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3.1.2 Portée maximale et taille des terrains . . . 58 3.1.3 Implications stratégiques et techniques . . . 60 3.2 Dégagements au football . . . 60 3.2.1 Trajectoires expérimentales . . . 61 3.2.2 Équation de la dynamique . . . 62 3.2.3 Discussion sur la portée . . . 64 3.2.4 Critère pour négliger l’effet de la rotation . . . 67 3.3 Jeu long au badminton . . . 68 3.3.1 Différence entre le volant en plume et en plastique . . . 69 3.3.2 Effet des conditions atmosphériques . . . 71 3.3.3 Effet de la rotation du volant . . . 73

Ce travail a été réalisé avec Caroline Cohen.

Introduction

La taille des terrains de sport est une grandeur qui peut être fonction de nombreux paramètres tels le nombre de joueurs, le type de terrain ou les règles du jeu. Ce chapitre considère l’influence de la portée des balles sur les dimensions des terrains où elles sont employées.

Le lien entre la portée maximale et la taille du terrain est particulièrement marqué dans le cas du ballon de baudruche. Imaginons que l’on invente un sport se pratiquant avec cette balle. Celui qui a déjà frappé à la main un ballon de baudruche sait à quel point il est difficile de l’envoyer à plus de trois mètres. Dans cette situation, la vitesse de frappe U0 est généralement plus importante que la vitesse terminale de ces objets (U∞ ∼

1 m/s) et leurs trajectoires est de type "Tartaglia" (cf. figure 3.1). La portée des ballons de baudruche sature avec la vitesse de lancer U0 pour atteindre une valeur maximale qui

dépend uniquement des caractéristiques de ces objets. La portée maximale des ballons de baudruche est typiquement de l’ordre de trois mètres. Sachant cela, on se garde bien de jouer avec ces objets sur un terrain de football ! Il est préférable d’imaginer un terrain dont les dimensions sont comparables avec la portée maximale des ballons.

Figure 3.1 – Chronophotographie du lancer d’un ballon de baudruche par un joueur amateur. La ligne blanche en bas à gauche indique un mètre. Chaque position est séparée par 200 ms. La vitesse de tir du ballon est estimée à U0 ≈ 4,8 m/s et l’angle initial à

θ0 = 18◦.

Le chapitre 2 nous a appris que la portée maximale d’un projectile soumis uniquement à son poids et à sa traînée ne dépend que de la vitesse de lancer U0 et de sa vitesse

terminale U∞. Ce chapitre se propose d’estimer la vitesse terminale U∞ des différents

ballons de sports ainsi que la vitesse maximale U0 = Umax à laquelle ils sont lancés sur

le terrain. Ceci permettra de déduire les portées maximales de ces différents projectiles et de les comparer à la taille des terrains sur lesquels ils sont utilisés. Dans un deuxième temps, nous étudierons les paramètres capables d’influer sur cette portée maximale. Le premier d’entre eux est la rotation propre de la balle. Cet effet sera étudié en se basant sur l’exemple des dégagement des gardiens de football. Ces derniers utilisent systématiquement la rotation arrière pour prolonger la trajectoire des ballons. Le second paramètre susceptible de modifier la portée maximale d’une balle est sa constitution physique (masse, taille et géométrie). Nous regarderons comment les fines variations des propriétés physiques des volants de badminton modifient leurs portées et donc le jeu.

3.1

Sur la taille des terrains

3.1.1

Vitesses terminales des balles de sport

Les vitesses terminales U∞ des balles de sport auraient pu être mesurées dans une expé-

rience de chute verticale. Cependant la hauteur nécessaire pour atteindre un équilibre entre poids et traînée nous a dissuadé d’utiliser cette méthode. Les vitesses terminales ont été déterminées dans la soufflerie verticale SV4 de l’ONERA à Lille. Ce dispositif exceptionnel permet de souffler de l’air jusqu’à 50 m/s dans une veine de 4 m de diamètre. Le protocole adopté consiste à augmenter graduellement la vitesse de l’écoulement jusqu’à atteindre la vitesse seuil permettant de mettre la balle en lévitation. À chaque augmentation de la vitesse de l’écoulement, une attente de plusieurs minutes est nécessaire à l’établissement d’un flux stationnaire. Si la balle tombe vers le bas, la vitesse de l’écoulement est aug- mentée, dans le cas inverse elle est diminuée. Lorsque l’équilibre est atteint, la vitesse de l’écoulement est mesurée à l’aide d’un anémomètre VT 200 Kimo et d’une sonde pitot. Ce protocole permet de déterminer précisément la vitesse du flux d’air nécessaire pour que la traînée de la balle compense exactement son poids. Deux exemples de lévitation sont portés sur la figure 3.2, le premier pour la ballon de football Jabulani où U∞ = 30 m/s et le

second pour un volant en plume pour lequel U∞ = 6,7 m/s. Les résultats de ces expériences

pour les différentes balles sont regroupés dans le tableau 3.1.

(a) (b)

(a) (b)

Figure 3.2 – Exemples de sustentation de balles dans la soufflerie verticale SV4 de l’ONERA à Lille. (a) Ballon de football Jabulani à U∞= 30 m/s. (b) Volant de badminton

en plume à U∞ = 6,7 m/s.

La colonne de ce tableau correspondant au coefficient de traînée montre que leurs valeurs sont comprises entre 0,1 et 0,6. Pour les objets sphériques et des nombres de Reynolds de l’ordre de 105, les coefficients de traînée sont proches de la valeur classique de 0,45 mesurée en soufflerie sur une sphère lisse. Pour des nombres de Reynolds plus importants le coefficient de traînée des balles chute vers une valeur proche de 0,2. Cette diminution correspond au phénomène de crise de traînée mentionné au paragraphe 1.2.2.

Il est intéressant de comparer les vitesses terminales de chaque balle à celles typiques de lancer. La dernière colonne du tableau 3.1 donne les valeurs du rapport Umax/U∞ entre la

vitesse maximale de tir homologuée sur le terrain [8] et la vitesse terminale mesurée pour les différents projectiles. Hormis au handball et au basketball, les vitesses maximales Umax

de lancer de ces balles sont supérieures à leurs vitesses terminales. Dans ces situations, les balles vont suivre des trajectoires de type "Tartaglia", similaires à celles du volant de badminton que nous avons étudiés au chapitre 2. L’expression (2.15) déduite de cette étude pour la portée des projectiles va pouvoir être appliquée à l’ensemble des balles de sports. Cette formule sera particulièrement adaptée aux sports aérodynamiques où la portée dévie grandement du cas gravitaire. Elle reste valable tant que la rotation de la balle peut être négligée. Les limites de cette hypothèse sont envisagées au paragraphe 3.2.4.

Au regard des observations précédentes, les différences entre les deux trajectoires des chronophotographies de la figure 2.2 paraissent plus compréhensibles. Le basket et le bad- minton représentent les deux sports dans lesquels les valeurs du rapport Umax/U∞ sont

extrêmes. Dans le cas du basket, la vitesse de tir est inférieure à la vitesse terminale. Les effets de la traînée sont faibles et la trajectoire est proche de la parabole galiléenne. À l’in- verse, un dégagé au badminton s’exécute avec une vitesse initiale plus de dix fois supérieure à la vitesse terminale du projectile.

Connaissant les vitesses Umax et U0 pour chaque balle, il est possible de déduire leur

portée maximale xmax. Cette grandeur est l’abscisse maximale qu’un projectile peut at-

teindre en le lançant selon l’angle optimal θmax = θ?(Umax) correspondant à U0 = Umax.

Les valeurs des vitesses maximales, Umax, des angles optimaux de tir relatifs, θmax, et des

portées maximales, xmax, relatives aux différents ballons de sport sont indiqués dans le

tableau 3.1.

sport 2R M Lt Umax U∞ Umax Re∞ (CD)∞ L θmax xmax

(cm) (g) (m) (m/s) (m/s) /U∞ ×105 (m) (◦) (m) badminton 6,3 5,0 13,4 117 6,7 17 0,27 0,64 4,6 22,7 13 ping pong 4,0 2,5 2,7 32 9,5 3,4 0,25 0,36 9,2 31,2 12,6 tennis 6,5 55 24 73 22 3,3 0,95 0,56 49 31,3 67 golf 4,2 45 230 91 48 1,9 1,3 0,23 235 35,6 214 football 21 450 100 51 30 1,7 4,2 0,23 92 36,5 76 volley 21 210 18 33 20 1,65 4,5 0,25 40 36,7 33 softball 9,7 190 76 47 33 1,4 2,0 0,38 111 37,9 78 baseball 7,0 145 110 55 40 1,3 1,9 0,38 163 38,1 111 hand ball 19 450 40 20 36 0,6 4,6 0,20 132 43,1 30 basketball 24 650 28 16 31 0,5 4,9 0,24 98 43,3 20 pétanque 7,3 700 15 10 78 0,12 0,45 0,51 620 44,9 10

Table 3.1 – Caractéristiques des différentes balles de sport et du terrain sur lequel elles sont employées : diamètre (2R), masse (M ), longueur du terrain (Lt), record de vitesse ho-

mologué sur le terrain (Umax), vitesse terminale (U∞) mesurée dans la soufflerie verticale,

rapport entre la vitesse maximale et la vitesse terminale (Umax/U∞), nombre de Reynolds

(Re∞ = ρ2RU∞/η), coefficient de traînée (CD)∞ = 2M g/(ρU∞2 πR2), longueur aérodyna-

mique (L = U∞2 /g). Les deux dernières colonnes contiennent l’angle optimal de tir (θmax)

pour U0 = Umax et la portée maximale associée (xmax).

3.1.2

Portée maximale et taille des terrains

La distance maximale atteignable par chaque balle, xmax, et la taille du terrain sur

grandeurs, la figure 3.3 représente la longueur du terrain Lt en fonction de la distance

maximale atteignable par la balle xmax.

0 50 100 150 200 250 0 50 100 150 200 250 x0(m) L fie ld (m ) baseball tennis softball football volley pétanque

shot putbasket handball

golf

pingpongbadminton

Sports de cible

Sports bornés

Figure 3.3 – Taille moyenne des terrains de sport Lt en fonction de la portée maximale

atteignable xmax par la balle correspondante. Chaque point est issu des données reportées

sur le tableau 3.1 et la ligne noire représente la droite de pente unité.

On observe sur cette figure une corrélation entre la taille des terrains de sport et la portée maximale des balles respectives. De plus la pente de la droite d’interpolation est proche de l’unité. Cette tendance s’explique par le fait qu’il n’y a pas d’intérêt à construire un terrain ni beaucoup plus grand, ni beaucoup plus petit que la portée maximale du ballon employé pour le jeu. La corrélation entre Lt et xmax est particulièrement remarquable dans

le cas du badminton où la portée maximale (xmax = 13 m) est proche de la taille du terrain

(Lt = 13,4 m). Elle est également valable pour les cas du baseball et du softball. Pour

ces deux sports, la différence entre les propriétés des balles entraîne celle de la taille des terrains [55].

En plus de prouver la corrélation entre les deux grandeurs Lt et xmax, le diagramme

3.3 permet de classifier les sports en deux catégories : ceux dont le terrain est moins grand que la portée maximale (xmax < Lt) et ceux où le terrain la dépasse (xmax > Lt). Dans les

sports situés en deçà de la droite solide noire (badminton, tennis, ping pong et volley), il est facile de dépasser les limites du terrain. L’exemple le plus marquant est celui du tennis où la portée maximale de la balle est de 67 mètres alors que le terrain n’est long que de 24 mètres. Pour ces sports, le score représente la capacité des joueurs à garder la balle dans les limites du terrain. C’est pourquoi ils sont qualifiés de « sports bornés ». En revanche pour ceux dont la taille des terrains est supérieure à la portée maximale des balles (c’est le cas du basketball, du football et du golf), les sorties de balles sont plus difficiles. Au football par exemple le terrain mesure entre 90 et 120 mètres alors que la portée maximale n’atteint que 76 mètres. Ces sports correspondent à ceux où il est nécessaire d’atteindre une cible (une cage, un panier ou un trou) pour marquer un point. Ils sont regroupés sous la dénomination de « sports de cible ». On comprend que le choix de construire un terrain plus petit ou plus grand que la portée maximale de la balle a des conséquences sur la

physionomie du jeu. Ces implications peuvent être regroupées en deux catégories : celles stratégiques et celles techniques.

3.1.3

Implications stratégiques et techniques

Les stratégies de jeu seront différentes pour les deux types de sport. Dans les sports bornés, un coup suffit à marquer le point. Le service est une phase déterminante du jeu et participe grandement au score final. En effet les « aces »ou les services gagnants sont courants. La plupart de ces sports autorisent les confrontations un contre un où la balle est échangée un grand nombre de fois. À l’inverse, pour les sports de cible, plusieurs passes sont généralement nécessaires pour atteindre la cible et marquer le point. Conséquemment, ces derniers sont pratiqués en équipe et le nombre de points marqués y est plus faible que dans le cas des sports contenus. Cet effet est amplifié d’autant que la cible est petite ou gardée par un gardien. À la différence des sports bornés, la durée du jeu est fixée par avance et ne s’achève pas pour un score donné.

Les techniques employées pour les deux types de jeu seront également différentes. C’est le cas de l’utilisation de la rotation propre des balles. Comme il sera détaillé dans le paragraphe 3.2, une balle qui possède un vecteur de rotation transverse à sa trajectoire va voir sa portée modifiée [36]. Dans le cas d’une rotation arrière ((ω0∧ U0) · ey > 0) la

portée est augmentée alors que dans le cas inverse (c’est-à-dire pour une rotation avant), elle est diminuée. Dans les sports bornés, c’est généralement ce dernier effet qui est utilisé. La rotation avant permet aux joueurs de conserver la balle dans les limites du terrain. Pour les sports de cible, les balles sont régulièrement lancées avec de la rotation arrière. Celle-ci prolonge la trajectoire des balles et augmente leurs portées. Cet effet est systématiquement employé par les gardiens de football lors des dégagements. Dans tous les cas, la rotation est employée afin de rapprocher la portée des balles de la ligne solide noire dans la figure 3.3.

La taille des terrains de sport, qui a été définie de manière empirique au cours de l’histoire, semble en réalité fixée par la portée maximale des balles utilisées pour le jeu. Deux catégories de sports peuvent être distinguées selon l’importance relative de la taille du terrain avec cette portée maximale.