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Les maladies neurodégénératives se caractérisent par la mort lente et progressive des neurones (Rego and Oliveira, 2003). Celle-ci peut être engendrée par la production aberrante de radicaux libres (Olanow and Arendash, 1994), par un transport axonal interrompu (Stamer et al., 2002) ou par le dépôt d’agrégats toxiques (Aβ, ou α-synucléine) (Hardy and Orr, 2006).

Deux approches de thérapie génique sont envisageables pour ce type de pathologies. La première dîte thérapie génique restauratrice ou substitutive, consiste à pallier les déficits induits par la mort neuronale. La deuxième dîte thérapie génique de protection, consiste à protéger les neurones de la dégénérescence. Dans le cadre d’une thérapie génique de substitution, des enzymes de biosynthèse (Tyrosine hydroxylase, GTP cyclohydrolase, Aromatic-acid decarboxylase…) peuvent permettre de palier le déficit en neurotransmetteurs induit par la mort neuronale. En revanche, dans le cadre d’une thérapie génique de protection, différents facteurs thérapeutiques peuvent être envisagés, notamment les facteurs trophiques tels que le NGF (Nerve Growth Factor), le BDNF (Brain-derived Neurotrophic Factor), le CNTF (Ciliary Neurotrophic Factor), le GDNF, les enzymes anti-radicaux libres tels que la SOD (Superoxyde Dismutase) ou GPx (Glutathion Peroxydase), ou les enzymes antiapoptotiques tels que Bcl-2 et Bcl-xL. Ces facteurs se sont montrés particulièrement efficaces pour protéger les neurones lors d’un apport direct dans le cerveau sous forme de protéines dans des modèles murins et de primates (Alberch et al., 2004; Kirik et al., 2004; Tuszynski and Blesch, 2004). Basés sur ces résultats, des essais cliniques d’infusion intracérébroventriculaire du GDNF ont été entrepris. Un premier essai clinique de phase I a été entrepris par Nutt et ses collègues

(Nutt et al., 2003). Cet essai testant l’infusion intracérébroventriculaire de GDNF à l’aide d’une canule, n’a aboutit à aucune amélioration des symptomes moteurs des patients et au contraire a révélé la survenue d’effets secondaires associés à la localisation du GDNF dans le ventricule. Par la suite, une étude de phase I a été réalisé par une équipe britannique dans laquelle la protéine GDNF était infusée directement à l’aide d’un cathéter relié à une pompe dans le putamen de cinq patients parkinsoniens (Gill et al., 2003; Patel et al., 2005). L’infusion chronique de GDNF a permis une amélioration significative des fonctions motrices chez tous les patients. Une analyse post mortem a révélé que ces effets bénéfiques étaient en particulier la résultante de formation de collatérales dans le striatum (Love et al., 2005). Bien que l’ensemble de ces résultats ait été confirmé un an après par une étude de phase I portant sur dix patients (Slevin et al., 2005), l’interprétation des résultats de ces études cliniques est limitée par l’absence de groupe contrôle ayant reçu un placebo et par le faible nombre de patients participants. Récemment, une nouvelle étude est venue contredire ces résulats (Lang et al., 2006). Contrairement aux premières études, cet essai n’a vu aucune amélioration significative des symptômes des patients traités en comparaison des patients ayant reçu le placebo. Ces résultats ont poussés les instigateurs à arrêter l’essai, sans que ne soit évalué les causes du manque d’efficaité du GDNF. Cependant, le caractère protéique de ces facteurs limite leur utilisation à long terme. Leur instabilité, leur vitesse de dégradation ainsi que leur inactivation par les protéines plasmatiques limitent leur efficacité. De plus, le franchissement de la barrière hématoencéphalique constitue un obstacle supplémentaire à l’injection intraveineuse de ces protéines thérapeutiques. L’administration directe et continue par voie intracérébroventriculaire ou intraparenchymateuse est une méthode invasive et associée à un risque élevé d’infections. Enfin, l’instabilité des facteurs trophiques nécessite l’administration de grandes quantités de protéines. Ces limites peuvent être contournées par l’expression locale et à long terme de ces facteurs thérapeutiques par le biais de vecteurs viraux. Plusieurs approches expérimentales ont démontré l’efficacité de vecteurs exprimant des facteurs neurotrophiques dans les modèles de maladies neurodégénératives. En particulier, nous avons montré pour la première fois au laboratoire que des vecteurs adénoviraux exprimant le GDNF sont efficace pour prévenir la mort des neurones dopaminergiques dans des modèles murins de maladie de Parkinson (MP) (Bilang-Bleuel et al., 1997). D’autres études émanant du LGN ou d’autres laboratoires sont venues confirmer l’effet protecteur du

GDNF exprimer par des vecteurs adénoviraux (Connor et al., 1999; Connor et al., 2001; Do Thi et al., 2004; Do Thi et al., 2006) ou lentiviraux (Bensadoun et al., 2000; Kordower et al., 2000) sur la mort des neurones dopaminergiques dans des modèles de MP. Les vecteurs viraux se sont également révélés efficace dans des modèles de la maladie d’Alzheimer (MAlz) (Zou et al., 2002; Wu et al., 2004; Tuszynski et al., 2005), de la maladie de Huntington (MH) (Bemelmans et al., 1999; de Almeida et al., 2001; Regulier et al., 2002; Kells et al., 2004) ou encore de maladies neuromusculaires comme la Sclérose Latéral Amyotrophique (SLA) (Aebischer et al., 1996; Acsadi et al., 2002; Klein et al., 2005) ou l’Amyotrophie Spinale (Haase et al., 1997; Haase et al., 1999; Watabe et al., 2001). De même, l’expression des facteurs antiapoptotiques Bcl-2 et Bcl-xL (Waldmeier, 2003), mais aussi des enzymes SOD et GPx, ont permis de prévenir la mort neuronale dans des modèles de MAlz (Blomer et al., 1998; Barkats et al., 2000), de MP (Ridet et al., 2006) et de SLA (Azzouz et al., 2000).

La thérapie génique des maladies neurologiques nécessite une expression stable et à long terme du (des) facteur(s) thérapeutique(s). Les vecteurs lentiviraux remplissent cette obligation, puisque le transgène est détecté plus de seize mois après l’injection dans le SNC (Kordower et al., 2000; Balaggan et al., 2006). De plus, leur simplicité d’utilisation, leur biosécurité et leur production aisée en font des vecteurs de choix pour une application thérapeutique aux pathologies du système nerveux. En outre, la transduction par un vecteur lentiviral ne semble pas affecter les propriétés électrophysiologiques du neurone (Dittgen et al., 2004). Cependant, dans des approches de neuroprotections, il sera nécessaire de cibler les astrocytes pour l’expression des facteurs neurotrophiques. L’utilisation de l’enveloppe du virus mokola permet de répondre à ce besoin (Brizard M., soumis). Ces caractéristiques sont des éléments importants pour l’application des vecteurs lentiviraux en thérapie génique humaine. Toutefois, afin de garantir l’utilisation clinique de ces vecteurs, il est nécessaire de contrôler l’expression du facteur thérapeutique et ceci afin de moduler l’apport de la protéine thérapeutique en fonction des besoins du patient, mais également d’arrêter le traitement en cas de complications graves. Les différents systèmes de régulation et leur incorporation dans des vecteurs lentiviraux seront documentés plus en détail dans le chapitre III.