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Synthèse de la revue de littérature sur la pleine conscience

2.1 Les rôles du manager dans l’organisation

2.1.2.2 La supervision : le cœur du rôle du manager

La supervision peut être définie comme « la direction, le suivi et le contrôle de proximité

immédiats du travail opérationnel » (Hales C., 2005, p. 474). De manière plus concrète, la supervision couvre une variété importante d’activités qui a été synthétisée par D. Dunkerley

(1975) et S. Kerr et al (1986)17 : « la planification, la programmation et la répartition du

travail, le pilotage de la conduite et de la production du travail, la vérification des équipements, de la sécurité et de la propreté, le suivi de l’implémentation d’un nouvel équipement, la gestion des imprévus d’effectifs, de matériel et de problèmes de production, le maintien de la discipline, la gestion des conflits, la formation, le conseil, le suivi et l’assistance au travail opérationnel ». Si cette définition prend ses racines dans le monde industriel, elle peut être déclinée pour les métiers de services. Par ailleurs, nous pouvons regrouper ces activités en trois catégories clés : le pilotage et l’organisation de l’activité, l’encadrement des hommes, la gestion des imprévus.

17 Cités dans Hales C, 2005, p. 475

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Nous déduisons aussi que le manager n’a pas pour rôle de produire lui-même le produit ou le service, ce rôle étant pris en charge par les collaborateurs qu’il encadre. L’encadrement des

hommes peut justement être défini comme « faire travailler des gens à l’intérieur de certains

cadres » (Mispelblom Beyer F., 2003). A ce sujet, le manager doit, d’une part, motiver les individus, c’est-à-dire tenter de susciter les comportements les plus performants chez ses subordonnés, et d’autre part, participer à leur développement, c’est-à-dire les accompagner, les former, les conseiller et les encourager. Il doit enfin former et préserver ses équipes, à savoir constituer les équipes et assurer leur bon fonctionnement (Mintzberg H., 2011). Il a donc un rôle d’animation individuelle mais aussi collective. Nous constatons d’ores et déjà que la notion d’encadrement de proximité, incluse dans la supervision, se confond en partie avec le rôle de leadership proposé par H. Mintzberg. Par ailleurs, ce rôle de supervision, s’il ne se confond pas complètement avec la figure traditionnelle du manager, en est le rôle clé, celui qui permet à la base de différencier le manager des autres figures dans les organisations modernes.

Cependant, une partie de la littérature voit dans l’émergence des organisations post-bureaucratiques, sinon une remise en cause de l’existence même de la figure du manager (Hamel G., 2011), au moins une transformation profonde du rôle du manager. A la différence des organisations bureaucratiques, figures du vingtième siècle, creuset de la fonction managériale, et marquées par la stabilité et la hiérarchie, les organisations post-bureaucratiques sont des organisations flexibles et non hiérarchiques, davantage construites sur des valeurs partagées, sur le dialogue et la confiance, que sur le respect de règles (Grey C. et Garsten C.,

2001, Heckscher C., 199418). C. Grey (1999) explique que, si dans ces organisations l’accent

est mis sur le leadership, la vision et la stratégie des managers exécutifs, les managers intermédiaires et de proximité, eux, sont appelés à devenir des coachs, des animateurs d’équipe, des facilitateurs et agents du changement. Ils doivent donc développer des rôles de communication, de développement de réseau, de construction du consensus. Par ailleurs, le développement de « l’intrapreneuriat », de « l’empowerment » des salariés et des multi-compétences conduirait le manager à ne plus être celui qui pilote une activité définie dans une direction, mais plutôt à être l’acteur qui créerait les conditions permettant aux collaborateurs de développer leurs propres aptitudes créatives et « intrapreneuriales ». L’étude de W.A. Gentry et al (2008) tend à confirmer les impacts de ces évolutions sur les compétences des managers. Les auteurs observent que les compétences liées à la communication et à la prise de décision sont les plus importantes et tendent à se renforcer. Ils observent aussi que l’importance des

18 Cité dans Tengblad S, 2006

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compétences relationnelles a très fortement augmenté entre les années 1988-1992 et les années 2004-2006. A l’opposé, les compétences administratives et organisationnelles deviendraient moins essentielles.

Certains auteurs vont jusqu’à remettre en cause l’existence même des managers, soit parce qu’ils les considèrent comme un frein au changement et au développement des organisations bureaucratiques ou libérées (Hamel G., 2011), soit parce que les organisations post-bureaucratiques sont moins demandeuses en management et plus en entrepreneuriat, avec un

effacement de la distinction entre managers et collaborateurs (Hecksher, 199519).

Cette vision est aujourd’hui discutée. Plusieurs études constatent effectivement un développement des aspects relationnels de la supervision avec une plus grande communication individuelle entre le manager et ses subordonnés, ainsi qu’une direction plus participative et coopérative (Barabel M. et Meier O., 2004, Tengblad S. 2006, Vie O., 2010, Mintzberg, 2011). Ces transformations changent profondément la nature des relations entre le manager et ses collaborateurs et impliquent une évolution des qualités managériales vers des qualités de communication, d’intelligence émotionnelle et d’empathie. Cependant, si la nature de la supervision change et si de nouveaux rôles du manager sont mis en exergue, la supervision reste au cœur du rôle managérial (IRRR, 1990, Gallie D. et al, 1998, Delbridge R. et Lowe J., 1997, Lowe J. et al, 2000, Hales C., 2005, Vie O., 2010).

Nous allons plus loin en réaffirmant l’importance des managers pour le bien-être et la performance des collaborateurs à l’instar de M. Detchessahar (2011) qui montre que c’est précisément l’éloignement des managers de proximité de leurs collaborateurs qui est source de

difficulté et de fragilisation des équipes opérationnelles. Les managers seraient « empêchés »

d’exercer leur rôle de supervision au quotidien, étant « happés » par des activités de reporting

et de participation à la stratégie et à des projets transverses : le manager ne serait plus présent pour accompagner, piloter, expliquer, aider, animer l’équipe, ce qui y génèrerait lassitude, épuisements et conflits. Finalement, J.M. Plane (2007) propose la définition suivante du management qui nous semble appropriée aux organisations post-modernes, qui rend compte de

la complexité de ce rôle et qui nécessite les compétences vues au-dessus : « il s’agit d’une

activité humaine et sociale visant à appréhender l’individu dans sa complexité et ses aspirations au travail, à stimuler les comportements productifs, à animer des équipes et des

19 Cité dans Grey C. 1999

69 groupes, à développer les structures organisationnelles et à conduire les activités d’une organisation en vue d’atteindre un certain niveau de performance ».

Au-delà de la supervision qui est au cœur de la fonction managériale, la littérature met en avant la contribution du manager à la stratégie de l’organisation.