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1.4 Les points de contrôles en G2/M

1.4.1 Les voies ATM et ATR

1.4.1.4 Les substrats de ATM et ATR

Après avoir été activées par les différents agents, ATM et ATR phosphorylent un très grand nombre de substrats. Des études de mutagenèse de p53, un substrat de ATM et ATR, et l’utilisation d’une banque de peptides ont permis d’établir que le motif S/T-Q représente la séquence minimale phosphorylée par ATM et ATR [374, 375]. Récemment, des études à grande échelle combinant l’immunoprécipitation à l’aide d’anticorps phospho-spécifiques pS/pT-Q à l’analyse par spectrométrie de masse quantitative (technologie SILAC) ont identifié entre 450 et 700 substrats phosphorylés par ATM et ATR suite à l’exposition aux radiations γ ou aux UV [376, 377]. Ces substrats sont généralement regroupés en trois familles selon leurs fonctions : 1) les médiateurs qui relient ATM et ATR aux autres cibles (ex. : Mdc1, 53BP1, le complexe MRN, claspine, Brit1/Mcph1 et H2AX), 2) les transducteurs du signal qui sont activés par ATM et ATR et qui propagent le signal en phosphorylant à leur tour d’autres substrats (ex. : les kinases Chk1/2) et 3) les effecteurs des points de contrôle impliqués dans la réparation et la réplication de l’ADN ou l’arrêt du cycle cellulaire (ex. : protéines MCMs, ORC, RFC, GINS, TopBP1, DNA polymérases, FANCD2,BRCA1, p53) [336]. Dans les prochaines sections, nous nous intéresserons particulièrement aux kinases Chk1 et Chk2.

1.4.1.4.1 Les kinases Chk1 et Chk2

Les gènes Chkl et Chk2 humains ont été identifiés par homologie de séquence aux protéines scChk1/spChk1 et scRad53/spCds1 [255, 378]. Ces deux kinases deviennent rapidement et fortement activées en réponse aux dommages à l’ADN, après avoir été phosphorylées par ATM et ATR [255, 378]. Bien qu’on sache aujourd’hui qu’il existe des inter-connections entre les différentes cascades de phosphorylation, historiquement, Chk1 est décrite comme étant activée en réponse aux lésions simples brin par ATR alors que Chk2 se trouve en aval de ATM lorsqu’il y a des cassures doubles brins [336]. L’activation de Chk1 nécessite la phosphorylation des Ser 317 et 345 situées à l’extérieur de son domaine kinase [379]. Afin d’être pleinement phosphorylée par ATR, Chk1 doit interagir avec la protéine claspine, une protéine adaptatrice qui facilite le rapprochement entre ATR et Chk1

[380, 381]. De son côté, l’activation de Chk2 par ATM ou ATR est très différente de celle de Chk1 et semble faire intervenir son homo-dimérisation [382]. Tout d’abord, la phosphorylation de Chk2 monomérique sur la Thr 68 située dans le domaine SCD (SQ/TQ cluster domain), une région riche en sites S/T-Q, provoque l’association via le domaine FHA (Forkhead associated domain) d’une autre molécule Chk2 [382]. Suite à cette dimérisation, Chk2 s’auto-phosphoryle sur les Thr 383 et 387 de la boucle d’activation permettant à Chk2 d’obtenir une activité enzymatique maximale [383]. Il semble que ces deux sites ne soient pas les seuls à intervenir dans l’activation de Chk2 puisque d’autres résidus en N-terminal de la protéine ainsi que dans le domaine kinase ont également été caractérisés (revue dans [382, 384]).

Bien qu’elles présentent un certain niveau de chevauchement quant aux signaux qui les activent, Chk1 et Chk2 possèdent des rôles physiologiques différents. Ainsi, l’inactivation génique de Chk1 chez la souris est létale au stade embryonnaire [385, 386]. Tandis que les souris Chk2-/- sont viables, leurs cellules sont moins aptes à maintenir un arrêt en G2 ou à induire l’apoptose suite à l’exposition aux rayons γ [387].

1.4.1.4.1.1 L’arrêt du cycle cellulaire par les kinases Chk1 et Chk2

Tel qu’il vient d’être décrit, les voies ATM/Chk2 et ATR/Chk1 sont activées lorsque l’ADN est endommagé. En plus de démarrer un programme de réparation de l’ADN, ces voies ont pour objectif de freiner la progression dans le cycle cellulaire. Les points de contrôle ainsi activés en G1/S ou G2/M préviennent la réplication et empêchent l’entrée des cellules en phase S ou en mitose lorsque l’ADN n’est pas parfaitement intact [336]. Différents substrats bien caractérisés de Chk1 et 2 ont des fonctions importantes dans le contrôle du cycle cellulaire. Par exemple, Chk1 et Chk2 phosphorylent p53 sur la Ser 20, ce qui diminue son affinité pour la E3 ubiquitine ligase Mdm2 et la stabilise [382]. L’accumulation de p53 provoque un arrêt du cycle cellulaire puisqu’elle est un activateur transcriptionnel de l’inhibiteur p21. Chk1 et Chk2 phosphorylent également le facteur de transcription E2F-1, ce qui augmente son activité transcriptionnelle et conduit à l’apoptose [388]. Une autre des stratégies importantes utilisées par ces voies et qui fût d’abord identifiée chez la levure est

l’inactivation des phosphatases Cdc25 (Section 1.2.1.3.2.2) [389, 390]. En réponse au rayonnement γ, Cdc25A est rapidement dégradée par le système ubiquitine- protéasome [391, 392]. Cette dégradation survient suite à la phosphorylation de Cdc25A par Chk1/2 sur les Ser 76 et 123, qui permet la reconnaissance par le SCFβ-

TrCP [384, 393]. Ces kinases sont également responsables de la séquestration dans le

cytoplasme par la protéine 14-3-3 [389]. En fait, Chk1 et Chk2 phosphorylent Cdc25B et C sur les Ser 309 et 216 respectivement et retardent du même coup leur transition dans le noyau où elles agissent pour promouvoir la progression dans le cycle cellulaire [252, 255]. Finalement, Chk1 contrôle l’activation de CDK1 via la kinase Wee1. En effet, suite à la phosphorylation de Wee1 par Chk1 sur la Ser 549 chez le xénope ou Ser 642 chez l’humain, l’activité kinase de Wee1 est stimulée grâce à son interaction avec la protéine 14-3-3 [394, 395].

Très importantes dans le contrôle du cycle cellulaire au niveau des points de contrôles, les kinases Chk1 et Chk2 représentent des cibles thérapeutiques présentement à l’étude. Le UCN-01, un dérivé de l’inhibiteur de kinases staurosporine, fait l’objet d’essais cliniques dans les traitements de plusieurs types de tumeurs. En effet, il semble que le UCN-01 augmente la cytotoxicitié en combinaison avec les traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie conventionnels [396]. Il a été montré que le UCN-01 inhibe Chk1 avec un IC50 environ 1000 fois plus petit que

pour Chk2, conduisant à la proposition que cette kinase représente une cible de choix pour le traitement des tumeurs [397]. Ceci suggère également qu’interférer avec le fonctionnement de points de contrôles pourrait s’avérer une approche thérapeutique viable.