5. Synthèse des résultats et discussion
5.1 Synthèse des résultats des articles
Dans le premier article (Flowers, Birnie et Hons, 2015), les auteurs
mettent en évidence l’importance de la mise en place des procédures de
préparation et des interventions psychologiques pour les soins qui peuvent
être douloureux. En effet, ces différentes techniques (l’hypnose, les stratégies
cognitivo-comportementale et la distraction) permettent de diminuer la
douleur provoquée par les procédures invasives, ainsi que la détresse, de
manière générale. En ce qui concerne l’hypnose, les auteurs ont identifié douze
études sur les quatorze analysées qui démontrent que l’hypnose est efficace
pour soulager ces deux problématiques, et plus particulièrement lorsque
l’enfant a une sensibilité élevée à l’hypnose et que cette dernière est pratiquée
par un soignant. Dans les articles qu’ils ont analysés, l’effet bénéfique de
l’hypnose a surtout été prouvé sur la douleur rapportée par l’enfant lui-même,
rarement sur la douleur observée et sur les mesures comportementales. De
plus, l’hypnose se montre plus efficace que d’autres techniques
non-pharmacologiques étudiées, comme la distraction, surtout si les enfants y sont
très réceptifs.
Pour le deuxième article (Vinson, Davis et Logan 2014), l’hypnose a
été insérée dans la médecine de type bio-comportementale, avec
l’entraînement à la relaxation et le biofeedback, et elle montre un effet positif
sur les mécanismes d’adaptation à la douleur, ce qui pourrait, selon les
auteurs, diminuer le risque de développement de comorbidités psychosociales.
Elle se révèle également efficace par le fait que le patient devient actif et qu’il
a plus de maitrise sur sa douleur, ce qui permet de l’autonomiser dans
l’apprentissage de la gestion de sa douleur. De plus, le degré d’utilisation des
méthodes alternatives en général dépend de certaines caractéristiques,
comme le genre, le niveau d’éducation des parents, l’intensité de la douleur et
l’incapacité fonctionnelle. En effet, le fait d’être de sexe féminin et d’avoir des
scores élevés dans les trois autres aspects augmentent la probabilité
d’utilisation de méthodes alternatives. Les auteurs de cet article expliquent
également que certaines méthodes sont plus efficaces pour certains types de
douleur, l’hypnose s’étant montré particulièrement utile chez les enfants avec
une douleur abdominale.
Dans le troisième article (Stinson & al., 2008), deux des articles étudiés
par les auteurs ont analysé l’effet de l’hypnose. Dans le premier article, sept
études sur huit montrent son efficacité pour les procédures douloureuses en
oncologie pédiatrique, mais la dernière n’a pas apporté de résultats en faveur
de cette pratique. Les auteurs expliquent donc que d’autres recherches
seraient nécessaires pour apporter encore plus d’éléments démontrant son
efficacité. Pour le deuxième article, qui a un niveau de qualité de preuve plus
élevé que le précédent, l’hypnose et la distraction ont un effet significatif sur
la diminution de la douleur engendrée par des procédures utilisant des
aiguilles. Les auteurs concluent donc que ces deux méthodes (hypnose et
distraction) sont efficaces et qu’elles devraient être utilisées au quotidien dans
la pratique, tout en continuant à faire des recherches plus approfondies et en
utilisant des outils d’évaluation de qualité pour appuyer leurs suppositions.
En ce qui concerne le quatrième article (Kendrick & al., 2016), qui est
une revue critique mise en place afin d’analyser les preuves de l’efficacité de
l’hypnose dans le traitement de la douleur aigue lors d’interventions, les
résultats démontrent que de manière générale, l’hypnose en tant que thérapie
accessoire s’est révélée efficace pour l’intensité et le caractère désagréable de
la douleur. Dans cette revue, les auteurs ont également relevé que son effet
est encore plus bénéfique si des séances sont pratiquées avant le jour de
l’intervention et si le niveau de sensibilité à l’hypnose est élevé. De plus, même
si la mise en place de cette pratique a un certain coût, elle permettrait en
contrepartie de diminuer le temps de la procédure douloureuse, d’éviter
certaines complications ainsi que l’utilisation excessive d’analgésiques, mais
aussi de raccourcir la durée de séjour à l’hôpital. L’hypnose se révélerait donc
propice aux économies dans la branche de la santé. Les auteurs
recommandent tout de même la poursuite des recherches mais en utilisant
des conditions de contrôle efficaces, ce qui n’était pas tout à fait le cas dans
leur revue puisque seulement cinq des essais randomisés contrôlés sur
vingt-neuf avaient obtenu le score maximal de qualité méthodologique.
Le cinquième article est une synthèse de revues systématiques
analysant l’efficacité des méthodes alternatives et complémentaires sur
différents symptômes ou pathologies que peuvent subir les enfants. Dans cette
étude, les auteurs (Hunt & Ernst, 2009), relèvent que l’hypnose est la thérapie
qui semble la plus efficace pour lutter contre la douleur parmi celles qui ont
été testées (acuponcture, chiropraxie, phytothérapie, homéopathie, massage,
yoga) et que la qualité de preuve est meilleure pour l’hypnose. Un des essais
randomisés retrouvé dans l’une des revues a montré que l’hypnose permettait
aussi de diminuer la durée du séjour à l’hôpital ainsi que la détresse observée.
Dans d’autres essais, l’hypnose s’est révélée bénéfique pour atténuer les
nausées et vomissements post-opératoires (les enfants ont eu moins recours
aux antiémétiques), pour gérer l’incontinence ainsi que pour assister
l’induction de l’anesthésie. Malgré ceci, les auteurs préconisent également des
recherches supplémentaires utilisant des méthodologies et stratégies de
meilleure qualité.
Dans ce sixième article (Tomé-pires, 2012), les moyens standards
(comprimés antalgiques, anesthésie locale ou pommade anesthésiante) de
gestion de la douleur associés à l’hypnose démontrent une diminution de la
douleur significative. L’hypnose, comparée aux autres méthodes de gestion
psychologique de la douleur (distraction, relaxation ou méthode
cognitivo-comportementale), diminue de façon plus significative la douleur. Toutes les
études ont rapporté que l'hypnose est plus efficace pour gérer la douleur que
la condition de contrôle de base (application de pommade anesthésiante
seule). L’efficacité de l’hypnose se voit renforcée si la sensibilité de l’enfant à
l’hypnose est forte. La réduction de la douleur, de l'anxiété et de la détresse
observée était liée au niveau d'hypnotisation dans les groupes d'hypnose. Il y
a également des différences dans la réponse au traitement selon l’âge des
participants : les enfants de moins de 14 ans ont mieux répondu (et de manière
significative) que les adolescents pendant le traitement jusqu'à 6 mois après
les interventions. Les résultats de ces études ont démontré la supériorité de
l'hypnose par rapport aux autres méthodes psychologiques ou aux traitements
médicamenteux dans la prise en charge de la douleur du cancer pédiatrique.
Les patients des groupes utilisant l'hypnose ont signalé moins de douleur et
d'anxiété et ont montré moins de détresse comportementale que les groupes
témoins.
Dans l’article de Richardson, Pilkington et Hons (2006), les patients
pratiquant l’hypnose ont signalé moins d'anxiété et de douleur que les groupes
témoins qui utilisaient la distraction pour diminuer la douleur. Le niveau
d'hypnotisation est significativement associé au bien-être lors du traitement
dans les groupes d'hypnose et l'utilisation de l'autohypnose a montré moins
d'avantages thérapeutiques. Les patients qui ont reçu l'hypnose ou la thérapie
comportementale cognitive (CBT) ont signalé moins de douleur et d'anxiété
liée à la douleur que dans le groupe témoin. Lorsque les parents utilisent les
méthodes d’hypnose avec leurs enfants, la douleur a été diminuée plus
significativement que les parents utilisant la distraction avec leurs enfants. Les
participants qui ont reçu une formation pour l’autohypnose ont démontré les
mêmes effets significatifs de diminution de la douleur que lorsque l’hypnose
est pratiquée par un intervenant externe. L’hypnose a démontré une
diminution significative de la douleur et de l’anxiété chez les 3 à 6 ans, ce qui
n’est pas le cas avec la distraction. Les participants âgés de 7 à 10 ans
présentent des diminutions significatives de la douleur et de l'anxiété évaluées
par l'observateur en pratiquant l’hypnose ou la distraction. L'anxiété est
considérablement réduite par l'hypnose mais pas par la distraction. Pendant
les ponctions lombaires, l'hypnose a montré une réduction statistiquement
significative de la douleur.
L’étude du huitième article (Liossi, White et Hatira, 2006) a comparé
la gestion de la douleur avec l’application d’anesthésique local EMLA, à
l’association EMLA et attention focalisée et à l’EMLA avec hypnose. La moyenne
d’âge dans l’étude est d’environ 8 ans. L’étude a analysé l'anxiété anticipée,
les comportements de détresse, la douleur liée à la procédure et l'anxiété
éprouvée face aux procédures invasives liées au cancer. La correction
Bonferroni a permis de calculer le seuil de significativité et d’évaluer l’intervalle
de confiance, et l’effet de l’hypnose a été évalué par des corrélations entre la
sensibilité à l’hypnose et les bénéfices thérapeutiques. Les résultats ont montré
que l’association EMLA et hypnose est la plus efficace dans la diminution de la
douleur chez les enfants, même si l’attention focalisée associée à l’EMLA
montre également une réduction de la douleur.
L’article de Birnie et al. (2014) a analysé plusieurs documents
comparant la gestion de la douleur par analgésique local, par analgésique et
distraction et par analgésique avec hypnose. Les auteurs ont identifié quelques
facteurs renforçant l’efficacité de l’hypnose ou de la distraction : la
participation d’adultes, l’utilisation de basse ou haute technologie,
l’intervention active ou passive et le choix de la distraction par l'enfant. La
haute technologie utilise des tablettes tactiles ou des consoles de jeux et les
interventions actives peuvent avoir lieu lorsque l’enfant lit une histoire ou fait
un jeu. Les résultats ont montré que la distraction était un bon moyen de
diminution de la douleur autoévaluée par les enfants. Les auteurs ont aussi
évalué les effets de l’hypnose sur la gestion de la douleur et de la détresse, et
les résultats indiquent un effet significatif sur l’autoévaluation de ces deux
symptômes. Les auteurs ont fait évalué les effets de cette méthode alternative
par des observateurs, mais les données étaient insuffisantes et n’ont pas pu
être analysées. De plus, il n’a pas été possible d’effectuer des comparaisons
entre les différents groupes d’âge.
Dans le dixième article (Accardi & al., 2009), les auteurs ont étudié
plusieurs méthodes psychologiques de gestion de la douleur, principalement
la distraction, l’hypnose et les traitements médicamenteux antalgiques. Ils ont
comparé les associations de plusieurs techniques : l’anesthésique local EMLA
et l’hypnose ; l’EMLA et distraction ; et l’EMLA seul. Lorsque l’hypnothérapeute
est présent avec l’enfant dans la salle de traitement, l’hypnose est plus efficace
que la distraction. Quand l’hypnose est utilisée tout au long de l’intervention
telle qu’une ponction lombaire, la douleur est soulagée dans une plus grande
mesure que si l’hypnose est effectuée au début de l’intervention seulement.
Les enfants les plus jeunes (3 à 6 ans) ou avec une forte sensibilité à l’hypnose
voient une forte diminution de la douleur et de la détresse durant le traitement.
L’EMLA avec l’hypnose s’est avéré être l’association la plus efficace de gestion
de douleur et de détresse chez les enfants. Avec l’hypnose par métaphore
utilisée et entraînée pour l’intervention que les enfants subissent, les
participants ont évalué la douleur comme étant moins intense et moins
longtemps présente en post-opératoire que les enfants qui reçoivent des
antalgiques médicamenteux. L’étude a aussi observé les suggestions directes
(fourni par l’hypnotiseur) et indirectes (souvenirs d’arômes ou de températures
par exemple) d’induction d’hypnose : il y a eu des réductions significatives de
la douleur mais sans différences entre les deux types de suggestions.
Nathan et Stinson (2015) mentionnent dans leur article que neuf études
ont examiné l’effet de l’hypnose sur la douleur chez les enfants et les jeunes
adultes atteints de cancer. Les auteurs comparent l’efficacité de l’hypnose
directe par rapport à l’hypnose indirecte sur la douleur liée aux ponctions
lombaires. Il a été démontré que la douleur était en diminution par rapport à
une ponction lombaire standard sans hypnose. Il n’y a pas de différence de
résultats entre l’hypnose directe et indirecte mais une diminution de la douleur
a été constatée dans ces deux groupes. Sept des études sur l’hypnose ont
montré des résultats significatifs de l’efficacité de l’hypnose sur la douleur
procédurale.
Dans le douzième article (Thrane, 2013), de nombreuses modalités
ont été étudiées pour le soulagement des symptômes chez les enfants, y
compris l'hypnose, l'acupuncture, le massage, la réalité virtuelle ou la prière.
Les résultats de cet article démontrent que les enfants ayant un haut seuil de
sensibilité à l’hypnose ressentent moins de douleur et d’anxiété lors de
ponction veineuse ou de ponction sur une chambre implantable que les enfants
ayants un bas seuil de sensibilité à l’hypnose. Dans d’autres études analysées
dans cet article, l’hypnose est plus efficace pour diminuer la douleur et l’anxiété
lors d’aspiration de la moelle osseuse que d’autres techniques alternatives et
antalgies médicamenteuses. Dans d’autres études encore, l’hypnose s’est
montrée efficace en complément de l’utilisation de crème anesthésiante EMLA.
L’article de Rheingans (2007) démontre qu’il existe une solution
potentielle au dilemme de la gestion des symptômes résidant dans les
thérapies complémentaires non-pharmacologiques. Les résultats mentionnés
dans cet article affirment que l’hypnose a été efficace pour diminuer la
détresse chez des enfants atteints de cancer. L’hypnose est également efficace
pour réduire de manière considérable les nausées et la quantité de
vomissements causés par le traitement du cancer. Dans une autre étude, il a
été observé que l’hypnose est efficace pour réduire la détresse observée liée
aux procédures invasives mais cela n’a pas été vérifié auprès des enfants
(autoévaluation de la détresse). Des résultats prometteurs de l’efficacité de
l’hypnose sur la douleur procédurale ont été observés mais il serait intéressant
de procéder à des recherches complémentaires.
Dans le quatorzième article (Liossi, White et Hatira, 2009), les résultats
ont démontré que les patients ayant reçu une anesthésie locale EMLA
combinée à des séances d’hypnose ont reporté moins d’anxiété avant le soin
et moins de douleur et d'anxiété liées à la procédure douloureuse. Les résultats
montrent que les patients présentent moins de détresse comportementale
pendant la procédure que ceux n’ayant pas eu ce type d’intervention. Les
parents dont les enfants ont été assignés au groupe utilisant l’hypnose
associée à l’EMLA ont vécu moins d'anxiété pendant la procédure de leur
enfant que les parents de l’autre groupe (uniquement reçu l’intervention de
l’hypnose ou de l’EMLA). Les résultats ont également démontré qu’il est
possible d’apprendre l’autohypnose aux enfants et que cela ne nécessite pas
un temps considérable mais qu’au contraire il est possible d’apprendre
l’autohypnose dans un court laps de temps (durée non-précisée par les
auteurs). À l'avenir, des études sur l'hypnose et les interventions
pharmacologiques seront nécessaires pour décrire comment les facteurs
individuels influencent l'efficacité de ces interventions. Plus précisément, un
examen minutieux de l'impact du niveau de développement, des compétences
cognitives et des modalités de réponse au traitement constituera une direction
importante pour la recherche. En outre, les chercheurs devraient se concentrer
sur les coûts avantageux de l'hypnose comparés à ceux des anesthésies
locales.
Dans l’article de Chester et al. (2016), les auteurs expliquent que
l’hypnose pourrait être une technique de soins supplémentaire utilisée par le
personnel soignant dans le domaine des soins de plaies, pour diminuer les
souffrances et compléter la gestion pharmacologique existante des enfants
brûlés. Si l'intervention s'avère efficace, les soignants pourraient être formés
aux techniques hypnotiques. De plus, la création d'un film de distraction
projeté dans la salle d’attente avant les soins de plaies, pourrait induire (ou
faciliter) l'hypnose pour les enfants et les inviter à la dissociation des
perceptions nocives et anxieuses. Les résultats de cette étude peuvent donc
donner une direction potentielle et novatrice dans la recherche future. Il est
nécessaire de continuer à identifier les liens entre la douleur, l'anxiété, le stress
et le temps de guérison dans le traitement des brûlures aiguës afin d’apporter
des éléments supplémentaires pour la pratique clinique.
Dans le document
Présentation d'une méthode innovante dans la gestion de la douleur en pédiatrie
(Page 73-83)