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3.2 Caractéristiques évolutives et structurelles des étoiles de type spectral A

3.2.1 Structure interne des étoiles en séquence principale

Même si la détermination précise du domaine de masses d’un type d’étoiles dépend de leurs compositions chimiques, les étoiles γ Doradus se situent dans une gamme de masses légèrement supérieures à celles du Soleil, de l’ordre de 1.2 M à 1.8 M. Nous nous focalisons ici sur la structure interne des étoilesγ Dor en séquence principale (MS

Les ´etoiles γ Doradus 49 pour "Main Sequence") et nous nous référons au chapitre 5 pour celle des étoiles en pré- séquence principale. I II b c a log T 7,36 3,86 7,24 5,30 4,74 4,68 4,14 III I II III

Figure 3.3 – Panneau gauche : coupe d’une étoile γ Dor typique en séquence principale. présentant un cœur convectif (région I), une zone radiative (région II) et une enveloppe convective (région III), ainsi que trois zones d’ionisation partielle, respectivement H I/He I (a), He II (b) et celle des éléments du groupe Fe (c). Panneau droit : Profil d’opacité de cette même étoile.

Comme le montre la figure 3.3, les étoiles A et F en MS présentent une structure in- terne comparable à un ensemble de poupées russes : un cœur convectif (région I), une région intermédiaire radiative (région II) et une (ou deux) région(s) externe(s) convec- tive(s) (région III). Cette figure nous montre qu’il existe également trois pics d’opacité principaux : celui lié à l’ionisation partielle H I/He I (zone a, vers log T ≃ 4.2, celui lié à l’ionisation He II (région b, log T ≃ 4.7) et enfin celui lié à l’ionisation partielle des éléments du groupe du fer, vers log T = 5.3 (c).

La mise en route du transport de chaleur par la convection est conditionnée par le critère de Schwarzschild

∇rad > ∇ad, (3.1)

où∇radet∇adsont les gradients radiatif et adiabatique de température, définis par ∇rad = 3κL 16πacGm p T4 et ∇ad = Γ2− 1 Γ2 . (3.2) Ainsi, l’apparition d’une enveloppe convective est favorisée par

– l’augmentation de l’opacité. Plus la température effective est faible, plus l’opacité dans les couches proches de la surface est élevée étant donné à la contribution de plus en plus grande provenant de l’ionisation de l’hydrogène.

– l’augmentation de pT−4, c’est-à -dire une augmentation de la contribution de la pression de radiation à la pression totale, favorisée par la forte décroissance de la densité.

– la diminution de∇ad. Dans les couches proches de la surface, la température n’est pas suffisante pour une ionisation totale de H et He : Γ2 < 4/3, et la valeur de ∇ad diminue.

Dans les couches profondes, le critère de convection est dominé par le terme L/m. Les deux zones d’ionisation H I/He I et He II sont responsables de l’apparition des régions convectives externes. Lorsque la convection est suffisamment efficace, ces deux régions fusionnent en une seule et unique enveloppe convective. Si la structure statique de ces étoiles semble relativement simple, de nombreux phénomènes physiques évoluent ou changent même drastiquement dans cette gamme de masses.

Tout d’abord, les étoiles A et F se situent à la transition entre les étoiles plus froides, présentant une zone convective profonde, et les étoiles plus chaudes pour lesquelles le transport de chaleur dans l’enveloppe se fait principalement par radiation. Cette dépen- dance de la taille de l’enveloppe convective en fonction de la température effective est mise en évidence par la figure 3.4. La convection étant l’une des clés de l’excitation des modes g dans lesγ Dor (cf. section 3.4.1), son traitement est particulièrement important pour ces étoiles.

Figure 3.4 – Température à la base de l’enveloppe convective en fonction de la température effec- tive pour une étoile de 1.5 M⊙évoluant sur la MS, et dont le transport convectif est paramétré par la MLT pourα = 1.6 (carrés blancs) et α = 1.8 (ronds noirs). Cette évolution est comparée à celle obtenue lorsque la convection est décrite par la FST pour une étoile de 1.52 M⊙. Figure issue de Montalbán et al. (2007).

Le traitement mathématique des mouvements convectifs dans une étoile est un exer- cice particulièrement complexe. Dans un fluide de grande viscosité, les mouvements convectifs peuvent se développer à l’intérieur de cellules et devenir stationnaires, mais dans les gaz stellaires quasi non-visqueux, ils sont extrêmement turbulents (nombres de Reynolds Re≃ 1010, 1013). Les changements observés à la surface du Soleil corroborent

Les ´etoiles γ Doradus 51 ce concept de convection solaire turbulente, et une description quantitative de la turbu- lence reste à ce jour un problème essentiellement non résolu. La théorie de la convection la plus communément utilisée est la théorie de la longueur de mélange (MLT6dans le for- malisme dérivé par Böhm-Vitense (1958). Cette théorie est une théorie locale qui définit le libre parcours moyen d’un élément convectif par

l= αHp = −α ( d ln p d ln r )−1 , (3.3)

oùα est un paramètre libre généralement inconnu dans les intérieurs stellaires et calibré pour reproduire le rayon solaire à l’âge actuel (α= 1.8).

Une alternative à la MLT est le traitement du spectre complet de la turbulence (FST7, Canuto et al. 1996). Si la MLT est plus efficace que la FST dans les régions de faible efficacité convective, la FST est bien plus efficace que la MLT dans les régions de très grande efficacité convective, ce qui conduit à des profils de température très différents dans les couches externes (superadiabatiques). En conséquence, la profondeur de la base de l’enveloppe convective lorsque calculée avec la FST passe de superficielle à profonde dans un très petit domaine de température effective (figure 3.4).

αov = 0.00

Figure 3.5 – Fraction de masse du cœur convectif en fonction de l’abondance centrale d’hydrogène pour des modèles entre 1 et 2 M allant de la ZAMS (Xc = 0.70) à la TAMS (Xc = 0). Figure

reprise de A. Miglio.

6. it "Mixing-Length Theory" 7. "Full Spectrum of Turbulence"

Le domaine de masses des étoilesγ Dor se situe également dans la région de transition dans laquelle la cœur convectif évolue différemment (figure 3.5) selon si les réactions nucléaires sont dominées par la chaîne p− p (pour les masses les plus faibles, jusqu’à ∼ 1.2 M⊙) ou par le cycle CNO pour les étoiles plus massives. Cette différence est due à une plus forte sensibilité du cycle CNO à la température (figure 3.6). Entre 1.1 et 1.5 M environ, la combustion centrale de l’hydrogène est d’abord dominée par la chaîne p− p. Le taux de génération d’énergie généré par ces réactions est proportionnel à

εp−p ∝ ρT4−5X2. (3.4)

Dans cette configuration, le cœur est totalement radiatif. L’abondance d’hydrogène, notée

X, décroît à mesure que les réactions nucléaires transforment l’hydrogène en hélium, et

il en va de même pour l’opacitéκ, proportionnelle à (1 + X). Pour compenser ce déficit, la température augmente, ce qui fait croître le taux d’énergie fourni par le cycle CNO (cf. figure 3.6), qui lui est proportionnel à

εCNO ∝ ρT15−17XXCNO. (3.5)

Ce cycle est donc plus sensible que la chaîne p− p aux variations de température, les ré- actions nucléaires sont plus concentrées en masse, et le rapport L/m augmente. Un cœur convectif naît et sa masse augmente avec le temps, jusqu’au moment où le cycle CNO contribue à la quasi-totalité des réactions nucléaires. Cette croissance crée une discon- tinuité claire dans le profil de composition chimique (et par extension dans le profil de la fréquence de Brunt-Väisälä N). Cette discontinuité entraîne une inconsistance dans la manière dont la limite du cœur convectif est définie puisque les couches situées juste au delà de la limite du cœur sont plus riches en hydrogène et par conséquent plus opaques, l’opacité étant proportionnelle à (1+ X). Le gradient radiatif est ainsi plus grand dans ces couches qu’il ne l’est à la limite du cœur convectif. Une telle situation soulève la question de la présence de zones partiellement mélangées, appelées zones semi-convectives (Kato 1966; Mitalas 1972; Gabriel & Noels 1977). Si cette discussion n’est pas nouvelle, la compréhension de ce qui se passe dans ces régions est toujours matière à débat. Lorsque la température centrale est suffisante et que le cycle CNO domine, le terme κ prend le dessus dans l’expression de∇radet le cœur convectif se rétracte. Dans les étoiles suffisam- ment massives pour que le cycle CNO soit presque immédiatement la source d’énergie principale, le cœur convectif formé durant la phase PMS décroît ensuite régulièrement en masse à partir de la ZAMS. Dans les deux cas, un gradient de composition chimique important se forme à l’extérieur du cœur convectif, ce qui entraine une variation brusque de N à la limite du cœur convectif. Nous reviendrons dans les chapitres 5 et 6 sur l’effet de cette variation de N sur les propriétés des spectres d’oscillation.

La localisation exacte des frontières des zones convectives dérivées à partir du mo- dèle local de convection utilisé dans la modélisation stellaire est sujette à des incertitudes importantes. Pour combler l’incapacité de ces théories à reproduire les effets non locaux, tel que la pénétration des éléments convectifs au delà de la frontière décrite par le critère de Schwarzschild, un paramètre d’overshootingαovest parfois introduit afin d’augmenter la dimension de la région mélangée. La distance de pénétration dans la région radiative est paramétrée par dov = αov× min(rcc, Hp), avec rccle rayon du cœur convectif et Hpla

Les ´etoiles γ Doradus 53 p-p ∝ T4-5 CNO ∝ T15-17 Soleil 5 10 15 20 25 30 104 102 10-2 1 Ta u x r e la ti f d e g é n é ra ti o n d 'é n e rg ie Température centrale (106K)

Figure 3.6 – Taux de génération d’énergie nucléaire par les réactions de la chaîne p − p et du cycle CNO en fonction de la température centrale de l’étoile. Dans le Soleil, la génération d’énergie par les réactions nucléaires est dominée par la chaîne p− p.

se justifier par le fait qu’à l’interface convection/radiation (∇ad = ∇rad), si l’accélération des éléments convectifs est nulle, leur vitesse ne l’est pas nécessairement.