La table 2.3 résume les points importants de ce chapitre. Pour chaque composante du rayonnement
cosmique, elle présente les enjeux de son étude, ses sources les plus probables, les questions qui lui
sont associées ainsi que quelques expériences récentes qui en effectuent la mesure.
2.3 Tableau récapitulatif
-T
ableau
récapitulatif
rayonnement cosmique enjeux sources potentielles interrogations actuelles expériences
ré-centes
solaire
E.1 GeV – physique solaire
– transport des particules
– Soleil
– atomes du milieu interstellaire
– composition
élémen-tale
– composition isotopique
– degré d’ionisation
– ACE
– STEREO
– SDO
galactique
1 GeV.E .1 EeV – propriétés de la Voie
lactée
– matière noire
– antimatière
– vestiges de supernovae
– pulsars
– étoiles à neutrons
– origine du genou
– nature des sources
– anisotropie
– AMS-02
– CREAM
– ATIC
– BESS
extra-galactique
E&1 PeV – nature des sources
– physique des
ultra-hautes énergies
– noyaux actifs de galaxie
– amas de galaxies
– lobes de radiogalaxies
– sursauts gamma
– anisotropie
– composition
– sections efficaces
– Auger
– Hires
– TA
leptonique
E.10 TeV – sources locales
– matière noire
– RC nucléaire
– vestiges de supernovae
– pulsars
– nature des sources
– position des sources
– anisotropie
– Fermi
– ATIC
– PAMELA
neutrinos
E&100 TeV – astronomie
– sources des UHECRs
– matière noire
– RC nucléaire
– étoiles
– supernovae
– AGN
– nature des sources
– anisotropie
– IceCube
– Antares
– ANITA
– Auger
photonsγ
1 MeV.E.10 TeV – astronomie
– sources des UHECRs
– matière noire
– RC nucléaire
– RC leptonique
– sursauts gamma
– nature des sources
– anisotropie
– HESS
– MAGIC
– VERITAS
– Fermi
-28
-Deuxième partie
Propagation du rayonnement cosmique
galactique
Chapitre 3
Description de la propagation
La propagation du rayonnement cosmique est l’objet de la présente partie. Il s’agit d’un domaine
passionnant aux multiples enjeux tant pour l’étude du rayonnement cosmique que pour celle de ses
processus associés dans la Voie Lactée. La figure 3.1 représente les abondances des éléments dans
le système solaire et dans le rayonnement cosmique galactique. À première vue, on constate que les
abondances relatives des éléments sont similaires. Par exemple, les éléments les plus abondants sont
dans les deux cas H et He suivit de C, N et O. Cependant quelques irrégularités existent. Le béryllium,
grand absent du système solaire, est10
5fois plus représenté dans le rayonnement cosmique. D’autres
éléments sont sur-représentés dans le rayonnement cosmique par rapport à l’abondance solaire : c’est
le cas du lithium, du bore, du fluor, du groupe d’éléments en-dessous du fer, etc.
Comment explique-t-on de telles différences entre ces abondances ? Ce qui caractérise les éléments
cités c’est qu’ils ne sont pas produits dans le milieu stellaire, d’où leur absence dans le système
so-laire. Leur présence dans le rayonnement cosmique signe pourtant l’existence d’un processus créateur.
Celui-ci réside dans la propagation du rayonnement cosmique galactique. Lors de leur trajet dans la
Galaxie, les particules du rayonnement cosmique interagissent avec le milieu interstellaire. Ces
in-teractions peuvent engendrer la destruction de la particule qui se fragmente alors en une particule
plus légère ainsi qu’un ou plusieurs débris. Ce mécanisme, appelé spallation, permet de créer des
élé-ments inexistants dans les sites d’accélération du rayonnement cosmique. On fait donc la distinction
entre les éléments accélérés par les sources, qualifiés de primaires, et ceux produits au cours de la
propagation par spallation d’un noyau plus lourd (les secondaires). Tout le jeu de l’étude de la
pro-pagation consiste à étudier les abondances des noyaux primaires et secondaires pour en déduire des
informations sur les propriétés de la Galaxie.
3.1 L’environnement de propagation
Avant de modéliser la propagation, il est nécessaire de bien mettre en lumière l’environnement
astrophysique de la Galaxie et les phénomènes qui importent pour la propagation du rayonnement
cosmique nucléaire galactique. Puisque la Galaxie peut être décomposée en deux parties (disque
galactique et halo galactique), nous profiterons de cette subdivision naturelle pour structurer cette
section.
3.1.1 Le disque galactique
La Voie Lactée est une galaxie de type spirale. Elle regroupe des centaines de milliards d’étoiles
(200−400×10
9) situées principalement dans un plan appelé disque galactique d’une épaisseur de
FIGURE3.1 – Abondance relative des éléments dans le système solaire (en bleu) et dans le
rayonne-ment cosmique galactique (en rouge) observée par l’expérience ACE [78].
∼100 pcet d’un rayon de∼20 kpc. Elles sont plus particulièrement regroupées dans les bras spiraux
qui s’enroulent autour du centre galactique bien que certaines étoiles existent aussi hors du disque
(les étoiles les plus vieilles). Au centre du disque galactique, aussi appelé centre galactique ou bulbe
galactique, la concentration d’étoiles et de matière est beaucoup plus importante si bien que le centre
galactique apparaît comme la région la plus brillante de la Galaxie. Cependant son profil de densité
est encore mal connu. Enfin, notre Galaxie est dotée en son sein d’un trou noir supermassif appelé
Sagittarius A
∗qui pourrait être la source des rayons cosmiques les plus énergétiques de notre Galaxie.
La géométrie exacte de notre Galaxie est encore mal connue. Ceci est dû à notre position à l’intérieur
même de la Galaxie qui nous empêche d’avoir une vision externe. En contrepartie, cela rend possible
des mesures in situ et l’on peut tirer des informations de l’étude du spectre du rayonnement cosmique
galactique, de sa composition et de son anisotropie.
3.1.1.1 Le milieu interstellaire
Outre les étoiles qui le composent, le disque de la Voie Lactée contient une grande quantité de gaz
et de poussières interstellaires imprégnés de champs magnétiques. Cette matière forme le milieu
in-terstellaire (angl :InterStellar Mediumou ISM). Celui-ci joue un rôle particulièrement important pour
la propagation du rayonnement cosmique puisqu’il est à l’origine des interactions avec les particules
et est donc responsable de la modification des abondances. En masse, le milieu interstellaire est
com-posé à99%de gaz et1%de poussières. En composition, celui-ci est composé de89%d’hydrogène
(moléculaire, neutre ou ionisé), de9%d’hélium et de2%d’éléments plus lourds appelés ’métaux’
dans le jargon astrophysique.
Due à l’action de la force de gravité, une grande partie de la masse du milieu interstellaire se trouve
sous la forme de surdensités de matière appelées nuages interstellaires. On distingue les différents
types de nuages interstellaires selon l’état de l’hydrogène qui s’y trouve.
1. Lorsque l’hydrogène est neutre on parle de régions H I. Ces régions, qui regroupent plus de 90%
de la masse du milieu interstellaire, peuvent être observées à l’aide de la raie de l’hydrogène
3.1 L’environnement de propagation
21 cm. Cette raie correspond à l’énergie de transition entre les deux états de spin de l’unique
électron de l’hydrogène.
2. Si l’hydrogène est partiellement ou totalement ionisé, il s’agit de régions H II. Elle sont plus
brillantes que les régions H I.
3. À ne pas confondre avec les régions H II, les régions H
2sont composées de dihydrogène
mo-léculaire. On parle alors de nuage momo-léculaire.
3.1.1.2 Les champs magnétiques
Les noyaux qui composent le rayonnement cosmique sont par essence des particules chargées. Dans
le régime galactique (E > 1 GeV) on peut même ajouter que les atomes sont entièrement ionisés.
Ils vont donc interagir dans les champs magnétiques. L’origine et l’intensité des champs magnétiques
galactiques sont encore des questions ouvertes [173]. Les champs magnétiques jouent un grand rôle
dans la propagation des particules chargées puisque ces dernières se déplacent en spiralant autour
des lignes de champs. Ils sont composés d’une composante régulière et d’une composante turbulente
dont les amplitudes sont similaires. De ce fait, les lignes de champs ont des directions aléatoires et les
particules aussi. La marche aléatoire des particules s’assimile à un processus de diffusion caractérisé
par une coefficient de diffusionKqui dépend de la structure du champ turbulent. Puisque la déflection
des particules dans les champs magnétiques diminue lorsque l’énergie augmente, les particules se
propagent mieux et ont des coefficients de diffusion plus faibles à haute énergie.
3.1.2 Le halo galactique
Les champs magnétiques - et par extension la diffusion des particules - ne se cantonnent pas au
disque galactique. Autour de ce dernier se trouve le halo galactique. Cette zone, pratiquement dénuée
de matière (étoiles ou milieu interstellaire), est néanmoins remplie de champs magnétiques. La
diffu-sion des particules peut y avoir lieu et elle est donc peuplée de particules. Son profil exact ainsi que
ses dimensions sont assez mal connus. Moyennant des approximations concernant sa géométrie, nous
verrons que sa taille est une des informations que peut apporter l’étude de la propagation du
rayonne-ment cosmique. Notons ici qu’il existe aussi un halo de matière noire qui englobe le halo galactique.
Il ne faut pas confondre les deux, le halo de matière noire ne sera pas abordé dans cette thèse
1.
3.1.3 Les interactions
Lorsque les particules se propagent dans le milieu interstellaire, elles peuvent subir différentes
interactions avec la matière et les champs magnétiques.
1. Les particules perdent de l’énergie par ionisation de la matière du milieu interstellaire si celui-ci
est neutre ou partiellement ionisé. Si il est déjà totalement ionisé, ce sont les pertes
coulom-biennes qui dominent. Les pertes d’énergie ne jouent qu’un rôle à basse énergie (E < 1 GeV
[118]).
2. Les particules du rayonnement cosmique peuvent aussi subir des interactions inélastiques avec
les particules du milieu interstellaire. Ces réactions de spallations jouent un rôle très
impor-tant dans la propagation puisqu’elles sont responsables de la modification de la composition du
rayonnement cosmique lors du transport. L’effet de la spallation sur la composition du
rayon-nement cosmique est étudié dans la section suivante.
3. Pour les particules chargées plus légères que les noyaux (électrons et positrons), on peut rajouter
les effets d’émission de rayonnement synchrotron et Bremsstrahlung, respectivement dans le
cas d’interaction avec des champs magnétiques et de la matière.
Dans le document
Mesure et phénoménologie du rayonnement cosmique avec l'expérience CREAM
(Page 41-49)