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D´ emonstrations formelles et th´ eor` eme de compl´ etude de G¨ odel . 29

Dans le document Cours de logique math (Page 30-40)

On va formaliser la notion de preuve.

Axiomes logiques : – les tautologies ;

– les axiomes de l’´egalit´e ;

– (∃-ax) les axiomes du quanteur existentiel.

R`egles de d´eduction :

– (MP) `A partir de ϕetϕ→ψ, on peut d´eduireψ.

– (∃-intro) Supposons x non libre dans ψ. `A partir de ϕ → ψ, on peut d´eduire∃xϕ→ψ.

D´efinition. SoitϕuneL-formule etT une L-th´eorie. Une preuve formelle de ϕdansT est une suite finie deL-formules (ϕ0, . . . , ϕn) avecϕn=ϕet telle que, pour chaquei≤n, soit ϕi ∈T, soit ϕi est un axiome logique, soit il s’obtient par (MP) `a partir deϕjetϕk avecj, k < i, soit il s’obtient par (∃-intro) `a partir d’une formuleϕj avecj < i.

On dit que ϕ est prouvable dans T, not´ee T `L ϕ, s’il existe une preuve formelle deϕdansT.

A priori,`L d´epend du langage L dans lequel la formule ϕet la th´eorieT sont consid´er´ees, car si L0 ⊇ L, il y a plus de L0-preuves que de L-preuves.

Nous verrons plus tard queT |=ϕsi et seulement siT `Lϕ, ce qui montrera en particulier que la prouvabilit´e d’une formule est une notion qui est ind´ependante du langage.

Dans la suite, on donnera aussi des preuves (ϕ0, . . . , ϕn) dans lesquelles des formulesϕidont la prouvabilit´e a d´ej`a ´et´e ´etablie ant´erieurement seront utilis´ees comme axiomes. On pourra toujours transformer une telle preuve en une preuve formelle — il suffit de remplacerϕi par une preuve formelle deϕi.

On utilisera parfois l’axiome (d´eriv´e) et les r`egles (d´eriv´ees) qui sont donn´es dans le lemme suivant.

Lemme 2.6.1.

1. (MPGen) Si T `L ϕi pour i= 1, . . . , n etT `Lϕ1∧. . .∧ϕn →ψ, alors T `Lψ.

2. (∀-ax) On a `L ∀x ϕ →ϕt/x pour toute L-formule ϕ, tout L-terme t et toute variable x.

3. (∀-intro) Si xn’est pas libre dans ϕ et si T `L ϕ→ψ, alors T `L ϕ→

∀x ψ.

4. (G´en´eralisation) SiT `L ψ, alors T `L∀xψ.

D´emonstration. (1) La formule suivante est une tautologie :

((ϕ1∧. . .∧ϕn→ψ)→(ϕ1→(ϕ2→. . .→(ϕn→ψ)· · ·).

On applique (MP)n+ 1 fois pour obtenir T`Lψ.

(2) Soient ϕ, tetxdonn´es. Voici une preuve formelle de∀x ϕ→ϕt/x (rap-pelons que∀xϕ=¬∃x¬ϕpar d´efinition) :

ϕ0= (¬ϕt/x → ∃x¬ϕ) (∃-ax)

ϕ1= (¬ϕt/x → ∃x¬ϕ)→(¬∃x¬ϕ→ϕt/x) (tautologie)

ϕ2=∀x ϕ→ϕt/x ((MP) surϕ0et ϕ1)

(3) La preuve de (∀-intro) est similaire que celle de (∀-ax). On l’obtient par contraposition `a partir de (∃-intro).

(4) On supposeT `Lψ. On choisit un ´enonc´e prouvableϕ.

ϕ0=ϕ (prouvable par notre choix) ϕ1=ψ (prouvable dansT par hypoth`ese) ϕ2=ψ→(ϕ→ψ) (tautologie)

ϕ3=ϕ→ψ ((MP) surϕ1et ϕ2) ϕ4=ϕ→ ∀xψ ((∀-intro) appliqu´ee `a ϕ3) ϕ5=∀x ψ ((MP) surϕ0et ϕ4)

Lemme 2.6.2(Lemme de d´eduction). SoitχunL-´enonc´e,T uneL-th´eorie et ϕuneL-formule.

1. T∪ {χ} `LϕssiT `L χ→ϕ.

2. T `Lϕssi il existe ψ1, . . . , ψn∈T tels que`L1∧ · · · ∧ψn)→ϕ.

D´emonstration. (1) Il est clair que T `L χ →ϕentraˆıneT ∪ {χ} `L ϕ. R´ eci-proquement, soit (ϕ0, . . . , ϕn) une preuve formelle deϕ=ϕn dansT∪ {χ}. Par induction sur i, on montrera que T `L (χ → ϕi). Si ϕi = χ, c’est clair, et si T `L ϕi, cela suit de (MP) et du fait que (ϕi→(χ→ϕi)) est une tautologie.

Cela montre T `L (χ → ϕi) dans les cas o`u ϕi est un axiome logique ou un

´element deT.

Si ϕi s’obtient par (MP) `a partir de ϕj et ϕk = (ϕj →ϕi) pour j, k < i, il suffit d’utiliser (MP) et le fait que ((χ→ϕj)∧(χ→(ϕj→ϕi))→(χ→ϕi)) est une tautologie.

Enfin, siϕi = (∃xψ →ϕ) s’obtient par (∃-intro) `a partir de ϕj = (ψ→ϕ) pourj < i(doncxn’est pas libre dansϕ), on utilise la tautologie (F →(G→ H))→(G→(F →H)) deux fois et le fait quexn’est pas libre dans (χ→ϕ) pour conclure :

T `Lχ→(ψ→ϕ) ⇒ T `Lψ→(χ→ϕ) (par∃-intro) ⇒ T `L∃xψ→(χ→ϕ)

⇒ T `Lχ→(∃xψ→ϕ) La partie (2) se d´eduit facilement de (1).

Lemme 2.6.3 (Simulation des constantes par des variables). Soit ψ une L-formule,T une L-th´eorie, etC un ensemble de constantes tel que L ∩C=∅.

(a) Soitxune variable etc∈C. Les propri´et´es suivantes sont ´equivalentes : (1) T `Lψ

(2) T `L∪{c}ψc/x (3) T `L∪{c}ψ

(b) On a T `Lψ si et seulement si T `L∪Cψ.

D´emonstration. On supposera dans la preuve que T = ∅. La preuve du cas g´en´eral est la mˆeme. Montrons d’abord la partie (a).

(1)⇒(3) est triviale. (TouteL-preuve est uneL ∪ {c}-preuve.)

(3)⇒(2). Si`L∪{c} ψ, alors `L∪{c}∀xψ par g´en´eralisation. En utilisant (∀-ax) et (MP), on obtient`L∪{c}ψc/x.

(2)⇒(1). Pour ˜ϕuneL ∪ {c}-formule etyune variable sans occurrence dans

˜

ϕ, on noteraϕ= ˜ϕy/cle mot obtenu en substituant toute occurrence decdans

˜ ϕpary.

Soient ˜ϕ,ψ˜ et ˜χ desL ∪ {c}-formules sans occurrences dey. Alors on a les propri´et´es suivantes :

(i) ϕest uneL-formule.

(ii) ϕc/y= ˜ϕ.

(iii) Si ˜ϕ est un axiome d’´egalit´e (respectivement une tautologie ou un ∃-axiome), alorsϕaussi.

(iv) Si ˜ϕs’obtient par (MP) `a partir de ˜ψ et ˜χ, alorsϕs’obtient par (MP)

`

a partir deψetχ.

(v) Si ˜ϕs’obtient par (∃-intro) `a partir de ˜ψ, alorsϕs’obtient par (∃-intro)

`

a partir deψ.

On peut montrer (i) par induction sur la hauteur deϕ, et (ii) est une cons´ e-quence de l’exemple 2.4.3(2). Les propri´et´es (iv) et (v) sont imm´ediates, de mˆeme les cas d’un axiome d’´egalite ou d’une tautologie dans (iii). Reste `a v´ e-rifier le cas d’un (∃-ax) dans (iii) : Si ˜ϕ = (˜δt/x → ∃xδ), il faut monter que˜ ϕ= ([˜δt/x]y/c → ∃x[˜δ]y/c) est un axiome de quanteur existentiel. Ceci est une cons´equence de l’identit´e

[˜δt/x]y/c= [˜δy/c]ty/c/x

dont la preuve se fait par induction et est laiss´ee en exercice.

Maintenant, soit ( ˜ϕ0, . . . ,ϕ˜m) uneL∪{c}-preuve formelle deψc/x. On choisit une variabley sans occurrence dans ˜ϕ0, . . . ,ϕ˜met telle quey6=x.

On d´eduit des propri´et´es (i)-(v) que (ϕ0, . . . , ϕm) est uneL-preuve formelle deϕm = (ψc/x)y/cy/x. (On utilise 2.4.3(2) pour ´etablir cette ´egalit´e.) En g´en´eralisant on obtient`L∀yψy/x.

On utilise (∀-ax) et (MP) pour montrer `Ly/x)x/y. Or, le lemme 2.4.4 montre que ψy/x

x/y=ψ, ce qui termine la preuve de (2)⇒(1).

La partie (b) est une cons´equence imm´ediate de (a). En effet, comme toute L ∪C-preuve n’utilise qu’un nombre fini de constantes deC, on peut supposer que C est fini. On termine donc par une induction sur le cardinal de C, en utilisant (1)⇔(3).

D´efinition. SoitT uneL-th´eorie.

– T estcontradictoire s’il existe un ´enonc´eϕtel queT `LϕetT `L ¬ϕ.

– T estcoh´erente si elle est non contradictoire.

– T est compl`ete si elle est coh´erente et pour tout L-´enonc´e ϕ on a soit T `Lϕ, soitT `L¬ϕ.

Remarque 2.6.4. Pour uneL-th´eorie T, sont ´equivalents : 1. T est contradictoire ;

2. T `Lϕpour toutL-´enonc´eϕ;

3. il existeψ1, . . . , ψn∈T tels que`L¬(ψ1∧ · · · ∧ψn).

D´emonstration. Exercice.

Lemme 2.6.5. SoitT uneL-th´eorie.

1. Soit ψ unL-´enonc´e. Alors T `Lψ ssiT∪ {¬ψ} est contradictoire.

2. Soit ϕ(x) une L-formule et c∈ L une constante qui n’a pas d’occurrence dans T ∪ {ϕ(x)}. On suppose que T est coh´erente. Alors la th´eorie T ∪ {∃xϕ→ϕc/x} est uneL-th´eorie coh´erente.

D´emonstration. (1) Le sens direct est clair. R´eciproquement, si T ∪ {¬ψ} est contradictoire, par le lemme de d´eduction, il existe unL-´enonc´eϕtel queT `L ψ→ϕet T `L ψ→ ¬ϕ. On utilise la tautologie ((ψ→ϕ)→(ψ→ ¬ϕ))→ψ et (MP) pour conclure.

(2) Si la conclusion ´etait fausse, on auraitT `L ∃xϕ∧ ¬ϕc/x par la premi`ere partie du lemme. Par le lemme de d´eduction il existerait donc ψ1, . . . , ψn ∈T tels que`L1∧. . .∧ψn)→(∃xϕ∧ ¬ϕc/x).

Nous allons montrer que si `L ψ → (∃xϕ∧ ¬ϕc/x) pour un L-´enonc´e ψ qui ne contient pas c, alors `L ¬ψ. En effet, on a clairement `L ¬∃xϕ → ¬ψ et `L ϕc/x → ¬ψ. Le dernier donne `L ϕ → ¬ψ par le Lemme 2.6.3(a), puis

`L∃xϕ→ ¬ψ par (∃-intro). En utilisant des tautologies convenables et (MP), on obtient`L¬ψ.

Exemples 2.6.6. 1. SoitAuneL-structure. Alors Th(A) :={ϕL-´enonc´e | A|=ϕ} est une th´eorie, appel´ee la th´eorie de A. C’est une th´eorie com-pl`ete. (Sa coh´erence sera une cons´equence de la direction facile du th´ eo-r´eme de compl´etude.)

2. La th´eorie des corps alg´ebriquement clos est laLan-th´eorie CAC qui outre les axiomes de corps contient un ´enonc´e χn pour tout n ≥1 exprimant que tout polynˆome de degr´ena une racine.

n=∀z0, . . . , zn−1∃x(xn+zn−1xn−1+. . .+z0=0) marche ; cette formule˙ peut ˆetre r´e´ecrite dansLan.]

Th´eor`eme 2.6.7 (Th´eor`eme de compl´etude de G¨odel). Soit T une L-th´eorie etϕun L-´enonc´e. Alors T |=ϕsi et seulement siT `Lϕ.

Remarque. Comme|=ne d´epend pas du langage consid´er´e, a postiori`L n’en d´epend pas non plus. Une fois le th´eor`eme de compl´etude ´etabli, nous ´ecrivons donc`au lieu de`L.

D´emonstration. T `L ϕ⇒ T |=ϕ. Ce sens facile exprime que notre calcul de preuves formelles est correct. En effet, `L ϕ ⇒ |=ϕ est une cons´equence des lemmes 2.5.4–2.5.8. SiT `L ϕ, il existeψ1, . . . , ψn ∈T tels que`L1∧. . .∧ ψn)→ϕ. Donc |= (ψ1∧. . .∧ψn)→ϕ et alors pour tout A|=T on aA|=ϕ (carA|=ψ1∧. . .∧ψn).

T |=ϕ ⇒ T `L ϕ. C’est le sens non trivial. Il sera cons´equence du th´eor`eme d’existence de mod`ele suivant. En fait, comme

T 6|=ϕ ⇐⇒ T∪ {¬ϕ}a un mod`ele (par d´efinition), et T 6`Lϕ ⇐⇒ T∪ {¬ϕ}est coh´erente (Lemme 2.6.5(1)), ce th´eor`eme est ´equivalent au th´eor`eme de compl´etude.

Th´eor`eme 2.6.8. Une th´eorie a un mod`ele si et seulement si elle est coh´erente.

D´emonstration. La direction facile a d´eja ´et´e montr´ee. Pour montrer que toute th´eorie coh´erente T a un mod`ele, l’id´ee est de construire une expansion T+ de T dans un langage L+ ⊇ L qui ressemble au «diagramme complet d’une structure». Nous avons besoin d’une d´efinition.

D´efinition. SoitLun langage etC un ensemble de constantes avecL ∩C=∅.

On dit qu’uneL ∪C-th´eorieT+ admet des t´emoins de Henkin dans C si pour touteL ∪C-formuleϕ=ϕ(x) il existec∈C tel que∃xϕ→ϕc/x ∈T+.

SiAest uneL-structure etA={ac | c∈C}une ´enum´eration (non n´ ecessai-rement injective) de son ensemble de base parC, on noteA+ laL ∪C-structure obtenue `a partir de A en interpr´etant c par ac. Alors Th(A+) est une th´ eo-rie compl`ete qui admet des t´emoins de Henkin dans C. En fait, toute th´eorie compl`ete qui admet des t´emoins de Henkin dansC est de cette forme :

Proposition 2.6.9. Toute L ∪C-th´eorie compl`eteT+ qui admet des t´emoins de Henkin dansC a un mod`eleA+ form´e de constantes deC, c’est-`a-dire dont l’ensemble de base est de la formeA+={cA+ | c∈C}.

D´emonstration de 2.6.9. Quitte `a remplacerT+par{ϕL ∪C-´enonc´e |T+`L∪C

ϕ}, on peut supposer queT+ estd´eductivement close(T `L∪Cϕssiϕ∈T+).

Sur C, la relationc∼d:⇐⇒ c=d˙ ∈T+ est une relation d’´equivalence. En effet, cela d´ecoule des axiomes de l’´egalit´e. On poseac :=c/∼et A+ :={ac | c∈C}. ´Evidemment, on aA+6=∅. On d´efinit une L ∪C-structureA+ surA+ comme suit :

– Pour d une constante, on pose dA+ := ac si c=d˙ ∈ T+. Pour montrer qu’un tel c existe, on raisonne ainsi :d=d˙ → ∃xx=d˙ ∈ T+ (par (∃-ax)), donc∃xx=d˙ ∈T+ par (MP) ; comme T+ admet des t´emoins de Henkin, il existec∈C tel que∃xx=d˙ →c=d˙ ∈T+, d’o`uc=d˙ ∈T+ par (MP).

C’est bien d´efini par les axiomes de l’´egalit´e.

– R∈ RLn. On d´efinit (ac1, . . . , acn)∈RA+ :⇐⇒ Rc1· · ·cn∈T+. C’est bien d´efini par les axiomes de l’´egalit´e (congruence 2).

– f ∈ FnL. On d´efinitfA+(ac1, . . . , acn) =ac0 :⇐⇒ f c1· · ·cn=c˙ 0∈T+. On montre sans probl`eme en utilisant les axiomes de l’´egalit´e (congruence 1) que c’est bien d´efini. Un argument similaire `a celui donn´e pour les constantes montre quefA+ est une fonction qui est d´efinie partout.

(I) Sit est unL ∪C-terme sans variable, alorstA+ =ac ⇐⇒ t=c˙ ∈T+. (II) SoitψunL ∪C-´enonc´e. Alors A+ |=ψ ⇐⇒ ψ∈T+.

On d´emontre (I) par induction sur ht(t), en utilisant les axiomes de l’´egalit´e.

Quant `a (II), on raisonne par induction sur ht(ψ), o`uψest unL ∪C-´enonc´e.

Rappelons que ht(ϕ) = ht(ϕs/x) (voir l’exercice 2.4.1).

Siψ=t1=t˙ 2, alors (II) suit de (I).

Si ψ=Rt1· · ·tn, on choisit ci ∈C tel que tAi+ =aci. Comme ti=c˙ i ∈T+, on aA+ |=ψ ⇐⇒ Rc1· · ·cn∈T+ ⇐⇒ ψ∈T+. La premi`ere ´equivalence suit de la d´efinition deA+, la seconde suit de la congruence 2.

Le casψ= (ϕ1∧ϕ2) est facile.

Si ψ =¬ϕ, on a A+ |= ψ ⇐⇒ A+ 6|=ϕ ⇐⇒ ϕ 6∈ T+ ⇐⇒ ψ ∈ T+, puisqueT+ est compl`ete par hypoth`ese.

Finalement, soit ψ=∃xϕ. On montre d’abord queψ ∈T+ ⇐⇒ il existe c ∈ C tel que ϕc/x ∈ T+. En effet, comme T+ admet des t´emoins de Henkin dans C, on a le sens direct. Pour le sens indirect, il suffit d’appliquer (∃-ax), (MP) et utiliser queT+ est d´eductivement close.

On obtient les ´equivalences A+|=ψ ⇐⇒ A+|=ϕ[ac] pour unc∈C (Lemme de substitution) ⇐⇒ A+|=ϕc/x pour unc∈C

(Hypoth`ese d’induction) ⇐⇒ ϕc/x∈T+ pour unc∈C

⇐⇒ ψ∈T+

A+ est donc un mod`ele deT+ qui est form´e de constantes deC.

Le lemme suivant terminera la preuve du th´eor`eme 2.6.8, car siA+ est un mod`ele de la L+ =L ∪C-th´eorie T+ avec T+ ⊇T, alors le r´eduit de A+ au langageLest un mod`ele de T.

Lemme 2.6.10. Soit T une L-th´eorie coh´erente. Alors il existe une L ∪ C-th´eorie compl`eteT+ contenant T qui admet des t´emoins de Henkin dans C.

D´emonstration. Pour touteL-formule `a une variable libreϕ=ϕ(x) on introduit une nouvelle constantecϕ. Soit C1 l’ensemble des cϕ. On poseL1=L ∪C1 et T1:= ˜T :=T∪ {∃xϕ→ϕcϕ/x | ϕ=ϕ(x)}. Montrons queT1est uneL1-th´eorie coh´erente. Comme une th´eorie est coh´erente si et seulement si toute partie finie

est coh´erente, il suffit ´evidemment de montrer que la th´eorie ˜T0 =T∪ {∃xiϕi→ ϕic

ϕi/xi}est coh´erente pour tout ensemble fini{ϕ1, . . . , ϕn}de formules. Comme Test coh´erente en tant queL1-th´eorie par 2.6.3, c’est une cons´equence du lemme 2.6.5(2), quitte `a raisonner par induction surn.

On r´ep`ete cette construction, avecC2 un ensemble de nouvelles constantes, L2 :=L1∪C2 et la L2-th´eorieT2 := ˜T1. On montre qu’il s’agit d’une th´eorie coh´erente. Si Tn est construite, on trouve Tn+1 := ˜Tn, une th´eorie coh´erente dans le langage Ln+1 = Ln∪Cn+1. Posons C := S

n∈NCn et L+ := L ∪C.

Alors (Tn)n∈Nest une suite croissante deL+-th´eories coh´erentes. LaL+-th´eorie T0 :=S

n∈NTn est alors coh´erente. Par construction, elle admet des t´emoins de Henkin dansC.

Comme toute L+-th´eorie S0 contenant T0 admet des t´emoins de Henkin dans C, il reste `a montrer que toute L+-th´eorie coh´erente est contenue dans uneL+-th´eorie compl`ete. C’est une cons´equence du Lemme de Zorn. En effet, l’ensemble S = {S0 ⊇ T0 | S0 et uneL+-th´eorie coh´erente} est non vide et ordonn´e partiellement par inclusion. Comme la r´eunion d’une chaˆıne de th´eories coh´erentes est coh´erente, cet ordre est inductif. Par le lemme de Zorn, il existe un

´el´ement maximal dansS, autrement dit il existe uneL+-th´eorieT+⊇T0qui est maximale coh´erente. SoitϕunL+-´enonc´e. SiT 6`L+ ϕ, laL+-th´eorieT+∪{¬ϕ}

est coh´erente par 2.6.5(1). On en d´eduit que ¬ϕ∈T+ par maximalit´e, ce qui montre queT+ est compl`ete et termine la preuve.

SiLest d´enombrable, le lemme admet une preuve par une construction plus directe. Nous allons l’esquisser maintenant. On choisit un ensembleC ={cn | n∈N}de nouvelles constantes et on ´enum`ere l’ensemble desL ∪C-´enonc´es via ϕ1, ϕ2, . . .. Par induction, on construit une suite croissante de L ∪C-th´eories coh´erentes ayant les propri´et´es suivantes :

– T0=T, etTn\T est fini pour toutn∈N; – ϕn∈Tn+1 ou¬ϕn∈Tn+1;

– siϕn=∃xψ, alors il existec∈C tel queψc/x∈Tn+1. Une fois la suite desTn construite, il suffit de poserT+ :=S

n∈NTn. C’est une th´eorie compl`ete par construction, et elle admet des t´emoins de Henkin dansC.

En effet, soitψ(x) donn´ee. Alors il existen∈Ntel que∃xψ=ϕn. Siϕn∈T+, alors par construction ψc/x ∈ T+ pour un c ∈ C, donc ∃xψ → ψc/x ∈ T+. Sinon, on a¬∃xψ∈T+, d’o`u trivialement∃xψ→ψc/x∈T+ pour toutc.

Supposons Tn construite. Si Tn ∪ {ϕn} est coh´erente, on pose ψn = ϕn. Sinon,ψn =¬ϕn. Dans les deux cas,Tn∪ {ψn} est coh´erente. Si ψn n’est pas de la forme∃xχ, on poseTn+1 :=Tn∪ {ψn}. Sinon, soitmminimal tel quecm

n’a pas d’occurrence dansTn (il existe car Tn\T est fini). On pose Tn+1 :=

Tn∪ {ψn, χcm/x}. La th´eorieTn+1 est coh´erente par le lemme 2.6.5(2).

Chapitre 3

Premiers pas en th´ eorie des mod` eles

3.1 Quelques th´ eor` emes fondamentaux

Th´eor`eme 3.1.1 (Th´eor`eme de compacit´e). Soit T une th´eorie dont toute partie finie a un mod`ele. Alors T a un mod`ele.

D´emonstration. La th´eorieT est coh´erente si et seulement si toute partie finie deT est coh´erente. Le r´esultat suit du th´eor`eme 2.6.8.

Exercice. SoitXl’ensemble desL-th´eoriesT compl`etes et closes par d´eduction.

SurX, on d´efinit une topologie de la mani`ere suivante. PourϕunL-´enonc´e, on note hϕi := {T ∈ X | ϕ ∈ T}, et on prend la collection des hϕi comme base d’ouverts d’une topologie. Montrer :

1. hϕ∧ψi=hϕi ∩ hψieth¬ϕi=X\ hϕi. En particulier, leshϕiforment une base d’ouverts-ferm´es.

2. Cette topologie est compacte et s´epar´ee.

D´efinition. Soient Met NdesL-structures.

1. On dit queMetNsont´el´ementairement ´equivalentes, si Th(M) = Th(N), c’est-`a-dire si elles satisfont les mˆemes ´enonc´es. On le noteM≡N.

2. Soit Mune sous-structure de N (ce que l’on note M⊆ N). On dit que c’est une sous-structure ´el´ementaire (et N est appel´ee extension ´el´ emen-taire de M) si pour toute L-formule ϕ = ϕ(x1, . . . , xn) et tout uplet a = (a1, . . . , an) ∈ Mn on a M |= ϕ[a] si et seulement si N |= ϕ[a].

On le noteM4N.

Remarque. 1. SiM4N, alorsM≡N.

2. SiMetN sont isomorphes, alors M≡N.

L’exemple suivant montre que M ⊆ N et M≡ N n’entraˆıne pas toujours M4N.

Exemple. Dans le langageL<, on consid`ereN:=hN;<iet M:=hN;<i, o`u N:=N\ {0}.

On aM⊆NetM∼=N, en particulierM≡N. Or, l’extensionM⊆Nn’est pas ´el´ementaire, puisqueM|=¬∃x x <1 etN|=∃x x <1.

Th´eor`eme 3.1.2 (Test de Tarski-Vaught). Soient M⊆N deux L-structures.

On suppose que pour touteL-formuleϕ(x0, . . . , xn)et tout uplet (a1, . . . , an)∈ Mn, s’il existe b0∈N tel que N |=ϕ[b0, a1, . . . , an], alors il existea0 ∈M tel queN|=ϕ[a0, a1, . . . , an]. Alors M4N.

D´emonstration. Par induction sur ht(ϕ(x1, . . . , xn)) on montre : pour touta∈ Mn on aM|=ϕ[a] ⇐⇒ N|=ϕ[a].

Siϕest une formule atomique, c’est vrai carMest une sous-structure deN.

Le cas des connecteurs logiques est clair.

Soit doncϕ=ϕ(x1, . . . , xn) =∃x0ψ(x0, . . . , xn). (Commex0n’est pas libre dansϕ, on peut supposer quex06=xipouri= 1, . . . , n.) Soit (a1, . . . , an)∈Mn. On aM|=ϕ[a1, . . . , an] ⇐⇒ il existea0∈M tel queM|=ψ[a0, . . . , an] (hypoth`ese d’induction) ⇐⇒ il existea0∈M tel queN|=ψ[a0, . . . , an] (hypoth`ese du th´eor`eme) ⇐⇒ il existeb0∈N tel queN|=ψ[b0, . . . , an]

⇐⇒ N|=ϕ[a1, . . . , an].

Notons que pour tout langage L on a card(L) = card(FmlL)≥card(TL).

(Exercice.)

Th´eor`eme 3.1.3(Th´eor`eme de L¨owenheim-Skolem descendant). Soit Mune L-structure et A⊆M une partie de l’ensemble de base de M. On suppose que card(M) ≥ card(L). Alors il existe une sous-structure ´el´ementaire M0 de M contenantA et de cardinalit´esup(card(A),card(L)).

D´emonstration. Quitte `a agrandirA on peut supposer que card(A)≥card(L).

Dans cette preuve, si ∅ 6= B ⊆ M, nous notons ˜B ⊆ M l’ensemble de base dehBiM (la sous-structure engendr´ee parB). On a ˜B ={tM[b1, . . . , bn] | t = t(x1, . . . , xn) ∈ TL, b1, . . . , bn ∈ B} (Exercice 2.3.3). En particulier, si card(B)≥card(L), alors card(B) = card( ˜B), puisqu’il existe une surjection de TL×S

n∈NBn sur ˜B.

SoitA0:=hAiMetA0:= ˜A. ´Etant d´efiniAi⊆M, on construitAi+1comme suit. Pour touteL-formuleϕ(x0, . . . , xn) et toutn-upleta∈Ani, siM|=ϕ[b0, a]

pour un b0 ∈ M, on choisit c(ϕ, a) ∈ M tel que M |= ϕ[c(ϕ, a), a]. On pose Bi+1 := Ai ∪ {c(ϕ, a) | ϕ = ϕ(x0, . . . , xn) ∈ FmlL, a1, . . . , an ∈ Ai}, puis Ai+1:=B]i+1, l’ensemble de base deAi+1=hBi+1iM.

SoitM0:=S

i∈NAi. AlorsM0contient cM pour toutc∈ CL et est clos par fM pour toutf ∈ FL. C’est donc l’ensemble de base d’une sous-structureM0

deM.

Soitϕ=ϕ(x0, . . . , xn) une formule,a∈M0netb0∈M tel queM|=ϕ[b0, a].

Il existe N ∈ N tel quea1, . . . , an ∈ AN. Par construction de AN+1 il existe c0 ∈ AN+1 ⊆M0 tel que M |= ϕ[c0, a]. Donc M0 4M par le test de Tarski-Vaught. Le fait que card(M0) = card(A) est clair.

Exemples 3.1.4. SoitR=hR; +,−,0,1,·, <ile corps ordonn´e des r´eels.

D´emonstration. (1) Soit c une nouvelle constante et L := Lc.ord∪ {c}. On consid`ere laL-th´eorieT := Th(R)∪ {0< c} ∪ {ϕn=c+. . .+c

(2) Par le th´eor`eme de L¨owenheim-Skolem descendant (pourA=∅), il existe R0 4 R avec R0 d´enombrable. On a Q⊆ R0, car R0 est un corps. On choisit r∈R\R0. Alors la partie{r0∈R0 | r0< r} n’a pas de supremum dansR0, car R0 est dense dansR.

Remarque. On peut montrer que Ralg 4R, o`u Ralg =hRalg; +,−,0,1,·, <i etRalg={r∈R | il existe 06=p(X)∈Q[X] tel quep(r) = 0}.

D´efinition. Soit P une propri´et´e que chaque L-structure est susceptible de v´erifier ou non.

On dit que P est axiomatisable (resp. finiment axiomatisable) s’il existe une L-th´eorieT (resp. unL-´enonc´eϕ) telle que pour touteL-structureM, la propri´et´eP est satisfaite parMsi et seulement siM|=T (resp.M|=ϕ).

Dans ce cas, on dit queT (resp.ϕ)axiomatise la propri´et´eP.

Proposition 3.1.5. SoitPune propri´et´e que chaqueL-structure est susceptible de v´erifier ou non. AlorsP est finiment axiomatisable si et seulement si etP et la n´egation deP sont axiomatisables.

D´emonstration. Si ϕaxiomatise P, alors ¬ϕaxiomatise la n´egation deP. R´ e-ciproquement, on suppose que T axiomatise P et que T0 axiomatise la n´ ega-tion deP. La th´eorie T∪T0 est contradictoire. Il existe doncϕ1, . . . , ϕn ∈T,

i=1ϕi est une axiomatisation finie deP.

Exemples 3.1.6. 1. Soitpun nombre premier. Alors les corps de caract´ e-ristiquepsont finiment axiomatisables (dans le langageLan).

2. Les corps de caract´eristique 0 sont axiomatisables dans Lan, mais pas finiment. (En effet, si l’´enonc´eϕ0 ´etait une axiomatisation finie, il serait cons´equence deϕcorps∪ {¬1 +. . .+ 1

| {z }

pfois

˙

=0 | ppremier}, et on aurait alors ϕcorps∪ {¬1 +. . .+ 1

| {z }

pfois

˙

=0 | ppremier et p < N} ` ϕ0 pour un N ∈ N. Contradiction, puisqu’il existe des corps de caract´eristiquep > N.) 3. Les corps ordonn´es archim´ediens ne sont pas axiomatisables (cf. 3.1.4(1)).

4. Les corps ordonn´es complets ne sont pas axiomatisables (cf. 3.1.4(2)).

On observe que les deux derniers exemples pr´ecisent ce que nous avons dit au d´ebut du chapitre 2.

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