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1.13 - Bilan sur la modélisation conceptuelle

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1.13.1 Synthèse des résultats établis

Les méthodes MACAO puis MACAO-II constituent mes réponses aux questions posées au chapitre 3 sur la modélisation conceptuelle.

Les premières recherches sur MACAO répondent en partie aux questions de la représentation des connaissances au sein de modèles, de la nature de ces modèles et des aspects méthodologiques (questions 1, 2, 3 et 6). Ces propositions posent les bases des résultats établis avec MACAO-II et même de nos choix en matière de construction d’ontologies à partir de textes. Elles présentent donc un intérêt qui dépasse le problème de l’acquisition des connaissances pour les systèmes experts car elles rejoignent les problématiques actuelles de l’ingénierie des connaissances :

- Pour identifier et recueillir des connaissances expertes (question 1), j’ai répertorié, caractérisé et adapté des techniques et des outils, en particulier les grilles répertoires, basées sur des entretiens et des simulations. J’ai posé en principe la nécessité de diversifier les techniques au cours d’un même projet et d’en exploiter la complémentarité. Je défends une approche ergonomique, basée sur l’étude des traces de la mise en œuvre des savoir-faire, au moyen de simulations ou d’analyses de l’activité.

- Concernant la nature et le statut des modèles conceptuels (question 2), j’ai choisi de privilégier le rôle de support au dialogue entre acteurs de la modélisation, pour apporter une aide véritable au cogniticien.

Pour cela, un modèle doit être facilement compris et interprété. Il doit pouvoir être construit de manière incrémentale et être corrigé facilement.

- Pour faciliter la lisibilité des modèles et en garantir une interprétation de bonne qualité, j’ai établi trois principes que je retiendrai dans mes travaux suivants : (i) l’intérêt des visualisations graphiques des modèles ; (ii) la définition de langages au niveau conceptuel, en

de connaissances

amont des représentations formelles ; (iii) la traçabilité depuis les

« données brutes » (retranscriptions d’entretiens par exemple) jusqu’aux connaissances structurées dans le modèle, et donc la conservation de ces connaissances à différents degrés de structuration ou de formalisation.

- Dans MACAO, la représentation des connaissances proposée au niveau conceptuel est basée sur des structures appelées schémas. Elles regroupent les connaissances en fonction des déclencheurs des actions et des objectifs visés.

- Du point de vue méthodologique (question 3), MACAO préconise l’approche ascendante comme moyen privilégié pour rendre compte des modes de raisonnements humains. J’aurai par la suite le souci d’étudier principalement les manières d’aider le cogniticien dans toutes les tâches d’abstraction pour dégager des éléments conceptuels à partir d’exemples, de données ou de cas particuliers.

Du point de vue de la manière de mener ces recherches, cette période a confirmé le caractère interdisciplinaire de la problématique et donc la nécessité de collaborer avec d’autres disciplines comme la psychologie cognitive ou l’ergonomie. J’ai également mesuré combien il est indispensable, pour mener un travail d’ingénierie, de valider des travaux plus théoriques par des retours d’expérience, et pour cela développer des systèmes en situation d’usage réel.

MACAO-II a permis de nouvelles avancées à la fois méthodologiques et liées à la représentation des connaissances :

- Au niveau méthodologique (question 6), la notion de schéma du modèle conceptuel a été précisée. Dans MACAO-II, ce schéma revient à mieux caractériser le raisonnement ainsi que le rôle des connaissances du domaine utilisées pour ce raisonnement. Cette caractérisation est plus simple en cas de réutilisation de méthode prédéfinie, mais elle nécessite des structures de représentation des connaissances et une démarche poussant à plus d’abstraction. J’ai montré qu’une caractérisation abstraite de ce type assure une meilleure capacité de maintenance que des modèles plus descriptifs.

- Toujours pour répondre aux besoins méthodologiques, j’ai mené un travail approfondi sur la manière d’intégrer des propositions méthodologiques, l’utilisation d’une représentation des connaissances et d’outils de recueil ou d’analyse. Deux supports ont été définis : un guide méthodologique qui présente le processus et les recommandations de manière claire et le logiciel MACAO-II.

- Le logiciel MACAO-II a été utilisé par une dizaine de personnes dans le cadre d’études de cas mais surtout de 4 projets avec des entreprises (Ariane 4, SADE, SAMIE et HYPERPLAN) ; suite à des collaborations avec l’IRIN, le LRI et la DER d’EDF, il intègre de nouvelles approches (acquisition d’éléments de méthode à partir du domaine) et de nouveaux éléments de représentation des connaissances (schéma entité association, rôles, opérationnalisation en ZOLA).

- Pour qualifier les modèles obtenus avec MACAO-II (question 5), la confrontation entre méthode ascendante et réutilisation a été poussée suffisamment loin pour en montrer la complémentarité, souligner la nécessité de bien étudier les tâches et activités des acteurs

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du domaine avant de procéder à l’adaptation de modèles génériques.

Chacune des approches conduit à des modèles de natures très différentes, plus ou moins performants en matière de résolution de problème et plus ou moins adaptés aux usages prévus du système final.

L’analyse de la tâche, inspirée de l’ergonomie, conditionne la pertinence du système final auprès des utilisateurs.

- C’est grâce à une représentation des connaissances dissociant tâches et méthodes de résolution de problème que je réponds à la volonté de modéliser des connaissances sur les systèmes coopératifs (question 4).

Les structures de Tâche et de Méthode seront d’ailleurs retenues comme briques de base pour la représentation de systèmes coopératifs dans les thèses de l’équipe qui ont suivi (Adj Kacem, 1995). Le langage MONA propose des primitives de tâche et méthode pour définir le modèle du raisonnement de manière assez souple. Les buts du système et les méthodes mises en œuvre sont caractérisés séparément. MONA permet de représenter des cas spécifiques autant qu’un modèle conceptuel. Ce langage est un support pour affiner progressivement des descriptions proches du langage naturel, les organiser dans des représentations structurées pour obtenir enfin des structures opérationnelles en LISA.

- Les liens étroits entre méthodes de raisonnement et structures du domaine peuvent guider la représentation des connaissances. Le langage MONA propose la notion de rôle pour expliciter les exigences de cette articulation. Des règles de structuration du domaine en lien avec le raisonnement constituent une aide précieuse pour organiser les deux niveaux de manière cohérente.

- Enfin, pour compléter les premières approches basées sur des entretiens et des analyses de la tâche, j’ai diversifié les sources de connaissances en m’intéressant aux textes. Les approches linguistiques et les outils terminologiques ouvrent de nouvelles perspectives en matière de recueil de connaissances à partir de textes. Les résultats prometteurs obtenus à l’aide de l’extracteur de termes LEXTER soulignent l’importance de pouvoir naviguer dans le réseau de termes extraits en fonction de critères liés à l’usage des termes. Les expériences utilisant COATIS ont confirmé l’intérêt de l’étude des relations pour localiser des contextes riches en information sur les concepts, idée reprise dans la thèse de P.

Séguéla (chapitre 6).

1.13.2 Situation de MACAO-II par rapport à d’autres travaux

Plusieurs résultats font référence encore aujourd’hui à la modélisation des connaissances, telle que je l’entends dans ce chapitre : le système Protégé permet de générer des éditeurs pour saisir des instances de modèle ; la méthode CommonKADS est basée sur la réutilisation et l’adaptation de composants génériques ; et enfin les composants de l’expertise de Steels proposent une représentation des connaissances à l’aide de concepts, tâches et méthodes. Les travaux sur MACAO-II y ont une place plus modeste, mais reconnue pour ses spécificités aux niveaux national et international.

La première originalité de MACAO-II se situe avant tout au niveau méthodologique, par la place accordée à l’étude ergonomique de l’activité, aux méthodes de résolution mises en œuvre par les experts et à leur analyse selon une démarche ascendante. La méthode constitue une des alternatives solides

de connaissances

à CommonKADS. Une autre particularité de MACAO-II est de proposer le langage MONA pour anticiper, au niveau conceptuel, les processus de sélection dynamique de tâches et méthodes en cours de résolution de problème, dans le modèle opérationnel. MONA se situe en amont de langages comme Lisa, Model-K et Omos ou les langages réflexifs : KARL, Zola puis DSTM. Enfin, un dernier point fort de MACAO-II correspond à sa plate-forme, qui est une des rares propositions intégrant à la fois un environnement de modélisation, des techniques de recueil et d’analyse de connaissances, et un support méthodologique.

1.13.3 Bilan

Finalement, le projet MACAO m’a permis de faire le tour de la plupart des questions liées à la modélisation des connaissances par un cogniticien. Pour assister le processus de modélisation, j’ai constitué un ensemble cohérent de propositions qui aident un cogniticien à accéder aux connaissances requises pour mettre au point un système à base de connaissances répondant aux besoins des utilisateurs. Concrètement, ces propositions sont organisées au sein d’une méthode, MACAO-II, et du support logiciel associé. Cette plate-forme offre des fonctions d’aide au recueil de connaissances, un langage de représentation des connaissances et des moyens de stockage pour gérer les informations recueillies et constituer progressivement un modèle conceptuel.

Ces dix années autour de la méthode MACAO ont permis d’identifier des techniques pertinentes et de définir une approche méthodologique générale, indépendante du type de problème à traiter, pour construire des modèles conceptuels. Pour cela, j’ai choisi systématiquement de ne pas retenir le seul point de vue technique de l’informatique et de l’IA pour parvenir à un système opérationnel, mais de prendre la réponse aux besoins des utilisateurs dans toutes ses dimensions, avec une réflexion enrichie d’analyses venant de la psychologie et de l’ergonomie. J’ai également voulu privilégier l’analyse au niveau conceptuel en amont de l’opérationnalisation. Ma contribution est donc plus significative en ce qui concerne l’acquisition et le recueil de connaissances, le repérage et l’organisation du contenu d’un modèle que dans l’aide à la formalisation ou à la validation opérationnelle.

De plus, nos expériences sur l’acquisition de connaissances à partir de textes ont souligné le fort potentiel d’une prise en compte systématique et outillée des connaissances présentes dans les textes. L’identification va bien au-delà du vocabulaire, elle porte sur les concepts et les connaissances associées sous forme de relations ou de propriétés. Pour cela, l’approche terminologique est un premier pas. Les outils linguistiques permettent d’aller plus loin. Il ressort la nécessité de définir des logiciels spécifiques, facilitant l’identification des concepts non seulement à partir de l’étude des termes (leurs déviances par rapport à la langue générale, leur fréquence, etc.) mais aussi à partir de l’analyse de leurs contextes d’usage (cooccurrences, relations grammaticales et sémantiques avec d’autres termes, rôles syntaxiques et analyse des distributions en corpus).

Étudier les connaissances à partir de leur expression en langue soulève des problématiques sur la nature des connaissances et ce que signifie leur opérationnalisation dans un système. J’ai pu rencontrer des linguistes et spécialistes du traitement automatique des langues eux-mêmes demandeurs d’expériences de validation de leurs propositions en matière de repérage de connaissances dans des textes. Ce contexte très favorable, tant du point de

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vue de la thématique que des personnes, m’a incitée à retenir cette orientation pour la suite de mes recherches.

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