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44 suivant la méthode expérimentale décrite par Hooz et Layton

L'idée de tout ceci était que nous tenions peut-être là une excellen­ te façon de construire le carbone spiro. Bien entendu on délaissait la possibilité d'effectuer la réaction de Diels-Alder mais d'un autre côté, ajouter facilement une chaîne alkyle nous semblait valoir au moins quelques essais. Il faut penser qu'un simple changement de réactif au cours de 1'alkylation - par exemple le bromolévulinate (52)

au lieu du bromure de propargyle - suivi de 1’addition du reste vi- nyle suffiraient pour mettre en place six des huit atomes de carbone requis pour former le cycle de neuf membres (53).

68 O

BrCH2—C — CH2 — CH2—COOEt

52

COOEt

53

La synthèse de cette nouvelle cetone (54) a été réussie mais en rendements plutôt médiocres ; l’isolation autant que la purification du produit se sont avérées délicates, la première à cause de la for­ mation de résidus solides provoquant des émulsions tenaces, la secon­ de par suite de la présence d’une grande quantité d’un produit dérivé du phosphore que nous n ’avons pas tenté d’identifier.

La vinyl-4 hydrindanone-2 (54) montre , en plus d'une bande cé- -1

tonique â 1740 cm , les bandes infrarouges caractéristiques du reste -1

vinyle, c’est-à-dire: 3095, 16 33, 1403, 995 et 911 cm . Dans le spectre de résonance magnétique nucléaire, la partie vinyle de la molécule apparaît sous forme d’un système ABC. Chacun des protons

est représenté par quatre pics. Les deux protons du méthylène termi­ nal ont deux pics communs et le proton isolé, lui, a ses quatre signaux

en ordre dTintensité croissante par rapport à leur proximité de la partie AB du système. De plus les constantes de couplage et J,^ varient légèrement de la partie AB à la partie C du système. Ces variations, pour étonnantes qu'elles puissent sembler ont toutefois

été observées â plusieurs reprises sur les restes vinyles. Elles proviennent du fait que le système n'est pas absolument d'ordre un. D'ailleurs, si l'on veut être rigoureux, la seule information exacte en matière de couplage qu'on peut obtenir de la partie C du système est que la distance entre les pics extérieurs est égale â la somme des constantes de couplage J et J

Le succès relatif de notre tentative nous a dissuadé de pour­ suivre plus avant l’étude de cette voie qui, de toute façon, s'éloi­ gnait un peu du cadre de notre travail.

A partir de ce moment, nous avons réorienté nos efforts vers la synthèse d'une cétone insaturée avec, à la jonction des cycles de cinq et de six membres, un groupe assez stable pour bloquer la posi­ tion et permettre le déplacement de la liaison double dans le cycle de six membres, mais aussi assez labile pour pouvoir être éliminé fa­ cilement en temps opportun. Le groupe carbéthoxyle possède ces ca­ ractéristiques, avec en plus 1'avantage de favoriser la réaction d'al­ kylation subséquente en activant le carbone numéro deux de la molécule.

Nous avons effectué la synthèse de la carbéthoxy-2 cyclohexanone (56) â partir de la cyclohexanone selon deux méthodes différentes. La première utilise le biais de l'ênamine. Cette dernière est formée d'abord par l'addition â la cétone d'une molécule d'amine secondaire

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(dans notre cas la pyrrolidine) puis par déshydratation intramolécu- laire avec un proton du carbone voisin. On fait ensuite réagir

l'ênamine avec du chloroformiate d' éthyle en milieu anhydre. Le fait que nous ayions négligé de tenir compte des modifications proposées

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par Hünig et ses collaborateurs a probablement été la cause des résultats plutôt médiocres que nous avons obtenus. Hünig a mon­ tré que l’ênamine de la morpholine, moins réactive, donnait des ré­ sultats supérieurs à ceux obtenus avec l'ênamine de la pyrrolidine. Il a aussi montré que le second équivalent d'ênamine, qui sert habi­ tuellement â capter l’acide chlorhydrique fofmé au cours de la

réaction, pouvait être remplacé, dans beaucoup de cas, par la triéthyl- amine. Bien entendu, 1’hydrolyse de la dernière ênamine regénère la cétone désirée.

L'autre méthode de synthèse de la carbéthoxy-2 cyclohexanone est probablement moins délicate; il s'agit de la méthode de Snyder

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et de ses collaborateurs qui font 1'addition d'oxalate d'éthyle sur la cyclohexanone pour produire le céto-2 cyclohexylglyoxalate d'éthyle (55). Cet ester est ensuite pyrolysé pour former la carbé­ thoxy-2 cyclohexanone. Il faut noter que dans la pyrolyse il est

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capital de n'employer qu’une trace de fer car autrement il se forme dans le mélange réactionnel de grandes quantités de gommes noires, ce qui coupe le rendement de la réaction.

ir^cooEt

o

55

56

On sait que les |3-cétoesters cycliques existent ordinairement sous forme d'un équilibre entre la forme céto et la forme énol dans les cas où un tel arrangement structural est possible. En infrarouge cet équilibre se manifeste par une série de quatre bandes d'absorption

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dans la région des carbonyles . Les deux premières, â 1750 et 1718 cm correspondent aux absorptions normales des carbonyles de l'ester et de la cetone respectivement. La troisième, à 1660 cm ^

représente 1'absorption du carbonyle de l'ester conjugué et chélaté â la fois car le déplacement considérable de la bande ne peut être attribué en entier ni â la conjugaison ni à la chélatation. Quant

-1

à la quatrième, â 1618 cm , elle provient des vibrations de la liai­ son double de la forme énol.

Le spectre de résonance magnétique nucléaire de la carbéthoxy-2 cyclohexanone est très caractéristique car en plus des signaux bien connus de l'ester éthylique, il montre bien 1'équilibre céto-énol qui existe dans la molécule : le proton énolique absorbe â 12.27 ô sous forme d’un singulet dont 1'intégration équivaut à environ trois quarts d’un proton; d'autre part, on trouve â 3.32 6 un petit tri­ plet qui s'intégre pour environ un quart de proton. On remarque en­ fin un léger dédoublement des signaux de l'ester éthylique et encore là les proportions sont d'environ trois à un pour la série principale et la série dédoublée.

Nous avons appliqué à la carbéthoxy-2 cyclohexanone, la même sé­ quence synthétique qu'à la dioxa-1,4 spiro[4,5]hydroxyméthylène-7

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décanone-6 (29) c'est-à-dire alkylation par le bromure de propargyle, hydratation de la liaison triple et enfin cyclisation de la méthylcé- tone.

Le produit d'alkylation, la carbéthoxy-2 propargyl-2 cyclohexa­ none (57), a pu être synthétisé en excellent rendement (77%) . Il présente en infrarouge toutes les caractéristiques du groupe propar­ gy le, telles qu'expliquées auparavant, ainsi que celles de l'ester et de la cétone; il faut noter toutefois que les absorptions des car- bonyles de l’ester et de la cétone ne sont pas bien résolues et qu’on observe plutôt une bande large qui inclut les deux absorptions. Le spectre de résonance magnétique nucléaire, lui, donne 1'occasion d’observer à 2.08 6 le signal dû au proton acétylénique, un triplet dont la constante de couplage est d’environ 2.7 Hz ; le triplet pré­ sente un léger dédoublement qu'il serait possible d'attribuer à deux conformères de la molécule si l'on fait intervenir ici un effet de rotation restreinte de la chaîne alkylée. Les deux protons du méthy­

lène de la chaîne se présentent sous la forme d'un quatuor AB dédou­ blé d'abord par le proton acétylénique et ensuite, de la même façon que ce dernier, par un effet de conformères différents. La constante de couplage entre les protons A et B est de 17.3 Hz, ce qui concorde avec les observations effectuées sur des molécules analogues. La position du quatuor à 2.586, est également en accord avec nos obser­ vations précédentes.

L'hydratation de la liaison triple de la carbéthoxy-2 propargyl-2

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de 95% en acétonyl-2 carbéthoxy-2 cyclohexanone (58). L’identité du produit a été démontrée à la fois par la disparition des bandes caractéristiques de la chaîne propargyle en infrarouge et par la présence dans le spectre de résonance magnétique nucléaire d'un

singulet â 2.10 ô qui s'intégre pour trois protons et qui est attri­ buable â un groupe méthyle voisin d'une cétone. Le signal dû au méthylène du reste acétonyle est un singulet, ce qui semble étonnant si l'on considère que le carbone voisin est asymétrique: on atten­ drait plutôt un quatuor AB.

Mise en présence d'une base aqueuse, la méthylcétone se cyclise par un mécanisme de condensation de type aldol pour ensuite se déshy­ drater et donner une cétone a, 3-insaturée, mais en même temps l'es­ ter est hydrolysé et lorsque, après la réaction, on acidifie le mi­

lieu afin d'en extraire les produits, on effectue la décarboxylation du cétoacide. On isole ainsi comme produit final de la réaction la bicyclo[4,3,0]nonène-6 one-8 (44). Cette cétone est en tous points identique à celle obtenue à partir de l’indêne.

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D’autre part, si on met la méthyleetone en milieu basique anhydre (tert-butylate de potassium dans le tert-butanol) le pro­

duit de réaction est la bicyclo[4, 3,ojcarbéthoxy-1 nonêne-6 one - 8 (60) . Cette cyclisation, qui permet de conserver le groupe carbéthoxyle et par là de bloquer la position angulaire sur le carbone numéro un, pose en pratique quelques problèmes de purification. En effet le produit cyclisé et la méthylcétone de départ présentent sur couche mince un comportement identique et leurs points d’ébullition sont très voisins de sorte que ni la chromatographie sur colonne, ni la distillation fractionnée ne peuvent donner de bons résultats. Comme la réaction; dans notre cas, n’a pu être réussie de façon quantitati­ ve, nous avons effectué sur le mélange une réaction d’acétalisation des cétones. Trois produits ont été récupérés de cette réaction: d’abord le diacétal de la méthylcétone (59) puis un mélange de la cétone cyclique (60) et de son acétal (61) .

Le produit d’acétalisation double, le dioxa-1,4 spiro[4,5]car- béthoxy-6 (êthylênedioxy-2,2 propyl)-6 décane (59), a été caractéri­ sé grâce â la bande ester â 1727 cm ainsi qu’aux quatre bandes d’absorption des acétals en infrarouge. L’étude du spectre de

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résonance magnétique nucléaire montre la présence d'un méthyle sur un carbone complètement substitué, d'un ester éthylique, de deux acétals (comme l'indique le singulet â 3.88 6 qui s'intégre pour huit protons), et enfin d'un méthylène voisin d'un carbone asymétrique dont le signal est un quatuor AB.

Le mélange de la cétone cyclique et de son acétal posent les mêmes problèmes que le mélange de la méthylcétone et de la cétone cyclique, il a fallu faire 1 'échange de l'acétal par un reflux de quelques heures dans un grand excès d’acétone en présence d'une quan­ tité catalytique d'acide £-toluènesulfonique. De cette façon nous avons réussi à obtenir un échantillon pur de la bicyclo[4,3,0]carbé- thoxy-1 nonêne-6 one-8 (60) .

Le spectre infrarouge de cette cétone comprend notamment une bande large et intense dans la région des carbonyles pour l'ester et

-1

la cétone; â 1625 cm on voit 1'absorption de la liaison double con­ juguée avec la cétone. Dans le spectre de résonance magnétique nu­ cléaire, on remarque surtout un quatuor AB â 2.36 6 et un singulet qui s’intégre pour un proton â 5.93 6, le premier étant causé par le méthylène placé entre la cétone et le carbone asymétrique dans le cycle de cinq membres alors que l'autre provient du proton oléfinique en a de la cétone. Bien entendu, les signaux caractéristiques de l’ester éthylique sont toujours présents.

L'examen du mélange de la bicyclo[4,3,ojcarbéthoxy-l nonêne-6 one-8 (60) et de son acétal (61) a permis de conclure que la liaison double n'a pas migré au cours de la formation de l'acétal. Le spectre

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de résonance magnétique nucléaire du mélange contient deux signaux dans la région des oléfines: un singulet assez large â 5.93 6 attri­ buable au proton oléfinique de la cétone, comme le confirme le spec­ tre du produit pur, et un autre singulet plus étroit à 5.41 6. De la position du pic on ne peut rien conclure puisque le remplacement de

la cétone par son acétal suffit â rendre compte du déplacement vers les champs forts mais la multiplicité, elle, joue un rôle discrimina­

toire .

61

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Dans le cas où la liaison double est dans le cycle â cinq mem­ bres (61), on voit que le seul couplage possible est le couplage allylique, lequel est d'ordinaire assez faible (0-2 Hz); par contre, si le proton oléfinique est dans le cycle de six, il sera couplé avec les deux protons vicinaux de sorte que le signal résultant sera un massif plutôt qu'un singulet. Les exemples de ceci sont nombreux dans la littérature : qu'on songe seulement au proton oléfinique du cholestérol qui absorbe â 5.36 ô sous forme d'un multiplet mal dé­ fini 51.

C'est la seule preuve que nous avons obtenue au sujet de la structure de 1'acétal car il a été impossible de purifier ce dernier ou de 1'obtenir en rendement quantitatif à partir de la cétone (60)

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comme c'est souvent le cas dans ce genre de réaction. Il faudra donc trouver un autre moyen de faire migrer la liaison double et à ce sujet, il n'est pas impossible que l'emploi d'un catalyseur plus violent, comme l'acide sulfurique, produise l'effet recherché. Il existe toujours la possibilité de faire l'acétate d’énol (63) ou même un éther d'énol (64) mais il faudra par la suite attaquer sé­

lectivement la liaison double du cycle de six membres sans toucher l'autre. C'est du moins ce que prévoit le plan de cette séquence :

O

63 R = C-CH

COOEt

3

d'abord faire un époxyde sur la liaison double du cycle de six mem­ bres puis hydrolyser cet époxyde ou en faire 1'ouverture avec un

acide halogéné ce qui doit introduire sur le carbone requis soit un hydroxyle qu'on peut oxyder soit un halogène qu'on peut ensuite échan­ ger pour un hydroxyle. Il est entendu que le comportement du reste carbéthoxyle et la façon de regénérer la liaison double dans le cycle de cinq membres par déshydratation ou déshydrohalogénation sont cho­ ses difficiles â-prévoir car ils dépendent pour beaucoup du mode opératoire choisi. Seule l'expérience saura discerner le vrai du faux, l'utopique du réaliste.

Afin de compléter cette série synthétique nous avons voulu véri­ fier que 1'introduction d'un reste méthyle sur le cycle de six membres ne gênait en rien les opérations. Nous avons donc repris les premières

étapes de la série en partant cette fois de la méthyl-4 cyclohexanone (65). De fait, toutes ces réactions s'effectuent très facilement et

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les rendements sont comparables à ceux obtenus dans la série homo­ logue . Il est donc raisonnable de croire que si la dicétone peut s 'obtenir à partir de la cyclohexanone, il sera tout aussi possible de l’obtenir en partant de la méthyl-4 cyclohexanone (65).