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La nouvelle m´ethode spectrale multi-domaine que nous avons d´evelopp´ee en 1998 ´etait mo-tiv´ee par le traitement pr´ecis de la surface des ´etoiles. Sauf dans le cas statique, la surface d’une ´etoile n’est pas exactement sph´erique, si bien que le traitement de 1993 (§ 1.4.4) r´esulte dans des fronti`eres entre domaines qui ne co¨ıncident pas avec la surface de l’´etoile. Cela est une source de probl`eme pour deux raisons :

• la surface de l’´etoile est un lieu de discontinuit´e pour de nombreux champs ou leurs

d´eriv´ees ; si la surface ne se trouve pas `a la fronti`ere entre deux domaines, on d´ecrit alors un champ discontinu (ou de d´eriv´ee discontinue) `a l’aide de s´eries de fonctions polynomiales

1On consid`ere ici une EDP du second ordre ; pour des ordres plus ´elev´es, il faut ajouter la continuit´e des d´eriv´ees d’ordres sup´erieurs.

542 M´ethode spectrale multi-domaine

(les fonctions de base de la m´ethode spectrale). Il en r´esulte une erreur connue sous le nom de ph´enom`ene de Gibbs, dont la cons´equence est la perte de la d´ecroissance exponentielle de l’erreur avec le nombre de degr´es de libert´e.

• la surface de l’´etoile est souvent un endroit o`u l’on doit mettre des conditions aux contours, notamment pour le champ de vitesse.

C’est pour cette raison que nous avons mis en œuvre des domaines adapt´es `a la surface de l’´etoile. Une premi`ere fa¸con de faire eut ´et´e de relier les coordonn´ees “num´eriques” (c’est-`a-dire vis-`a-vis desquelles on effectue les d´eveloppements spectraux) (ξ, θ0, ϕ0) aux coordonn´ees physiques (r, θ, ϕ) par

r = R(θ0, ϕ0) ξ (29.1)

θ = θ0 (29.2)

ϕ = ϕ0, (29.3)

o`u R est la fonction d´efinissant la surface de l’´etoile par r = R(θ, ϕ), de sorte que la surface correspond `a ξ = 1. Ce type de coordonn´ees adapt´ees a d´ej`a ´et´e utilis´e dans la litt´erature, no-tamment par Uryu & Eriguchi en 1998 [276] dans leur ´etude des syst`emes binaires irrotationnels (cf. § 22.1). Cependant les conditions de r´egularit´e `a l’origine et sur l’axe θ = 0 (cf. Eq. (10) de [A29]) sont tr`es compliqu´ees `a exprimer en terme de (ξ, θ0, ϕ0) dans un tel syst`eme. Nous avons donc opt´e pour un changement de coordonn´ees d’une forme diff´erente :

r = α · ξ + (3ξ4− 2ξ6)F (θ0, ϕ0) +1 2(5ξ 3− 3ξ5)G(θ0, ϕ0) ¸ (29.4) θ = θ0 (29.5) ϕ = ϕ0, (29.6)

o`u α est une constante et F (θ0, ϕ0) (resp. G(θ0, ϕ0) une fonction ne contenant que des harmoniques paires (resp. impaires) en ϕ0. La surface de l’´etoile correspond toujours `a ξ = 1, si bien que son ´equation dans les coordonn´ees physiques s’´ecrit r = α[1 + F (θ, ϕ) + G(θ, ϕ)]. La parit´e et la forme des petits polynˆomes de ξ en facteur de F (θ0, ϕ0) et G(θ0, ϕ0) est choisie de mani`ere `a ce que les conditions de r´egularit´e exprim´ees en termes de (ξ, θ0, ϕ0) soient voisines des conditions de r´egularit´e exprim´ees en termes de (r, θ, ϕ). Notamment, pr`es de l’origine r ∼ αξ, ce qui n’est pas le cas de la forme (29.1).

Nous avons introduit un changement de variable de mˆeme type dans les coquilles, sauf qu’il n’y pas l`a de probl`eme de r´egularit´e en ξ : F (θ0, ϕ0) d´ecrit alors la forme de la fronti`ere interne du domaine et G(θ0, ϕ0) sa forme externe.

Nous avons ensuite explicit´e les op´erateurs gradient et laplacien en termes de (ξ, θ0, ϕ0). Le laplacien prend notamment une forme assez compliqu´ee (Eq. (98) de [A29]), si bien que l’on doit d´esormais r´esoudre l’´equation de Poisson par it´eration, en isolant un “pseudo-laplacien” et en mettant tous les termes non affines (c’est-`a-dire issus de la non nullit´e de F (θ0, ϕ0) ou G(θ0, ϕ0)) dans le membre de droite de l’´equation. A chaque pas de l’it´eration, nous avons r´esolu l’´equation de Poisson par la m´ethode de patch mentionn´ee § 29.1.

Dans l’article [A29] nous avons illustr´e cette technique par le calcul de configurations d’´equilibre newtonienne pour des fluides incompressibles en rotation ou en syst`eme binaire en corotation. On peut alors comparer avec des solutions analytiques du probl`eme, qui sont respec-tivement les ellipso¨ıdes de Maclaurin et les ellipso¨ıdes de Roche. Sans les coordonn´ees adapt´ees le probl`eme ne serait pas traitable avec les m´ethodes spectrales, en raison de l’importante dis-continuit´e dans le champ de densit´e `a la surface de ces objets. Par contre avec les coordonn´ees

29.2 Notre technique [A29] 543 adapt´ees de la forme (29.4)-(29.6), nous avons retrouv´e la d´ecroissance exponentielle de l’erreur avec le nombre de coefficients, typique des m´ethodes spectrales (Fig. 5 et 6 de [A29]). Pour la petite histoire, il a mˆeme fallu ´ecrire un petit code Mathematica pour calculer pr´ecis´ement la solution analytique car les tables qui figurent dans le livre classique de Chandrasekhar sur les figures d’´equilibre ellipso¨ıdales [94] ne comportaient que 5 chiffres significatifs et la pr´ecision du code va bien au del`a de 10−5.

Chapitre 30

R´esolution des ´equations de Poisson

scalaires et vectorielles

30.1 Introduction

Un des grands int´erˆets des m´ethodes spectrales d´evelopp´ees dans notre groupe est qu’elles permettent la r´esolution d’´equations elliptiques de mani`ere tr`es efficace, c’est-`a-dire avec une grande pr´ecision et un faible temps de calcul. Cette situation contraste avec celle des m´ethodes aux diff´erences finies, pour lesquelles la r´esolution des ´equations elliptiques est synonyme de grande consommation de temps CPU. Pour cette raison, les autres groupes de relativit´e num´erique ont longtemps essay´e d’´eviter au maximum les ´equations elliptiques. Ces consid´erations pure-ment techniques ont d’ailleurs provoqu´e un engouepure-ment massif pour des formulations enti`erepure-ment hyperboliques des ´equations d’Einstein dans les ann´ees 1990 (cf. par exemple [69]), avant que l’on s’aper¸coive que la plupart de ces formulations conduisent `a des singularit´es de coordonn´ees [31, 32].

Pourtant, d`es la fin des ann´ees 1970, L. Smarr & J.W. York [263] avaient propos´e, dans le cadre du formalisme 3+1 de la relativit´e g´en´erale, un syst`eme de coordonn´ees bien adapt´e `a la fois aux champs gravitationnels fort et `a la description asymptotique du rayonnement gravitationnel sortant. Il s’agissait du feuilletage maximal combin´e avec la jauge spatiale de distortion minimale. Seulement la r´esolution des ´equations d’Einstein dans ce syst`eme de coordonn´ees passait par la r´esolution d’´equations elliptiques pour la fonction lapse et le vecteur shift. Bien qu’adapt´e `a la physique des sources d’ondes gravitationnelles, ce syst`eme de coordonn´ees n’a pas ´et´e employ´e jusqu’`a r´ecemment en relativit´e num´erique en raison des ´equations elliptiques qu’il comportait. Il faudra attendre 1999 et les travaux de M. Shibata [255, 256] pour voir les coordonn´ees de Smarr & York employ´ees dans des probl`emes dynamiques 3-D.

S. Bonazzola & J.A. Marck [72] ont d´evelopp´e en 1990 une m´ethode spectrale de r´esolution des ´equations de Poisson 3-D. A l’´epoque il s’agissait d’une m´ethode mono-domaine (int´erieur d’une sph`ere). Cette m´ethode a ensuite ´et´e ´etendue au cas multi-domaine avec domaine externe compactifi´e par S. Bonazzola (§ 7 et 8 de [19], cf. aussi [8]).