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Chapitre 2 : Matériaux et méthodes

3. Techniques de caractérisation

3.3. Techniques d’analyses par faisceau d’ions

Trois techniques d’analyses par faisceau d’ions ont été utilisées dans le cadre de ces travaux, la spectroscopie de rétrodiffusion Rutherford (RBS), l’analyse par réaction nucléaire (NRA) et la spectrométrie de masse d’ions secondaires (SIMS). Ces techniques se distinguent par la nature des interactions ions / échantillon mises en jeu, découlant directement du type de faisceau d’ions primaires mis en oeuvre. Les analyses par SIMS utilisent en général des ions lourds de faible énergie (de l’ordre de quelques keV) alors que les analyses par RBS et NRA sont réalisées à partir d’ions légers de très haute énergie (de plusieurs centaines de keV à quelques MeV). Les faisceaux d’ions permettant la mise en œuvre de ces deux dernières techniques sont produits à l’aide d’un accélérateur Van de Graaff dont la tension maximale d’accélération est de 2,5 × 106 V.

3.3.1.

Spectroscopie de rétrodiffusion Rutherford (RBS)

L’accélérateur émet des ions monocinétiques d’énergie E0 qui interagissent avec la surface de l’échantillon et sont rétrodiffusés avec une énergie E1 (< E0). Le facteur cinématique, reliant E1 et E0, ne dépend, dans une direction de détection donnée, que des masses de l’ion incident et de l’atome cible [Tro02]. Lorsque cet ion doit traverser une épaisseur de matière avant d’atteindre sa cible, celui-ci subit une seconde perte d’énergie, le long de son parcours aller et retour, dépendant de l’épaisseur et de la nature de la matière traversée. Si bien que la perte d’énergie découlant de l’interaction entre l’ion incident et le noyau diffuseur est représentative de la nature chimique de l’atome rencontré, mais également de sa localisation en profondeur dans l’échantillon.

Des ions 4He+ d’une énergie incidente de 2 MeV sont émis par l’accélérateur Van de Graaf sous la forme d’un faisceau de 0,5 mm de diamètre. La charge écoulée durant une analyse est de 3 µC, cette dernière fixant le nombre d’ions incidents susceptibles d’interagir durant l’expérience. Les particules rétrodiffusées sont détectées sous un angle de 150°. La résolution sur la localisation des atomes en profondeur est de l’ordre de 2 nm, elle dépend de la résolution en énergie des canaux du détecteur et de la densité du solide traversé par les ions rétrodiffusés. L’étalonnage de l’échelle en énergie par rapport aux canaux du détecteur est effectué à l’aide d’un échantillon de référence constitué d’un dépôt d’or-palladium d’épaisseur connue surmontant un substrat d’aluminium.

Le spectre RBS obtenu représente un nombre de coups, proportionnel au nombre d’ions rétrodiffusés, en fonction de l’énergie de ces particules. Il permet ainsi de localiser en profondeur des éléments chimiques donnés. Cette technique a été utilisée sur des échantillons marqués à l’or puis corrodés, dans l’objectif d’identifier les mécanismes de croissance de la couche d’oxyde protectrice. La mise en œuvre et les résultats obtenus au cours de ces essais sont présentés au paragraphe 2 du chapitre 4.

3.3.2.

Analyse par réaction nucléaire (NRA)

Le dosage de l’oxygène par NRA est utilisé dans l’objectif de mesurer l’épaisseur des couches d’oxyde formées. En raison d’une très faible limite de quantification et d’une résolution en profondeur étant de l’ordre de 2 µm, cette technique est bien adaptée à l’étude des fines couches d’oxyde. Elle est basée sur la réaction nucléaire, exoénergétique [Ber05], qui découle de l’interaction des deutons émis par l’accélérateur avec les atomes d’oxygène de la couche d’oxyde, conduisant à l’apparition de l’isotope de masse 17 de l’oxygène et à l’émission de protons :

16

O + D+ 17O + H+ (E.2.1).

L’énergie des protons émis par une réaction nucléaire est caractéristique de la nature de cette réaction. Ainsi, la réaction, appelée 16O(d,p1)17O, des deutons avec l’isotope de masse 16 de l’oxygène, sur laquelle est basée le dosage de cet élément dans ces travaux, émet des protons à une énergie de 1258 keV dans les conditions expérimentales mises en œuvre.

Dans le cadre des analyses réalisées, les deutons sont produits sous la forme d’un faisceau d’ions de 1 mm de diamètre, à une énergie incidente de 900 keV, la section efficace de la réaction 16O(d,p1)17O variant peu autour de cette énergie [Sea04]. La charge écoulée durant une analyse est de 100 µC. Les protons émis par réaction nucléaire sont détectés sous un angle de 150°. La présence d’un filtre en mylar (C10H8O4) d’une épaisseur de 12 µm permet d’éliminer les deutons rétrodiffusés susceptibles d’atteindre le détecteur.

Le spectre ainsi obtenu représente un nombre de coups, proportionnel au nombre de protons comptés par le détecteur, en fonction de l’énergie de ces protons. L’utilisation d’échantillons de référence, constitués d’un substrat de tantale et d’une couche d’épaisseur connue de Ta2O5, cet oxyde présentant un très faible écart à la stœchiométrie, permet d’étalonner le spectre en énergie et en intensité. Le nombre d’atomes d’oxygène compté par unité de surface sur chaque échantillon est proportionnel à l’épaisseur de la couche d’oxyde, supposée compacte et uniforme.

L’étalonnage du dosage de l’oxygène par NRA est présenté en annexe 4, les cinétiques d’oxydation obtenues par cette technique étant présentées au paragraphe 1 du chapitre 4.

Les analyses par RBS et NRA ont été réalisées en collaboration avec S. Pellegrino et S. Vaubaillon du laboratoire Van de Graaff de l’INSTN (Institut National des Sciences et Techniques Nucléaires).

3.3.3.

Spectrométrie de masse d’ions secondaires (SIMS)

Le SIMS est basé sur l’interaction d’ions lourds de faible énergie avec une surface à analyser, provoquant la pulvérisation de cette surface et l’émissions d’ions secondaires. Ces

ions secondaires sont collectés par un spectromètre de masse et analysés en fonction de leur rapport masse sur charge. Ce type d’analyses permet ainsi d’obtenir des profils de composition à travers les couches d’oxyde, non seulement en termes de nature des éléments chimiques, mais aussi, grâce à sa haute résolution en masse, en termes de nature isotopique pour un même élément chimique.

Cette technique d’analyses a donc été utilisée sur les échantillons ayant subi des essais de corrosion séquencée, dans l’objectif de caractériser les mécanismes de diffusion de l’oxygène à travers les couches d’oxyde formées sur les alliages à base nickel exposés en milieu de type primaire, les résultats de cette étude étant discuté au paragraphe 2 du chapitre 4.

Le SIMS utilisé est un appareil de type Cameca Riber MIQ256. Des ions Ar+ d’une énergie de 4 keV constituent un faisceau d’ions primaires d’une intensité de 5 nA. Ce faisceau balaie une surface à analyser de 140 × 200 µm², sous un angle d’incidence de 45°. Le spectre obtenu représente l’évolution du nombre de coups associé à chaque masse analysée en fonction de la durée d’exposition au faisceau, proportionnelle à la profondeur abrasée.

Ces analyses ont été conduites par O. Heintz et S. Chevalier de l’Institut Carnot de Bourgogne.