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médicale ou psychiatrique lui sont soumises régulièrement, tous ·les six

mois au moins, pour leur prorogation, leur suspension ou toute autre décision appropriée ; et ce même tribunal doi't être informé par avis médical ou administratif, de la situation, des progrès du traitemtJnt et des décisions proposées.

L'originalité institutionnelle du code d'exécution est donc d'établir un « tribunal pénitentiaire » ayant de larges afüibutions (mais unique-ment en ce qui concerne l'exécution des peines et mesures privatives de liberté). Il est « responsable du procès d'exécution » et dispose d'une compétence générale importan1e, puisqu'en cas de conflit entre les deux organes chargés du respect de la légalité dans l'exécution, soit l'admi-nistration pénitentiaire et le procureur public, la décision est portée devant lui : ce qui effectivement « témoigne de la priorité accordée à l'ordre judiciaire pendant la procédure d'exécution». L'accès du tri-bunal est « fargement ouvert au condamné et à toute personne que les décisions d'exécution concernent» ainsi qu'au procureur (art. 8 et 14 Cpepol). Les parties peuvent ainsi lui présenter des conclusions, ou même des réclamations, contre les décisions rendues dans la procédure d'exé-cution ; les débats sont analogues à ceux qui se déroulent devant les tribunaux de jugement, et toutes les parties peuvent y assister, à l'excep-tion du condamné, dûment représenté, mais dont la participal'excep-tion per-sonnelle reste prévue par la loi pour certaines décisions, ou peut être ordonnée par le tribunal pénitentiaire chaque fois qu'elle paraît utile (art. 22, al. 1 Cpepol).

Le système nous a paru mériter d'être esquissé ici dans notre con-clusion ; car la nature des décisions et leurs incidences sur l'exécution

« confirment que les attributions du tribunal pénitentiaire forment une prolongation des attributions judiciaires déjà établies par le code pénal et concernant les pouvoirs du tribunal de condamnation». C'est à la fois la marque d'une juste conception et la garantie d'une justice mieux rendue. Car il peut arriver - remarque M. Robert dans son appréciation toujours si sensée - que le tribunal de jugement « manque d'informa-tions sur le condamné et soit donc incapable de fixer certaines modalités de la peine, comme il en aurait le pouvoir ; ou encore que les moda!Hés qu'i'l a fixées se révèlent inadéquates. C'est alors au tribunal péniten-tiaire d'intervenir pour compléter ou corriger le jugement. H pourra donc ordonner l'exécution de la peine dans un autre établissement ou modifier le régime i1nHialement déterminé, ou accorder également finterruption d'une peine privative de liberté dans les mêmes conditions que celles qui permettent au tribunal de jugemen1 d'ajourner l'exécution».

XXII PRÉFACE Pour le détail des avantages d'une telle institution, que l'auteur a su montrer avec une pénétration qui témoigne de beaucoup de compé-tence personneHe, on ne peut que renvoyer à son texte même. Ainsi parti-culièrement lorsqu'il souligne que la décision de libération condition-nelle, essentielle dans un système progressif et humain actuel, et qui pose de notables problèmes dans le système français, est prise par le tribunal pénitentiaire, et cela à la suite d'une procédure juridictionnelle où toutes les parties sont entendues, non pas dans un siège lointain quelconque mais dans l'établissement pénitentiaire même, ce qui le contraint à se rapprocher du condamné et lui permet d'apprécier direc-tement, sur p'lace et dans les conditions où il vit et où sa conduite est la mieux connue, quelle est la décision qui lui convient le mieux, et quelles sont les chances réelles de sa récupération sociale. On peut mesurer, lorsqu'il s'agit par exemple d'un récidiviste ou d'un instable, l'impor-tance de décider de la «mise à l'épreuve sous surveillance», en exami-nant si, d'après les résultats acquis et les observations faites pendant son incarcération, « l'absence de progrès dans sa réadaptation sociale laisse à supposer qu'après sa libération il commettra une nouvelle infraction » ; ou encore s'il y a lieu d'ordonner son placement pour une durée indéterminée dans un centre de réadaptation sociale « afin d'exercer sur lui une influence sociale complémentaire » pouvant promeMre un effet bénéfique. Et, ce qui est particulièrement important aussi, les délais de recours et ceux de l'examen sont brefs, afin de permettre des décisions sur réclamation rapides dans les dix jours (théoriquement en tout cas, art. 79).

Le juge pénitentiaire, compétent aussi pour accorder les permissions de sortie, pour suspendre, modifier ou annuler les décisions des com-missions pénitentiaires, est ainsi « le premier garant des principes de l'exécution des peines privatives de liberté et des droits reconnus aux condamnés». Ses compétences en matière de sanctions disciplinaires ne sont pas ignorées non plus, bien que mesurées à l'essentiel pour ne pas risquer d'entraver par trop l'action administrative normale des établis-sements : elles sont ramenées à la possibilité de « suspendre l'exécution d'une sanction pour en vérifier le bien-fondé», et de «modifier ou annuler la décision prise si elle est contraire à la loi ou aux principes de la politique pénitentiaire» resocialisante. Le consentement préalable du juge est exigé pour la sanction disciplinaire, soit !'«isolement» (qui peut aHer d'un à six mois). Il existe d'ailleurs dans les établissements des commissions pénitentiaires composées de spécialistes (médecins, psychologues et pédagogues), qui ont pour tâche principale de classer les condamnés avec clairvoyance ; et le juge pénitentiaire ainsi que le

procu-PRÉFACE XXIII reur peuvent assister aux séances de ces commissions, dont les déci-sions peuvent être annulées ou modifiées par le juge pénitentiaire lors-qu'elles sont contraires à la loi ou aux principes de la politique péniten-tiaire. C'est donc « la loi qui précise très exactement le rôle du juge par rapport aux organes collégiaux en milieu pénitentiaire», et cela dans la pensée tout à fait raisonnable que «l'activité de l'équipe criminologique doit être contrôlée par l'autorité judiciaire», afin que «le traitement pénitentiaire, qui s'accompagne de décisions touchant directement le statut juridique du condamné, demeure sous la surveillance du juge».

C'est ainsi que le code d'exécution polonais, « par ses dispositions de fond, de procédure et de contrôle sanctionnel, résout le problème de la légalité dans l'exécution pénale en traitant celle-ci de façon intégrale, sans qu'échappe à cet examen aucun de ses trois aspects, légal, procé-dural et juridictionnel».

« Des droits sans juridiction, pas plus que des juridictions sans pro-cédure ne peuvent apporter une solution répondant aux exigences de la légalité», conclut la belle et impartiale vue générale de l'auteur, qui le démontre pertinemment. Le code d'exécution polonais « accorde au con-damné les droits d'une partie au procès d'exécution de la peine, avec toutes les conséquences qui en découlent». La voie d'action et celle de recours ainsi ouvertes permettent à son avis d'affirmer que le tribunal d'exécution pénitentiaire, dans une exacte vue des droits, des compé-tences et des besoins, « reste maître des décisions importantes de l'exé-cution, soustraites aux autorités administratives » et à leurs erreurs ou abus possibles. Elles ne révèlent pas seulement mais permettent de réa-liser avec les meilleures chances, l'intention du législateur « qui ne conçoit pas la participation judiciaire à l'application des sanctions pénales comme une simple « juridictionnalisation » théorique, mais comme la surveillance active de magistrats sur le procès d'exécution », en donnant son véritable sens et toute sa portée à un procès pénal coor-donné et cohérent, du jugement de condamnation à son application et à son effet final. - C'est là l'ouverture d'une des manières d'aboutir à ce que nous avons recherché dans tant d'études, notamment dans notre

« Introduction à une procédure rationnelle de prévention et de défense sociales » 1, non moins que dans nos réflexions consécutives au II' Congrès de défense sociale des Nations Unies à Stockholm, en 1965, en mon-trant que, et en partie comment « nous devons renouveler le sens de la peine pour renouveler l'homme ».

7 RPS 1950, p. 82 SS.

XXIV PRÉFACE En concluant son analyse, M. Robert a estimé que les dispositions et l'expérience polonaises, si résolument originales et largement réforma-trices, au point d'influer en profondeur sur tout le système de la condam-nation et de l'application des sanctions et de leur effet 'le plus sociale-ment et humainesociale-ment bénéfique, ont un caractère «expérisociale-mental ». Si, dit-il, cette répartition actuelle des compétences et des moyens d'action

« est un compromis entre la reconnaissance d'un rôle nouveau confié à la juridiction de jugement et la spécialisation d'un ordre juridictionnel en matière d'exécution», il conduit à admettre «qu'en fait comme en droit, la solution définitive ne fait guère de doute». C'est à la fois la consécration justifiée de l'institution du juge et du tribunal spécialisés, et la constatation que leur rôle et leurs pouvoirs - tels que nous ,avons désiré les rappeler succinctement à cause de leur caractère novateur et de leurs garanties pour la liberté et les droits personnels ainsi que pour l'avantage social général doivent recevoir leur plein effet, en ce qu'ils s'étendent des sanctions privatives de liberté aux sanctions restrictives de droits : c'est-à-dire à la protection légitime des droits des personnes jugées et condamnées, et à la sanction légitime aussi, des fautes et des violations que pourraient de leur côté commettre les membres de l'auto-rité administrative et exécutive chargée de l'application de la loi en respectant les garanties de justice et d'équité qu'elle établit.

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On nous permettra, pour conclure, quelques considérations d'un carac-tère personnel. Nous nous sommes beaucoup occupé de la participation du juge à l'application des sanctions pénales, tant dans notre « Intro-duction à une procédure pénale rationnelle de prévention et de défense socia:les », que dans notre rapport sur « Les méthodes et procédés tech-niques de 1l'é1aboration de la sentence pénale ~, s. C'est là un vaste sujet, qui nous tient d'autant plus à cœur que, pendant de si longues années, nous avons pmtiqué les fonctions et ce que nous appellerions mieux, dans la ligne de pensée de d' Aguesseau, l'art passionnant de la justice, soit de la participation du juge de cassation à la vérification de la légalité des sanctions pénales et de leur application conforme aux textes et aux buts des lois pénales de fond et de procédure.

Dans notre « Introduction à une procédure rationnelle de prévention efficace et de défense sociales», nous insistions sur l'évidence que « le criminel est un homme comme tous les autres hommes, comme celui qui

s RIDP 1960, p. 256 ss.

PRÉFACE XXV