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Quant aux éthers de glycol, c’est en 2000 que la Commission de la sécurité des consommateurs a préconisé la substitution complète des éthers de glycol de la série éthylénique (série E) par ceux de la série propylénique (série P) ou par toute autre substance. Mais des travaux ultérieurs, notamment l’expertise collective de l’INSERM en 2006, ont montré qu’il ne faut pas pour autant considérer les éthers de glycol de la série P comme inoffensifs.

A cet égard, votre Rapporteur insiste sur le fait que :

l’absence de preuve d’un effet n’est pas la preuve de l’absence d’effet.

y Quelques exemples des limites de l’innocuité des substitutions de solvants :

- Les nettoyants aqueux à la place des produits traditionnels comme les coupes pétrolières et les solvants chlorés pour le nettoyage industriel et le dégraissage des pièces métalliques. Ces nettoyants aqueux contenant des tensio-actifs et des éthers de glycol sont des mélanges complexes qui peuvent provoquer des irritations cutanées, oculaires et des allergies. Or, très peu de données toxicologiques sur les nettoyants aqueux et sur les expositions à ceux-ci existent.

- Les esters d’acides dicarboniques (DBE) à la place de solvants dans les produits décapants, de nettoyage, d’équipement, de fabrication, dans l’industrie électronique, dans les peintures. Il a été observé que l’utilisation des DBE brouillait la vision. Là encore, les données toxicologiques sont peu abondantes.

- Le diméthylsulfoxide (DMSO) à la place de solvants comme le dichlorométhane ou les éthers de glycol dans le domaine du décapage. Ce produit peut provoquer des irritations cutanées et des effets sur le système nerveux central. La aussi, les données toxicologiques sont rares et le niveau d’exposition envisageable est inconnu. Les effets cancérogènes ou sur le système immunitaire du DMSO demeurent également largement inconnus.

- La substitution par le solvant N-méthylpirrolidone. Jugé idéal en 1999, ce solvant est apparu reprotoxique en 2005.

- La substitution par l’acétate d’éthyle qui se transforme en acide acétique et en éthanol dans l’organisme deviendrait très critiquée si l’éthanol était classé reprotoxique et mutagène.

Enfin, il doit être souligné que doit être absolument évitée :

- La substitution d’éthers de glycol dangereux par des éthers de glycol nouveaux aux effets pas vraiment étudiés (EGMEE, DGEE) ou par des dérivés également dangereux (DEGME, DEGDME).

Cette considération sous-tend tout le rapport de l’Office.

Enfin, il a été dit plus haut, dans le cadre du contrôle des substances extrêmement préoccupantes par le système REACH, que ces substances ne sauraient être autorisées que s’il n’existe pas de substances ou de technologies de substitution.

Faut-il rappeler que les éthers de glycol sont eux-mêmes des produits de substitution employés pour remplacer d’autres solvants, les solvants chlorés, jugés plus dangereux ?

TROISIÈME PARTIE :

L’AIR INTÉRIEUR, MILIEU D’ÉLECTION

DE POLLUANTS DANGEREUX POUR LA SANTÉ HUMAINE

L’air ambiant est le lieu de pollutions insoupçonnées et donc le terrain pertinent pour des études toxicologiques complètes.

La pollution de l’air se définit comme « l’introduction par l’homme, directement ou indirectement, dans l’atmosphère et les espaces clos, de substances ayant des conséquences préjudiciables de nature à mettre en danger la santé humaine… et à provoquer des nuisances olfactives excessives ».

Une étude néerlandaise a évalué la perte de santé annuelle associée à des maladies environnementales : les effets à long terme des particules dans l’air représenteraient environ 60 % des maladies en lien avec les pollutions tandis que la pollution de l’air intérieur (tabagisme passif, radon, humidité…) atteindrait 6 %. Ces maladies environnementales ne représenteraient que 5 % du poids total des maladies aux Pays-Bas.

Une autre étude sur le nombre de décès dus à la pollution atmosphérique en Autriche, en France et en Suisse évalue ce nombre à 6% des décès totaux, soit 20 000 décès annuels.

Enfin, un groupe d’experts réuni par l’AFSSE en 2004 a estimé l’impact sur la santé d’une exposition chronique aux particules fines entre 6%

et 11% de la mortalité par cancer du poumon (de 600 à 1 100 décès) et entre 5% et 7% de la mortalité par maladie cardio-respiratoire (de 3 000 à 5 000 décès) – étude menée sur 76 agglomérations françaises regroupant 15 millions de personnes âgées de 30 ans ou plus.

Pour l’Europe, 100 000 décès et 725 000 années de vies perdues par an seraient attribuables à l’exposition aux particules fines.

L’importance de ces chiffres traduisant l’impact de la pollution de l’air sur la mortalité situe la gravité du problème qui ne peut manquer d’être rapproché du droit de respirer un air qui ne nuise pas à sa santé reconnu par la loi sur l’air du 30 décembre 1996.

Les études citées ci-dessus ne distinguent pas la pollution de l’air extérieur de celle de l’air intérieur mais cela n’atténue pas les inquiétudes sur la qualité de l’air intérieur : l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI - voir son audition) a montré, dans son étude récente, que la pollution

est majoritairement d’origine intérieure, les concentrations de polluants étant souvent plus élevées à l’intérieur du logement qu’à l’extérieur.

Afin de compléter les connaissances sur ce thème, l’AFSSE a été saisie, en 2004, par le ministre de la Santé pour évaluer la nocivité des produits de construction et de tout autre produit présent dans l’habitat.

Le plan d’action en santé environnement 2004-2010 de la Commission européenne identifie la pollution de l’air intérieur comme une priorité européenne. C’est également une des actions prioritaires de l’OMS Europe.

A la lumière de tests réalisés par l’« UFC-Que choisir » (voir son audition), les désodorisants d’intérieur et les produits nettoyants apparaissent comme des produits à surveiller.

Toutefois, en l’absence d’une norme sur la qualité de l’air intérieur, les résultats des données recueillies dans l’habitat demeurent difficiles à interpréter. Pour y remédier, l’AFSSET a entrepris l’élaboration de valeurs guides pour la qualité de l’air intérieur.

Enfin, sur la base de la méthodologie développée par l’OMS, l’INSERM et l’Observatoire régional de la santé Ile-de-France ont débuté le calcul des années de vie ajustées sur l’incapacité (AVAI) pour calculer le fardeau global des maladies en France.

Ce calcul devrait permettre d’éclairer les décisions tendant à identifier les priorités de santé publique, évaluer l’efficacité des politiques environnementales en termes de gain sanitaire et caractériser le risque sanitaire associé avec l’accumulation géographique d’expositions environnementales multiples et, enfin, améliorer la communication.

Avant d’examiner quelques substances présentes dans l’air intérieur et particulièrement nocives pour la santé humaine, il faut rappeler que les Français passent au moins 70% à 90% de leur temps à l’intérieur de locaux ou de moyens de transports et que l’exposition des personnes à l’air est de 100 %.

Parmi les polluants particulièrement actifs dans l’air intérieur, figurent un polluant résultant d’un comportement humain subi (la fumée de tabac environnementale), un polluant résultant des matériaux constituant le bâtiment, de ses équipements ou de son mobilier (le formaldéhyde), des polluants résultant d’une activité de nettoyage, d’une activité de bricolage ou encore d’une activité de jardinage amateur (substances phytopharmaceutiques, appelées phytosanitaires dans le langage courant) et un mélange entre divers polluants (le cas des particules).

Avant d’aborder ces différents polluants de l’air intérieur, doivent être mentionnés pour mémoire l’existence d’immeubles comportant des pathologies associées au bâtiment (Building Related Illness ou BRI) d’origine

infectieuse (légionelloses dont la fièvre de Pontiac, la fièvre du lundi ou la fièvre des humidificateurs).

Ensuite, le syndrome des bâtiments malsains (Sick Building Syndrome ou SBS), parfois confondu avec le premier phénomène décrit ci-dessus, qui se traduit par de multiples symptômes (irritation et obstruction nasales, sécheresse et irritation de la muqueuse des yeux, de la gorge, de la peau, migraines, léthargie, état de fatigue, nausées, toux…) liés à l’occupation des locaux et pouvant notamment provenir de facteurs chimiques comme les composés organiques volatils (COV) dont le formaldéhyde, la fumée de tabac, le monoxyde et le dioxyde de carbone, le dioxyde d’azote, l’ozone…

Ce syndrome est surtout observé chez les occupants de bâtiments climatisés récents ou rénovés d’autant que certains systèmes ont été conçus pour réutiliser en partie l’air extrait.

Parallèlement aux caractéristiques de l’air ambiant, celles du bâtiment lui-même doivent être prises en considération.

L’Association Haute qualité environnementale (HQE-voir son audition) estime que la qualité de l’air intérieur doit être appréciée en fonction de plusieurs objectifs : confort olfactif, confort hygrothermique (humidité relative entre 40 % et 50 %), absence de risques pour la santé.

Dès lors, la démarche HQE se propose d’atteindre six cibles :

- gestion des risques de pollution par les produits de construction pour éviter les particules solides (fibres), les composés organiques volatils (composés aliphatiques1 dont le formaldéhyde, composés aromatiques, composés halogénés…) ;

- gestion des risques de pollution par les équipements grâce au bon fonctionnement et au bon entretien des équipements de combustion et des équipements aéroliques (chaudière, ventilation) ;

- gestion des risques de pollution par l’entretien et l’aménagement des bâtiments en évitant les matériaux exigeant beaucoup d’entretien et en écartant les produits d’entretien nocifs ;

- gestion des risques de pollution par le radon dont la concentration doit être inférieure à 200 becquerels par mètre cube d’activité radon (recommandation OMS) ;

- gestion des risques de pollution de l’air neuf pollué grâce à des ventilations à double flux créant une légère surpression, la filtration ou l’absorption des polluants et le confinement des locaux en cas de pollution accidentelle ;

1Aliphatique : se dit, en chimie organique, d’un composé chimique contenant du carbone et dont la structure est en chaîne ouverte (et non en cycle).

- gestion de contrôle de la ventilation de l’air grâce à un renouvellement suffisant, mais aussi faible que possible, pour réduire les besoins de chauffage de l’air neuf.

Pour appréhender la diversité des situations vécues dans des airs intérieurs de qualités diverses, l’approche retenue par le présent rapport part de l’idée que l’individu respire au cours de chaque journée l’air intérieur de différents milieux qui pourraient être considérés comme autant de catégories de boîtes : les « boîtes à vivre » (logements et bureaux comprenant elles-mêmes de nombreuses sous-boîtes ou placards), les « boîtes à voyager » (automobiles et autobus, leurs tunnels et leurs parcs de stationnement, métro et trains, leurs tunnels et leurs gares, avions et leurs aéroports) et les « boîtes à loisirs » (piscines, patinoires, gymnases, discothèques, bars à chichas, musées…) dont les caractéristiques sanitaires seront rappelées ci-dessous.

I. LES « BOÎTES » À VIVRE

A l’intérieur des boîtes à vivre que sont les espaces d’habitation et les espaces de travail, divers éléments influent sur la qualité de l’air intérieur. Il s’agit d’abord des émissions des matériaux de construction puis de celles des matériaux de décoration, du mobilier, des comportements et des activités.

A. LES ÉMISSIONS DES MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION ET DE