Suture de Gely.
— On
prend unfilarmé
de deuxaiguilles, que l’on enfonce parallèlement à la plaie.
On
les croise pour les enfoncer ensyite dans les trous de sortie.En
serrant fortementchaque point de suture, les lèvres de la plaie se replient en de-dans, et la séreuse estainsi affrontée à elle-même.M. Sédillot l’apprécieendisant qu’elle estd’une ap-plication longue et difficile, et qu’elle doit être ré-servée pour les plaies longitudinales et peu éten-dues. J’ajoute que c’est une suture perdue
, et que
—
49—
l'avantage d’affronter très-exactement la séreuse à elle-même est balancé par le risque de rétrécir le calibrede l’intestin. Le véritable élogequi lui con-vient, c’est de dire qu’elle est très-ingénieuse.
Sutures de Reybard.
—
Reybard étaitun
cher-cheur, et ses efforts ne restaient pas toujours in-fructueux. Son esprit inventif s’est largementdonné
carrière au sujet des plaies de l’intestin, et,comme
nous le verronsplus loin, ila étendu aussi ses recherchesau traitement des suites de ces bles-sures, c’est-à-dire de l’anus accidentel.Il proposa d’abord
une
suture dans laquelle une plaque de bois léger était placée dansl'intestin sui-vantla directionde la blessure.Deux
filstraversant laplaque près dechacune de ses extrémités et per-çant l’intestin dededans en dehors, affrontaient les lèvres de la plaie. Puis cesdeux
fils, réunisenun
seul, traversaient la paroi abdominale dans le voi-sinage de l’ouverture et étaient maintenus au de-hors. C’était là,
comme
on le voit,une
suture fixe.Plus tard, Reybard
abandonna
ce procédé pour porter sesessaissurune
sutureperdue:un
fildouble, portantun
petit rouleau de linge à une de ses ex-trémités, était conduit de dedans au dehors de l’in-testin. Le rouleaude lingefaisait l’office denœud
;puis la suture
du
pelletier ou en surjet était prati-quée. Le dernier point était fait avecun
seul fil,
qu’on nouait ensuite avec l’autre.
Enfin cette sutureelle-même fut encore modifiée
-
50-par son auteur de la manière suivante : plus de rouleau de linge
; au point de départ le fil est ar-rêté, en serrant,
comme
dans une ligature,une
très -faible partie de l’une des lèvres de la plaie.
La
suture est toujours celledu
pelletier; seulementles points sont très-rapprochés les uns des autres et placés très-près des bords de ladivision.
En
ser-rantle fil eten aidantun
peu avec l’extrémitéd’une pince àlig’ature, les bords de la plaie s’infléchissentdu
côté de la cavité, et la séreuse est étroitement accolée à elle-même.Du
huitième au quinzièmejour, les fils tombent dans l’intestin.
Reybard accordait tant deconfianceàcettesuture en surjet, qu’il la croyait capable de réussir,
même
dans les sections complètes
du
conduitintestinal.Je n’en dirai que ceci : c’est qu’ellen’échappe p^s au danger des suturesperdues.
Suture de
M.
Lembert.— Une
suture inventée par M. Lembert pour les sections complètes de l’intes-tin peut aussi s’appliquer avantageusementaux
divisionspartielles. Les points de suture se font par autant de fils séparés. Le fil, introduit à quelques millimètres d’une des lèvres de la plaie
, passe en dehors de la muqueuse, et ressort à 2 millimètres
du
borddu même
côté. Surl’autre lèvre, on opère demême,
de sorte qu’en nouant, on fronceune par-tie de la séreuse du voisinage de la plaie et onl’af-fronte étroitement àelle-même.
Pour
cette suture, il serait peut-être encore plus—
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dangereux que pour une autre de l’abandonner dans l’abdomen, car il n’est pas sûr que les fils, qui n’ont pas traversé toute l'épaisseur de la paroi, ne tomberaient pasdans lepéritoine.Mais,si on fixe les fils audehors, cette suture peut devenir excellente, en
même
temps qu’elle estd’une exécution facile.Suturespour les sections totales.
—
Autrefoisonre-gardait ces blessures
comme
au-dessus des res-sources de l’art, et l’on ne tentaitaucun
effortpour sauverle patient.Les quatre maîtres les premiers osèrent
prati-quer des sutures sur l’intestin. Ils affrontaient sim-plement les lèvres de la plaie, en les maintenanten contact au
moyen
d’une trachée de veau glisséedans l’intestin. Duverger, Sabatier et d’autres va-rièrent l’animal et sa trachée, lui substituèrent
même un
tube de sureau,une
carte àjouer, etc.En-core n’est-il pas bien sûr que ces sutures fussent pratiquéespourles sections complètes. Elles étaient plutôt réservéespour les partielles; etdans les
au-tres, on avait la prudence d’établir
un
anus contre nature, quelque redoutable que parût alors cette infirmité.Ramdhor
innovaune
autreméthode, celle de l’in-vagination. Il fit entrerpurement
etsimplement lebout supérieur dans l’inférieur et l’y fixa. Le
ma-lade guérit. Ce fut, dit-on, le seul cas de guérison due à cettesuture ; mais il n’en eutpas moins
une
portée considérable, carde nombreuses recherches furent dirigées danscette voie.
-
52-Les travaux de Bichat, qui vinrent bientôt prou-ver que les
membranes muqueuses
ne contractent point d’adhérences entre elles ni avecles séreuses, que l’inflammation adhésive ne s’effectue en gé-néral qu'entre des surfaces celluleuses, modifièrent Je procédé sans changer la méthode.Ce fut Jobert qui utilisa le premier ces données nouvelles de physiologie pathologique. Il invagina
lebout supérieurdans l’inférieur, après avoir préa-lablement repliéce dernier en dedans, de telle sorte
que la séreuse de l’un se trouve en contact avec la séreuse de l’autre.
Outre la grande difficulté de l’exécution, sans parler de celle de distinguer le bout supérieur de l’inférieur, cette suture nécessite encore la section
du
mésentère qui estun
dangerd’hémorrhagie.En
outre, en admettant que les fils ne se desserreront pas, et que toutes les chances favorables se réuni-ront pour
amener
laguérison, il restera dans l’in-testinun
bourrelet qui donnera lieu àun
rétrécis-sement plus ou moins inoffensif.
Demaux
inventa trois viroles ingénieuses, assu-jetties solidement par un fil, et confia à l’intestinlui-mêmele soin de s’en débarrasser.
«Qui oserait, dit Velpeau (I), abandonner ainsi l’intestin dans leventre? Qui peut répondreque ces
anneaux
ne perforeront pas le conduit? »Baudens, suivant la
même
série d’idées, préco-nisaun
anneau engomme
élastique, qui s’applique sur une virole creusée pour le recevoir.(1) Médeciue opératoire.
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53—
Amussat
se sert d’un bouchon qui présenteune
gouttière à sa partie moyenne.
On
lie lesdeux
bouts de l’intestin sur cette gouttière; on obtientun
sillon que la séreuse de chaque boutvientcom-bler, en se mettant ainsi en contact avec
elle-même.
Toutes ces sutures, ayant pour but de recoudre
la totalité de la circonférence de l’intestin, n’ont été bien expérimentées par leurs auteurs que sur des animaux. Sur l’homme, la preuve complète de leur haute valeur reste encore à faire.
On
ne peut pas conclure de la réussite chez l’animal à la réus-site chezl’homme;
les conditions d’irritabilité des tissus et de plasticité ne sont pas lesmêmes,
et sont tout à l’avantage de l’animal.De
plus,même
chez les animaux, ces sutures ne réussissent pas toujours. Sur 15 chiens opérés par le procédé de Jobert
, 7 arrivèrent à
une
guérison apparente,
mais 3 succombèrent avant
un
mois écoulé. Les 5 autres restèrent sujets à des vomissements plus ou moins fréquents, et l’autopsie fit voir le bout supérieur considérablement dilaté au-dessus de la valvule, avec le bout inférieur considérablement rétréci au-dessous.Les expériences physiologiques elles-mêmes, sur lesquelles on s’appuie pour établir le principe de
la cicatrisation certaine et régulière, sont loin de pouvoirrésisterà
un
contrôle sévère.Ainsi, Travers a faitune
fois, avec succès, cette tentative cu-rieuse : il a étranglé, chezun
chien, tout le calibre1870.
—
Goyard. 7-
54—
du
conduit alimentaire, et il a vu que, pendant quela cloison formée par cet étranglement se
gan-grène, se détache et est entraînéedu
côtédu
rec-tum
, les portions accoléesdu
péritoine viscéral se soudent fortement entre elles et maintiennent l’intégritédu
canal. Ce serait très-concluant si c’était absolu; mais l’expérience ne réussit pas toujours. Elle a échouédeux
fois entre les mains de Velpeau.Ce
grand
chirurgien appréciaitainsi cessortesde sutures (1) :«La
prudence permet-elle de s’en re-mettre à de pareils moyens,moyens
quiamène-raient nécessairement la mort , s’ils venaient à
manquer
leur effet? Est-il permis de risquer ainsi la vie deshommes,
quand, en établissantun
anus contre nature, on a lapresquecertitude de pouvoirle guérir plus tard. »
C’est là, en effet, le