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Termes, notions et concepts

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1.16 - Modèles de données pour les ressources terminologiques et ontologiques

1.16.1 Termes, notions et concepts

Clarifier ce que couvrent les mots termes, notions et concepts est une des composantes de notre recherche (Biébow, 2004). Si le fait que plusieurs disciplines s’appuient sur un vocabulaire « commun » favorise les rapprochements dans un premier temps, très vite, les divergences conceptuelles, liées aux objectifs et à l’histoire de chacune, rendent complexes les échanges et multiplient les malentendus. Les analyses disciplinaires

terminologiques et ontologiques

présentées ci-dessous mettent l’accent sur les mutations récentes sur la définition des concepts et des termes. Ces mutations reflètent une convergence de vue et sont, en particulier, le fruit des réflexions collectives de TIA.

1.16.1.1 Concepts et réseaux sémantiques

En intelligence artificielle, seule est utilisée la notion de concept, objet formel relevant de la représentation des connaissances. Savoir ce que représente un concept a été l’objet de débats récurrents parmi les chercheurs travaillant sur les réseaux sémantiques et les formalismes associés (Sowa, 1991). Cette question revient régulièrement parce qu’elle est rapidement évacuée par une vision informatique qui confond la définition de ce que l’on veut représenter avec la solution technique retenue. Par exemple, le concept est souvent assimilé au prédicat de la logique du premier ordre. Aussi, plutôt que de définir ce qu’est un concept, il est plus simple de préciser comment ils sont représentés dans différents formalismes (Gómez-Pérez et al., 2004). Les concepts correspondent à des classes d’objets abstraits ou concrets, que l’on cherche à définir en intension, par des caractéristiques qui sont le plus souvent leurs relations avec d’autres classes, et rarement en extension, par la liste de leurs réalisations ou instances. Elles se définissent donc par leur place au sein d’une hiérarchie et par les relations formelles posées entre elles. Certains formalismes comme les logiques de description différencient des concepts primitifs (donnés par des conditions nécessaires) de concepts définis (par des conditions nécessaires et suffisantes).

Les recherches sur les ontologies issues d’une tradition plus philosophique s’inquiètent plus du statut du concept indépendamment de sa représentation, et cherchent à aider l’analyste à déterminer ce que sont les concepts du domaine et comment ils sont reliés entre eux. Ainsi les travaux de N. Guarino (méthode OntoClean) fournissent des propriétés que doivent vérifier les concepts et les relations. Ces propriétés sont le reflet d’une vision des concepts comme renvoyant à des classes universelles d’objets partageant au moins une propriété caractéristique et ayant une unité, ces classes étant disjointes entre elles et stables au cours du temps. Les travaux de B. Bachimont mettent plus l’accent sur le fait que les concepts sont des constructions permettant de rendre compte d’une réalité, d’un sens. En référence aux travaux de F. Rastier, il les définit comme des signifiés normés, qui organisent les objets en s’appuyant sur leurs parentés et leurs différences, selon un point de vue fixé par l’analyste.

1.16.1.2 Concepts et ontologies

Il est utile de revenir sur l’analyse de B. Bachimont concernant les différentes approches du concept dans plusieurs courants de la tradition philosophique, à chacune correspondant une manière de les identifier à partir du langage ou d’autres appréhensions du monde (Bachimont, 2004). Revue, cette tradition débouche sur trois facettes des concepts au sein des ontologies :

- Concept comme essence : selon cet angle d’analyse, le concept d’un objet est le noyau des propriétés nécessaires vérifiées par un objet, indépendamment des variations qu’il peut subir dans les différents contextes où il se trouve ; il est connu par abstraction ; on considère alors le concept comme une signification normée, qui s’inscrit dans un système et

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dont la compréhension correspond à sa reformulation à travers d’autres significations conceptuelles ; on rejoint là la terminologie traditionnelle.

- Concept comme construction synthétique : le concept d’un objet est vu comme une règle qui permet de rassembler toutes les expériences, les réalisations et d’en tirer un invariant, une méthode pour passer de la diversité des expériences pour définir, construire une synthèse, une invariance ; selon cette vue, la relation du concept aux autres concepts est moins fondamentale que celle du concept aux objets qui lui correspondent ; - Concept comme performatif : le concept peut être aussi considéré comme une opération, il permet des actions. Alors énoncer un concept, c’est faire quelque chose (Austin, 1991). En informatique, le concept formalisé est interprété par la machine pour produire un comportement effectif. Il est prescription pour le système formel, dont il permet d’exécuter des actions ;

Bachimont considère que ces trois facettes sont autant de niveaux dans la manière de comprendre un concept. Leur articulation est indispensable. Il oppose deux courants actuels dans la conceptualisation : une tradition nominaliste, pour laquelle l’ontologie regroupe des essences dont la signification sera explicitée de manière logico-formelle (Smith, 1998) (Guarino, 1995) ; une tradition essentialiste, selon laquelle les essences sont étudiées comme des unités linguistiques et conceptuelles, sans préjuger de leur portée ontologique réelle (Bachimont, 2004). Son point de vue, développé dans la méthode Archonte et qui a fortement influencé le groupe TIA, se situe dans une approche à la fois nominaliste et conceptuelle : à partir des manières de parler, on déduit des manières de penser pour aborder des manières d’être.

1.16.1.3 Concepts et notions

En terminologie, la notion est l’équivalent du concept (Condamines, 2003) (Biébow, 2004). Selon la terminologie traditionnelle, la notion préexiste aux termes, c’est-à-dire aux unités linguistiques qui la désignent. Les notions d’un domaine scientifique ou technique s’organisent en un ensemble structuré par des relations non linguistiques, le système notionnel, qui peut être « purifié », normé pour définir une norme. La langue serait alors le point d’entrée vers les connaissances. Cette école fait l’hypothèse de la monosémie des termes dans chaque domaine de spécialité. Le but de la terminologie est alors de rassembler, selon une démarche dite onomasiologique, les termes correspondant à une notion donnée par sa définition (normée). Le lien terme-concept est alors un lien univoque de référence.

Les pratiques terminologiques autant que l’évolution de la théorie terminologique remettent en question cette vision. La démarche terminologique partant de textes se déroule dans le sens inverse, selon une démarche sémasiologique : partant de manifestations linguistiques, on identifie et définit des concepts. À ce moment-là, le sens est construit à partir de l’interprétation des occurrences du mot en contexte. Puis il est normé (ce qui revient à établir une convention, une norme) et normalisé (restreint pour être adapté à l’application qui va l’utiliser). Rastier parle de sens normé et non de signifié normé pour bien souligner le caractère contextuel de cette construction, liée aux occurrences observées en corpus, alors que le signifié aurait un statut indépendant du corpus (Biébow, 2004).

terminologiques et ontologiques

Le statut du concept du point de vue de la linguistique est plus complexe : il prend tantôt la place du signifié, tantôt celle d’entités générales, universelles, préexistant aux termes (Condamines, 2004). Le concept permet entre autres de rendre compte de phénomènes comme la polysémie. A.

Condamines considère qu’il n’y a concept que si la normaison (définition de la norme) peut s’appuyer sur des régularités d’usage des signes linguistiques et si l’on dispose de critères pour conférer à ces signes un statut particulier. Dans le cadre d’analyse de corpus spécialisés, les concepts ne sont pas préexistants mais construits, et les manifestations linguistiques à partir desquelles ils sont établis ont en commun des caractéristiques liées à la situation d’énonciation.

D’une certaine façon, créer des concepts est un acte de définition, de maîtrise du sens. Dans ce même esprit, les manifestations linguistiques observées ne prennent le statut de termes qu’après avoir effectué cette définition.

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