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Chapitre V Interprétation des résultats et mécanismes de

I. Synthèse bibliographique des mécanismes de sorption de l’uranium par

Plusieurs mécanismes ont été proposés dans la littérature, pour expliquer l’immobilisation des cations uranyles en solution aqueuse par l’hydroxyapatite.

La rétention de l’uranium par l’hydroxyapatite a été examinée par Jeanjean et coll.,[1], qui confirment l’introduction de l’uranium dans la nouvelle hydroxyapatite obtenue avec formation d’une phase amorphe ou microcristalline ; cette phase n’a pas été identifiée. Le mécanisme mis en jeu est une dissolution – précipitation. Valsami et coll., [2] suggèrent que l’interaction entre l’apatite et les métaux en solution est contrôlée par la dissolution de l’apatite et il en résulte la précipitation des phosphates de métaux.

Les résultats publiés par Arey et coll., [3] indiquent que l’apatite immobilise l’uranium des sédiments contaminés par coprécipitation, avec formation de phosphates d’uranium comme phases secondaires, mais n’arrivent pas à appréhender la phase d’autunite. Par contre cette dernière phase a été détectée par

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Conca et coll.,[4,5], au cours de l’application de l’apatite à la décontamination des sols. Dans des travaux analogues, Bostick et coll.,[6] aboutissent également à une précipitation de l’autunite sur les surfaces de l’apatite II.

Jerden et Sinha [7] concluent que le processus mis en jeu, à partir de la solution d’uranium en présence de l’apatite, est une précipitation du phosphate d’uranyle de faible solubilité : la méta- autunite de barium.

Les phases identifiées par Fuller et coll., [8], après avoir ajouté des ions uranyles à une solution saturée d’hydroxyapatite sont : l’autunite et la chernikovite. Pour certaines concentrations, le processus d’adsorption a été suggéré ; les ions uranyles et les groupes fonctionnels de la surface de l’apatite peuvent interagir pour former un complexe de surface de sphère interne.

Les réactions de formation de l’autunite et de la chernikovite s’écrivent :

2UO22+ + Ca++ +2PO43- Ca(UO2)2(PO4)2 (1)

Autunite

UO22+ + 2H+ + 2PO43- H2(UO2)2 (PO4)2 (2)

Chernikovite

D’autres recherches effectuées par Fuller et coll., [9], montrent que la rétention des ions uranyles par l’hydroxyapatite ne peut être contrôlée par la précipitation de la phase solide de l’autunite et qu’il s’agit probablement d’une adsorption de complexes moléculaires sur la surface de l’apatite.

Le mécanisme décrit par Leyva et coll., [10], est une sorption de U(VI) à la surface de l’hydroxyapatite ; deux groupes de surfaces sont envisagés, et le phénomène peut être représenté par les équilibres suivants :

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PO3P-OH+ + UO22+ PO3P-O-UO22+ + H+ (4)

Les résultats publiés par T. Ohnuki et coll.,[11] révèlent qu’une couche de l’autunite est formée à la surface de la fluoroapatite. Les calculs thermodynamiques montrent que l’autunite peut être obtenue par une saturation locale et non par précipitation dans la solution. Ces auteurs concluent que la minéralisation à la surface est le mécanisme prédominant.

A partir des données fournies dans la littérature, les hypothèses proposées sont nombreuses et ne permettent de dégager un mécanisme d’immobilisation précis. Les travaux de Arey et coll.,[3] ; Bostick et coll.,[6] ; Fuller et coll.,[8,9] tendent vers plusieurs propositions. Généralement, il en découle au moins deux mécanismes différents prépondérants :

1. dissolution de l’apatite et précipitation de nouvelles phases représentant l’autunite ou autres composés semblables.

2. adsorption des ions (UO2)2+ par la formation de complexes à la surface de

l’apatite.

Tous les résultats indiquent que l’uranium est éliminé, par précipitation, après contact avec l’hydroxyapatite (formation de précipité ou de complexe).

Les processus d’échange d’ions ne sont pas exclus ; Wu et coll., [12], ont montré que l’hydroxyapatite a la capacité d’immobiliser les ions uranyles en solution aqueuse par la formation d’une solution solide et la substitution des ions calcium.

II Interprétation des résultats et mécanismes

II.1 pH de la solution initiale d’uranium = 5

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II.1.1 Analyse par la diffraction des rayons X (DRX)

La caractérisation par DRX, des phases solides obtenues dans la première série de mélange : 4.10-4 mol/l ≤ C[U(VI)] ≤ 12.10-4 mol/l, t = 48 heures, T = 25°C, montre qu’en plus des raies de l’hydroxyapatite initiale, il y a apparition d’autres raies nouvelles. Deux complexes de phosphate d’uranium sont susceptibles de se former : UO2HPO4.4H2O ou (UO2)3(PO4)2. 4H2O.

Le dépouillement des spectres des précipités obtenus dans les conditions expérimentales citées ci-dessus (cf. Chapitre IV, figures 1, 3, 4 et 5) indique que les nouvelles raies observées peuvent être comparées à celles de UO2HPO4.4H2O

[13] et (UO2)3(PO4)2. 4H2O [14].

Nous avons déjà signalé que les spectres de diffraction des rayons X indiquent la formation de phases mal cristallisées, au-delà de 10.10-4M et présentent un élargissement des raies. Nous avons également noté que l’intensité de plusieurs raies, caractéristiques de l’hydroxyapatite initiale, diminue lorsque la concentration des ions uranium croit, ce qui semble en faveur de la dissolution de l’hydroxyapatite et la formation de phases solides amorphes ou mal cristallisées.

Le tableau 1 résume les différentes nouvelles distances réticulaires relevées dans des phases solides formées en présence de 4.10-4, 8.10-4, 10.10-4 et 12.10-4 M en uranium.

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Tableau 1. Nouvelles raies relevées dans les phases solides formées lorsque 4.10-4 M ≤ C[U(VI)] ≤ 12.10-4M

II.1.2. Etude par la spectroscopie d’absorption infrarouge

II.1.2.1 C[U(VI)] = 4.10-4 M

L’identification de la phase obtenue par la spectroscopie infrarouge (cf. chapitre IV, figure 2) révèle la présence des ions UO2++, caractérisée par l’apparition

de la bande 920 cm-1.

C[U(VI)] M Distances réticulaires (Å)

4.10-4 8,240 5,506 4,760 3,721 3,515 3,098 2,557 2,164 2,116 8.10-4 8,313 4,611 3,461 3,098 2,043 10.10-4 8,313 5,569 3,459 3,281 3,085 2,062 12.10-4 8,290 5,366 4,930 4,737 4,360 3,475 3,227 2,346 2,230 2,164 2,130 2,058 1,975 UO2HPO4.4H2O(s) [13] 8,745 5,463 4,946 4,373 3,708 3,498 3,247 3,079 2,332 2,239 2,153 2,133 2,057 1,974 (UO2)3(PO4)2.4H2O [14] 8,75 5,47 4,95 3,71 3,51 3,25 3,09 2,55 2,15 2,13

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Rappelons que les deux autres épaulements, très faibles, aux fréquences 942,8 cm-1 et 890 cm-1 sont attribués aux ions phosphates PO43- et aux ions

hydrogénophosphates HPO42- présents dans les apatites déficientes, respectivement.

II.1.2.2 8.10-4 ≤ C[U(VI)] ≤ 12.10-4M

Dans ces milieux, les phases qui précipitent ne contiennent plus les ions UO22+,

puisque la bande 920 cm-1 disparaît (cf. chapitre IV, figure 6).

Les résultats déduits de la diffraction des rayons X et la spectroscopie infrarouge, indiquent que la possibilité de formation des phases UO2HPO4.4H2O(s)

ou (UO2)3(PO4)2.4H2O peut être envisagée comme phases secondaires, en plus de

la phase apatitique. La participation de l’uranium aux réseaux de ces nouvelles phases semble importante aux concentrations 4.10-4M, et faible quand la quantité des ions uranyles augmente.

Remarque :

Nous constatons que les distances réticulaires indiquées dans les fiches JCPDF de UO2HPO4.4H2O(s) [13] et de (UO2)3(PO4)2. 4H2O [14] sont presque

identiques. De même, la majorité de ces raies coïncident également avec celle de l’hydroxyapatite initiale. D’où la difficulté d’une caractérisation plus précise des phases solides secondaires obtenues après la rétention des ions uranyles par l’apatite phosphocalcique.

La transformation de l’hydroxyapatite en phase apatitique déficiente contenant les ions HPO42- semble confirmée par la présence de ces ions révélés en

spectroscopie IR (cf. chapitre IV, paragraphe II.1.1), et également par le pHéquilibre = 7

(cf. chapitre IV, tableau5) qui est celui de l’équilibre 2 (chapitre I):

152

La phase apatitique déficiente peut être décrite par la formule chimique Ca9

(HPO4)(PO4)5 (OH). Dans ce composé, il existe des lacunes dans les sites calcium et

dans les sites hydroxyles. Elles s'accompagnent de la substitution des groupements phosphate PO43- par les groupements hydrogénophosphate (HPO4)2- et la

transformation peut être schématisée comme suit :

Ca10(PO4)6(OH)2 + 2H+ Ca9 (HPO4)(PO4)5 OH + Ca2+ + H2O (6)

ou

Ca10(PO4)6 (OH)2 + 2H+ Ca9 (PO4)6,H2O + Ca2+ + H2O (7)

Ca9 (PO4)6,H2O 3Ca3 (PO4)2 + H2O (8)

L’attaque de Ca3 (PO4)2 par UO22+ est décrite par :

Ca3 (PO4)2 + 2UO22+ 2UO2 PO4- + 3Ca2+ (9)

ou

Ca9 (PO4)6,H2O + 6UO22+ 6UO2PO4- + 9Ca2+ + H2O (10)

Les données bibliographiques rapportées au chapitre III, dont :

 la figure 5 (cf. paragraphe II.1) qui donne la répartition des espèces aqueuses de phosphate d’uranyle, indique que les complexes UO2HPO4 aq, et UO2PO4-

peuvent exister quand le pH est compris entre 6 et 7. UO2PO4- est maximal

aux environs de pH = 7,

 la figure 8 (cf. paragraphe II.2) montre qu’à pH proche de 7, on a coexistence des deux espèces H2PO4- et HPO42-,

Selon Sandino et Bruno (cf. paragraphe II.2), les complexes UO2(PO4)- et

UO2(HPO4)aq existent dans un domaine de pH compris entre 6 et 9,

supportent la présence des espèces : UO2(H2PO4)+, UO2(HPO4) (aq) et UO2(PO4)-,

au cours de la sorption des ions uranyles sur l’hydroxyapatite.

II.1.3 Mécanismes

153

Les propositions décrites ci-dessus sont confirmées par les résultats de la mesure de la radioactivité de l’uranium dans les phases liquides.

* C[U(VI)] = 4.10-4M

En tenant compte du fait que l’uranium se trouve totalement dans la phase solide (cf. chapitre IV, tableau 5), nous pouvons avancer l’introduction certaine de cet élément dans le réseau d’une phase nouvelle d’allure apatitique, avec formation d’autres phases secondaires. Ces dernières peuvent être exemptes d’ions uranium. Le mécanisme mis en jeu est probablement une dissolution de l’hydroxyapatite initiale suivie de la précipitation d’apatite uranifère.

Jeanjean et al., [1] ont aboutit à la formation du même produit final - résultats que nous avons décrit précédemment - ; la phase obtenue après interaction de la solution d’uranium avec l’apatite, est constituée par une nouvelle apatite et des composés amorphes ou microcristallins ; le mécanisme de la sorption est décrit par le processus de dissolution- précipitation.

* 8.10-4 < C[U(VI)] < 12.10-4M

Les études effectuées par Payne [15] sur les effets des phosphates au cours de la sorption des ions uranyles UO22+ par la ferrihydrite, indiquent que la phase la plus

soluble UO2HPO4.4H2O(s) est le premier précipité formé. Comme la limite de

solubilité de UO2HPO4.4H2O(s), n’a pas été généralement dépassée au cours des

essais expérimentaux, la précipitation de phosphate d’uranium (UO2)3(PO4)2. 4H2O

pouvant être exclue, le mécanisme de rétention de UO22+ est plutôt une sorption.

Les études expérimentales de la précipitation des systèmes de phosphate d’uranyle réalisées par Schreyer et Baes [15], Sandino et Bruno [16] et Grenthe et al., [2] aboutissent à la formation de UO2HPO4.xH2O, ensuite à la précipitation de la

phase (UO2)3(PO4)2 (cf. chapitre III, paragraphe II.2).

Ces données de la littérature ainsi que le pourcentage élevé des ions uranyles dans la phase aqueuse, obtenue au cours de nos essais expérimentaux (cf.

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chapitre IV, tableau 5), expliquent en quelque sorte le choix de la formation du complexe UO2HPO4 plutôt que la phase solide (UO2)3(PO4)2. 4H2O.

* Durée d’agitation : 69 heures

Le produit obtenu après la sorption, quand nous augmentons le temps d’agitation du mélange réactionnel à 69 heures, avec C [U (VI)] = 4.10-4

mol/l, pH de la solution des ions uranyles proche de 5 et la température du milieu égale à 25 °C, est un mélange polyphasé constitué par une nouvelle hydroxyapatite, et une ou plusieurs phases supplémentaires.

Le pourcentage d’uranium immobilisé par l’hydroxyapatite, obtenu par la mesure de la radioactivité de cet élément, est toujours maximal même lorsque la durée d’agitation ou de la réaction est portée à 69 heures (cf. chapitre IV, tableau 6). Ceci indique que le temps d’équilibre est atteint à t = 48heures.

Nous avons comparé nos résultats avec ceux trouvés par jeanjean et al., [1], qui ont travaillé dans les conditions expérimentales voisines des nôtres : [ U(VI)] = 3,9. 10-4 mol/l, m HAP = 0,05 mg, pH (NO3)2UO2 = 5, t = 48 heures.

L’équilibre n’est pas atteint à t = 48 heures, et la sorption est de 1,2 moles d’uranium par mole d’apatite. L’immobilisation des ions uranyles par l’apatite augmente au delà de 48 heures. Nos résultats par contre, indiquent que le temps d’équilibre est atteint à t = 48 heures. Cette différence peut être due à la nature de l’apatite initiale utilisée par ces auteurs, c’est une apatite déficiente en cations, qui contient des ions sodium et sa composition est entre ces deux formules limites : Ca 9.03 Na 0.43 (PO4)6 (OH) 0.49, 3.6 H2O

Ca 9.03 Na 0.43 (PO4) 4.49 (HPO4) 1.51 (OH)2 , 2.1 H2O

Remarque

La DRX ne permet en aucun cas d’assurer la pureté de l’apatite formée ou d’exclure la possibilité de formation de phases amorphes contenant ou non l’uranium.

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II.2 pH de la solution initiale d’uranium = 4

Dans les conditions expérimentales (4. 10-4 mol/l ≤ C[U(VI)] ≤ 10-4 mol /l, T = 25 °C, t = 48 heures et pH de la solution du nitrate d’uranium égale à 4), l’étude des produits obtenus par la diffraction des rayons X et la spectrométrie d’absorption infrarouge, a permis de dégager des éléments clés pour la compréhension du mécanisme de rétention.

La présence des ions HPO4-- et (UO2)2+ révélés par la spectroscopie IR ainsi

que la valeur de pH à l’équilibre (pH = 7, 30) quand C[U(VI)] = 4.10-4

M, permettent de confirmer la transformation de l’hydroxyapatite en une apatite uranifère déficiente.

Pour une concentration en ions uranium égale à 8.10-4 mol/l, nous remarquons la diminution de l’intensité de la bande 3566 cm-1

; ceci laisse supposer que la phase obtenue, après introduction des ions uranium, est légèrement hydroxylée.

Quand la concentration des ions U(VI) = 10.10-4 mol/l, nous obtenons une phase exempte d’ions OH-

; la caractérisation par la diffraction des rayons X indique plusieurs raies supplémentaires qui peuvent être liées à la nouvelle phase formée.

Nous avons essayé d’identifier les nouvelles raies observées dans le domaine angulaire 2θ < 25°. Les phases précipitées peuvent être constituées de composés amorphes d’uranyle, de calcium et de phosphates ainsi que des phases cristallisées contenant le calcium, l’uranium et les phosphates.

II. 2.1 Diffraction des rayons X

Nous avons rapporté sur le tableau 2, les nouvelles distances réticulaires obtenues, après la mise en contact des ions uranium avec l’hydroxyapatite. Nous constatons que ces raies sont comparables à celles de l’autunite Ca(UO2)2(PO4)2.10H2O [16] quand C[U(VI)] = 8. 10-4M et 10. 10-4M. L’apparition des

156

quelques raies caractérisant l’autunite pour des concentrations inférieures en uranium : 4.10-4M, semble indiquer le début de précipitation de cette phase.

Tableau 2 : 4.10-4 ≤ C[U(VI)] ≤ 10.10-4M

Les nouveaux pics observés sur les diffractogrammes des précipités obtenus à C[U(VI)] = 4. 10-4M, 8. 10-4M et 10. 10-4M, sont présentés sur la figure 1. Notons que plusieurs raies de l’autunite chevauchent avec des pics de l’hydroxyapatite. C[U(VI)] 4.10- 4M 8.10- 4M 10.10- 4M Autunite [16] Ca (UO2)2(PO4)2.10H2O Distances réticulaires (Å) 9,25 9,721 9,708 (100%) 10,300 (100%) 9,003 8,990 8,970 6,323 6,447 6,700 4,951 5,000 4,960 4,52 4,521 4,480 3,626 3,623 3,590 3,465 3,462 3,462 3,495 3,291 3,330 3,330 3,094 3,023 3,134 3,120 2,858 2,880 2,722 2,710 2,501 2,488 2,490 2,339 2,400 1,758 1,758 1,758 1,750

157 C[U(VI)] = 4. 10-4M C[U(VI)] = 8. 10-4M C[U(VI)] = 10. 10-4 M

Figure1 : Nouvelles raies observées lors du dépouillement des spectres de phases solides : C[U(VI)] = 4. 10-4M, 8.10-4M et 10. 10-4M, t = 48heures, comparées à l’autunite.

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L’uranium en solution est sous la forme volumineuse UO2++, son incorporation

directe à l’intérieur de la phase apatitique en substitution des ions calcium (r Ca++ =

1,0 Å) nécessiterait des modifications importantes de la structure.

II.2.2 Spectroscopie d’absorption infrarouge

Le tableau 3 indique les nouvelles bandes observées par la spectroscopie d’absorption infrarouge (cf. chapitre IV, figure 14) après l’immobilisation des ions U(VI) par l’hydroxyapatite. Nous remarquons que ces bandes sont caractéristiques de l’autunite, et sont en accord avec celles trouvées par Farmer [17] et Frost [18] . Tableau 3 : Différentes bandes d’absorption infrarouge, caractéristiques de l’autunite. C[U(VI)] = 10.10- 4 M

L’astérisque (*) indique un chevauchement des raies de HAP et de l’autunite. 1. Région de l’hydroxyle OH de l’autunite : vibration d’élongation "stretching"

La forte bande observée sur nos spectres d’absorption infrarouge à 3447 cm- 1 est en accord avec celles trouvées par Farmer [17] : 3435 cm-1 et Ray L. Frost [18] : 3444 cm-1. Elle est attribuée à la vibration de valence symétrique s des ions

hydroxyles de l’eau.

Autunite [18] Autunite [17] Ce travail 3566 3444 3248 3435 3447 1660 1630 1595 1640 1630 1118 1074 985 1123 1023 1098* 1054* 972* 916 915 920 888

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2. Région HOH : vibration de déformation " bending"

La région entre 1600-1750 cm-1 est relative au mode de vibration δOH de l’eau. La

bande moyenne observée sur nos spectres d’absorption infrarouge, à la fréquence 1630 cm-1, est en accord avec les résultats de Farmer (1640 cm-1) et Frost (1630 cm-1).

Les minéraux contenant de l’eau adsorbée physiquement présentent de fortes bandes aux environs de 3550 cm-1 : s et de 1630 cm-1 : δOH . Ces fréquences

sont influencées par la quantité d’eau adsorbée, le type de minéral et le cation auquel l’eau est liée.

Notons que ces fréquences apparaissent à 3455 et 1645 cm-1 pour l’eau liquide, et vers 3255 et 1655 cm-1 pour les molécules d’eau solide.

3. Région (PO4)3- et (UO2)2+ : vibrations d’élongation "stretching"

L’une des principales difficultés rencontrée dans la spectroscopie vibrationnelle des autunites est le chevauchement des bandes des vibrations des ions (PO4)3- et

(UO2)2+.

Cejka et coll., [19] ont attribué la faible absorption observée à 810 cm-1 au mode de vibration symétrique des ions (UO2)2+, et la vibration antisymétrique à la

fréquence 915 cm-1.

Selon Frost [18], le spectre infrarouge de l’autunite révèle un chevauchement de bandes complexe : 1118, 1074, 985, 916 et 888 cm-1. Ils ont ainsi attribué respectivement, les trois premières bandes et la bande 916 cm-1 aux vibrations antisymétrique et symétrique des ions phosphates. Une autre attribution plus probable de la bande 916 cm-1, est le mode de vibration 3 des ions (UO2)2+. La

dernière bande située à 888 cm-1 est attribuée, selon Frost, au mode de libration de l’eau.

Nos spectres d’absorption infrarouge révèlent des bandes observées à 1098,1054 et 972 cm-1 que nous avons attribuées aux vibrations antisymétriques des

160

ions phosphates. La bande obtenue à 920 cm-1 (3), est fort probablement due à la

présence des ions uranyles (UO2)2+.

La raie située à 890 cm-1, que nous avons attribué aux ions HPO4--, apparaît

quand C[U(VI)] = 8.10-4M, et disparaît aux concentrations supérieures. Ce phénomène peut être expliqué par la condensation des ions hydrogénophosphates pour donner naissance au pyrophosphate que nous avons détecté par la présence de la bande à 753 cm-1 [20].

II.2.3 Mécanisme

Sur la base de données fournie par la diffraction des rayons X et la spectroscopie d’absorption infrarouge, il est vraisemblable que le processus mis en jeu est une précipitation du phosphate d’uranyle de faible solubilité : l’autunite de calcium. Elle immobilise les ions uranium suivant le pH des milieux et la concentration de cet élément. Cette précipitation est obtenue après la dissolution du phosphate apatitique initial.

Ceci peut être confirmé par les mesures de la radioactivité des ions uranyles dans la phase liquide, qui indiquent que le pourcentage retenu de l’uranium par le précipité formé augmente quand la concentration de cet élément croit (cf. chapitre IV, tableau 7).

L’hydroxyapatite mise en contact avec une solution aqueuse est capable de libérer des quantités importantes d’ions calcium, phosphate et hydroxyde, avant d’atteindre l’équilibre de dissolution. Cet équilibre de solubilité se généralise sous la forme :

Ca5(PO4)3OH 5Ca2+ + 3PO43- + OH- kps 10-49 (11)

L’interaction entre l’uranium accumulé et le calcium dissout aboutit à la formation de l’autunite :

Ca2+ + 2(UO2)2+ + 2(PO4)3- Ca(UO2)2(PO4)2.10-12H2O kps = 10-49 (12)

(a) (a) (a) (s) (a): aqueux (s): solide

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Ces réactions minoritaires sont régies par une constante de dissolution- précipitation kps, appelée produit de solubilité de l’hydroxyapatite et des phosphates

d’uranyles.

Du fait de sa faible solubilité, l’autunite présente une forte capacité pour retenir l’uranium; ce minéral est la forme la plus stable parmi les phosphates d’uranium naturels.

II. 2. 4 Effet de la durée d’agitation : 78 heures

Les résultats obtenus par la diffraction des rayons X lors de l’immobilisation des ions uranium (C [U(VI)] 4.10-4 mol/l), par la matrice apatitique à pH égal à 4 et pour une durée d’agitation de 78 heures, indiquent que la phase solide obtenue ne contient plus les raies appartenant au domaine angulaire 2θ < 25° et 33° < 2θ < 40°. Nous observons à peu près le même nombre de pics caractérisant l’autunite, que nous avons identifiés pour un temps d’agitation égale à 48heures (figure 2). C’est une phase qui semble hydratée et qui contient les ions UO22+.

Ces résultats indiquent que l’équilibre n’est pas atteint à 78heures (Cf. chapitre IV, tableau 8) ; ceci peut être expliqué par le fait que la précipitation de l’autunite nécessite plusieurs jours [21].

Figure 2 : Nouvelles raies observées lors du dépouillement du spectre de la phase solide : C[U(VI)] = 4. 10-4M, t = 78heures, comparées à l’autunite.

162

II. 2. 5 Effet de la température

A T = 50 °C, le spectre parait moins cristallisé et nous retrouvons quelques raies relatives à l’autunite ; la spectroscopie infrarouge présente la vibration à la fréquence 1630 cm-1 relative aux ions OH- de l’eau.

Quand la température atteint 80 °C, le spectre de diffraction des rayons X n’indique plus les raies de l’hydroxyapatite de référence. On n’observe qu’une seule raie située à d = 7,675Å (2θ = 11,6°) qui tend à devenir principale. Les trois raies situées dans le domaine 31° < 2θ < 33° et qui caractérisent l’hydroxyapatite s’atténuent. La bande 1630 cm-1

disparaît.

Nous pouvons conclure que, pour des pH de la solution de nitrate d’uranyle proche de 4, C[U(VI)] = 4.10-4 mol/l, et t = 48 heures, les quelques raies relatives à la phase solide de l’autunite détectées à température ambiante, existent également quand le mélange réactionnel est traité à 50°C, et la présence des ions hydroxydes indique bien qu’il s’agit d’un composé hydraté.

Ces raies disparaissent quand nous augmentons la température jusqu'à 80 °C, ainsi que la bande OH- ; il semblerait donc que la nouvelle phase obtenue est différente de l’autunite et ne contient pas les molécules d’eau.

L’augmentation de la température défavorise la formation de l’autunite et par conséquent diminue la rétention de l’uranium.

Conclusion

A partir des données expérimentales, nous avons déduit que l’uranium peut être immobilisé dans des phases apatitiques à température ambiante. Les milieux étudiés ont un pH aux environs de 5 et une concentration en uranium égale à 4.10-4 mol/l ; la durée d’agitation de 48 heures est le temps d’équilibre de la réaction. Nous avons montré que cette rétention diminue lorsque la quantité de l’uranium augmente. Dans ces conditions expérimentales, le processus qui gouverne la sorption est une dissolution suivie par une précipitation.

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Nous avons également conclu que le mécanisme de réaction de la solution d’uranium à pH au voisinage de 4, en présence de l’apatite, est une précipitation du phosphate d’uranyle de faible solubilité : l’autunite de calcium. La rétention de l’uranium devient importante au fur et à mesure que la concentration de cet élément augmente ; la formation de la phase nécessite un temps d’équilibre supérieur à 78heures.

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Références

[1] J.J. Jeanjean, J.C. Rouchaud, L. Trains, M. Fedoroff. "Sorption of uranium and other heavy metals on hydroxyapatite". J. Radioanal. Nucl. Chem. Lett; 201, pp. 529-