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Les pressions vers une éducation de qualité

Dans le document UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DAKAR (UCAD) (Page 34-38)

CHAPITRE 1 - ÉNONCÉ DU PROBLÈME

3. Les pressions vers une éducation de qualité

En mars 1990, la Conférence Mondiale sur l'Éducation pour Tous, tenue à Jomtien en Thaïlande élaborait la Déclaration Mondiale sur l'Education pour Tous et un Cadre d'action pour répondre aux besoins éducatifs fondamentaux (UNICEF, PNUD, UNESCO, & BIRD, 1990). Elle attachait un intérêt particulier au rôle et à la place que l'éducation de base devait occuper dans tous les efforts de développement national. L'une de ses recommandations insiste avec une tonalité singulière sur la nécessité de prendre en compte l'amélioration de la

« qualité » comme un objectif majeur dans toute politique éducative. Selon elle,

[…] l’élargissement des possibilités de formation ne peut aboutir, en dernière analyse, au développement véritable de l’individu, ou la société, que si les formations offertes se traduisent par des apprentissages effectifs, c’est-à-dire par l’acquisition des connaissances, de la capacité de raisonnement, des savoir-faire et des valeurs utiles […] (UNICEF, PNUD, UNESCO, & BIRD, 1990 : 9).

Le Cadre d’action de Dakar considère la qualité comme une condition primordiale de la réalisation de l’Éducation pour tous (UNESCO, 2000 : 42) ; l’exigence de qualité (UNESCO, 2004) est placée « au cœur de l’éducation ». Le deuxième objectif de « Dakar » engage les nations à assurer un enseignement primaire « de qualité ». Dans son sixième objectif, il exprime la volonté ferme

d’améliorer sous tous ses aspects la qualité de l’éducation dans un souci d’excellence, de façon à obtenir pour tous des résultats d’apprentissage reconnus et quantifiables – notamment en ce qui concerne la lecture, l’écriture, le calcul et les compétences indispensables dans la vie courante.

(UNESCO, 2000 : 8).

L’importance d’une éducation de qualité est une priorité (UNESCO/BREDA, 2004, 2005a). Elle était d’ailleurs le thème lors de la table ronde ministérielle sur la qualité organisée à Paris en 2003 (UNESCO, 2004).

Il paraît donc indispensable de comprendre et d’identifier ce qui détermine la qualité de l’éducation pour tenter d’en dégager les facteurs propres à garantir un meilleur enseignement-apprentissage. Plusieurs approches de la qualité ont vu le jour et sont enracinées dans différentes traditions de la pensée sur l’éducation. Les approches humanistes, les théories behavioristes, les critiques sociologiques de l’éducation et les contestations des séquelles du colonialisme ont toutes contribué à enrichir le débat sur la qualité et ne manquent pas d’engendrer des visions différentes de la manière dont les objectifs de l’éducation devraient être considérés et atteints. La pratique courante (Bernard, 2004) veut qu’on rende compte de la qualité de l’atteinte des objectifs à travers les acquisitions des élèves mesurée par des tests nationaux ou internationaux.

Les grandes enquêtes internationales [Association Internationale des Acquis Scolaires (IEA), la Troisième Enquête Internationale sur les Mathématiques et les Sciences (TIMSS), le Programme Internationale de Recherche en Lecture Scolaire (PIRLS), le Programme International pour le Suivi de Acquis des élèves (PISA), le Consortium de l’Afrique Australe pour le Pilotage de la Qualité de l’Éducation (SACMEQ), le Laboratoire Latino-américain d’Evaluation de la Qualité de l’Education (LLECE), le Suivi Permanent de Acquis Scolaires (MLA) et le Programme d’Analyse des Systèmes Éducatifs de la CONFEMEN (PASEC)] ont chacune tenté d’identifier les facteurs prégnants dans la réussite scolaire.

Les principaux résultats rapportent que le milieu familial des élèves s’est révélé important. Les élèves issus des milieux socio-économiques les plus favorisés tendent à avoir de meilleures performances que ceux des familles plus pauvres. Les études sud-américaines et africaines ont aussi révélé des différences prononcées entre zones urbaines et rurales reflétant l’influence des revenus plus élevés et de meilleurs services éducatifs sur les résultats (UNESCO, 2004). Parmi les conclusions majeures de plus de 40 années de recherches conduites dans le cadre du programme de l’IEA, trois semblent revêtir une importance particulière pour les politiques visant à améliorer la qualité de l’éducation :

- la répartition des aptitudes dans la population scolaire,

- le temps consacré à l’étude de matières spécifiques, à l’école où chez soi, a une influence sur les performances surtout en mathématiques, en sciences et en langues,

- la disponibilité des manuels et les ressources scolaires.

Bien que le statut socio-économique influence le niveau des acquis dans tous les contextes, la disponibilité des manuels et les ressources scolaires pourrait compenser le désavantage socio-économique, particulièrement dans les contextes défavorisés (UNESCO, 2004). En outre, les travaux de comparaison de plusieurs évaluations internationales facilitent la compréhension des résultats d’apprentissage. Entre 1995 et 2001, ces études indiquent qu’en Afrique, les scores aux tests d’alphabétisme ont connu un recul dans un échantillon de pays et l’étude des résultats de ces tests internationaux (UNESCO, 2004) révèle que :

1- le statut socio-économique exerce une grande influence sur les acquis ;

2- le temps consacré en classe aux mathématiques et à la langue, a une forte incidence sur les performances des apprenants ;

3- le sexe de l’enseignant a un impact sur les performances des élèves dans beaucoup de pays à faible revenu ;

4- l’école (environnement scolaire, soutien aux enseignants, autonomie des écoles, fourniture de manuels) peut partiellement compenser le milieu socio-économique des élèves.

Pour UNESCO (2004), selon une forte tradition de recherche, les bonnes écoles se caractérisent généralement par :

(a) un fort leadership ;

(b) un environnement ordonné et sûr au niveau de la salle de classe, une attention centrée sur les compétences de base ;

(c) des attentes ambitieuses concernant les résultats des élèves et de fréquentes évaluations de leurs progrès ;

(d) le degré de maîtrise par les enseignants du programme scolaire, le niveau de leurs aptitudes verbales et leurs attentes concernant leurs élèves.

Les facteurs qu’évoquent ces résultats aux tests internationaux sont autant d’éléments qui contribuent à l’amélioration de la qualité des écoles. Le contexte social de l’école mérite une attention. En effet, les études de sociologie de l’éducation donnent à penser que les élèves et le milieu familial de même que le groupe de paires qui ont des idéaux proches de ceux que promeut leur école tendent à accéder à des niveaux plus élevés de compétences cognitives que les autres élèves qui peuvent tenter d’échapper à la contradiction en se rebellant (Bernstein, 1975).

Au Maroc, le projet MLA indique que le soutien et l’aide que l’enfant reçoit à la maison ont le plus d’impact sur le succès des élèves.

Tenter d’identifier les caractéristiques associées aux enseignants et aux classes qui sont les plus efficaces suppose au préalable que l’on admette (Sall, 1996) la thèse de la prédominance des facteurs internes sur le rendement scolaire des élèves par rapport aux facteurs externes (Heyneman, 1986) ; ou encore que l’enseignant dispose, par ce qu’il est, d’un pouvoir d’influence sur l’apprentissage des élèves, partant, sur leurs performances (Anderson, 2004). Mais qu’en est-il réellement de l’enseignant ?

Dans cette perspective, l’étude PASEC 1999 (CONFEMEN, 1999) analyse la variance des gains d’apprentissage pour les élèves de cinq pays (Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Madagascar et Sénégal). Elle montre que les facteurs scolaires9 (sur lesquels on peut agir) expliquent entre 61 et 87% des différences de scores tandis que l’environnement familial et socio-économique (qui échappe à l’école) des élèves ne génère que 13 à 39% de ces différences.

Treize des facteurs scolaires retenus et utilisés dans le modèle de régression ont un impact significatif sur les apprentissages ; être enseignante et avoir reçu une formation

9 Il s’agit: des outils pédagogiques (livres), de l’encadrement pédagogique (recrutement et formation des maîtres), l’organisation scolaire (taille des classes, organisation des classes à double flux et classes multigrades),

professionnelle a un impact positif sur les apprentissages en deuxième année, mais a un impact négatif en 5è année (CONFEMEN, 1999).

Par rapport aux résultats de recherches internationales sur la qualité des systèmes éducatifs, les performances scolaires dépendraient en partie des enseignants, des écoles et des élèves eux-mêmes (UNESCO, 2004 ; ADEA, 2006). Toutefois, nombreux sont les acteurs et les parents qui affirment de plus en plus que la faiblesse des résultats est liée au niveau des enseignants actuels (Monde de l’Éducation, novembre 2006). Cette opinion est-elle réelle où simplement postulée ? La responsabilité des maîtres paraît peu élucidée.

En dépit des résultats insuffisants en général, certains maîtres font de bons résultats dans de nombreuses écoles.

• Quels en sont les facteurs ?

• Les classes disposent-t-elles toutes d’un personnel d’efficacité équivalente ?

• Qui sont les maîtres qui réalisent des résultats satisfaisants ?

• Existe-t-il, dans les pays africains, en particulier dans le contexte sénégalais, des caractéristiques propres et communes à ces enseignants ?

• Comment les reconnaître, les identifier et les définir dans une perspective de capitalisation et de reproductibilité ?

• Quels enseignements peut-on en tirer pour entreprendre des stratégies d’amélioration et de renforcement des classes les moins efficaces ?

• A quels indicateurs devrait-on se référer pour garantir une meilleure offre éducative ?

Ces interrogations guident notre analyse qui se focalise sur les performances des élèves et sur ce qui, chez les maîtres, les élèves et les classes détermine leurs variations. La question problème, « Quels facteurs de l’environnement scolaire interne déterminent la variation des performances des élèves au Cours Moyen deuxième année ?», au centre de cette recherche, il y a notre volonté de contribuer à la connaissance des facteurs caractéristiques des classes les plus performantes.

Les progrès de la scolarisation, dans un contexte de pays en voie de développement caractérisé par (a) des contraintes économiques, (b) des indicateurs qualitatifs d’offres éducatives faibles et par (c) une pratique pédagogique dominée par l’enseignement dit traditionnel (Solaux & Suchaut, 2002), exigent que l’on s’intéresse à l’agent d’éducation ; car selon ADEA (2006 : 27) « l’amélioration de la qualité dépend des enseignants et des interactions en classe » ou encore de l’efficacité des enseignants (Anderson, 1992, 2004).

Certaines institutions (UNESCO, 2000, 2004 ; UNESCO/ADEA, 2003) ont tenté de comprendre le phénomène. Des recherches se sont également intéressées à la réussite scolaire.

Elles semblent indiquer que les différences de résultats des élèves tiennent fortement aux facteurs proprement scolaires en général (Verspoor, 2005 ; Jarousse & Mingat, 1992 ; Felouzis, 1997) et aux enseignants en particulier (Altet et al., 1996 ; Anderson, 2004 ; Barahinduka, 2006 ; Bressoux, 1990, 1994a, 1995, 1996, 2000 ; Gauthier & Dembélé, 2004 ; Guèye, 1997 ; Heyneman, 1986 ; Kantabaze, 2006, 2010 ; Mingat, 1996 ; Ndiaye B.D., 2003 ; Sané, 2001 ; Sall & al., 2009).

Compte tenu des tendances dégagées par les conclusions de ces travaux sur le thème du rendement scolaire des élèves, le défi qui se pose à ceux qui veulent mettre en place des mesures visant à améliorer le niveau des classes les moins performantes, consiste à identifier les facteurs intra scolaires qui sont les plus prégnants sur les résultats scolaires des élèves.

Leur exploitation pourra permettre de concevoir des activités spécifiques adaptées (Ndidde, 2006).

4. Retour sur la justification du thème de la recherche

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