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Des subventions salariales à destination des personnes rencontrant une capacité de travail très réduite

C. L’accompagnement des assurés par les organismes pour les personnes handicapées

5.3. Des subventions salariales à destination des personnes rencontrant une capacité de travail très réduite

Les autorités publiques recourent en général à différents types d’instruments pour encourager l’engagement de personnes handicapées. On distingue en général les subventions salariales, les systèmes de quotas, les dispositions contractuelles flexibles et les mécanismes incitatifs créés dans le système de prestations sociales291. Toutes ces mesures n’ont pas pour autant été évaluées et il est parfois difficile de mesurer l’impact précis qu’elles auront. Lorsque l’emploi est dit assisté, il a également été constaté que la création d’emplois est un aspect très important pour encourager l’engagement des personnes qui entrent dans ce dispositif. Le jobcoach a un rôle déterminant dans la création de ces emplois292.

En ce qui concerne la personne souffrant de troubles mentaux, la question est complexe.

D’une part, un subside peut réellement lui permettre d’intégrer un emploi ; d’autre part, il est possible qu’à l’aide d’un accompagnement ou d’un suivi, elle puisse réintégrer le marché du travail sans qu’il soit nécessaire d’octroyer à l’employeur une aide financière particulière293. En outre, il convient de voir avec l’assuré s’il souhaite ou non divulguer sa maladie à l’employeur. Il est tout à fait possible que celle-ci soit invisible et que son impact sur sa capacité de travail soit limitée, voire même inexistante. A l’inverse, certaines personnes préfèrent ou finissent par accepter de devoir révéler leur maladie. Dans ce cas, elles introduisent souvent une demande de reconnaissance de la maladie à l’organisme pour

289 Voyez les fiches en anglais sur le site de l’Assurance Invalidité suédoise. URL : http://www.forsakringskassan.se/sprak/eng/if_you_fall_ill_(om_du_blir_sjuk)/

290 La Suède a créé un système d’assurance invalidité spécifique pour les jeunes de moins de 30 ans.

291 Rapport d’étude COWI, « Supported Employment for people with disabilities in the EU and EFTA-EEA. Good practices and recommendations in support of a flexicurity approach », op. cit., p. 17.

292 Ibid., p. 18. Hormis dans le secteur public, certains critiquent la création d’emplois dans le secteur privé en raison de leur caractère provisoire. Voyez à ce sujet : SPJELKAVIK Ø., FRØYLAND K., EVANS M., « Supported Employment in Norway. A National Mainstream Programme », op. cit., pp.

46- 47.

293 Voyez sur une critique des systèmes de subventions salariales à destination des personnes souffrant de troubles mentaux : OCDE, Mental Health and Work : Sweden, op. cit., p. 103.

personnes handicapées afin d’avoir plus de chances d’accéder à un emploi. Le passage par cet organisme pose question, notamment en termes de stigmatisation. La personne souffrant de troubles mentaux qui n’est plus capable de travailler comme auparavant se résigne parfois à entrer dans un circuit qui n’est en général pas conçu pour prendre en charge des problèmes de santé fluctuants ou passagers. En raison du caractère spécifique de nombreux troubles mentaux, il y aurait intérêt à développer un autre outil de subsides conçu spécifiquement pour l’engagement ou le maintien à l’emploi des personnes souffrant de graves problèmes de santé, voire de santé mentale. Le fait de construire cet outil autour d’un problème de santé antérieur ou autour d’une capacité de travail (temporairement) réduite - sans devoir spécifier qu’il s’agit d’un trouble de santé mental - pourrait avoir l’avantage de réduire le stigmate vécu par l’allocataire. Afin d’éviter un recours abusif à ce type de dispositif, il pourrait également être utile de le restreindre aux personnes qui sont éloignées depuis une longue période du marché du travail et dont les chances de trouver un emploi sont par conséquent très faibles.

C’est ainsi qu’en vue de favoriser un retour au travail graduel mais rémunéré, le Danemark paye des subsides aux employeurs pour que les employés à capacité de travail réduite qui retournent travailler à plein temps mais qui travaillent moins ou moins bien qu’auparavant (en termes de productivité) soient cependant payés pour un temps plein294. Cette mesure fait partie du dispositif Flexjobs. Ce dispositif a fait l’objet de plusieurs correctifs, notamment car il attirait des employés qui n’étaient pas dans le groupe cible. Les évaluations du dispositif révèlent que la réforme a, dans l’ensemble, eu un effet positif et les subsides octroyés pour les flexjobs ont continué à croître295. Parmi les bénéficiaires de la mesure, on estime à 15%

les personnes répertoriées comme souffrant de troubles mentaux296.

Les autorités publiques suisses ont, quant à elles, perfectionné leur système d’incitants financiers afin d’encourager l’engagement ou le maintien à l’emploi des personnes souffrant de problèmes de santé. Elles ont volontairement refusé de mettre en place un système de quotas qu’elles jugent trop stigmatisant et non-efficace en raison de la faible augmentation du taux d’emploi des personnes souffrant d’une capacité de travail réduite suite à l’introduction de ce type de dispositif297.

294 Pour les informations relatives à ce dispositif, voyez OCDE, Fit Mind, Fit Job. From Evidence to Practice in Mental Health and Work, op. cit., p. 131.

295 Ibidem.

296 Ibidem.

297 Voyez à ce sujet l’argumentaire du 19 mars 2007 développé par le Département fédéral de l’intérieur et Office fédéral des assurances sociales (OFAS) précédant la “votation populaire fédérale du 17 juin 2007 : oui à la 5ème révision AI”, disponible sur le site de l’OFAS. URL : http://www.bsv.admin.ch/dokumentation/gesetzgebung/00092/01581/?lang=fr

Ainsi, dans le cadre de la cinquième révision de la loi suisse relative à l'assurance invalidité, adoptée le 28 septembre 2007 et entrée en vigueur le 1er janvier 2008298, les employeurs du circuit régulier du travail reçoivent des subsides durant la première année s’ils engagent des personnes ayant été en incapacité de travail. Il est également possible de recevoir des conseils et un suivi sur le lieu du travail. Ils ont également droit à une allocation « d’initiation au travail » dans la mesure où « les performances de l’assuré ne correspondent pas encore au salaire convenu »299. En cas d’engagement d’une personne ayant souffert d’une incapacité de travail et devant s’absenter pour la même maladie que celle pour laquelle elle était précédemment en incapacité, les augmentations des cotisations à la prévoyance professionnelle ou à l’assurance d’indemnités journalières sont compensées par l’Etat pendant les deux premières années d’engagement300. Enfin, un dédommagement de l’employeur est prévu si ce dernier offre à un de ses employés souffrant d’une capacité de travail réduite la possibilité de rester au sein de l’entreprise et d’y effectuer des mesures de réinsertion301.

Avant de mettre en place un tel dispositif en Belgique, il serait également indiqué d’étudier si le fait d’opter pour des subventions salariales ou des abattement fiscaux a un effet différent sur le comportement des entreprises. En effet, un problème généralement rencontré tient au fait que lorsque l’employeur ne bénéficie plus de subsides, il a davantage tendance à licencier la personne. Les entreprises seraient-elles plus susceptibles de maintenir un travailleur qui souffrirait sur le long terme d’une capacité de travail réduite si elles ne bénéficiaient pas d’une subvention salariale (qui intervient en amont et que l’employeur reçoit immédiatement) mais d’abattements fiscaux (qui ont lieu en aval du processus) ? La question mériterait d’être étudiée. Enfin, il semble également conseillé de délimiter de façon circonscrite les conditions pour accéder à ce subside et de ne pas l’envisager de façon exclusive : l’accompagnement de la personne par un jobcoach, cumulé à un tel subside, donne des résultats plus encourageants en termes de maintien dans l’emploi que le fait de recourir uniquement à des subsides302.

298 Modification du Règlement sur l’assurance-invalidité (RAI) du 17 janvier 1961, Recueil officiel des lois fédérales, n°831.201, pp. 5155-5172.

299 Article 6ter du RAI.

300 Voyez l’article 6bis du RAI.

301 Voyez l’article 4octies du RAI.

302 SPJELKAVIK Ø., FRØYLAND K., EVANS M., « Supported Employment in Norway. A National Mainstream Programme », op. cit., p. 10.