Analyse du GEASE

Sept NPS de Saint-Martin, ont participé à ce GEASE.

L’objectif, était de les faire verbaliser sur des moments de leur pratique, des incidents critiques qui exposés au groupe, seraient susceptibles de les aider à dépasser une difficulté.

La situation choisie par la stagiaire S a porté sur le comportement d’un élève excessivement difficile pour lequel elle souhaitait avoir un éclairage nouveau de ses pairs. Il en ressort la retranscription citée en annexe n°21. 88

Au cours de la présentation, j’ai insisté sur le caractère même du GEASE exempt de jugement. Car, il ne s’agissait pas de juger ses pairs au regard d’une pratique mais bien de partir de la situation exposée et travailler autour de la difficulté.

La NPS S expose son cas et l’intitule : « le phénomène JVN ». Ce titre est assez évocateur de la situation qu’elle va décrire et dont je cite un fragment:

J’ai un CE1 de 26 élèves dont l’élève JVN. C’est un élève à la fois perturbateur, violent, agressif envers moi, envers l’enseignante, envers les camarades, peu importe l’adulte avec qui il a affaire. Il ne reste pas assis dans la classe. Il a des problèmes de concentration. Du coup, comme il ne reste pas assis, il est plutôt préoccupé à agresser les autres et à faire toutes sortes de choses. Donc il ne travaille pas. Il ne fait aucune production.

J’ai eu plusieurs cas de violence. Il essaye de me mordre, de me frapper. Il récupère des pierres dans la cour et les envoient sur moi et sur les camarades de la classe. Quelques faits : « Il récupère des ciseaux et coupe les cheveux des filles. Il frappe les camarades sans raison et les élèves les plus calmes, il les tabasse. » On a ici un condensé d’un élève ayant un comportement perturbateur et perturbant pour l’ensemble de ses camarades et de l’enseignant au point de se demander si l’élève est bien à sa place ou s’il relève d’un autre dispositif comme celui des élèves à besoins éducatifs particuliers. Les conseils formulés au départ par certaines collègues sont assez négatifs au sens où ils confortent la NPS dans une certaine impuissance à gérer la situation. Cette attitude est générale et semble même émaner des personnels du RASED cités par les NPS de St-Martin.

Cette attitude est rapportée dans l’extrait suivant :

Et quand la psychologue scolaire dit qu’il n’y a pas de solution. Comment on pourrait l’orienter vers une thérapie vraiment, chez un psychologue ? Est-ce qu’elle l’a pris en compte?

S1 : La psychologue prend en compte les SEGPA.

Doit-on se laisser gagner par le découragement ou se dire qu’un seul GEASE ne peut suffire à régler la difficulté ? Il est nécessaire de s’inscrire dans une continuité afin de permettre de débloquer un tant soit peu la situation.

On peut aussi s’interroger sur la faculté des jeunes collègues à éluder la difficulté qu’elle rencontre à travers un positionnement comme nous l’affirme Claudie Rault89(2005) citée plus haut dans notre revue de littérature. Toutes les conditions sont réunies pour que l’élève « JVN » cumule des difficultés extérieures à la pratique de l’enseignante à savoir : « une déficience de l’élève, un milieu social et familial défaillant, ou encore de mauvaises conditions d’enseignement offertes par l’institution scolaire. »

La NPS S ne serait-elle pas tentée face à cette situation de réduire à la baisse ses prétentions afin d’instaurer comme nous le dit Butlen (2002, 2004), une « paix scolaire » ? Ne serait-elle pas tentée de raccourcir le temps d’activité des élèves ?

Ce groupe d’entraînement à l’analyse de situations éducatives a eu le mérite de proposer aux jeunes collègues de Saint-Martin un espace de parole entre pairs, loin du jugement. Elles ont conscience qu’elles verbalisent sur leur situation en d’autre temps et en d’autres lieux. Toutefois, le cadre imparti par le GEASE présentait certaines contraintes qu’elles ont pu intégrer. Il serait souhaitable de poursuivre ces actions de formation.

       88 _{Transcription GEASE NPS de l’année N} 89 _{C. Rault cité plut haut p.16}

III.2.7 Des écrits divers

Ces divers écrits seront de nature à montrer les difficultés générées par ce nouveau cahier des charges. Les NPS échangent en raison de la nécessité qu’elles ont à communiquer et assurer une continuité des apprentissages. Si pour certains binômes cette communication est aisée et rentre dans les échanges quotidiens entre pairs, il n’en est pas toujours ainsi comme l’atteste les quelques extraits joints qui interpellent l’éthique ou la capacité à collaborer.

Ainsi, la NPS C1 envoie un message à son binôme : Bonjour C2,

Je t'envoie un tableau récapitulatif de ce qui a été fait.

J'ai rempli une première partie, dans la journée je t'envoie la suite.

En histoire je n'ai pas fini la Préhistoire, je n'ai pas eu le temps de faire le Néolithique.

Demain matin, les élèves seront en évaluation: le sujet et le verbe puis grandeurs et mesure et je ferai une séance en anglais sur les couleurs et sur le présent de l'indicatif. Il y aura aussi l'exercice de secours PPMS : Plan particulier de mise en sureté, je crois.

Les séances en cours (non finies donc) : Histoire

- CM1: *le genre des noms et des adjectifs *(pas de trace écrite)

- CE2: *La reproduction de figures * (pas de trace écrite) ; *le présent de l'indicatif* (ils ont vu les verbes du 1er groupe ainsi que les verbes être, avoir et aller), tu pourras continuer avec le 2ème et le 3ème groupe. CE2/CM1: La *monnaie* a été travaillée, une séance de révision et d'évaluation est à prévoir.

Bonne réception Cordialement C1

La NPS C2 interpelle son binôme de manière virulente. On cite le fragment suivant : Bonjour,

Je viens de recevoir seulement maintenant tes éléments. Dommage, j'ai travaillé hier une séquence sur la monnaie, car tu ne m'as pas indiqué par téléphone cela. D'où ma demande de m'envoyer ton cahier journal depuis la semaine dernière, en vain !!!!!!

Avec tout le travail à réaliser, tu me fais perdre mon temps, alors qu'un document envoyé par mail se fait en un seul clic. Je ne peux pas travailler de cette façon !

C2

La NPS C1 répond. C2,

La séquence sur la monnaie a été faite par mon remplaçant lors de ma semaine d'absence. JE N'AI PAS FAIT DE SÉQUENCE SUR LA MONNAIE alors comment t'en parler au téléphone?

Je t'ai dit TOUT ce que j'ai fait ou envisageais de faire par téléphone. Dans mon message je dresse donc un bilan plus approfondi des 5 semaines. Donc fais attention avant de tirer des conclusions hâtives.

C1

La conseillère C3, suite à ces échanges tente de pacifier la communication et répond : Bonsoir C1, Bonsoir C2,

J'attire votre attention sur l'importance de la communication entre pairs qui est primordiale pour votre réussite à Toutes.

Toutefois il convient que de vos écrits ou de vos rencontres, se dégage un respect certain, une reconnaissance de l'autre.

Il est clair que cette année vous devrez veiller à assurer la continuité des apprentissages pour une meilleure cohérence de la formation des jeunes élèves dont vous avez la charge.

Par delà les impératifs familiaux de chacune qui peuvent expliquer certains retards dans vos échanges et vos envois, ce n'est que d'une saine collaboration que pourra émerger votre professionnalité.

Je vous exhorte donc à pacifier vos échanges, ôter votre stress qui peut nuire à votre analyse réflexive pour le bien du binôme.

Je reste à votre disposition pour l'accompagnement que requiert un tel dispositif.

Dans le cas contraire, une rencontre avec l'IEN de circonscription sera éventuellement préconisée. Je vous remercie de votre compréhension.

Cordialement C3/ CPD

A cette régulation ferme, seule la NPS C1 répond : Message bien reçu Mme C3.

Je tente de recadrer les échanges et de placer la communication entre pairs sous l’égide de la reconnaissance professionnelle de Honneth (la reconnaissance entre pairs) de même que l’éthique développé par Bernard williams.

Un autre exemple nous vient de l’extrait du compte rendu de cadrage que j’ai réalisée suite à la rencontre entre un binôme et l’IEN de circonscription. Je cite l’extrait suivant :

L’alerte a été donnée en raison de l’absence d’échanges de pratiques entre les 2 NPS et d’outils communs. Il s’agit ici de faire un point sur ce qui explique l’absence de cohérence entre les pratiques des 2 NPS car les élèves de la classe doivent bénéficier d’un enseignement cohérent. Les stagiaires n’ont jamais échangé par mail. Les rituels mis en place par le binôme sont différents. Les comptines ne sont pas transmises. Le cahier journal ne reste pas dans la classe pour assurer la transmission. La progression n’est pas achevée.

L’IEN met l’accent sur un métier de la communication professionnelle avec des traces. Les NPS ne peuvent pas échapper à un travail d’équipe. Les NPS ont reçu du directeur d’école, la programmation de cycle, le projet d’école et les actions à mener.

L’IEN interpelle les NPS sur le fait qu’ils sont en train de jouer leur avenir professionnel. Il convient de mettre de côté leur ego pour trouver un moyen d’échanger. Cela passe par le partage d’un minimum : les préparations, les outils et les contenus. La progression devra être partagée ce qui va nécessiter de dégager du temps pour cela. Les échanges par mails sont nécessaires. Les 2 NPS seront évalués sur leur capacité à mettre en place une procédure de travail. Il leur est demandé de l’engagement face aux enjeux pédagogiques… Les NPS devront s’inscrire dans une projection en travaillant avec l’autre. L’IEN fait état du référentiel de compétences de 2013 et la nécessité de travailler par projet. Les NPS prennent l’engagement de travailler ensemble. Ils recevront la visite des CPC et CPD. Il conviendra de valider la compétence CC14.