rendre
un
compte assezexact de la sympathie pro-fonde qui relie tous les ressorts de l’organisme, etqui devient plus délicate et plus obscure encore dans l’étatde maladie; possédons-nous, en
un
mot, tous les éléments nécessaires pour diriger métho-diquement nos efforts, et avoir seulement la certi-tude de ne pas nuire?Dans les phlgmasies abdominales suites de bles-sures, aucontraire, le malade est atteint au milieu d’une santé parfaite, etle plus souvent
même
dansles conditions d’une vigueur physique qui, loin d’êtreabattueparlafatigue,n’afaitque s’accroître; de plus, lacauseest simple : c’est
un
traumatisme,et, cequi n’estpas moinsprécieux, nous la connais-sons.
Nous
savons quelle conduite tenir à l’égard—
40—
de cette cause, et nous ne risquons pas de faire fausse route dans le traitement : il faut
du
repos, de bonnesconditions hygiéniques, et des antiphlo-gistiques.Blessure de l'intestin.
—
L’intestin peut avoir été contus, coupé ou déchiré, ou avoir subi une perte de substance. Si la contusion n’est que légère, on pourra la négliger ; si elle est assez profonde pourfaire craindre la mortification
du
tissu, il faudrase conduirecomme
si la solution de continuité était déjà produite.Quand
il y a plaie longitudinale ou transversale, ou qu’une partie de la paroi a été en-levée, on devra recourir àl’un des procédés opéra-toires queje discuterai plus loin.Pour
appliquer les ressources de la science à laguérison d’une lésion intestinale, il faut d’abord bien connaître cette lésion.
Il est facile de s’en rendre compte lorsque l’in-testin blessé afait hernie au devant de l’abdomen.
Mais s’il est resté dans la cavité, on est obligé de soumettre la plaie à une exploration qui n’est pas toujours sans danger. Quelques chirurgiens veu-lent qu’on s’abstienne,et que,
quand
la lésion n’est pas visible au dehors, on courre lachance des acci-dentsquipourrontse déclarer, plutôtqued’en pro-voquer soi-mêmepardesmanœuvres
imprudentes.M. Maisonneuve (1), en particulier, qui repousse absolument toute exploration d’une blessure
quel-(1) Communicationorale.
-
41—
conque, étendsa proscription avecla
même
rigueuraux
plaiespénétrantes de l’abdomen. Tout lemonde
apprécie sans doute les raisons qui inspirent cette pratique; maislaquestion est desavoir sila
somme
des avantages ne dépasse pas celle des inconvé-nients; d’autant plus qu’un chirurgien prudent qui sait arrêter à temps ses recherches, mettra presque toujours les bonnes chances de son côté.
On
explore avec le doigt,doucement
etlente-ment.
La
lésiondel’intestin sereconnaîtà plusieurs signes : les matières intestinales salissent le doigt, qui rapporte au moins leurodeur. Des gaz peuvent s’échapper. Puisun
signedonné
par Baudens(1) :« Ayant remarqué, dit-il, que les bouts de
l’intes-tin qui viennentd’être déchirés par une
arme
vul-nérante,secontractentd'unemanière spasmodique,qu’ils deviennent très-durs et
comme
cartilagi-neux, demous
qu’ils étaient, j’ai maintes fois re-connu cet état en plongeant le doigt dans l’abdo-men. » Ilcompare
la rigiditédu
bout de l’intestindans ce cas, à la dureté qu’offrent les disques de la trachée-artère, et il considère ce signe
comme
ca-ractéristique de lalésion intestinale.Lorsque l’existence de la lésion est bien consta-tée, il ne faut pas hésiter à agrandir la plaie exté-rieure avec le bistouri. L’intestin est ensuite attiré
au dehors, exploré avec plus de soins, et dans une plus grande étendue. Selon les indications, on
(1) Clinique des plaiesd’armes àfeu, p.326.
ferme alors le canal par
une
suture, ou bien onétablit
un
anus accidentel.Cette pratique n’est pas acceptée par tous les chirurgiens. Autrefois, surtout, elle a trouvé des détracteurs déclarés. Les faits qui prouvent que des anses intestinales perforées ont
pu
séjourner dans la cavité abdominale, sans donner lieu à un épanchement de matières stercorales, ont semblé parfois donner raison à ceux qui repoussentl’in-tervention chirurgicale.Dupuytren, danssesLeçons
orales, dit, enparlant desplaies d’armes à feu dans
larégion abdominale : « Il est digne de remarque, que les ruptures
du
canal intestinal ne sont pas toujours suivies d’épanchement de matières sterco-rales dans le ventre, et que souvent les maladesg*uérissent parle faitd’adhérences qui existent
en-tre les parties déchirées et les parties voisines. » Et en effet,
une
expérience prouve bien nettement la difficulté que les matières stercorales éprouvent àsortirdescanaux qui les contiennent : sidansun
cas de plaie d’estomac, on fait ingérer dans cet
or-gane
déjà chargé d’aliments,une
dosed’émétique, ceux-ci, au lieu de sortir par la plaie, sont rejetés par les vomissements.Larreyqui aété à
même
sur, leschamps
deba-taille, d’observer de nombreuses plaiesde cette na-ture, a été vivement frappé de cet avantage. Aussi danssa Clinique chirurgicale, en pieux admirateur de la nature, avec la conviction que donne une
-
43—
longue expérience, il
condamne
le chirurgien quj toucherait àune
plaie intéressant l’intestin.On
pourrait sans doute, avecune
statistique, réfuter ces préceptes timides où la craintedu
dan-ger de l’opération tient certainement plus de place que la confiance dans les ressources de la nature.Il faudrait réunir des faits, les uns où l’expectative aurait été gardée, les autres
où
le chirurgien se-rait intervenu, et comparer les résultats. Maiscomme
ce travail n’a pas été fait, il faut chercher d’autres arguments. Aujourd’hui si l’on est plus hardi, ce n’est,pas que l’on soit moins sage, maisc’est que l’on possède des
moyens
de guérison plus sûrs et plus complets.En
effet, Boyer lui-mêmes’exprimeainsi:«Les.opérationspratiquéesàl’égard de ces blessures, ont moins pour objet de procurer
la réunion immédiate des lèvres de la plaie entre
elles, que de prévenir l'épanchement des matières contenues dans l’intestin. » Cette assertion
montre
le peu de confiance qu’on avait dans les procédés employés, puisqu’onneleurdemandait quede parer aux accidents les plus pressants. Dès lors, ne
valait-il pas
mieux
laisser toute libertéà lanature qui sou-vent sechargeait, àelleseule,même
dela guérison?Depuis cette époque , les ressources de la chi-rurgie se sont accrues; on est en droit d’espérer aujourd’hui, ou bien que l’on obtiendra la cicatri-sation de l’intestin
du
premiercoup, oubien qu’on établira l’intégritédu
conduit après que la piaie aura subi diverses modifications.Si donc on peut— U —
en quelque sorte imposer la guérison
aux
foreesorganiques par la direction intelligente qu’on leur imprime, pourquoi placer en elles
, une espérance exclusive qui est déçue trop souvent, et qui doit être gardée
comme
la ressource dernière d’une im-puissance absolue?Aussi m’associerai-je pleinement à l’opinion
qu’un auteur récent (1)exprime à ce sujet: «
A
l’é-gard del’intestin blessé, dit-il, qui est resté dansla cavité abdominale, la plupart deschirurgiens
mo-dernes
recommandent
d’abandonner la guérison à la nature; ils s’en tiennent à ce qued’on appellelesmoyens
généraux, leur faisant les honneurs du succès, si le blessé guérit, et s’il succombe, consi-dérant la blessurecomme
au-dessus des ressources de l’art. Quelques observations heureuses excu-sentcettemanièredevoirsansla justifier;un grand nombre
de cas funestes lacondamnent.»Traitement.
—
Laissantde côté lesmoyens
pallia-tifsappliqués localement, l’hygiènedu
blessé et les préceptes de médication interne, jeme
contenterai de dire qu’il estbon d’administrer l’opium en vue de prévenir l’épanchement des matières intesti-nales, et je m’attacherai spécialement à l’examen des diverses opérations qui ont été proposées, etde leurs indications.Les sutures pour fermer les plaies intestinales
(1) Legouest, Traité dechirurgied’armée, p. 529.
—
45—
sont nombreuses et variées. Elles ont toutes plus
ou
moins pour objet cle maintenir la séreuse en contact avec elle-même, parce que l'expérience a prouvé que l’irritation locale provoque, entre les portions accolées de lamembrane,
des adhérences précieuses pour la guérison.De
plus, les fils donton
s’est servi coupent peu à peu les tissus et tom-bent dans la cavitédu
canal intestinal plutôt que dans le péritoine.Je nedécrirai pas en détail le
manuel
opératoire de chacunedecesopérations. Je renvoie, pour celte étude, aux livres classiques et spéciaux. Jeme
con-tenterai de passer rapidement en revue les princi-pales d’entre elles.On
peut les ranger endeux
catégories, suivantle degré de la blessure qu’elles ont pour but de fermer. Les unes, en effet, s’adressent plus parti-culièrement
aux
sections partielles de l’intestin, les autresaux
sections totales.Sutures pour les sections partielles.
—
Si l’intestina subi
une
simple piqûre ou bienune
section qui ne dépasse pas 3 ou 4 millimètres, ordinairementla
muqueuse
fait hernie à travers le petit orificeet le bouche exactement.Dans
ce cas, on peut donc, àla rigueur,abandonner
l’anse intestinale dans lacavité sansplus de précautions.
Sil’on n’apasassez deconfiance dans ce
bouchon muqueux,
ou quand, pour une raison ou pour une autre, on a lieu de craindre qu’il ne remplisse pas1870,
—
Goyard. 6—
46—
suffisamment son office, on ferme laplaie avec
un
fil.
On
placeun
simple point de suture entrecoupée,soit que l’on fasse traverser au fil toutes les tuni-ques de l’intestin, soit qu’on l’insinue en dehors de la
muqueuse,
de manière à refouler celle-cidans le canal et à affronter plus étroitement, par la constriction
du
fil, les lèvres de la plaie.On
peut encore procéder autrement : lier lepourtour de la petite plaie avec
un
fil,comme
onferait pour le bout d’une artère coupée. Dans les
deux cas, l'anse intestinale ainsi formée peut être,
sansdang*er, abandonnée dans leventre.
Si la blessure faite à l’intestin dépasse l’étendue de3 ou 4 millimètres, ou s’il yaune perte de sub-stance équivalente, il n’estjamais prudentde s’ab-stenir de fermer l’ouverture.
On
peut choisir, dans ce cas, entre les procédés suivants :Suture du 'pelletier.
—
Cette suture s’exécutecomme
pourune
plaie cutanée. Préconisée des pre-mières, puis négligée, peut-être à cause desasim-plicitéetde sa vulgarité,ellaaétéremiseen
honneur
par Reybard,comme
nous le verrons plus loin.Sutureà anses de Ledran.
— On
passe des filssé-parés d’une lèvre à l’autre de la plaie.
On
a, de cette façon, deux faisceaux.En
les tordant, on rap-proche et on affronte les bords de la solution de continuité.Lesfils, ainsi réunisen un seulfaisceau,—
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sont fixés audehors et maintiennentlalésion intes-tinaleen rapport avec l’ouverture de la paroi abdo-minale.
Cette suture est
une
des plus simples.M.
Sédillot dit que c’est enmême
temps la plus employée.J’avoue, quant à moi, que je ne m'étais pas fait,
jusqu’à ce jour, cette opinion sur elle. Mais, quoi
qu’il en soit, sielle n’est pas très-souvent utilisée, elle mérite peut-être de l’être plus que d’autres