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AXE I THÉORIE ET ÉTAT DE L’ART

Chapitre 3 Méthodologies

3.3 Techniques de séparation et d’extraction

Les techniques de séparation et d’extraction ont pour objectif d’isoler l’analyte d’intérêt de sa matrice ou d’éléments interférents. Les procédés peuvent isoler l’analyte ou bien isoler les interférents, afin de permettre d’avoir une solution analysable. De nombreuses méthodes d’extraction sont également des procédés de concentration, permettant ainsi de réduire la limite de détection de la méthode. Ainsi les facteurs de séparation et de concentration sont des indicateurs de performance lors du choix d’une méthode, en plus du rendement d’extraction. Le ratio des rendements entre l’analyte A et l’interférent B (Équation 3.2) permet d’obtenir le facteur de séparation (FS) [76] ; tandis que le facteur de concentration (FC) [77] représente le ratio volumique entre l’échantillon initial et l’échantillon final (Équation 3.3). 𝐹𝑆 = 𝑛𝐴 𝑛𝐵 ⁄ (𝑛𝐴 𝑛𝐵 ⁄ ) 0 3.2 𝐹𝐶 = 𝑉 𝑉0 3.3

3.3.1 La précipitation et coprécipitation

L’extraction et préconcentration par (co)-précipitation sont des méthodes historiques pour procéder au fractionnement d’un échantillon. Elles ont notamment largement été employées par Marie Curie dans la première extraction séquencée visant à mettre en évidence du polonium [33].

La précipitation est la formation d’un sel insoluble contenant l’analyte. La coprécipitation se différencie par la formation d’un sel insoluble, contenant un élément porteur et l’analyte, normalement toujours soluble. En effet, de par les propriétés chimiques proches entre le porteur (qui précipite) et l’analyte, il est possible de précipiter ce dernier. Ces méthodes présentent donc un fort facteur de concentration, mais la récupération est extrêmement dépendante du milieu.

Il est nécessaire de prendre en note que la formation de ces sels insolubles est conditionnée par les conditions expérimentales telles que le pH, la température et le degré d’oxydation de l’élément en solution [43]. De plus, le rendement de ce type d’extraction est régi par les

constantes de solubilité [73]. Ainsi certains sels ne peuvent être précipités à partir d’une solution tels que les oxydes, et d’autres peuvent être solubilisés en modifiant les conditions expérimentales (notamment le pH). Le Tableau A.1 présent en annexe regroupe l’ensemble des contre-ions menant à la (co-)précipitation des éléments ciblés.

3.3.2

L’extraction liquide / liquide

L’extraction liquide / liquide est un procédé très couramment employé à l’échelle de l’industrie pour la séparation des éléments. Ce procédé consiste à transférer les analytes dans une autre phase liquide pour laquelle ils ont plus d’affinité. Cette affinité peut être exacerbée en utilisant des ligands solubles dans les deux phases, appelés extractants, mais ayant une préférence pour la phase d’extraction, permettant ainsi d’avoir de très bonnes valeurs de facteur de séparation. Ce procédé est régi par le coefficient de partage et de diffusion que présentent les analytes et ligands, mais également par les constantes de complexation. Ainsi, à l’échelle industrielle, ce procédé est souvent reproduit plusieurs fois sur une même solution, comme dans le cas du procédé PUREX pour le retraitement des déchets d’uranium après leur exploitation dans l’énergie nucléaire. Il existe déjà des protocoles concernant la séparation des radioisotopes ciblés [78], [79]. Cependant, la multitude d’étapes d’extraction pour augmenter le rendement confère à cette méthode un facteur de concentration inférieur à 1.

3.3.3

L’extraction au point trouble

L’extraction au point trouble (CPE) est en fait une extraction liquide / liquide améliorée. En effet, la présence de micelles dans une microémulsion permet d’augmenter significativement les performances analytiques sans nécessiter une grande quantité de solvant. Ainsi, le facteur de concentration dans le CPE peut être élevé. Une fois l’analyte extrait et retenu dans la phase organique des micelles, un changement des conditions expérimentales – notamment la température – permet la précipitation de ces dernières, et donc l’extraction de l’analyte de sa matrice. Des systèmes ont déjà été mis en place pour extraire l’uranium [80], le radium [81], le plomb [77], [82] et le thorium [83]. Cependant, le CPE est un système sensible aux variations de pH, et n’est actuellement viable que pour l’analyse de l’eau.

3.3.4 La chromatographie d’extraction et la chromatographie ionique

La chromatographie est un outil permettant d’exacerber les performances analytiques pour la séparation. En effet, la limitation des ligands utilisés en extraction liquide / liquide est due à la nécessité de répéter les phases d’échange, autrement dit le nombre de plateaux. Dans un système dynamique, ces phases d’échange sont plus importantes, et donc cela permet une meilleure extraction. En plus des facteurs de séparation et de concentration usuels, les performances chromatographiques peuvent être quantifiées par le facteur de capacité k’. Ce facteur permet de quantifier la rétention d’un analyte sur la résine dans des conditions isocratiques, en fonction de son temps de résidence sur la résine. On considère qu’un ratio de 100 entre deux analytes confèrent une très bonne séparation.

k′ = Vrétention − Vmort Vmort

Dans le cas d’une chromatographie ionique, la charge présente à la surface de la résine permet de retenir les espèces portant une charge opposée, et ainsi séparer les analytes en fonction de leur charge. De plus, la porosité des résines permet également d’ajouter des facteurs de séparation supplémentaires via l’implication d’autres mécanismes discriminatoires tels que la gêne stérique ou la diffusion à travers les pores [84]. Le Tableau 3.2 présente les différents types de résines cationiques ou anioniques commercialement disponibles.

Tableau 3.2 : types de résines cationique et anionique.

Résines cationiques Résines anioniques

Type Groupe

Fonctionnel

Type Groupe fonctionnel

Acide sulfonique R-SO3- Amine

quaternaire N(CH3)3+ Acide carboxylique R-COO- Amine quaternaire N(CH3)2(EtOH)+ Acide phosphonique

Acide phosphinique

R-PO2H- Amine secondaire NH2(CH3)3+

Phénolate R-O-H- Amine primaire NH

3+

Acide arsénique R-AsO3H-

Acide sélénique R-SeO3H-

Dans le cas d’une chromatographie d’extraction, un ligand est utilisé pour augmenter la sélectivité de la résine. Ce dernier peut être soit imprégné à l’aide d’une phase organique à la résine ou bien greffé sur cette dernière. Le Tableau 3.3 présente les résines commercialement disponibles chez Eichrom, et qui présentent des sélectivités intéressantes pour les radioéléments d’intérêt.

Tableau 3.3 : résines commerciales Eichrom possédant un ligand s’appliquant à l’analyse des radionucléides ciblés.

Source Ligand Ra Th U Po Pb Résine Actinide [85] H2DEH(MDP) X X Résine DGA [86] DGA R = C8H17 X Résine Ln [87] HDEHP X X X Résine MnO2 [88] MnO2 X Résine Pb [89] DtBuCH18C6 X Résine Sr [90] X X X X Résine UTEVA [91] DAAP X Résine TRU [92] CMPO X X X Résine TEVA [93] Aliquat Tm 336 X X

Les compagnies 3M, IBC Advanced Technologies et GL Sciences proposent également des résines hautement sélectives, en utilisant la technologie de la reconnaissance moléculaire (MRT) [94]. Cette technique permet de synthétiser des ligands ayant une cavité interne correspondant au rayon ionique de l’analyte ciblé. De plus, ces résines sont greffées sur le support de silice, contrairement aux résines d’Eichrom qui sont imprégnées, permettant une plus grande réutilisabilité. La Figure 3.11 présente un exemple de ces résines, dont les ligands sont soumis au secret industriel.

Figure 3.11 : exemple de système de MRT.

Ainsi, une fois encore, la sélectivité de la résine dépendra également des conditions expérimentales telles que le pH, le degré d’oxydation de l’analyte et sa spéciation.

3.4

État de l’art pour la mesure de la radioactivité dans les