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(1) Il suffit pour s'en convaincre de reprendre ses propres schémas présentés

dans (66, 1973). Spence suppose les productivités données dès le départ. Mais rien n'empeche de les faire cro1tre avec le.niveau de signal acquis et d'obtenir des configurations analogues à celles que Spence analyse. Du reste un.modèle ~xte accumulation de co~pétences - signalement a été élaboré par Stiglitz dans (70, 1915) •..

il est nécessaire que les coOts d'acquisition du complexe signal-compétence soient différents d'un agent à l'autre.

Cette remarque montre que l'analyse de la sélection, quoique inspirée par celle du "filtre~ n'est pas nécessairement exclusive de celle de la formation qui suppose des acquisitions réelles de compétences.

Mais ces considérations ont des conséquences pratiques très importantes. En général l'observateur extérieur n'est pas capable de dis- tinguer signaux et compétences individuelles. Il est condamné à mesurer l'un et l'autre par les mêmes caractéristiques. Par exemple, le niveau d'étude mesure à la fois le signal de Spence et l'acquisition de compétences du capital humain. Il est alors impossible de trancher entre les deux inter- prétations alternatives du capital humain et du signalement. Ou si l'on préfère, il est impossible d'affirmer que les études favorisent les carrières individuelles par les compétences qu'elles permettent d'acquérir. La même observation peut s'interpréter en considérant que seuls les plus doués au départ obtiennent les meilleurs diplÔmes. Ces conséquences sont reprises en détail dans le chapitre VI.

Enfin une dernière remarque s'impose sur la généralité du modèle de sélection. Spence suppose que les salaires reflètent les productivités marginales des employés. Or le principe derauto~confirmation des percep- tions des employeurs ne requiert pas une correspondance cardinale salaire- productivité. Il suffit pour que le processus fonctionne que les performances ex post des individus les plus aptes soient les plus élevées. Autrement dit

le modèle ne requiert qu'une correspondance de rang, ou ordinale, entre

performances et salaires (1). Si l'on privi1égi~ la corr~8pondance slgna1-emp1oi en termes de niveaux, par opposition à la correspondance entre spécialités, seuls comptent les rangs des signaux produits et des performances dans des emplois de même spécialité.

(1) La démonstration est reprise dans le chapitre IV consacré à la discri- mination. L'une des analyses de la discrimination repose effectivement sur une auto-sélection des individus discriminés, les croyances des employeurs ne concernant que des performances ordinales.

L'importance de cette remarque tient à la difficulté, voire à

l'impossibilit~ de définir des productivités individuelles, alors que la hiérarchie d'une entreprise peut classer les individus selon leurs perfoc- mances compte tenu des critères qui y sont jugés satisfaisants.

4. CONCLUSION

L'analyse économique de la sélection traite essentiellement des aspects informationne1s des relations employeurs-employés.

Elle peut être conçue comme un complément nécessaire de l'économie de la formation car il s'agit d'une réflexion sur les critères de sélection sur le marché et des relations qu'ils entretiennent avec les compétences réelles des candidats sélectionnés.

A l'inverse, elle est également une critique radicale de l'économie de la formation, car elle propose un modèle explicatif qui n'attribue pas à

la formation d'influence sur les capacités productives individuelles. Sur ce plan, sa contribution est essentielle. En démontrant que des équilibres de signalement sur le marché de l'emploi sont concevables sans qu'il y aie acquisition réelle de compétences, elle démontre la possibilité d'une inter- prétation alternative des relations observées entre formation, expérience et rémunérations.

A l'extrême, ces relations ne traduisent pas nécessairement les améliorations de performance consécutives aux acquisitions de compétences. Les études ou les années d'expérience sont des attributs superficiels uti-

lisés comme critères de sélection par les employeurs pour repérer les candidats les mieux doués dès le départ, ou les mieux pourvus en aptitudes

inaltérables su'ils recherchent .

Une seconde contribution est d'éclairer les rôles respectifs des comportements de l'entreprise et des employés, et cela indépendamment du doute qui pèse sur l'origine des différences de compétences entre les employeurs. L'essence de l'analyse tient aux processus d'auto-sélection des employés, d'auto-confirmation des croyances des employeurs et leurs interdépendances.

Il est possible que la sélection observée ex post ne soit que la partie visible d'un processus caché qui fait intervenir, ex ante, - des comportements des candidats dont ne subsiste plus, à l'issue du mécanisme, de trace visible.

Critères et comportements de sélection donnent des rôles explicites à chacune des parties prenantes: l'employeur et l'employé. C'est là une nouvelle étape de la prise en compte des facteurs d'entreprise dans le déroulement des carrières. Mais bien évidemment, l'analyse reste partielle sur ce plan. Il faut attendre les approches dites de la segmentation pour montrer comment fonctionne la structure a110cative des individus dans les grandes entreprise~ et les étroites imbrications des dimensions sociales et

économiques dans la détermination des salaires et des carrières individuelles.

Dans la perspective de cette étude, un enseignement important de cette approche est de proposer un modèle explicatif différent de celui fondé sur l'accumulation d'expérience. Il est notamment démontré que les corres- pondances emplois-niveaux de formation ou d'expérience, ou encore sa1aires- niveaux de formation ou d'expérience, peuvent être indéterminées et conven- tionnelles. La question ~e pose alors de savoir si des tests permettant de départager les deux approches sont concevables.

La possibilité de concevoir de tels tests conditionne la démarche des études empiriques. Dans l'éventualité où ces tests sont

diffidles à mettre en oeuvre, le cherc~eur est condamné à proposer simul- tanément les deux interprétations alternatives à ses résultats. Cette question est explorée en détail au chapitre VI qui conclu à l'impossi- bilité de concevoir et de mettre en oeuvre des tests à la fois discriminants et catégoriques pour un observateur externe à une entreprise.