cardinalit´e d´epend du mod`ele. Ainsi, l’en-semble des entiersN (au sens deM) et l’ensemble des r´eelsR(au sens deM) sont tous les deux d´enombrables d’un point de vue du mod`ele de fond. Or, la bijection entre les deux ensembles qui existe comme ensemble na¨ıf n’est mˆeme pas repr´esent´e par une classe dans M. En effet, sinon, par remplacement, elle serait donn´ee par un ensemble au sens deM, c’est-`a-dire par un ´el´ement deM.