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Test des peptides dérivés des motifs d’interaction sur la croissance de P falciparum

Les expériences sont réalisées en plaque 96 puits, avec une culture de parasites à un hématocrite de 1% et une parasitémie initiale de 0,5%. Les peptides sont ajoutés à différentes concentrations (concentrations finales de 30, 60 et 120µM) dans 250µl de RPMI- AGH et incubés 48h pour permettre aux parasites d’effectuer un cycle. Ensuite 50µl de SYBR Green I 1X (servant à marquer l’ADN des parasites) dilués dans un tampon (contenant 20mM Tris-HCl pH8.8, 138mM NaCl (Invitrogen)), sont ajoutés sur les cultures et celles-ci restent à l’obscurité 30min à température ambiante. Le paraformaldéhyde est ajouté, avec une concentration finale de 1%, afin de fixer les érythrocytes puis le tout est conservé à l’obscurité à 4°C.

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La croissance parasitaire est mesurée par cytométrie en flux sur un FACSCalibur (Becton-Dickinson). Les érythrocytes infectés ou non sont ciblés selon leurs signaux FSC (foward scatter) et SSC (side scatter). L’analyse de la fluorescence (fluorescence verte, filtre FL1) est réalisée en utilisant le logiciel CellQuest (FACScan ; BD Biosciences) sur un total de 100 000 événements acquis. La fluorescence est observée selon le protocole décrit par Izumiyama, sur un dot-plot à deux paramètres (FL1-SSC) (Izumiyama et al. 2009). La fluorescence des érythrocytes sains est ajustée pour être entre 100 et 101. Les résultats sont présentés en pourcentage de fluorescence des érythrocytes totaux.

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Le parasite Plasmodium falciparum possède un cycle de développement complexe avec 2 hôtes : l’anophèle, où il effectue son cycle sexué et l’homme, où il effectue ses cycles asexués. Durant ces différentes phases, le parasite subit de nombreuses étapes de développement, lui permettant ainsi de se multiplier, de s’adapter et d’évoluer très rapidement. Ces étapes peuvent contribuer au développement rapide de résistances aux traitements antipaludiques existants. Il est donc important de continuer les recherches sur la biologie et le fonctionnement de ce parasite.

Toutes les étapes du développement de P. falciparum nécessitent la mise en place d’une régulation coordonnée et fine. Un des axes majeurs de recherches, ces dernières années, concerne les phénomènes de phosphorylation/déphosphorylation dans la régulation cellulaire et plus particulièrement au niveau des modifications post-traductionnelles potentiellement impliquées dans la division (A Bloecher and Tatchell 2000; Hsu et al. 2000). Des études récentes sur le kinome de Plasmodium ont pu mettre en évidence que certaines kinases sont essentielles au développement et à la survie du parasite (Doerig et al. 2010; Guttery et al. 2014; Tewari et al. 2010). Face à ces kinases, Plasmodium possède des phosphatases, connues pour être responsables des processus de déphosphorylation, qui participent à la régulation fonctionnelle des protéines.

Les études menées au laboratoire portent sur la régulation des phosphatases de type 1 et 2A du parasite puisque les études réalisées ont montré que ces enzymes sont cruciales pour son développement. En effet, PfPP1 est essentielle principalement dans le cycle érythrocytaire du parasite et au niveau de la libération des mérozoïtes infectieux (Blisnick et al. 2006; Kumar et al. 2002). Nos recherches nous ont permis de caractériser trois régulateurs : la protéine Leucine-Rich-Repeat (PfLRR1), l’Inhibiteur 3 (PfI3) et l’Inhibiteur 2 (PfI2) chez le parasite. Dans ce contexte, nous avons montré que PfLRR1 et PfI2 inhibent l’activité de la phosphatase PfPP1 alors que PfI3 l’active. Des études de génétique inverse suggèrent que ces régulateurs sont aussi essentiels que la PfPP1c elle-même (Daher et al. 2006b; Fréville et al. 2012, 2013).

Au cours de ce travail de thèse, nous avons pu montrer l’importance d’un motif d’interaction de PfI2 dans la relation structure/fonction de ce régulateur. Nous avons également étudié eIF2β (eukaryotic initiation factor type 2 subunit β), un facteur de l’initiation de la traduction, comme un régulateur potentiel de PfPP1.

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I. L’inhibiteur 2 de Plasmodium falciparum

A. Rôle des motifs d’interaction dans la formation du complexe

PfI2/PfPP1

Dans une première étude, nous avons montré que l’inhibiteur 2 est exprimé par le parasite, qu’il présente une localisation nucléocytoplasmique, et qu’il semble être essentiel pour le développement érythrocytaire de P. falciparum. La protéine PfI2, composée de 144 acides aminés (205 chez l’Homme), est la plus petite avec une séquence plus courte au niveau N-terminal par rapport à ses homologues I2. Ces derniers possèdent trois motifs d’interaction à PP1 : KGILK, RVxF et HYNE alors que seulement 2 motifs ont été identifiés dans la séquence de PfI2 : RVxF et HYNE. Le motif KGILK a été identifié dans la séquence de différents I2, y compris celle de l’Homme, au niveau de la partie N-terminale et semble jouer un rôle important dans la régulation de l’activité de PP1 (Huang et al. 1999; Park and DePaoli-Roach 1994). En effet, l’absence de ce motif chez certains I2 (levure, rat) montre une diminution de la fonction inhibitrice sur la phosphatase (Osawa et al. 1996; Tung, Wang, and Chan 1995). Le second motif, ayant pour séquence consensus [R/K]-X-[V/I]-X-[W/F], est décrit comme le motif principal d’interaction à PP1. En effet, sa mutation ou sa délétion perturbe l’interaction voire l’abolit complètement. Ce motif, plus connu sous le nom RVxF, est présent chez de nombreux régulateurs de PP1. Le dernier HYNE est situé dans la partie C- terminale de la protéine. Malgré l’absence dans la partie N-terminale du motif KGILK, PfI2 interagit avec PfPP1 via ses motifs RVxF et HYNE. La mutation ou la délétion de l’un des deux motifs diminue l’interaction. Dans le but de mieux définir cette interaction ainsi que les motifs impliqués, nous avons utilisé la spectroscopie RMN (Résonnance Magnétique Nucléaire) combinée à des approches biochimiques et biologiques.

Grâce aux expériences de RMN, plusieurs régions d’interaction entre PfPP1 et PfI2 ont été définies plus précisément : la première contenant le motif RVxF, la deuxième au niveau des résidus 70-80 et la dernière au niveau des acides aminés 95-116. Au niveau de cette dernière région, le motif FKEKRK (correspondant au motif FxxR/KxR/K), initialement décrit dans les protéines apoptotiques Bcl, a été identifié (Ayllón et al. 2002). Il est également présent dans de nombreux régulateurs de PP1. Nous avons montré que le motif FxxR/KxR/K est impliqué dans l’interaction avec PfPP1. Grâce au BIACORE et aux tests de type ELISA, nous avons mis en évidence que la mutation de ce motif induit une diminution d’interaction avec la phosphatase PP1.

Ces résultats confirment les observations faites précédemment, en démontrant la présence de plusieurs sites d’interaction à PfPP1 sur la séquence de PfI2. Différentes approches (ELISA, Ovocytes de Xénope, Co-IP) ont mis en évidence une perte d’interaction avec PfPP1 lorsque PfI2 est mutée sur les motifs RVxF et FxxR/KxR/K. Ces observations suggèrent que le motif RVxF est aussi important que le motif FxxR/KxR/K dans l’interaction. De plus, les motifs FxxR/KxR/K et HYNE sont proches l’un de l’autre, nous ne pouvons pas exclure la possibilité que la mutation du premier affecte la structure du second, empêchant ainsi la formation et la stabilisation du complexe. Au vu des résultats obtenus durant ces études, nous supposons que les motifs RVxF et FxxR/KxR/K sont des sites d’interaction

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« primaire » alors que le motif HYNE est un site « secondaire ». Afin de définir l’importance de chaque motif dans la formation du complexe PfI2/PfPP1, il faudrait déterminer les constantes d’association/dissociation entre PfPP1 et les différentes versions de PfI2 (sauvage, muté sur un seul motif ou sur deux motifs) grâce au BIACORE ou à l’ITC (Isothermal Titration Calorimetry). De plus, l’analyse du spectre I2/PP1 de P. falciparum par RMN met en évidence un autre site d’interaction au niveau des résidus 70-80. Afin de valider la possibilité d’un 2ème site d’interaction secondaire, des expériences supplémentaires devront être effectuées.

Les résultats que nous avons obtenus avec PfI2 sont différents de ceux obtenus avec PfI3 alors que ces deux protéines, thermostables et non structurées, appartiennent à la même famille des inhibiteurs de PP1. En effet, nous avons démontré que la mutation du motif RVxF de PfI3 abolit l’interaction, supposant ainsi un unique site d’interaction à PfPP1.

B. Importance des motifs d’interaction dans la fonction régulatrice