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Les théories pour expliquer le manque de femmes en poste de leadership 16

Chapitre 2 Revue de la littérature 9

2.3   Les théories pour expliquer le manque de femmes en poste de leadership 16

Il existe une disproportion marquée entre le nombre de femmes et d’hommes au sein de la hiérarchie sportive. En effet, les femmes demeurent principalement concentrées aux niveaux plus bas (initiation au sport ou introduction à la compétition), positions pour lesquelles elles ne détiennent que très peu de pouvoir (Powell, 2011). Le nombre peu élevé d’entraineures et de directrices illustrent de façon éloquente la proportion inégale entre les hommes et les femmes au sein du système sportif canadien (Donnely, 2013). Au fil du temps, les chercheurs ont tenté d’expliquer cette différence prononcée en élaborant divers modèles théoriques pour représenter la lente progression des femmes dans le système sportif. Nous présentons ici les quatre modèles les plus souvent cités pour expliquer le phénomène.

2.3.1 Le mur absolu

La notion de mur absolu était utilisée au début du 20e siècle pour décrire la situation des femmes en position de leadership dans le sport. À titre d’exemple, notons que jusqu’au milieu des années 1900, il leur était formellement interdit d’exprimer une quelconque opinion politique par le bais du vote et qu’elles étaient très peu nombreuses à fréquenter des établissements d’études supérieures. La notion de mur absolu était par conséquent utilisée pour décrire l’interdiction d’accès à tout ce qui se retrouve en-dehors de leur foyer, entre autres, le sport. Ce n’est donc qu’au début de la seconde moitié du 20e siècle que l’on distingue que certaines femmes se démarquent. À cette époque, l’idée de l’incapacité des femmes à exercer les fonctions relatives aux positions les plus élevées dans la société était un concept répandu et il n’existait aucune législation pour favoriser une participation plus active de celles-ci sur la scène publique. L’opinion persistante que les femmes sont trop émotives et ont un caractère imprévisible est resté ancrée pendant un long moment dans la culture et constituait un argument fréquemment utilisé pour justifier l’accès limité des femmes à des postes élevés (Eagly & Carli, 2007).

2.3.2 Le plafond de verre

Dans les années 1970, on observe peu à peu une présence plus importante des femmes à des postes pour lesquels elles possèdent davantage de pouvoir dans la hiérarchie sportive. Malgré tout, un très petit nombre d’entre elles se retrouvent aux fonctions les plus influentes. Le concept du plafond de verre remplace petit à petit l’idée du mur absolu, devenu désuet pour illustrer le climat qui régnait à cette époque. La barrière ne laissant autrefois aucune chance aux femmes au sein du monde sportif s’est transformée avec le temps. Les femmes pouvaient maintenant entrevoir les possibilités d’accès à des positions plus élevées. Il existait désormais une chance pour elles de combler certains postes au sein des organisations sportives (Eagly & Carli, 2007). Cette barrière invisible (plafond de verre) difficile à surmonter a longtemps engendré de la

frustration chez les femmes désirant faire leur place dans le système sportif en bloquant les possibilités de carrière ainsi que les privilèges qui y sont reliés.

2.3.3 La bouteille

Le nombre de places pour atteindre les sommets en entrainement étant limité, la lutte pour se hisser au haut niveau des structures sportives est sans pitié. Les femmes ne sont pas bienvenues aux postes d’entraineur et de direction. À compétences égales avec leurs collègues masculins, elles sont souvent dans l’obligation de redoubler d’efforts afin de se tailler une place parmi les postes les plus élevés. Le peu d’opportunités offertes aux femmes est justifié par la sous-évaluation de leurs capacités à remplir les fonctions relatives aux postes d’influence (Norman, 2008).

Norman (2008) compare la situation des femmes aspirant à des postes élevés dans le sport à une bouteille. Selon les témoignages qu’elle a recueillis, elle a conclu qu’à mesure que les femmes progressent dans les associations sportives, le chemin se rétrécit et les possibilités qui s’offrent à elles sont de plus en plus restreintes. Ainsi, un nombre très peu élevé de femmes réussit à atteindre le sommet de la profession. À titre d’exemple, dans la NCAA, beaucoup de femmes sont employées comme assistantes entraineures, mais très peu d’entre elles sont à la tête d’un département des sports (Acosta & Carpenter, 2012, 2014). De plus, encore de nos jours, il existe de nombreux cas de litiges basés sur la discrimination de genre. Marshall, Demers & Sharp (2010) ajoutent que le fait d’augmenter le nombre de femmes dans le domaine du coaching ne signifie pas pour autant qu’elles seraient valorisées ou tout simplement qu’elles auraient accès facilement à des positions de pouvoir. Elles affirment que la théorie de la bouteille est imparfaite et qu’elle n’est pas appropriée pour expliquer le vécu des entraineures canadiennes. À leur avis, cette analogie n’est pas totalement appropriée pour comprendre ce que vivent les entraineures canadiennes car il n’y a tout simplement pas beaucoup d’entraineures à la base des structures sportives.

2.3.4 Le labyrinthe

Au début du 21ième siècle, de plus en plus de femmes sont visibles à des postes de haut niveau. Les femmes progressent dans la hiérarchie sportive et elles détiennent de plus en plus d’emplois qui étaient traditionnellement réservés aux hommes. Il existe de nouvelles voies à emprunter pour se rendre aux sommets et certains obstacles, bien qu’ils soient toujours présents, deviennent surmontables. Ces routes demeurent toutefois difficiles à découvrir et une minorité de femmes réussissent à les emprunter et à se rendre jusqu’au bout. La réticence de fournir l’occasion à une femme d’occuper un poste élevé relève maintenant du sexisme et est jugée et sanctionnée par la loi (Eagly & Carli, 2007). Même si le peu d’opportunités de progresser à des niveaux élites forcent toujours les entraineures à rester à un niveau peu élevé ou à abandonner avant d’avoir atteint leur plein potentiel, Eagly & Carli (2007) affirment que les théories

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précédentes (mur absolu, plafond de verre et bouteille) sont maintenant désuètes. Bien que les hommes aient longtemps monopolisé les positions de leadership et continuent d’être présents en plus grand nombre, ces théories ne conviennent plus pour expliquer la situation actuelle car les femmes ont maintenant davantage accès à ces postes. Eagly et Carli (2007) ont constaté que les mêmes obstacles continuent de limiter la progression, mais que quelques-unes ont réussi à se hisser au sommet de certaines organisations. Le labyrinthe serait donc plus approprié pour expliquer la situation actuelle. En effet, il représente plusieurs petits murs qui se dressent devant les femmes et qu’elles doivent contourner tout au long de leur cheminement vers le haut niveau. Pour se rendre au même point, les femmes ont à parcourir un chemin plus long et parsemé d’embuches que leurs homologues masculins n’ont pas à surmonter.

2.4 Les entraves à la progression des femmes dans le système