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3. Substrats neurobiologiques associés au jeu pathologique

3.5. Spectroscopie par résonance magnétique (MRS)

3.5.1. Définition

Basée sur le même principe physique que l'IRM et utilisant le même équipement, la spectrométrie par résonance magnétique (MRS) est une technique qui utilise les signaux provenant des protons afin d’obtenir des informations biochimiques sur les cellules qui constituent les tissus. Cette technique permet de déterminer une concentration de métabolites donnée à l’intérieur d’un volume prédéfini du cerveau. À chaque métabolite correspond une fréquence émise connue qui, une fois transformée (du temporel ou fréquentiel, Fourier), sera observable sur un spectre où chaque pic (une amplitude marquée) révèle un métabolite spécifique (Evans et al., 2013). L’aire sous la courbe de chaque pic dépend de la concentration du métabolite en question dans la région du cerveau étudiée (voxels). Par différentes méthodes de localisation, l'obtention de spectres permet la quantification de ces métabolites résonant à des fréquences spécifiques. Par la suite, la fréquence de résonance de

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chaque métabolite est quantifiée par rapport à la fréquence de résonance d’un autre indice métabolique, généralement celle des molécules d’eau ou de la créatine.

La MRS permet de mesurer les concentrations de plusieurs métabolites cérébraux tels que des composés fondamentaux du métabolisme comme le N-acétylaspartate (NAA), la choline et ses dérivés, le myo-inositol, la créatine (Cr) et la phosphocréatine ou encore des composés impliqués dans la neurotransmission tels que le Glx, un indice combiné de glutamate+glutamine, marqueur de la transmission excitatrice, et le GABA, principal neurotransmetteur inhibiteur. La résonance de ce dernier est en chevauchement avec celle d’autres macromolécules et de l’homocarnosine. Ainsi, son signal est souvent référé comme GABA+ (Zhu and Barker, 2011). De plus, sa concentration est relativement basse comparativement à celle d’autres métabolites (Choi et al., 2006).

3.5.2. États de connaissances en MRS dans le jeu pathologique

À l’heure actuelle, il n’y a pas d’études mesurant les concentrations en métabolites chez les joueurs pathologiques avec la MRS. Néanmoins, des études ont investigué les concentrations en métabolites avec la MRS chez des sujets avec un trouble de dépendance aux substances [pour revue (Moeller et al., 2016); Tableau 3] chez des individus avec une dépendance aux jeux en ligne [en anglais « Internet or online game addiction » ; (Han et al., 2014)] et chez les individus avec une cyberdépendance [en anglais « Internet addiction disorder »; (Liu et al., 2013)].

Chez les patients souffrant de trouble de dépendance aux substances comparativement aux volontaires sains, certaines similarités métaboliques ont été notées, indépendamment de la substance consommée. En effet, un niveau plus faible de Glx a été observé dans le ACC et le DLPFC chez des individus avec une dépendance à l'alcool (Thoma et al., 2011; Ende et al., 2013) à la cocaïne (Yang et al., 2009; Schmaal et al., 2012), aux opiacées (Yucel et al., 2007; Verdejo-Garcia et al., 2013) et à la nicotine (Durazzo et al., 2016) comparés aux volontaires sains. Or, chez les individus avec une dépendance à l'alcool, il a été noté que les niveaux de Glx peuvent varier, selon que le sujet est en consommation active ou en période de sevrage (Thoma et al., 2011; Ende et al., 2013). Concernant le GABA, une diminution de sa concentration dans ces mêmes régions a été notée chez les individus avec une dépendance

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à l’alcool (Behar et al., 1999), à la cocaïne (Ke et al., 2004) et à la nicotine (Janes et al., 2013) comparativement aux volontaires sains. Enfin pour le NAA, une diminution de sa concentration a été notée dans les lobes préfrontaux chez les individus avec une dépendance à l’alcool (Meyerhoff et al., 2013). D’autre part, chez les individus avec une dépendance aux jeux en ligne, il a été observé sur un large échantillon d’individus (N = 73) que le niveau de NAA était diminué au niveau du ACC comparativement aux volontaires sains (N = 73). Par ailleurs, le niveau de NAA était négativement corrélé aux scores de sévérité du problème (Han et al., 2014). Une réduction du niveau de NAA préfrontal a aussi été rapportée chez 14 individus avec une cyberdépendance comparativement à 14 volontaires sains (Liu et al., 2013)

En somme, il semblerait que les personnes avec une dépendance présenteraient globalement des faibles niveaux de Glx, GABA et NAA dans les structures préfrontales. Compte tenu de ces observations, il serait tout à fait envisageable que les joueurs pathologiques présentent ces mêmes caractéristiques neurochimiques.

Tableau 2. État de connaissance en spectroscopie par résonance magnétique dans les troubles de dépendance aux substances. D’après Moeller et collaborateurs (2016).

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3.5.3. Études en MRS pertinentes aux déficits de prise de décision observés chez les joueurs pathologiques

De manière intéressante, une étude a répertorié des corrélations négatives entre les niveaux de GABA et Glx préfrontaux chez des volontaires sains et les performances à une tâche de prise de décision. Dans cette étude les concentrations en métabolites ont été mesurées pendant que des volontaires sains effectuaient la CGT (Fujihara et al., 2015). Des corrélations négatives ont été trouvées entre les concentrations de GABA au niveau du ACC et la recherche de récompense ainsi qu’entre les niveaux de Glx dans le ACC et la prise de risque. Enfin, deux études effectuées chez les volontaires sains ont observé des corrélations négatives entre les niveaux de GABA préfrontal tel que mesuré par la MRS et les niveaux d’impulsivité. Dans la première étude, les niveaux de GABA ont été mesurés au niveau du DLPFC chez 12 volontaires sains puis l’échelle UPSS a été administrée. Les auteurs ont observé une corrélation négative entre le niveau de GABA préfrontal et le score dans la catégorie « Urgence » de cette échelle (Boy et al., 2011). Dans la deuxième étude effectuée chez 50 volontaires sains, une corrélation négative a été observée entre la concentration de GABA au niveau du ACC et les scores d’impulsivité à la BIS notamment dans la catégorie « Impulsivité Motrice » (Silveri et al., 2013).

3.6. Résumé des connaissances sur les substrats neuronaux associés au jeu