5.3 Les sous-détecteurs
5.3.3 La Cherenkov Camera (CherCam)
Le nombre de photons produits dans ce cône est proportionnel à la longueur traversée par la particule
et au carré de la charge de la particuleZ
2[77] :
dN
dλ =
2παZ
2L
λ
2sin
2θ
coùLest l’épaisseur traversée par la particule incidente,α≈
1371la constante de structure fine etλ
re-présente la longueur d’onde du photon Cherenkov. En comptant les photons, on peut donc remonter à
la charge de la particule incidente. Ici, les photons Cherenkov sont produits lorsque la particule passe
à travers un radiateur plastique d’épaisseur1 cmet ils sont détectés à l’aide de photo-multiplicateurs.
Tout comme dans le cas du TCD, la mesure du signal charge est suffisamment rapide pour être
ef-fectuée avant le passage des particules albédoes qui pourrait perturber la mesure. L’efficacité du CD
s’effondre pour les particules de vélocité inférieure à β ∼ 0.7 car les particules, qui sont alors en
deçà du seuil Cherenkov, ne produisent plus de photons. Grâce à cette propriété, le CD peut servir
de veto afin d’empêcher le TCD de déclancher sur les évènements de trop basse énergie (inférieure à
quelques centaines de MeV/n) et pour lesquels il est impossible de mesurer l’énergie.
5.3.3 La Cherenkov Camera (CherCam)
Tout comme le Cherenkov Detector[147], CherCam
3basa sa mesure de la charge sur le comptage
du nombre de photons Cherenkov produits par le passage de la particule incidente à travers un milieu
radiateur. Le détecteur se décompose en un plan radiateur dédié à la production de la lumière et un
plan de photo-multiplicateurs pour le comptage des photons. Contrairement au Cherenkov Detector,
CherCam ne s’affranchit pas du bruit causé par les particules albédoes grâce à une mesure des photons
ultra-rapide effectuée avant le passage de ces dernières à travers le détecteur. En tant qu’imageur
Cherenkov, CherCam utilise la connaissance de l’empreinte sur le plan de détection laissée par le
cône Cherenkov pour exclure le signal des particules albédoes. En effet, connaissant la trajectoire de
la particule incidente on peut reconstruire l’empreinte que va laisser le cône Cherenkov sur le plan
de photo-multiplicateurs. L’intersection du cône et du plan forme une ellipse dont la géométrie ne
dépend pas de la charge de la particule incidente mais seulement de sa trajectoire. En comparant le
signal attendu avec le signal mesuré, on peut rejeter les photo-multiplicateurs où la différence est
trop importante car ils sont susceptibles d’avoir été traversés par une particule albédoe. CherCam a
été conçu et réalisé en partie par le LPSC, en collaboration avec le CESR de Toulouse et l’UNAM
de Mexico. Dans les deux paragraphes qui suivent, nous allons détailler le plan de production des
photons et le plan de détection.
3. La décision par le groupe AMS-CREAM du laboratoire de s’impliquer dans l’expérience à travers la création d’un
nouvel instrument date de 2004. Cette décision survient suite à l’accident de la navette spatiale Colombia le1
erfévrier 2003.
À cette époque le groupe est entièrement engagé sur se développement du Ring Imager Cherenkov (RICH) de l’expérience
AMS-02 qui doit être acheminé sur la Station Spatiale Internationale en navette. Suite à l’accident, l’annulation par la
NASA des vols suivant menace l’expérience AMS-02 et le groupe décide de se tourner vers l’expérience CREAM pour
mettre son expérience à profit en construisant un détecteur similaire au RICH, CherCam. CherCam est caractérisé par un
temps de développement extrêmement cours puisqu’il vola et prit des données avec succès lors du troisième vol de CREAM
entre décembre 2007 et janvier 2008, soit 3 ans après le début du projet.
5.3.3.1 Le plan de production des photons
Il est constitué de tuiles carrées d’aérogel de10.5 cmde longueur et de1.05 cmd’épaisseur. Les
dimensions des tuiles sont relativement petites du fait de leur extrême fragilité. En effet, l’aérogel est
un matériau transparent composé à99%d’air et à1%d’agrégats de particules de silice. Les aérogels
possèdent un indice entre 1.01 à 1.07. L’aérogel utilisé est produit par le fabricant Matsushita et
possède la particularité d’être hydrophobe et donc peu sensible à l’humidité qui pourrait entraîner
des variations d’indice et de transparence, voire même modifier la structure des tuiles de manière
irréversible. Le choix de l’indice est crucial afin de maximiser la collection des photons. Deux effets
sont à prendre en compte. Tout d’abord, l’indice optique dicte la vitesse minimale que doivent avoir
les particules pour être en régime supra-luminique à travers la formule triviale de célérité de la lumière
et d’autre part il régit la valeur de l’angle d’ouverture du cône Cherenkov. En conclusion, un indice
élevé permet d’avoir un seuil en énergie plus bas mais augmente l’angle du cône Cherenkov. Ceci
peut induire une perte d’acceptance puisque, pour les évènements inclinés, les photons peuvent être
en situation de réflexion totale à l’intérieur de l’aérogel. L’indice de 1.05 permet un bon compromis
entre ces deux phénomènes et a donc été sélectionné pour équiper le détecteur. L’aérogel n’est pas
strictement transparent et sa transmissiontdépend de la longueur d’ondeλ, de l’épaisseur traversé et
d’un coefficient appelé clartéCsuivant :
t=A(λ)e
−dC/λ4,
où A(λ) est un facteur de normalisation qui dépend de la longueur d’onde. La clarté définit donc
la proportion de photons qui diffusent dans l’aérogel et sortent du cône Cherenkov : les photons
Rayleigh. Dans notre cas, l’aérogel possède une clarté de 0.016µm/cm et environ la moitié des
photons Cherenkov vont subir une diffusion Rayleigh. Le plan d’aérogel est constitué d’un pavage
de 10×10 tuiles sur deux épaisseurs. Les tuiles sont fixées dans la grille d’aluminium par groupe
de 2×2×2. Elles reposent sur un film de mylar tendu. Une photographie du plan d’aérogel en
cours de montage est présentée à la figure 5.4. On peut y voir les groupement tuiles d’aérogel dans
leur structure métallique. Le plan d’aérogel est recouvert de mousse sur la partie supérieure afin
d’absorber les photons provenant du bas (et donc les photons des particules albédoes, voir 5.5).
Une fois la particule sortie de ce milieu, elle n’initie plus la production de photons. Dans le cas d’une
particule d’incidence normale au plan d’aérogel, tous les photons auront été émis sur une longueur
de∆e= 21 mm. Puisque l’indice de l’aérogel est de 1.05 et que les particules sont ultra-relativistes
β ≈1et par conséquent l’angle Cherenkov vautθ
c= 0.3 rad = 17
◦. Les photons vont donc former
sur le plan de détection des anneaux d’épaisseur :
∆R= ∆etanθ
c≈0.7 cm
, et de rayon :
R=htanθ
c≈4.2 cm
, oùh= 11.05 cmreprésente la distance entre l’aérogel et le plan de détection.
5.3.3.2 Le plan de détection des photons
La mesure du nombre de photons s’effectue à l’aide des photo-multiplicateurs XP3112 de Photonis
dont le but est de convertir le nombre de photons collectés en un signal électronique. Ces
photo-multiplicateurs de géométrie cylindrique et de un pouce de diamètre sont répartis pour former un plan
de40×40photo-multiplicateurs espacés les uns des autres de27.5 mm. On peut calculer qu’un tel
espacement avec les dimensions du photo-multiplicateur produit une efficacité de recouvrement du
5.3 Les sous-détecteurs
FIGURE5.4 –Tuiles d’aérogel en cours de montage sur le support.
FIGURE5.5 –Schema et représentation de CherCam, tirés de [147]. Une particule traverse le plan d’aérogel
et initie l’émission de photons Cherenkov. Ceux-ci sont collectés dans le plan des photo-multiplicateurs.
plan de 50% et donc aussi 50%de zones mortes où les photons ne sont pas captés. La résolution
spatiale de ce plan, donnée par la distance entre les centres des photo-multiplicateurs est donc aussi
27.5 mm. Avant de se propager hors du plan d’aérogel, le cône Cherenkov possède une dimension
in-férieure à cette résolution. Si la collection était effectuée juste après la sortie du plan radiateur, un seul
photo-multiplicateur serait touché et il serait impossible de distinguer le signal des photons
Cheren-kov de celui produit par le passage de la particule incidente à travers le verre du photo-multiplicateur.
De plus, ce dernier est tellement important qu’il fait saturer le photo-multiplicateur et rend la
me-sure de charge impossible. En espaçant le plan de détection de plan radiateur de 11.05 cm, on laisse
au cône Cherenkov le temps de croître. Son rayon atteint3.3 cmet recouvre alors plusieurs
photo-multiplicateurs. On peut donc distinguer le signal des photons Cherenkov qui forment un anneau et le
signal central qui signe le passage de la particule incidente. Les photo-multiplicateurs sont regroupés
en modules de4×4et chaque module est lu par une seule carte de lecture. Les modules sont insérés
dans un matériau plastique appelé ertalyte. L’ertalyte forme une plaque percée de trous qui laissent
apparaître la partie supérieure des photo-multiplicateurs. La partie inférieure est encastrée dans un
cadre en aluminium de110.6×110.6 cm
2permettant la fixation et la rigidité de l’ensemble.
Dans le document
Mesure et phénoménologie du rayonnement cosmique avec l'expérience CREAM
(Page 100-103)