5.4 Les simulations du détecteur
6.1.2 Reconstruction de la trajectoire
FIGURE6.1 – Logarithme de l’énergie déposée (en MeV) dans le calorimètre reconstruite en utilisant
seulement le gain bas (en abscisse) et en utilisant aussi le gain haut (en ordonnée) pour les cellules
avec plus de 8000 coups ADC en gain bas.
6.1.2 Reconstruction de la trajectoire
Le code d’analyse comprend deux algorithmes de reconstruction de la trajectoire de la particule à
l’aide du calorimètre. Tous deux utilisent le fait que le dépot d’énergie de la particule est orienté selon
sa direction d’arrivée.
6.1.2.1 Méthode des barycentres
Présentation de la méthode
Dans cet algorithme, la direction dans les plans X-Z et Y-Z est reconstruite à partir des barycentres
en énergie de chaque couche du calorimètre. Nous avons vu que le calorimètre est composé d’un
empilement de couches de tungstène et de scintillateurs successivement orientés selon X et Y. On
obtient ainsi deux cartes de l’énergie déposée indépendantes et projetées selon X-Z et Y-Z. L’analyse
des deux plans est similaire et nous nous consacrerons donc uniquement au plan X-Z. Il est composé
de 10 couches de 40 cellules chacune. Dans chaque couche, on va chercher la cellule la plus touchée
puis calculer le barycentre de cette cellule et de ses deux voisines pondérées par l’énergie déposée. On
peut ensuite définir la droite qui passe le plus près de ces barycentres analytiquement. Dans chacun
des plans, on obtient donc une droite et les deux droites forment la trajectoire. Bien sûr, cette méthode
n’utilise pas toute l’information disponible dans le calorimètre puisque tous les pixels ne sont pas
utilisés pour reconstruire la trajectoire. En contrepartie, cette méthode est peu sensible au bruit. En
effet, il y a peu de chance qu’une cellule bruitée soit la plus énergétique de sa couche car les gerbes
6.1 Reconstruction de l’énergie et de la trajectoire avec le calorimètre
produisent des signaux plus fort. Il est donc peu probable qu’un barycentre soit construit autour
d’une cellule bruité et les cellules bruitées non prises en compte pour les barycentres ne jouent aucun
rôle sur la trajectoire reconstruite. La figure 6.2 représente la visualisation dans le plan X-Z d’une
gerbe développée par un candidat proton de∼ 500 GeV. On peut y observer le niveau de bruit non
négligeable à l’extérieur de la gerbe. Il est donc important d’avoir un algorithme robuste face au bruit.
FIGURE6.2 – Energie déposée dans chaque cellule du calorimètre du plan X-Z par un candidat proton
de∼500 GeV.
Limitation de la méthode
Le problème de cette méthode est qu’elle possède un axe préférentiel. En effet, pour toutes les couches
de calorimètre où du signal est présent, on peut reconstruire un barycentre même si la trajectoire de
la particule n’y passe pas. Cela pose des problèmes lorsque les gerbes sont trop inclinées car elles
sont systématiquement reconstruites de manière verticale. Le problème est illustré par la figure 6.3,
qui représente le plan Y-Z du calorimètre pour un proton incliné de 2.5 TeV simulé avec GEANT3.
Bien qu’arrivée de manière horizontale, la gerbe est suffisamment large pour laisser du signal dans 3
couches de calorimètre selon Y (et 3 couches selon X, que l’on ne voit pas ici), et le système
d’acqui-sition se déclenche. La méthode des barycentres reconstruit une trajectoire quasiment verticale. Sans
FIGURE6.3 – Représentation du plan Y-Z du calorimètre pour un proton incliné de 2.5 TeV simulé
avec GEANT3. Alors que la trajectoire de la particule est représentée par la droite horizontale,
l’al-gorithme utilisant les barycentres reconstruit une trajectoire quasiment verticale.
ceux dont la trajectoire reconstruite de la particule incidente passe à travers les deux plans de SCD
situés au-dessus du calorimètre. Si la trace des évènements inclinés est reconstruite verticalement,
ils passeront donc les coupures. À basse énergie, ce problème est supprimé par le fait que les gerbes
inclinées ne sont pas assez énergétiques pour déclencher le système d’acquisition du calorimètre. En
effet, la condition de déclenchement est de laisser plus 13.7 MeV d’énergie déposée pour 6 cellules
situées dans des couches successives. Pour déclencher, une gerbe verticale doit donc posséder une
extension longitudinale de 6 couches. Pour une gerbe horizontale, c’est son extension latérale qui
doit être supérieure à 6 couches et cela nécessite de plus hautes énergies. À haute énergie, cela peut
se produire, et de plus en plus d’évènements inclinés sont capables de déclencher l’acquisition et
la proportion d’évènements dans lesquels la particule possède une trajectoire inclinée augmente. En
pratique, la majorité de ces évènements sont rejetés par la coupure de l’analyse suivante, qui requière
une charge mesurée dans les deux plans de SCD : à cause de sa trajectoire inclinée, la particule n’est
pas passée par le SCD et n’a donc pas laissé de signal. Cependant, si la trajectoire mal reconstruite
pointe vers un pixel du SCD bruité on va reconstruire une charge qui n’existe pas. Ce biais pose aussi
des problèmes au niveau de de l’estimation de l’acceptance effectuée à partir des données simulées.
En effet, l’acceptance est calculée comme la proportion d’évènements déclenchant l’acquisition et
dont la trace passe à travers les deux plans de SCD. Nous reviendrons sur l’erreur sur l’acceptance
engendrée par un biais sur la trajectoire reconstruite dans la partie 9.2.2.
6.1.2.2 Reconstruction de la trace par ajustement decluster
Cette nouvelle méthode permet de surmonter ce problème. Nous allons détailler son
implémenta-tion ici. Elle est avant tout basée sur l’ajustement parχ
2de la trace. Cependant, en présence de bruit
un tel ajustement nécessite un travail de pré-sélection des cellules à ajuster qui constitue le cœur de
la méthode.
Sélection d’uncluster
Pour s’affranchir d’un maximum de cellules bruitées, on commence par chercher un groupe de
cel-lules qui constituera la gerbe et qui sera appelé uncluster. Unclusterest formé par un ensemble de
cellules qui se touchent horizontalement, verticalement ou encore diagonalement. Puisque l’on peut
avoir plusieursclusters, on sélectionne celui composé du plus grand nombre de cellules. Puisque
l’in-fluence d’une seule cellule bruitée peut modifier drastiquement la convergence de l’ajustement, on va
chercher à n’avoir aucune cellule bruitée. Pour cela, on va encore restreindre le nombre de cellules
sélectionnées et ne garder dans leclusterque les 7 cellules les plus touchées. Dans certaines
configu-rations, ces 7 cellules constituent un amas trop isotrope qui ne permet pas de reconstruire la direction
de la gerbe et dans ce cas, on ajoute des cellules supplémentaires auclusterqui permettent à la gerbe
d’avoir une extension d’au moins70 mm. Demander une telle extension permet de briser l’isotropie
de cesclustersafin de faire apparaître l’axe de la gerbe.
Ajustement de la trace et vérification
Les cellules sélectionnées sont ensuite ajustées par minimisation d’unχ
2. Sa formule est la suivante :
χ
2/ndf = 1
n
n∑
iE
2 ir
⊥ i, (6.1)
où E
ireprésente l’énergie dans la cellule ietr
⊥i
la distance de la cellule à la trace. Cette distance
dépend des coordonnées de la celluler⃗
iet de la trajectoire représentée par une droiteZ =aX+boù
6.1 Reconstruction de l’énergie et de la trajectoire avec le calorimètre
aetbreprésentent les paramètres de l’ajustement. En prenant un pointAquelconque appartenant à la
droite et⃗uson vecteur directeur normé et M le point de la cellule de coordonnéer⃗
i,r
⊥i
s’exprime :
r
⊥i=
−−→
AM−||
−−→
AM· −→u||
||−−→AM|| ⃗u
.
Dans la formule 6.1, les distances sont pondérés par le carré de l’énergie et non l’énergie. Cela permet
d’accorder plus d’importance aux cellules ayant un fort signal. En pratique, cela permet une meilleure
reconstruction de la trajectoire.
À l’issu de la minimisation et dans le cas oùχ
2/ndf >10, une dernière vérification est effectuée
pour s’assurer que les cellules sélectionnées ne sont pas bruitées. On effectue de nouveaux
ajuste-ments dans lesquels une cellule est désélectionnée à chaque fois. Ainsi, si une cellule bruitée est
dés-électionnée, on obtient une nette amélioration duχ
2/ndf. On garde ensuite l’ajustement qui minimise
leχ
2/ndf. Les résultats obtenus par les deux méthodes sont représentés sur la figure 6.4. Elle montre
FIGURE6.4 – Résolution sur l’angle zénithal (en radians) avec les deux méthodes calculée à partir
des données simulées avec GEANT3 : angle moyen entre la trajectoire reconstruite et la trajectoire
incidente. Les barres d’erreurs représentent la dispersion sur la valeur de cet angle.
l’évolution de l’erreur sur l’angle azimuthal dans les données simulées pour les deux méthodes. On
constate que les deux méthodes donnent des résultats similaires à basse énergie mais que la résolution
se dégrade significativement dans le cas de la méthode des barycentres. Cette dégradation de la
ré-solution est en partie due à l’augmentation du nombre d’évènements inclinés capables de déclencher
le système d’acquisition et qui sont systématiquement mal reconstruits. D’autre part, même pour les
évènements standards, il semblerait que la résolution soit meilleure avec la méthode d’ajustement des
clusters. Cependant, il faut bien garder à l’esprit que le point sensible de cette dernière méthode réside
dans sa plus grande sensibilité au bruit et que celui-ci n’est pas modélisé dans les données simulées.
Bien qu’elle soit difficile à estimer, la résolution dans les données réelles semble moins bonne que
dans les données simulées, même si l’on garde un fort pouvoir de réjection des évènements inclinés.
Dans le document
Mesure et phénoménologie du rayonnement cosmique avec l'expérience CREAM
(Page 113-117)