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Partie II : Contribution des facteurs génétiques à l’étiologie de l’autisme

4. Causes génétiques connues de TSA

4.2 Syndromes génétiques

4.2.2 Syndromes de microdélétion/microduplication

De nombreux syndromes de microdélétion ou microduplication ont été identifiés chez des patients avec

TSA. Ils correspondent à des CNVs qui peuvent être récurrents ou de taille variable selon le mécanisme

d’apparition (Figure 20).

Figure 20. CNVs récurrents et non récurrents

La ligne horizontale noire représente la région génomique impliquée dans le réarrangement, le rectangle noir représente un gène localisé dans cette région et les rectangles rayés correspondent à des duplications segmentales. Les lignes épaisses bleues ou rouges correspondent aux CNVs. Les CNVs récurrents ont une taille et des points de cassure similaires ; les CNVs non récurrents ont des tailles variables mais peuvent présenter une région minimale commune. Des exemples de chaque type de CNV, impliqués dans l’étiologie des TSA, sont présentés de part et d’autre du schéma (figure adaptée de Gu et coll., 2008).

Syndromes associés à des CNVs de taille variable

Parmi les syndromes de microdélétion/microduplication de taille variable associés aux TSA, on trouve

notamment plusieurs délétions subtélomériques comme le syndrome de Phelan-McDermid, dû à une

délétion terminale du chromosome 22q13.33 et dont le gène responsable est SHANK3. D’autres exemples

incluent le syndrome de microdélétion 2q37 (délétion terminale 2q, gène HDAC4), le syndrome de

Kleefstra (délétion terminale 9q, gène EHMT1) et le syndrome de Jacobsen (délétion 11q terminale,

gène(s) impliqué(s) non connu).

Dans le cas des CNVs de taille variable impliqués dans un syndrome, la description d’un nombre

suffisant de patients et notamment la description de réarrangements atypiques et/ou de petite taille,

permet parfois de définir une région critique. Dans de rares cas, la région ainsi délimitée ne contient

qu’un seul gène, ce qui permet d’attribuer les manifestations associées au syndrome aux altérations de ce

dernier. La détection de mutations d’un gène de la région chez plusieurs patients et absentes de témoins

peut également apporter la preuve de sa contribution au phénotype. Dans les cas où la région minimale

critique contient plusieurs gènes, la présence d’un point de cassure d’une translocation interrompant l’un

de ces gènes chez un individu ayant une présentation clinique similaire peut apporter une évidence, bien

que ce type de réarrangement complexe ne puisse pas impliquer un gène directement. En effet, les

translocations présentent toujours deux points de cassure et même lorsque la région impliquée dans le

deuxième point de cassure est non génique, on ne peut exclure sa contribution au phénotype. Par

exemple, dans le syndrome de microdélétion 22q13 (syndrome de Phelan-McDermid), de nombreuses

délétions de tailles très variables avaient été décrites. Une translocation de novo interrompant le gène

SHANK3 avait été rapportée chez un garçon présentant toutes les caractéristiques cliniques du syndrome

de microdélétion 22q13 (Bonaglia et coll., 2001). Ce gène était l’un des meilleurs candidats fonctionnels

dans la région puisqu’il code une protéine d’échafaudage synaptique qui interagit avec les neuroligines,

déjà impliquées dans l’étiologie des TSA. Puis, la région minimale délétée a été réduite à environ 90 kb

(Bonaglia et coll., 2006), contenant uniquement 3 gènes, dont le gène SHANK3. Le séquençage de ce gène

dans une cohorte de patients atteints de TSA a permis la découverte d’une mutation de novo causant un

décalage du cadre de lecture chez deux frères atteints, impliquant définitivement SHANK3 comme

responsable des manifestations principales du syndrome et notamment des altérations neurocognitives

(retard sévère ou absence de langage, déficience intellectuelle et TSA) (Durand et coll., 2007). Depuis,

plusieurs délétions interstitielles n’impliquant que le gène SHANK3 ont également été décrites chez des

patients atteints du syndrome de Phelan-McDermid (Bonaglia et coll., 2011) (Figure 21).

Dans d’autres cas, la région critique est trop large pour impliquer un gène en particulier. Il est possible

que nombre de ces syndromes soient causés par l’altération simultanée de plusieurs gènes chacun

contribuant indépendamment au phénotype avec des effets additifs ou synergiques, dans ce cas, ils sont

appelés syndromes de gènes contigus.

Syndromes associés à des CNVs récurrents

Les CNVs récurrents sont formés dans des régions génomiques riches en duplications segmentales, qui

favorisent le mécanisme de recombinaison homologue non allélique à leur origine. Les duplications

segmentales correspondent aux points de cassure récurrents des réarrangements (breakpoints, BP) qui

ont ainsi pu être caractérisés moléculairement et phénotypiquement pour définir des syndromes de

microdélétion et microduplication.

Sur le bras long du chromosome 15, différents groupes de duplications segmentales entraînent la

formation de différentes délétions et duplications récurrentes associées aux TSA. La duplication

interstitielle de la région chromosomique 15q11-q13 entre les BP2-BP3 ou BP1-BP3 (la région critique se

situant entre le BP2 et le BP3) est l’un des réarrangements les plus fréquemment associés à l’autisme

(Depienne et coll., 2009b ; Hogart et coll., 2010). Ces duplications peuvent être interstitielles ou

Figure 21. Délétions 22q13 de taille variable chez les patients atteints du syndrome de Phelan-McDermid

Les délétions peuvent être simples (terminales ou interstitielles) ou correspondre à un remaniement complexe (chromosome en anneau ou translocation). Le seul gène contenu dans la région de délétion commune est SHANK3 (figure adaptée de Bonaglia et coll., 2011).

correspondre à la présence d’un chromosome 15 isodicentrique et sont la plupart du temps d’origine

maternelle. Ces dernières sont caractérisées par une pénétrance élevée et une forte association avec les

TSA, contrairement aux duplications interstitielles paternelles qui sont plus rarement associées à un

phénotype anormal (Depienne et coll., 2009b) et peuvent parfois être détectées chez des individus non

atteints (Veltman et coll., 2005). Le phénotype inclut également un retard de développement, un retard

de langage, une déficience intellectuelle plus ou moins sévère, des difficultés de coordination motrice

ainsi que quelques dysmorphies. Par ailleurs, des triplications de cette région ont également été décrites,

associées à un phénotype plus sévère peu importe l’origine parentale du réarrangement (Hogart et coll.,

2010). Les délétions de cette région sont impliquées dans les syndromes d’Angelman et Prader-Willi. Ces

deux syndromes associés aux TSA sont dus à des altérations des gènes soumis à empreinte dans la région.

Le syndrome d’Angelman est causé par une déficience de la copie maternelle du gène UBE3A (mutation,

délétion, disomie uniparentale paternelle ou défaut d’empreinte). Dans le cas du syndrome de

Prader-Willi, c’est la copie paternelle de la région qui est impliquée cependant, le gène (ou les gènes) responsable

n’a pas encore été clairement identifié.

Parmi les CNVs récurrents pour lesquels les TSA sont une manifestation fréquente, on trouve les

délétions et duplications 17p11.2, incluant le gène RAI1. Les délétions causent le syndrome de

Smith-Magenis alors que les duplications sont responsables du syndrome de Potocki-Lupski. Ces deux

syndromes sont très rares, cependant, les individus atteints présentent des TSA dans environ 90 % et 70 %

des cas, respectivement (Laje et coll., 2010 ; Treadwell-Deering et coll., 2010). De même, des délétions au

locus 7q11.23 sont responsables du syndrome de Williams-Beuren pour lequel environ 50 % des patients

ont un TSA (Klein-Tasman et coll., 2009 ; Tordjman et coll., 2012). La duplication en miroir de cette région

est également pathogène et environ 40 % des individus atteints présentent un autisme (Depienne et coll.,

2007 ; Van der Aa et coll., 2009 ; Sanders et coll., 2011). Dans la région 7q11.23, le ou les gènes impliqués

dans le phénotype neurocognitif ne sont pas connus.