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Théories explicatives de la réussite/échec scolaire

Dans le document UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DAKAR (UCAD) (Page 57-60)

CHAPITRE 1 - ÉNONCÉ DU PROBLÈME

2. Repères théoriques

2.1. Théories explicatives de la réussite/échec scolaire

De nombreux chercheurs ont tenté d’apporter un début de réponse à l’explication du phénomène de « réussite/échec » scolaire aussi vieux que l’éducation. Aussi, les partisans de l’« idéologie du don » continuent-ils de présenter l’intelligence comme un patrimoine hérité.

Ils présentent la réussite scolaire comme étant le fait du patrimoine génétique (Crahay, 2000).

Des auteurs (Jensen, 1969 ; Hernstein, 1971 tous cités par Ouellet, 1987) donnaient un rôle prépondérant aux habiletés intellectuelles héritées génétiquement. Ainsi, il en résulte l’idée que rien ne sert de se lamenter et de vouloir des chances identiques pour chacun, dans la mesure où les inégalités sont naturelles (Debray-Ritzen, 1978 cité par Bastin & Roosen, 1992).

Suite aux travaux de Piaget et de Wallon, l’intelligence est désormais perçue comme quelque chose qui se construit. Pour eux, l’intelligence est avant tout l’exploration par le mouvement, les sensations (Piaget, 1993) dans l’expérimentation avec son environnement (social) et l’intériorisation par les schèmes d’action avant d’accéder aux représentations symboliques (Wallon, 1975 ; Wallon, 1968 cité par Bulle, 2000). Chez Piaget, le développement de la pensée enfantine repose sur le degré d’élaboration des structures cognitives générales.

Freud (1994) quant à lui perçoit le développement des structures de la personnalité de l’enfant à différents âges comme étant fonction des formes d’organisation et des orientations

de la libido dès la naissance. Chez d’autres psychologues, ces différences reposent plutôt sur le degré d’élaboration d’outils de pensée plus spécifiques.

En effet, en rejetant les interprétations naturalistes du développement intellectuel humain, Vygotsky (1933-1935, cité par Bulle, 2000) insiste sur l’existence de deux lignes de développement :

- la première concerne le développement des fonctions élémentaires d’origine biologique ;

- la seconde concerne de développement « des fonctions mentales supérieures » d’origine sociale.

Au plan psychologique, les recherches donnent à penser que le milieu joue un rôle déterminant dans la réussite scolaire. Progressivement, cette théorie des dons laisse place à des théories dites de la « reproduction ». Les travaux de Bourdieu et Passeron (1964, 1970), de Coleman et al. (1966), et de Crahay (1997) ont, quant à eux, mis plutôt en évidence la détermination des contraintes sociales, économiques (Boudon, 1973 ; Bisseret, 1974 cité par Bastin & Roosen, 1992) et des influences culturelles (Bernstein, 1975) dans les performances scolaires des apprenants. L’école transforme des différences et des inégalités diverses en échecs et réussites scolaires (Bourdieu, 1966 ; Bernstein, 1975). Par exemple, alors qu’à six ans certains enfants savent déjà lire et que d’autres en sont bien loin, on exige de tous qu’ils sachent lire le plus tôt possible.

Une étude de Hasley, Heath, et Ridge (1980) analysait le rôle de l’école dans la réduction des inégalités sociales au regard de son objectif méritocratique. Les auteurs se proposaient de répondre entre autres à la question suivante: quel est l’impact du type d’établissement fréquenté (privé/public/secondaire moderne) sur le niveau scolaire atteint par rapport aux autres variables influençant la réussite scolaire ?

Les résultats de cette étude indiquent que ni les aptitudes, ni le climat familial n’ont un grand impact sur la longueur des études poursuivies par un individu. Au contraire ce sont les origines sociales qui sont plus déterminantes (Hasley & al., 1980).

Selon d’autres chercheurs (Schiefelbein & Simmons, 1981) sur dix études sur treize effectuées dans certains pays en voie de développement, le statut économique s’est révélé un prédicateur positif du rendement scolaire.

Par exemple au Sénégal (Université Cheikh Anta Diop), Sall en 1996 a trouvé sur un échantillon de 935 étudiants, que la profession du père avait un impact positif sur les résultats intermédiaires des étudiants. Mais il s’agit, le plus souvent, de l’effet cumulatif de plusieurs facteurs (revenu, niveau de formation, possession de biens etc.), tous susceptibles d’être des

indicateurs du statut socio-économique (Barahinduka, 2006 ; Kantabaze, 2006, 2010) et d’agir sur d’autres facteurs tels que la disponibilité d’ouvrages et documents scolaires, la motivation, l’intérêt pour les études etc. (Dieng, 2007).

Ces études viennent-elles confirmer la recension d’écrits de Simmons et Alexander ? En effet Heyneman (1980) rapporte que parmi 19 études effectuées sur les pays en voie de développement, on retrouvait chaque fois l’influence du statut socio-économique des parents sur le rendement scolaire des élèves au début du secondaire et surtout au primaire.

Toutefois, il faut reconnaître que le statut socio-économique demeure une variable dont la relation directe avec le rendement scolaire pour les pays en voie de développement reste équivoque (Sall, 1996) dans la mesure où les variables internes à l’école s’avèrent souvent beaucoup plus significatives en terme d’effet sur le rendement (Heyneman, 1981).

Dans une étude effectuée en Ouganda, Heyneman (1976) a trouvé que contrairement à ce qui était observé dans les pays industrialisés, les variables reliées à l’origine socio-économique avaient moins d’influence sur les résultats scolaires des apprenants que celles reliées à l’école. En 1980, Postlethwaite, à partir d’une étude menée en Indonésie sur des élèves de 6è année du primaire, a découvert une relation positive en milieu urbain entre la situation matérielle et financière de la famille et les résultats scolaires. Cependant la même étude fait ressortir l’absence d’une telle relation en milieu rural.

Au total, les conditions économiques des parents déterminent en grande partie la scolarité des enfants (Godefroid, 1987). Quand les conditions de vie sont précaires elles peuvent réduire considérablement la motivation des élèves et leurs chances d’apprendre quelles que soient par ailleurs leurs capacités intellectuelles (UNESCO, 1998). Mais si au Sénégal la qualité des performances scolaires au cycle élémentaire répond aux normes occidentales (Coleman & al., 1966 ; Bourdieu & Passeron, 1985), c’est-à-dire l’échec ou la réussite scolaire dépend fortement de facteurs extrascolaires, alors le rôle de l’enseignant est peu important.

Si par contre le niveau des performances scolaires au cycle élémentaire répond mieux aux recherches comme celles conduites, d’une part, par Heyneman (1986) qui remettent en cause l’influence des facteurs sociaux et d’autre part, par Sall (1996), qui elles, remettent en cause partiellement cette influence, alors que les facteurs internes à l’école joueraient un rôle important. Dès lors l’intérêt de la recherche en Afrique doit s’intéresser aux caractéristiques des enseignants, des classes aux pratiques de classe.

Au demeurant la convergence, ainsi que la prégnance des conclusions de certaines de ces différentes études, ont semble-t-il contribué quelque peu à alimenter la croyance que

l’école et le personnel enseignant n’ont que très peu d’impact sur la réussite scolaire. Or, mentionnant que l’origine socioéconomique ne constitue pas une barrière infranchissable, Coleman a également noté que cette situation n’était pas irréversible et que l’école elle-même pouvait venir jouer un rôle déterminant (Coleman & al., 1966).

L’idée que l’institution scolaire à travers son organisation, ses programmes ses méthodes d’enseignement et ses modes d’évaluation n’est pas indemne de toute responsabilité devant les échecs d’enseignement apprentissages est défendue par beaucoup d’auteurs dont Crahay et Lafontaine (1986), Crahay (1997), Bressoux (1970, 1994, 2004), Duru-Bellat (2003). Auparavant, des recherches (Brophy & Good, 1986 ; Rosenshine & Stevens, 1986 ; Gauthier, Desbiens, Malo, Martineau, & Simard, 1997) ont confirmé que l’enseignant, par le biais des pratiques enseignantes (gestion de la classe, enseignement), affecte directement l’apprentissage des élèves.

Une synthèse publiée par Hattie (1992) établit que l’effet d’ampleur générale des facteurs reliés au milieu familial et social sur la performance scolaire est faible par rapport à celui des facteurs reliés à l’enseignant et à l’école. Existe-t-il des recherches scientifiques qui ont pris en compte cet aspect ? Qu’en disent-elles ?

Plus prés de nous, dans un contexte spécifique de pays en voie de développement comme le Sénégal, des travaux, dont ceux de Sall (1996), Gueye (1997) et de Ndiaye (2003), ont proposé une approche plus spécifique et élaborée en s'investissant plus profondément sur les préoccupations actuelles dont les réponses pourraient, nous semble-t-il, améliorer significativement l’échec scolaire. Dans cette perspective, plus récemment, Barahinduka (2006), Kantabaze (2006) et Dieng (2007) ont tenté d'appréhender et d'identifier les facteurs susceptibles de déterminer la réussite scolaire ou universitaire des apprenants dans un cadre plus englobant de l’environnement intra et extrascolaires.

2.2. Influence des facteurs scolaires sur les performances des apprenants : état de

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