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Sans l’émulsifiant, il subsiste une tension interfaciale bitume/eau car le bitume contient des molécules acides et basiques ayant des propriétés interfaciales. Ces propriétés ont été mises en évidence dans différents travaux. Par exemple, Durrieu [10] a mesuré l’activité interfaciale de solutions benzéniques de bitume en fonction du pH de la solution aqueuse. Elle a constaté une activité à pH acide et basique, marquant la présence de composés polaires anioniques acides (sûrement des fonctions acides carboxyliques) et cationiques basiques (amines) dans les bitumes. Par des tests de tension interfaciale, il a été mis en évidence un effet favorable des cationiques basiques sur l’enrobage des matériaux humides. Une autre étude [19] a consisté à mesurer les tensions interfaciales bitume-eau à différents pH et pour des bitumes de nature différente (l’un naphténique, l’autre paraffinique) avec l’anneau de du Noüy. Cette recherche a mis en évidence l’influence du pH sur la tension interfaciale et l’influence de la présence de molécules polaires dans le bitume sur la cinétique d’adsorption. Des tests de tensions interfaciales ont aussi été réalisés à plus haute température (interface bitume/eau à 80 °C) à l’aide d’un tensiomètre à goutte pour des systèmes bitume-eau et tensioactif. La baisse de la tension interfaciale a été observée [20].

Il semble aussi que le rapport résines/asphaltènes (r/a) joue également sur les propriétés interfaciales rencontrées chez les bitumes. Salou et al. [21] ont formulé des dispersions et des émulsions à partir de bitumes dont ils ont déterminé les teneurs en asphaltènes et résines de bitumes. Ils ont démontré qu’un haut rapport r/a donnait des dispersions et des émulsions stables, et que des rapports faibles donnaient des dispersions et des émulsions instables. Plus récemment, Jada

et al. [22] ont corrélé le travail d’adhésion à l’interface bitume/eau à des mesures d’angles de

contact. Ce travail est d’autant plus fort que le rapport r/a est élevé. Ils ont donc conclu que le rapport résines/asphaltènes conditionne la diffusion de composés polaires à l’interface eau/bitume. Toutefois, d’autres publications montrent que les émulsions eau dans pétrole brut sont plus stables pour des rapports r/a faibles. McLean et Kilpatrick [23] ont obtenu les émulsions les plus stables pour une valeur de r/a de 1/3. Ce résultat est interprété par le fait que les résines solubilisent les agrégats d’asphaltènes. Les asphaltènes se dispersent dans la phase huileuse. Ils s’adsorbent moins à l’interface, d’où une diminution de la stabilité [24]. Selon Ese et al. [25], l’ajout de résines a le même effet que l’ajout de démulsifiants à l’interface eau/huile. Les résines réduiraient l’adsorption d’asphaltènes à l’interface. Daniel-David et al. [26] ont prouvé que la présence de résines diminuait la rigidité du film interfacial et par conséquent la stabilité de l’émulsion.

I.1.2. La matière minérale

I.1.2.1.Les granulats

Les granulats se définissent comme des fragments rocheux servant à la fabrication de routes, de voies ferroviaires et de certains ouvrages d’art. Ils peuvent être obtenus par récupération des dépôts de roches dans les cours d’eau (alluvions) ou par extraction de roches massives. Le plus souvent, ils sont concassés et criblés pour être utilisés en construction.

Les granulats se caractérisent d’abord par leur granularité. Ils sont en effet répartis en classes granulaires définies par deux dimensions notées d et D ; d correspond à la plus petite dimension prise par un granulat (avec un tamis d’ouverture minimale égale à 0,063 mm), D est la plus grande dimension. Les familles granulaires sont les sables, les gravillons, les graves et les fillers. Le Tableau I.2 indique les spécifications sur d et D pour ces familles pour application routière en mélange bitumineux. L’analyse granulométrique des granulats s’effectue le plus souvent par tamisage.

Tableau I.2 – Classification des familles de granulats selon leur granularité.

Classe granulaire Valeurs de d (mm) Valeurs de D (mm)

Sables 0 1 < D ≤ 6,3

Gravillons ≥ 1 ≤ 125

Graves 0 2 ≤ D ≤ 45

Fillers 0 < 2, 70 % des fillers passent à 0,063 mm

recomposition d’un squelette granulaire pour un enrobé. Pour des matériaux en couche d’assise ou en couche de roulement, des normes indiquent les plages de valeurs de passants à différents tamis à respecter pour assurer les fonctions de l’enrobé considéré. La Figure I.8 représente une recomposition granulométrique d’un mélange granulaire à l’émulsion.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 0,01 0,1 1 10 100 Diamètre (mm) P a s s a n t c u m u ( % )

Figure I.8 – Recomposition granulométrique d’un mélange granulaire à l’émulsion.

Une autre caractéristique des granulats est leur nature pétrographique. Les roches sont classées en trois grandes familles : les roches magmatiques ou ignées (diorite, gabbro,…) formées après refroidissement et solidification du magma, les roches sédimentaires (calcaire, quartzite) issues du dépôt de sédiments sous forme de couches, et les roches métamorphiques (gneiss, granite, schiste,…) provenant de la recristallisation de roches magmatiques ou sédimentaires. Pour chacune de ces familles, ils existent des roches acides et des roches basiques. Il convient de préciser que les notions d’acidité/basicité ne font pas allusion aux définitions données par les chimistes. Il est fait référence ici à la teneur en SiO2 de la roche. La Figure I.9 représente quelques minéraux classés en fonction de leur teneur en SiO2. Ainsi, une roche est dite acide si elle contient plus de 65 % de SiO2, elle est basique si elle a moins de 55 % de SiO2, et intermédiaire si la teneur en SiO2 est comprise entre 55 et 65 %. Le caractère acide ou basique d’une roche a une incidence sur l’adhésion entre le liant et les granulats et l’adhésivité en présence d’eau.

Figure I.9 – Teneur en SiO2 de quelques composés minéraux [27].

Les granulats possèdent des caractéristiques intrinsèques liées à la roche telles que la masse volumique réelle, l’absorption d’eau, la résistance à la fragmentation, la résistance à l’usure, etc.

Ils présentent également des caractéristiques liées au procédé d’extraction et de traitement comme l’angularité ou le pourcentage en fines des gravillons. De ces caractéristiques vont dépendre le comportement des enrobés. Par exemple, un enrobé comportant des granulats longs et plats se compactera plus difficilement.

I.1.2.2.Les agrégats d’enrobés recyclés