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3 Quelles stratégies d’accompagnement les formateurs mettent-ils en place pour le développement professionnel des NPS ?

Age et sexe de la Population N

Question 18 : Quel dispositif de formation auriez vous souhaité expérimenter durant votre

IV- 3 Quelles stratégies d’accompagnement les formateurs mettent-ils en place pour le développement professionnel des NPS ?

Nous faisions l’hypothèse suivante : La situation de formation en classe difficile provoque un décalage grandissant entre les attentes des formateurs et l’activité professionnelle des NPS. Cette hypothèse met en balance les stratégies d’accompagnement des formateurs et le développement professionnel des NPS mais pose surtout la question de la cohérence de la formation des formateurs. Modifient-ils leurs pratiques pour tenir compte du contexte difficile dans lequel évoluent les NPS ou pour tenir compte de leurs besoins? Sont-ils eux même formés pour répondre aux besoins des NPS ?

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Ria, L. (2012). Variation des dispositions à agir des enseignants débutants du secondaire : entre croyances et compromis provisoires. In P. Guibert & P. Périer (Eds.), La socialisation professionnelle des enseignants du secondaire. Parcours, expériences, épreuves, (pp.107-125). Rennes : Presses Universitaires de Rennes.

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Robbes, B., maître de conférence à l’université de Cergy Pontoise 94

Ardoino, J., 1993, L'approche multiréférentielle en formation et en sciences de l'éducation, Pratiques de formation (analyse), Université Paris VIII, Formation Permanente, N° 25-26, Paris.

Au regard des résultats de l’entretien semi directif mené avec les formateurs, il ressort que les questions n°2 et°6 répondent le mieux à cette hypothèse : Qu’attendez-vous d’un NPS? Comment parvenez-vous à faire face à leurs besoins lorsqu’ils sont placés en contexte difficile ou quand ils vous font part de leur difficulté?

En réponse à la question n°2 relative aux attentes des formateurs vis à vis des NPS, nous reprenons ci dessous, les résultats de l’analyse :

Les exigences vis à vis des stagiaires sont variables allant de la volonté d’instaurer au départ de bonnes relations, aux exigences liées aux référentielles de compétences. Ces exigences sont sujets à la fonction première du formateur. L’EMF est dans la relation alors que le directeur en qualité d’animateur, va privilégier l’intégration du NPS dans l’équipe. Les conseillers pédagogiques vont avoir des exigences différentes tenant compte soit de l’attitude, du savoir faire ou des compétences.

Le formateur GL nous livre ses attentes (Annexe 31):

J’attends des NPS qu’ils me donnent suffisamment de matière physique, de documents de préparation en plus de la mise en œuvre que je viens voir, pour que le conseil pédagogique que ma fonction m’impose, soit le plus complet possible. Je leur explique qu’il ne s’agit pas de leur faire passer des nuits blanches pour le plaisir. C’est vraiment pour que le moment de conseil qu’on va passer, soit le plus complet possible de façon à me donner le maximum d’information sur leur pratique.

A l’issue de ma visite, je rédige un compte rendu de visite sur lequel apparaissent les remarques faites lors de l’entretien. Ce compte rendu de visite est exposé aux autres et notamment à la hiérarchie qui devra valider leur année. S’ils ne me communiquent pas les documents de préparation, Je n’exige pas tous ces documents le jour J. Je leur laisse une marge de temps afin de me fournir ces documents mais s’ils ne présentent rien c’est à leur décharge. Ils travaillent un peu contre eux lorsqu’ils ne le font pas.

Le formateur N nous répond (Annexe 30):

Ce que j’attends d’eux en fait, c’est pouvoir prendre du recul et analyser leur pratique. Donc ce que j’attends d’eux et c’est ce qui se passe lors de l’entretien, c’est qu’on essaye d’analyser ce qui s’est passé. Non pas de me dire ce qui c’est passé, j’étais là, j’ai vu, mais qu’est ce qui a fonctionné ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné et comment on aurait pu faire autrement ? Soit en amont dans la préparation, soit in situ dans la classe. On se rend compte que la séance qu’on avait imaginée ne fonctionne pas. Comment réagir, même si on n’est pas capable de réagir tout de suite, dans l’entretien ? Dire quand l’élève a dit ça, j’aurais du faire ça etc… Ce qui m’importe, c’est qu’on va former des enseignants intelligents si on arrive à leur permettre d’apprendre à analyser, d’apprendre à réfléchir, de prendre du recul.

Le formateur PJ insiste sur les éléments suivants (Annexe 27):

J’attends qu’ils fassent travailler les enfants, qu’ils les prennent en compte, et comprennent que les enfants sont là pour apprendre.

J’attends qu’ils réfléchissent sur les supports qu’ils donnent aux enfants, pour construire quelque chose avec eux, pour eux. La « construction » est primordiale. La programmation doit être construite pour que l’enfant apprenne.

Il n’y a pas assez d’accompagnement du jeune et on risque de griller des générations d’enfants. Il faut les accompagner.

Le formateur BC nous dit (Annexe 28):

On doit attendre d’eux qu’ils appliquent…déjà qu’ils mettent en pratique les conseils qu’on leur a donnés mais aussi on est en train de vérifier que les compétences des nombreux enseignants soient mises en œuvre, on vérifie qu’ils ont des compétences sinon on les aide à les acquérir.

Les attentes professionnelles exigées par les formateurs vis à vis des NPS sont assez diverses. Certains sont comptables de leur supérieur hiérarchique et dans la logique juridique d’un écrit adressé à la hiérarchie, vont privilégier des traces pour la validation des NPS à travers le bulletin de visite. D’autres seront sur des dispositifs de formation comme l’analyse de pratiques et vont convoquer des pratiques telles que l’entretien d’explicitation de Vermersch. D’autres seront dans l’évaluation des compétences professionnelles au regard du référentiel. D’autres encore seront dans la relation tuteur/tutoré ou la tenue de classe.

Ces attentes tiennent-elles compte du contexte d’exercice des NPS ?

A regarder de plus près, sur l’ensemble des 11 formateurs consultés, seul le formateur GG a fait mention du milieu. Je cite,

Dans mon accompagnement je l’aide à devenir un professionnel, à se projeter dans le futur, à avoir une activité réflexive par rapport au milieu où il va enseigner dans le futur. (Annexe 32)

Ce milieu qu’il évoque pour des situations professionnelles futures constitue déjà la réalité du NPS affecté en EMR sur un support difficile.

Hormis le formateur GG, Il ressort de ce constat que les attentes formulées envers les NPS de même que les stratégies évoquées, sont propres aux formateurs car elles dépendent de leur sensibilité professionnelle et ne sont pas fonction du contexte d’exercice.

La multiplicité des approches ne seraient-elles pas le signe d’une certaine incohérence ou d’une absence de formation commune ? Chacun allant en ordre dispersé, au gré de son autoformation, de ses expériences passées ?

Le formateur ne reconnaît pas dans ses attentes la spécificité du contexte car il n’a pas été formé à les appréhender.

Se pose alors la question de la formation des formateurs aux différents dispositifs d’entretien pour aider l’accompagné à construire son identité professionnelle.

Jean-François Thémines et Anne-Laure Le Guern95 (2012, p.155-174) mettent l’accent dans leur contribution, sur la professionnalisation des enseignants qui ne s’est pas traduite par la professionnalisation des formateurs. Ils nous montrent que :

La professionnalisation du métier d’enseignant s’est réalisée en France sans que ne soit conduite de front celle du métier de formateur d’enseignants. Alors que la première a donné lieu à une forme unique (les IUFM) le renoncement à la seconde s’est traduit par des formes locales, à l’échelle de chaque IUFM et pour son propre compte, de formation de formateurs d’enseignants(p.156-157) …

Prenant l’exemple de l’IUFM de Basse Normandie, les deux auteurs tentent de montrer comment le dispositif de formation des nouveaux formateurs répond à la demande politique de professionnalisation des enseignants.

Rapporté à notre contexte local en Guadeloupe, nous pouvons dire que cette professionnalisation des enseignants est faite sur la base du volontariat. Ce sont les formateurs qu’ils soient EMF, conseillers pédagogiques ou autres formateurs de secteurs différents, qui prennent l’initiative personnelle de se former dans le cadre du Master 2 de Formation de formateurs d’adultes (MASTER 2 CEFA FFA), dirigé par Mr Picot Patrick, Maître de conférences, à l’ESPE Guadeloupe. Ce MASTER prenant la forme à compter de cette année d’un Master MEEF (Métier de l’enseignement, de l’éducation et de la formation).

Il existe bien cinq journées de formation à destination des conseillers pédagogiques inscrites au Plan Académique de formation (PAF). Ces journées ne concernant pas l’ensemble des formateurs, les EMF se retrouvent à nouveau isolés et obligés de recourir à l’autoformation. Depuis 2010, seuls trois rencontres, leur ont été consacrées :

- Quatre jours de formation du 28 juin au 02 juillet 2010 à l’IUFM de Guadeloupe, dans le but d’harmoniser les représentations des outils de l’enseignant, s’approprier la fonction tutorale, s’approprier les gestes professionnels de la fonction ;

- Trois journées de formation à leur demande du 20 au 22 juin 2011 sur l’analyse de pratiques, la formation et le suivi des NPS, entretien et échanges avec les CPD et l’élaboration d’un cahier du tuteur.

- Une matinée d’information en juillet 2013 avec l’IENA adjoint au DAASEN, dans le but de présenter le nouveau dispositif de formation des contractuels et des NPS pour l’année 2013/2014.

Il importe pour parler le même langage, d’harmoniser la formation des formateurs, d’assurer à l’EPSE une formation commune aux formateurs pour un meilleur développement professionnel des NPS. Cela ne pourrait-il pas passer par une politique de formation de tous les acteurs en présence ? Ainsi, les EMF, les conseillers pédagogiques et les formateurs à l’ESPE pourraient comme cela s’est produit dans le passé, bénéficier de formations à l’analyse des pratiques professionnelles (GEASE, entretien d’explicitation, auto confrontation, auto confrontation croisée, récits autobiographiques), aux gestes professionnels, à la posture de formateur d’adultes, à l’ingénierie de la formation et à l’accompagnement. Le nouveau dispositif       

95 Thémines J.-F., avec Le Guern, A.-L., (2012), « Enregistrer l'expérience. Écritures en formation de formateurs débutants ». In Mellouki M. & Wentzel B. (2012). Que faut-il penser de la professionnalisation de la formation des enseignants aujourd'hui ? Nancy : PUN

de formation à distance (FOAD) mis en service dans l’Académie de Guadeloupe depuis le 13 décembre dernier à destination des conseillers pédagogiques sur leur temps de formation pourrait constituer une belle alternative à ce besoin de formation commune.

Comment peut se traduire ce langage de l’accompagnement dans le quotidien des accompagnés ? Dans quelles mesures les formateurs tiennent-ils compte des besoins des NPS et les aident-ils en cela dans leur processus de développement professionnel ?

En réponse à la question n°6 de l’entretien semi directif, les stratégies pour venir en aide aux NPS vont dépendre du positionnement et des modèles convoqués par les 11 formateurs. Les formateurs ont employé ou observé une palette de stratégies :

- la stratégie par essais-erreurs par les NPS, la stratégie du modèle de l’EMF ; - l’analyse de pratiques ;

- l’analyse des gestes professionnels dans la gestion de la classe, la posture et la communication non verbale ; - la formation comme préalable à la compréhension du métier.

- la mise en confiance, le passage par des procédés relevant de l’innovation. - le conseil et la documentation.

- le travail en équipe.

Tous ces modèles convoqués hormis trois d’entre eux, ne doivent pas nous faire perdre de vue, que le développement professionnel des NPS s’accompagne de l’observation de leurs pratiques suivie de ce temps d’échanges propice à l’analyse.

Anne Jorro lors d’une conférence tenue à l’ESEN (Ecole supérieure de l’Education Nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche) le 30 septembre 2010 déclarait que,

Le développement professionnel des enseignants passe nécessairement par la reconnaissance professionnelle car c’est une question sensible et plutôt vive chez les acteurs. En tant qu’accompagnateur, il convenait de trouver une focale pour les enseignants qui débutent dans le métier. Selon l’auteur, le moment d’entretien de

développement professionnel que nous qualifions nous, d’entretien qui suit la visite formative, doit être

formalisé.

Cet entretien que Paul (2011) qualifie d’espace ‘inter valorisant’ serait par essence même le lieu où se joue l’accompagnement au développement professionnel du NPS mais également le lieu de sa reconnaissance professionnelle.

De l’avis de l’auteur, ce développement professionnel doit être formalisé par la rédaction d’un écrit. Rapporté à nos stagiaires, cet écrit prend la forme d’un bulletin de visite pour les conseillers pédagogiques ou d’un compte rendu de stage pour les EMF. Son rôle semble assez bien perçu par les NPS qui l’intègre à leur formation. La NPS F y voit (Annexe 18)

Une photo d’une situation à un moment donné. Le formateur nous donne les aspects positifs et les aspects négatifs de notre pratique. Cet entretien nous permet de nous voir avec du recul. On n’apprend pas de façon linéaire.

Interrogés sur les formateurs qui leur permettent de développer leur professionnalité,

28 sondés sur 34 sont d’avis que les EMF sont plus à même en premier lieu d’assurer leur développement professionnel. Ils sont 24 à positionner les formateurs à l’ESPE au troisième rang. Les conseillers pédagogiques occupent la seconde place pour 19 sondés.

Au moment d’évaluer la validité ou non de notre troisième hypothèse nous ne pouvons manquer de réinterroger le décalage qui existe entre les attentes des formateurs et l’activité professionnelle des NPS exerçant en classe ou contexte difficile.

Nous faisons le constat que les attentes des formateurs sont fortes à l’égard des NPS et ne tiennent pas forcément compte de leur contexte d’exercice. Notre troisième hypothèse qui veut

que : « La situation de formation en classe difficile provoque un décalage grandissant entre les attentes des formateurs et l’activité professionnelle des NPS. » est en ce sens validée.

Afin d’ouvrir des pistes, ne peut-on pas penser que ces enseignants débutants qui subissent de plein fouet les effets des milieux difficiles dans leur classe, sont quelque peu entravés dans leurs activités ? Le concept de l’activité didactique empêchée développé par Clot (1991) et

Amade-Escot pourrait ici trouver un terrain favorable au sens où, il conviendrait au cours des entretiens d’interroger la part contrariée de l’activité afin qu’elle s’exprime.

IV-4 La nouvelle ingénierie de formation avec son dispositif en alternance, ne vient-elle pas