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LA SUISSE, UN SYSTÈME PERFECTIBLE

43. LE CADRE LÉGAL DE L'EXÉCUTION : HISTORIQUE,

Le peuple suisse a adopté, en 1898, l'art. 64 bis CF, qui confère à la Confédération le droit de légiférer en matière de droit pénal et réserve la souveraineté cantonale « dans la même mesure que par le passé » pour l'organisation judiciaire, la procédure et l'administration de la justice.

Cette disposition constitutionnelle ne mentionne donc pas l'exécution des sanctions pénales, et H est bien difficile de savoir si cette lacune fut voulue ou si elle résulte simplement d'une assimilation sommaire de l'exé-cution pénale à l'exécution civile 1 • Toujours est-il que, dès lors, toutes les interprétations furent possibles.

Avant même le long orage politique déclenché par l'unification du droit pénal, Stooss, le premier, avait prévu les difficultés que pourrait provoquer, dans un pays fédéraliste, l'application inégale du droit de fond. Aussi avait-il suggéré, dans l'exposé des motifs de son avant-projet, l'élaboration d'une loi d'exécution des peines, ayant pour base l'art. 21 dudit projet, traitant du régime des peines privatives de liberté 2.

Mais plus encore soucieux de l'avenir des mesures de sûreté, qu'il ne voulait pas laisser à l'appréciation des juridictions de jugement, Stooss proposait la création d'une autorité fédérale spéciale compétente en la matière, dont la composition et le fonctionnement seraient réglés par une loi fédérale spéciale (art. 40 avant-projet de 1893). « Chargée exclusi-vement de cet examen, soulagée des occupations si diverses qui surchar-gent les tribunaux, cette autorité, on peut y compter, vouera à sa tâche son attention toute entière ; elle saura s'élever au-dessus de la routine bureaucratique et du formafüme des juristes. La composition judicieuse de la commission augmentera encore la confiance qu'elle doit inspirer » 3, 1 Des réserves identiques concernant les compétences cantonales se retrou-vent en effet à la fois dans l'art. 64, dernier alinéa, CF concernant le droit civil, et 64 bis CF concernant le droit pénal.

2 C. Stooss : op. cit., p. 39. Signalons d'autre part qu'une thèse neuchâte-loise, rédigée parallèlement à notre étude, est exclusivement consacrée au contrôle du juge dans l'application des sanctions pénales en droit suisse. Nous y renvoyons le lecteur qui y trouvera certains développements sur l'historique de la question, les règles de partage de l'art. 64 bis CF et les exigences d'une parti-cipation judiciaire dans le nouveau droit pénal, depuis la réforme du CPS de 1971 ; cf. Dick F. Marty: Le rôle et les pouvoirs du juge suisse dans l'applicatio:z des sanctions pénales (op. cit.).

3 C. Stooss : op. cit., p. 49 et 50.

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Stooss avait ainsi jeté les bases d'une loi fédérale d'exécution des peines et suggéré une exécution centralisée des mesures d'internement.

Il s'affranchissait des scrupules de certains fédéralistes et avouait ses craintes d'une mise en échec de sa politique criminelle par une application cantonale trop inégale. Ce sont surtout les décisions d'internement qui, à ses yeux, devaient échapper à une répression « oscillant sans cesse entre une rigueur exagérée et une clémence injustifiée» 4•

Et c'est ainsi que les travaux préparatoires du CPS, et plus particu-lièrement ceux de la 2° Commission d'experts, seront riches en débats sur la réglementation de l'exécution pénale et la place qu'il faut accorder à celle-ci dans le texte même du CPS 5. E. Zürcher s'oppose à toute disposi-tion détaillée sur ce sujet 'au motif que l'exécudisposi-tion des peines est réservée aux cantons 6, opinion qu'il répète dans l'exposé des motifs de l'avant-projet de 1908 : «Le nouvel article 64 bis CF ne contient rien sur l'exécu-tion des peines ( ... ) Il faut en conclure qu'on a évidemment voulu laisser aux cantons le droit de construire et de gérer les établissements où s'exécutent des peines privatives de liberté et celui d'édicter des prescrip-tions sur cette matière» 7 • Cette position se fonde sur une interprétation extensive de l'alinéa 2 de l'art. 64 bis CF, et notamment du concept même de l'administration de la justice (Rechtsprechung), qui comprend pour E. Zürcher l'exécution des jugements s. A. Gautier déclare plus catégo-riquement encore que « l'exécution des peines est réservée aux cantons par nos textes constitutionnels » 9 • De telles interprétations de l'art.

64 bis CF sont loin de faire l'unanimité. « Die Verfassung behiilt denn auch den Kantonen nicht die Gesetzgebung über den Strafvollzug vor » 10.

Il s'agit toutefois moins d'une exégèse juridique stricte que d'une querelle politique opposant partisans et adversaires du fédéralisme dans le cadre du partage des compétences entre cantons et Confédération. Lors des débats parlementaires, Logoz assure ainsi que « l'exécution des peines doit rester cantonale» 11, en justifiant son affirmation par une analyse sommaire de l'art. 64 bis CF.

4 Idem, p. 79.

5 O. Delaquis: op. cit., p. 14.

6 Protokoll der zweiten Expertenkommission, Vol. 1, Lucerne 1912, p. 242.

7 E. Zürcher : op. cit. (trad. A. Gautier), Berne 1914, p. 4.

s Annexe / aux procès-verbaux de la 2" Commission d'experts, Berne 1916, p. 100.

o Protokoll der zweiten Expertenkommission, Vol. IX, Lucerne 1920, p. 196.

10 W. Burckhardt : op. cit., p. 596.

11 Bulletin sténographique (Conseil National), 1928, p. 9 et 144. Déclaration dans le même sens: de Meuron, p. 31. Dans son commentaire du CPS, Vol. 1 (Neuchâtel 1939), Logoz reconnaît toutefois que l'art. 64 bis CF est muet sur ce point (p. 151).

HISTORIQUE 145 Les propositions n'ont pourtant pas manqué, qui tendaient à contrain-dre le législateur fédéral à définir dans le CPS les modalités, les buts et les limites de l'exécution des peines. H suffit de rappeler les suggestiong de Studer 1 2, ou d'autres propositions détaillées concernant l'ensemble du régime pénitentiaire, sur le travail et la condition du condamné 13, qui ont été systémaitiquement rejetées, car elles n'avaient pas, disait-on, leur place dans le CPS H. Les arguments juridiques en leur faveur ne man-quent pourtant pas. Selon Kaiser, par exemple, le droit d'exécution ap-partient au droit matériel et tombe donc sous le coup de l'ai. 1 de l'art.

64 bis CF, et non de l'ai. 2 ; de plus, comme le droit de fond ne se borne pas à déterminer les actes illicites, la compétence du législateur fédéral doit s'étendre au droit d'exécution (Strafvollzugsrecht) 15, l'octroi de subventions fédérales ne consacrant qu'une attribution limitée à l'exécu-tion stricte (Durchführung des Strafvollzuges) en faveur des cantons.

Lang était du même avis : « Es kann doch kein Zweifel bestehen, dass aile Bestimmungen, welche sich auf den Zweck der Strafe und die Art und das Wesen des Strafübels beziehen, zum materiellen Strafrecht gehôren und dass wir Bestimmungen dieser Art aufzunehmen berechtigt sind » m. Certains soutinrent les propositions initiales de Stooss en faveur d'une loi d'exécution fédérale, à laquelle s'opposèrent notamment Zür-cher 17 et Hafter 18, On tint dès lors pour acquis que 'le CPS ne devait contenir que des principes généraux nécessaires à son application uni-forme, des dispositions administratives ultérieures réglant les normes de l'exécution et la construction des établissements.

Les raisons politiques 19, jointes à quelques considérations budgétaires d'importance 20, ont donc entraîné le rejet de toutes les propositions tendant à conférer à la Confédération des responsabilités plus importantes dans le domaine de l'exécution des sanctions pénales, et fait échec à la création d'une loi fédérnle d'exécution pénale 21 •

12 « Bei strengen Anforderungen an Ordnung, Gehorsam, Unterorctnung und Arbeit soli doch der Verurteilte nicht gedemütigt und wiedergedrückt und seine Selbstachtung und Menschenwürde nicht verletzt werden. » Protokoll der zwei-ten Experzwei-tenkommission, Vol. I, Lucerne 1912, p. 240.

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On peut donc tenir pour acquis que l'idée d'une loi fédérale sur l'exécution des peines et mesures, ainsi que l'idée d'une autorité fédérale compétente pour certaines mesures, sont aussi vieilles que l'avant-projet de notre CPS. On peut enfin rappeler qu'en 1931, W.Burckhardt recon-naissait au législateur fédéral (et non à l'exécutif) de larges compétences en matière d'exécution pénale, au motif que celle-ci est intimement liée au droit de fond : « Der Bundesgesetzgeber ware daher auch zweifellos zustandig, zu bestimmen, welche Strafanstalten von den Kantonen bereitzustellen sind, und welche Anstaltsordnung gelten soll, denn ail das und gerade das macht die Eigenart der Freiheitsstrafe aus, die er androht » 22.

Le contexte politique des travaux préparatoires du CPS n'a pas per-mis de faire au contrôle judiciaire dans l'exécution des sanctions pénales la place qui lui revenait logiquement dans le système conçu par Stooss.

Certains auteurs se sont pourtant exprimés en faveur d'une participation étroite du juge à l'application des peines. Pour C. Ludwig, cette partici-pation est nécessaire pour des raisons pratiques et très concrètes, bien qu'elle ne se justifie en théorie ni par la nature de la procédure et du jugement pénal, ni par les buts de la peine et les exigences de l'état de droit : « Die vollkommene Fernhaltung des Richters vom Strafvollzug fiihrt dazu, dass die mit den verschiedenen Funktionen der Strafrechts-pflege betrauten Organe einander fremd bleiben, und dass daher dem Richter die Gelegenheit fehlt, sich über die Wirksamkeit und die Wirkun-gen der von ihm ausgesprochenen Strafen zu unterrichten » 2 3. La même idée se retrouve chez O. Kronig ; la participation « wtirde das Gericht zwingen, im Rahmen seiner normalen Erkenntnisfunktion die weitere personliche Entwicklung des Verurteilten, sei es in der Freiheit, sei es was hier hauptsachlich interessiert, im StrafvoHzuge, zu berticksich-tigen » 24 •

Selon Ludwig, le juge doit donc se voir accorder des compétences juridictionnelles, en toute hypothèse dans les cas contestés, pour l'inter-ruption ou la prolongation de l'exécution de la peine, pour la déduction sur la durée de la peine du séjour dans un établissement spécialisé (hos-pice ou hôpital psychiatrique), pour l'octroi et la révocation de la libéra-tion condilibéra-tionnelle, l'établissement du délai d'épreuve et la fixalibéra-tion des obligations imposées au libéré 25 • Ces propositions - leurs auteurs le

22 W. Burckhardt : op. cit., ad art. 64 bis CF, p. 596.

23 C. Ludwig : op. cit., p. 278.

24 O. Krônig : op. cit., p. 89.

25 Certaines de ces propositions ne sont que le reflet de l'état du projet de CPS en 1930 (art. 36 et 38). Mais la majorité d'entre elles n'ont pas trouvé grâce auprès du législateur fédéral.

CONTRÔLE 147 reconnaissaient - dépassent largement le cadre des justifications pure-ment pratiques : « Somit bHdet die Beiziehung des Richters zum Straf-volilzug ein bedeutsames Mittel zur Herbeiführung vertiefter Gerechtig-keit auf dem Gebeit der gesamten Strafrechtspflege » 26. Il s'agit donc d'obtenir, par l'extension des expériences psychocriminologiques du juge, une justice pénale suivie d'une application équitable mais aussi légitime.

Ces diverses propositions législatives et doctrinales en vue de la parti-cipation du juge à l'application des sanctions pénales ont malheureuse-ment avorté.

44. LE CONTRÔLE DE L'APPLICATION DES SANCTIONS PÉNALES.

a) Le contrôle cantonal.

Les importantes concessions faites aux administrations cantonales de la justice ont conduit au maintien, voire à la floraison de systèmes de contrôle si variés que les rares auteurs qui en ont tenté la synthèse n'ont pu que décrire, canton par canton 2 7, les autorités intervenant dans l'exécution des peines et mesures. Ces divers systèmes possèdent néan-moins une caractéristique commune, à savoir la prépondérance des auto-rités administratives et plus spécialement de l'autorité exécutive supé-rieure 2s (Conseil d'Etat). Quelques cantons ont créé des commissions de surveillance, dont la dépendance à l'égard du pouvoir exécutif est très marquée. EHes sont, pour la plupart, nommées par le Conseil d'Etat « so dass es der Regierungsrat an sich in der Hand hatte, dem Strafvollzug eine mi:iglichst regierungsfromme Ueberwachung zu geben » 2 9 •

Les compétences de ces commissions sont souvent limitées à des visites périodiques d'établissements durant lesquelles la cuisine, la chapelle, les locaux de travail et la bibliothèque sont minutieusement inspectés, et généralement à la satisfaction de tous les membres de ces commissions -du moins à en croire leurs rapports 3o.

Trois cantons ont reconnu à leurs commissions certaines compétences décisionnelles (Tessin, Bâle-ville so bis et Genève), principalement en

ma-26 C. Ludwig : op. cil., p. 282.

27 M. Schwarz : Verzeichnis der Anslalten in der Schweiz des Straf- und Massnahmenvollzuges und der Untersuchungshaft, Bâle 1954.

2s H. Dubs : op. cit., p. 325.

20 H.F. Pfenninger : Die Aujsicht (op. cit.), p. 297.

30 Berne, Fribourg et Valais connaissent de telles commissions; Genève également, mais ses membres sont élus par le Grand Conseil. Cf. Pfenninger : op. cil., p. 300.

30bis A. Schmid : Die Baselsliidtische Slrafvollzugskommission, RPS 1973, p. 385.

148 SUISSE tière de libération conditionnelle. Certaines de ces commissions font lar-gement place à des magistrats, ce dont on a parfois conclu que la participation judiciaire à l'exécution des peines était ainsi assurée 31. Il faut cependant préciser que ces magistrats sont d'ordinaire les représen-tants du ministère public, habitueHement soucieux de l'ordre public davantage que de prévention spéciale.

Pfenninger, qui a dressé l'inventaire sommaire de ce contrôle dans les différents cantons, propose en conclusion certains principes concernant la création d'une autorité de contrôle idéale, son indépendance, sa compo-sition et ses compétences. Il semble fonder beaucoup d'espoir sur un or-gane collégial, nommé par les représentants du peuple, et indépendant de l'administration, à qui il n'hésite pas à confier des compétences déci-sionnelles :

1) comme instance de recours à disposition des fonctionnaires et employés de l'établissement pénitentiaire et des condamnés,

2) en matière d'octroi et de révocation de la libération conditionneJ!le.

Cette proposition, fondée avant tout sur ce qui existe dans certains cantons, n'est guère satisfaisante en ce qui concerne tant la composition et le statut de l'autorité envisagée que ses compétences. Une telle insti-tution rallierait certes les suffrages de nombreux cantons, mais elle ne correspondrait en rien aux exigences actuelles de I'exécution et sa création aboutirait en outre à « parcelliser» encore l'autorité de la justice 3 2, ce qui serait regrettable. L'élargissement du champ d'activité des commis-sions administratives ou politiques serait une demi-mesure ou un compro-mis qui pourrait faire dépendre plus étroitement l'exécution pénale d'or-ganes collégiaux et ne représenterait pas une solution conforme au principe de la légalité dans l'application des sanctions pénales. S'i'l fallait absolument conserver les commissions qui existent actuellement 33, ce a1 Ch. Gilliéron : op. cit., p. 277. Faisant allusion à ces institutions de droit cantonal, R. Warlomont (Le contrôle juridictionnel de la libération conditionnelle en Belgique, RIDP 1956, p. 114) parle même de «commissions juridictionnelles»

(p. 119 note 20).

32 H. Dubs (op. cit., p. 335) exprime le même avis : « Die Schaffung solcher Spezialkommissionen führt überdies zu einer unerfreulichen Aufsplitterung der justiz. »

33 Les commissions bénéficient en Suisse de faveurs toute particulières. Ainsi H. Sturzenegger, qui a spécialement étudié la libération conditionnelle (op. cit.), propose également comme « autorité compétente » idéale une commission pluri-disciplinaire avec un recours administratif au Conseil fédéral. « Die idealste

« zustiindige Behürde » für aile die bedingte Entlassung betreffenden Entscheide ist eine aus Vertretern der obersten kantonalen justizbehêirde, der Rechts-sprechung, des Strafvollzuges, der psychiatrischen Medizin und der Schutz-aufsichts-Organe gebildete spezielle Strafvollzugs-Kommission, die in eigener Kompetenz entscheidet » (p. 137).

CONTRÔLE 149 ne pourrait être que dans un sens restrictif, c'est-à-dire que leurs compé-tences devraient se limiter à la surveillance générale des établissements pénitentiaires et ne plus s'étendre à l'application individualisée des sanc-tions pénales et de leurs modalités.

H faut donc distinguer très nettement les attributions d'un organe collégial mi~politique, mi-administratif (dont les juges ne peuvent être exclus), responsable envers les pouvoirs législatif.s et exécutifs cantonaux de la bonne gestion et administration des établissements pénitentiaires, et celles de l'autorité responsable du traitement pénitentiaire proprement dit, prenant des décisions en application du droit de fond et offrant toutes garanties de compétences et d'indépendance, par l'application d'une pro-cédure judiciaire sanctionnée par des voies de recours : ces dernières attributions doivent être, conformément aux exigences de l'état de droit, confiées au juge dans le cadre de ses fonctions judiciaires. « Der Richter ist in erster Linie berufen, zwischen dem offentlichen Interesse an der Resozialisierung oder Sicherung und dem fundamentalen Anspruch des Taters auf personliche Freiheit objektiv abzuwagen, und diese schwierige interessenabagung muss ja nicht nur bei einer erstma:ligen Anstalts-einweisung, sondern auch bei jeder Entlassung oder Rückversetzung neu vorgenommen werden. Das gerichtliche Verfahren bietet zuden im aHgemeinen wesentlich bessere prozessuale Garantien ais jedes Ver-waltungsverfahren » 34.

b) Le contrôle fédéral.

Sur 1le plan fédéral, et jusqu'en 1968, c'est le Conseil fédéral, en qua-lité de juridiction administrative, qui connaissait des recours contre les décisions prises en dernière instance cantonale, notamment en matière d'exécution des peines ; ce domaine était en effet considéré comme rele-vant de l'exécution fédérale, en vertu des principes généraux régissant ses tâches (art. 102 ch. 2 CF) et de la «haute surveillance» à lui confiée par le CPS (art. 392 CPS) 35.

Les inconvénients de cette solution tenaient tant à la faiblesse des moyens dont disposait l'administrateur-juge (informations limitées et surcharge), qu'à la diversité des domaines dans lesqu~ls il pouvait être appelé à décider 36, De plus, il était fréquemment chargé avant tout d'un contrôle de légalité, qu'une autorité judiciaire telle que le Tribunal fédéral

34 H. Dubs : op. cit., p. 334.

35 Voir sur ce sujet: V. Kurt: Die Aufgaben des Bundes (op. cit.).

36 Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant l'extension de la juridiction administrative fédérale. FF 1965, II, p. 1315 et ss.

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aurait été mieux à même d'exercer : « Le contrôle de l'administration par des organes judiciaires garantit mieux les intérêts individuels que l'inter-diction de toute ingérence des tribunaux dans l'activité administrative.

Par conséquent ( ... ) le principe secondaire du contrôle des pouvoirs devra compé-tence, « les particuliers intéressés à l'élargissement des attributions du Tribunal fédéral ne sont pas légion». Il n'a pourtant pas omis de mentionner les détenus, qui « doivent avoir les moyens de faire respecter les droits que leur reconnaît l'ordre juridique» 40,

De fait, les décisions prises par le Tribunal fédéral en matière de libération conditionnelle, en application de ses nouvelles attributions de juridiction administrative, ont incontestablement affirmé des principes qui n'avaient jamais été clairement établis auparavant par les décisions man-quera pas d'avoir des incidences importantes sur l'étendue des questions débat-tues dans le cadre des recours en matière d'exécution des peines (cf. par ex.

CONTRÔLE 151 pénales. Les décisions cantonales de dernière instance sont désormais contrôlées par une autorité judiciaire fédérale, ce qui apporte un argu-ment décisif en faveur de l'institution d'autorités judiciaires cantonales chargées des décisions sanctionneHes 47,

Ces observations, fondées sur le fonctionnement administratif du contrôle cantonal de l'exécution des peines, sur la doctrine et les nouvelles attributions du Tribunal fédéral en !a matière, devraient évidemment marquer la fin du règne de l'autorité administrative dans le domaine de clairement dégagée conformément à l'esprit même de la libération conditionnelle, destinée à être l'étape la plus importante et peut-être la plus nécessaire de la Rechts-schutzsystem sehr bedeutsame Neuerung im Zusammenhang mit dem Ausbau der Verwaltungsgerichtsbarkeit ( ... ) : der kantonale Verwaltungsakt unterliegt der richterlichen Ueberprüfung durch das Bundesgericht » (op. cit., p. 161). Et faisant allusion au juge de l'exécution, Clerc relevait récemment «qu'il n'est pas exclu que la récente révision du CPS conduise à envisager cette formule et cela d'autant plus que, pour contrôler l'administration, nous voyons se déve-lopper très rapidement la juridiction administrative. La Confédération est entrée dans cette voie, de sorte que les recours contre les décisions cantonales en matière d'exécution ne sont plus examinés par le pouvoir exécutif, mais par le Tribunal fédéral lui-même» (Les récentes transformations du CPS, RSC 1972, p. 324).

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dénomination d' « autorité compétente», témoin d'un temps révolu où le droit de fond était contraint d'affirmer la nature administrative des décisions de l'exécution pénale afin de sauvegarder l'autonomie cantonale.

45. LA PARTICIPATION JUDICIAIRE DANS L'APPLICATION DES SANCTIONS PÉNALES.

Le CPS de 1937 48 avait très timidement et de façon assez incohérente fait place aux décisions du juge, avant tout dans l'application des mesures destinées aux anormaux mentaux dangereux (art. 17, ch. 3 GPS), de l'éducation au travail (art. 43, ch. 5, al. 2 CPS) et du renvoi de buveurs d'habitude en asile (art. 44, ch. 3,, al. 2 CPS). Dans tous ces cas, la mission du juge était toutefois restreinte à la décision à prendre en fin de mesure concernant l'exécution de la peine prononcée paraUèlement à la mesure lors de la condamnation et suspendue par l'exécution prioritaire de

Le CPS de 1937 48 avait très timidement et de façon assez incohérente fait place aux décisions du juge, avant tout dans l'application des mesures destinées aux anormaux mentaux dangereux (art. 17, ch. 3 GPS), de l'éducation au travail (art. 43, ch. 5, al. 2 CPS) et du renvoi de buveurs d'habitude en asile (art. 44, ch. 3,, al. 2 CPS). Dans tous ces cas, la mission du juge était toutefois restreinte à la décision à prendre en fin de mesure concernant l'exécution de la peine prononcée paraUèlement à la mesure lors de la condamnation et suspendue par l'exécution prioritaire de