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Application de la stimulation transcrânienne en courant continu (tDCS) chez les joueurs pathologiques : effets neurobiologiques et comportementaux

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Application de la stimulation transcrânienne en

courant continu (tDCS) chez les joueurs

pathologiques : effets neurobiologiques et

comportementaux

Thèse

Maya Dickler

Doctorat en neurobiologie

Philosophiæ doctor

(Ph. D.)

Québec, Canada

© Maya Dickler, 2017

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Application de la stimulation transcrânienne en

courant continu (tDCS) chez les joueurs

pathologiques : effets neurobiologiques et

comportementaux

Thèse

Maya Dickler

Sous la direction de :

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iii

RÉSUMÉ

Introduction : Le jeu pathologique est décrit par un comportement excessif de jeu d’argent et de hasard qui peut mener à des conséquences négatives multiples pour le sujet affecté, son entourage et la société. Il fait maintenant partie dans le Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders-5 (DSM-5) de la catégorie « Troubles reliés à une substance et troubles

addictifs » sur la base de caractéristiques partagées avec le trouble de dépendances aux

substances. Par exemple, l’utilisation de méthodes d’investigation cérébrale avancées telles que l’imagerie par résonance fonctionnelle (IRMf) a permis de mettre en évidence la présence d’altérations de la connectivité fonctionnelle au repos notamment au niveau du réseau fronto-striatal chez les individus avec un trouble de dépendance. D’autre part, des études en spectroscopie par résonance magnétique (MRS) ont relevé des niveaux anormalement bas de métabolites neuronaux incluant le GABA, le glutamate+glutamine (Glx) et le N-acetyl-aspartate (NAA) au niveau des lobes frontaux chez les individus avec un trouble de dépendance. Enfin, les individus avec une dépendance présentent des déficits de prise de décision ainsi qu’un niveau de « craving » intense envers des stimuli liés à la substance ou à l’expérience désirée (ex. : le jeu). De manière intéressante, lorsqu’appliquée sur le cortex préfrontal, la stimulation transcrânienne en courant continu (tDCS) a démontré une modulation de la connectivité fonctionnelle au repos et des concentrations en métabolites neuronaux dans plusieurs structures du cerveau ainsi que l’amélioration de la prise de décision chez les volontaires sains et la diminution du craving dans plusieurs types de dépendances mais n’a jamais été appliquée chez les joueurs pathologiques.

Objectifs : Ainsi cette thèse de doctorat comporte deux objectifs principaux. 1) Évaluer les effets neurobiologiques de la tDCS chez les joueurs pathologiques : connectivité fonctionnelle au repos (étude 1) et concentrations en métabolites neuronaux (étude 2). 2) Évaluer les effets comportementaux de la tDCS chez les joueurs pathologiques : craving (étude 1).

Méthode : Pour les deux études, un devis expérimental croisé, randomisé et aveugle à deux niveaux a été conduit chez des participants joueurs pathologiques. Chaque participant a participé à deux visites. Lors de chacune de ces deux visites, une session d’IRM combinée à

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iv

la tDCS a eu lieu pendant laquelle des mesures de connectivité fonctionnelle au repos et de mesures de MRS ont été acquises. La tDCS a été appliquée bilatéralement sur le cortex préfrontal (anode à droite, cathode à gauche) pendant 30 min à 1 mA. Le craving a été mesuré avant et après chaque session.

L’étude 1 a révélé que la tDCS active comparée à la tDCS placébo induit une modulation de la connectivité fonctionnelle au repos du cortex préfrontal. Notamment, une diminution de la connectivité fonctionnelle entre structures frontales distinctes et au niveau des réseaux fronto-pariétal a été observée pendant la tDCS active chez les joueurs pathologiques. Cette étude a aussi montré que la tDCS n’entraîne pas de changement des comportements de

craving.

L’étude 2 a révélé que la tDCS active comparée à la tDCS placébo augmente le niveau de GABA préfrontal mais n’engendre pas de modulation des concentrations de Glx et NAA au niveau préfrontal ni du Glx, GABA ou NAA au niveau striatal. De plus, les résultats de cette étude suggèrent que les joueurs pathologiques présentant des niveaux plus élevés de prise de risque, impulsivité et craving sont plus aptes à répondre à la stimulation.

Conclusion : Les études composant cette thèse de doctorat ont permis d’approfondir les connaissances sur les effets neurobiologiques de la tDCS chez les joueurs pathologiques. En effet, différents substrats neuronaux connus comme étant associés aux symptômes du jeu pathologique ont pu être modulés grâce à la tDCS, suggérant que cet outil pourrait avoir un intérêt thérapeutique chez cette population. Néanmoins, les effets bénéfiques d’appliquer la tDCS pour diminuer le craving chez cette population restent à être démontrés. Par conséquent, des études ultérieures doivent être réalisées pour vérifier cette hypothèse, ainsi que des essais cliniques employant des protocoles connus comme ayant des résultats bénéfiques dans plusieurs maladies psychiatriques telles que des sessions répétée s de tDCS étalées sur une période de temps.

Mots-clés : Jeu pathologique - stimulation transcrânienne en courant continu - imagerie par résonance magnétique fonctionnelle - connectivité fonctionnelle au repos - spectroscopie par résonance magnétique - craving

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ABSTRACT

Introduction: Gambling Disorder is described by engaging in compulsive and excessive gambling behaviors that can lead to multiple negative consequences for the affected individual, his or her entourage and society. Gambling disorder is now included in the category of "Substance-Related Disorders and Addictive Disorders" in the Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders-5 (DSM-5), based on shared characteristics with substance use disorders. For example, the use of advanced cerebral investigation methods such as functional magnetic resonance imaging (fMRI) has made it possible to demonstrate the presence of abnormal patterns of resting state functional connectivity, particularly in the fronto-striatal network in individuals with an addictive disorder. Moreover, magnetic resonance spectroscopy (MRS) studies have found abnormally low frontal lobe levels of neuronal metabolites including GABA, glutamate+glutamine (Glx) and N-acetyl-aspartate (NAA) in individuals with an addictive disorder. Finally, individuals with an addictive disorder are described by impaired decision-making as well as high levels of craving towards stimuli related to the desired substance or in this case, gambling. Interestingly, when applied over the prefrontal cortex, transcranial direct current stimulation (tDCS) stimulation has shown to modulate resting state functional connectivity and neuronal metabolites levels in several brain structures as well as improve decision-making in healthy volunteers and decrease levels of craving in substance use disorders but has never been used in gambling disorder.

Objectives: Thus, the present doctoral thesis has two main objectives. 1) Evaluate the neurobiological effects of tDCS in subjects with gambling disorder: resting functional connectivity (study 1) and neuronal metabolites levels (study 2). 2) Evaluate the behavioral effects of tDCS in subjects with gambling disorder: craving (study 1).

Methods: For both studies, we used a crossover, randomized and blinded at 2-levels study was conducted with subjects with gambling disorder. Each subject participated in two visits. During each of the two visits, a combined MRI/tDCS session took place during which measures of resting functional connectivity and MRS measurements were acquired. tDCS

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was applied bilaterally over the prefrontal cortex (anode right/cathode left) during 30 min at 1mA. In addition, craving was measured before and after each MRI/tDCS session.

Study 1 revealed that active compared with sham tDCS induces a decrease in resting state functional connectivity between distinct frontal structures and over fronto-parietal networks. This study also showed that a single session of active compared with sham tDCS does not modulate craving levels.

Study 2 revealed that active compared with sham tDCS increases prefrontal GABA levels but does not modulate prefrontal Glutamate and NAA levels nor striatal Glutamate, GABA or NAA levels. The results of this study also suggest that subjects with gambling disorder who display greater level of risk taking, impulsivity and craving are more likely to respond to tDCS

Conclusion: The two studies included in the doctoral thesis here presented have contributed to a deeper understanding of the neurobiological effects of tDCS in gambling disorder. Indeed, various neuronal substrates known to be associated with the symptoms of pathological gambling were modulated by tDCS, implying that this tool could have a therapeutic interest in this clinical population. Nevertheless, the beneficial effects of applying tDCS in order to reduce risk-taking and craving in this population remain to be demonstrated. Therefore, further studies have to be carried out to verify this hypothesis, as well as clinical trials employing protocols known to have beneficial results in several psychiatric diseases such as repeated tDCS sessions spread over a period of time.

Key-words: Gambling disorder - transcranial direct current stimulation - functional magnetic resonance imaging - resting state functional connectivity - magnetic resonance spectroscopy - craving

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vii

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

ABSTRACT... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES TABLEAUX ... xi

LISTE DES FIGURES ... xii

LISTE DES ABRÉVIATIONS ET DES SIGLES ... xiii

ÉPIGRAPHE ... xv

REMERCIEMENTS ... xvi

AVANT-PROPOS ... xviii

INTRODUCTION ... 1

1. Jeu Pathologique ... 1

1.1. Du jeu normal au jeu pathologique ... 1

1.2. Diagnostic « Jeu pathologique »... 2

1.2.1. Définition ... 2 1.2.2. Évaluation clinique ... 3 1.2.3. Prévalence ... 4 1.2.4. Prédispositions... 4 1.2.5. Comorbidités ... 5 1.2.6. Conséquences ... 6 1.2.7. Types d’activités ... 6

2. Caractéristiques comportementales associées au jeu pathologique ... 7

2.1. Prise de décision... 7

2.1.1. Prise de risque ... 8

2.1.2. Recherche de récompense et prise de risque ...10

2.1.3. Impulsivité ...12

2.2. Craving ...14

2.2.1. Définition ...14

2.2.2. Craving chez les joueurs pathologiques ...14

3. Substrats neurobiologiques associés au jeu pathologique ... 15

3.1. Structures associées à la prise de décision et au craving ...15

3.2. Neuroimagerie structurale ...18

3.2.1. Morphométrie voxel à voxel (en anglais VBM) ...18

3.2.2. Les études VBM chez les joueurs pathologiques ...18

3.3. Neuroimagerie fonctionnelle ...19

3.3.1. Définition ...19

3.3.2. Les études task -based chez les joueurs pathologiques ...20

3.3.3. Études de connectivité fonctionnelle au repos chez les joueurs pathologiq ues ...22

(8)

viii

3.4. Corrélats neurochimiques du jeu pathologique ...24

3.4.1. Dopamine ...24

3.4.2. Tomographie par émission de positons (TEP) ...25

3.4.3. Autres neurotransmetteurs impliqués dans le jeu pathologique ...26

3.5. Spectroscopie par résonance magnétique (MRS) ...27

3.5.1. Définition ...27

3.5.2. États de connaissances en MRS dans le jeu pathologique...28

3.5.3. Études en MRS pertinentes aux déficits de prise de décision observés chez les joueurs pathologiques ...30

3.6. Résumé des connaissances sur les substrats neuronaux associés au jeu pathologiq ue ...30

4. Traitements actuels pour le jeu pathologique ... 31

4.1 Thérapie cognitivo-comportementale (TCC)...31

4.2. Rencontre de « joueurs anonymes » ...32

4.3. Médicaments ...32

5. La stimulation transcrânienne en courant continu (tDCS) ... 35

5.1. Généralités ...35

5.1.1. Définition ...35

5.1.2. Bref historique ...35

5.2. Matériel nécessaire et application de la tDCS ...36

5.3. Mécanismes d’action de la tDCS...37

5.3.1. Effet de la tDCS sur l’excitabilité corticale ...37

5.3.2. Mécanismes cellulaires de la tDCS ...39

5.4. Aspects sécuritaires ...40

5.5. Avantages et inconvénients ...41

5.6. Les multiples applications de la tDCS ...42

5.7. Effets de la tDCS sur les comportements pertinents au jeu pathologique ...43

5.7.1. Effets de la tDCS sur la prise de décision ...43

5.7.1.1. Modulation de la prise de risque...43

5.7.1.2. Modulation de la recherche de récompense et de la prise de risque ...44

5.7.1.2. Modulation de l’impulsivité ...44

5.7.2. Effets de la tDCS sur le craving...45

5.8. Effets de la tDCS sur les substrats neuronaux pertinents pour le jeu pathologiq ue ...46

5.8.1. Effets de la tDCS sur l’activité fonctionnelle ...46

5.8.1.1. Études en task -based ...46

5.8.1.2. Études en connectivité fonctionnelle au repos ...47

5.8.2. Effets de la tDCS sur les concentrations en métabolites neuronaux ...48

6. Objectif général et hypothèses ... 49

CHAPITRE 1. Effets de la tDCS sur la connectivité fonctionnelle, la prise de risque et le craving chez les joueurs pathologiques... 51

1. Résumé ... 52

2. Abstract... 53

3. Introduction ... 54

2. Materials and Methods ... 55

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ix

2.2. Participants ...55

2.3. Stimulation parameters ...57

2.4. fMRI data acquisition and preprocessing ...57

2.5. Gambling craving assessment ...58

3. Results ... 59

3.1. Resting state fMRI...60

3.2. Gambling craving assessment ...61

3.5. Side effects ...61

3.6. Integrity of blinding...62

4. Discussion... 62

6. Funding ... 65

7. Acknowledgements... 65

CHAPITRE II : Effets de la tDCS sur la concentration de métabolites neuronaux chez les joueurs pathologiques... 66

1. Résumé ... 67

2. Abstract... 68

3. Introduction ... 69

4. Material and methods ... 70

4.1. Patients ...70

4.2. Design ...71

4.3. Stimulation parameters ...72

4.4. Scans and MRS measurements ...72

4.5. Data analysis ...72 4.6. Statistical analysis ...73 5. Results ... 75 6. Discussion... 76 7. Conclusions ... 79 8. Acknowledgements... 80 9. Funding ... 80 DISCUSSION ... 81

1. Bilan des résultats obtenus ... 81

2. Effets de la tDCS sur la connectivité fonctionnelle au repos ... 82

3. Effets comportementaux de la tDCS chez les joueurs pathologiques... 91

4. Effets de la tDCS sur les concentrations de métabolites neuronaux ... 94

5. Lien entre la diminution du GABA préfrontal et celle de la connectivité fonctionnelle entre le DLPFC et autres structures ... 100

6. Forces ... 102

7. Limites... 104

8. Perspectives ... 106

CONCLUSION... 110

BIBLIOGRAPHIE ... 111

ANNEXE I : Impulse control disorders: Prospect for treatment using noninvasive brain stimulation ... 144

(10)

x

ANNEXE II : Cortical Excitability During Passive Action Observation in Hospitalized Adults With Subacute Moderate to Severe Traumatic Brain Injury: A Preliminary TMS Study... 163

(11)

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LISTE DES TABLEAUX

INTRODUCTION

Tableau 1. Critères DSM-5 du jeu pathologique...3 Tableau 2. État de connaissance en spectroscopie par résonance magnétique dans les troubles de dépendance aux substances... 29 Tableau 3. Questionnaire sur les principaux effets secondaires de la tDCS... 41

CHAPITRE I

Table 1. Characteristics of subjects with gambling disorder………56 Table 2. Clusters of areas that showed a significant Time x Stimulation interaction in the ANOVA (p<0.05, cluster size threshold 97 voxels)……….61 Table 3. Side effects reported by participants after each transcranial direct current stimulation session...……….62

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LISTE DES FIGURES

INTRODUCTION

Figure 1. Représentation de combats de gladiateurs... 1

Figure 2. Modèle conceptuel proposé pour les comorbidités existant entre le jeu pathologiq ue et d'autres troubles psychiatriques.. ... 5

Figure 3. Exemple de jeux préférés par les joueurs pathologiques ... 7

Figure 4. Illustration de la Balloon Analogue Risk Task (BART). ... 9

Figure 5. Structures cérébrales impliquées dans la prise de décision. ... 16

Figure 6. Voies dopaminergiques principales et structures impliquées dans le circuit de la récompense ... 24

Figure 7. Matériel nécessaire pour une session de tDCS. ... 37

Figure 8. Illustration des mécanismes physiologiques d'une stimulation transcrânienne en courant continu.. ... 38

CHAPITRE I Figure 1. Results from the significant Time x Stimulation interaction for A) the right DLPFC seed and B) the left DLPFC seed..………..61

CHAPITRE II Figure 1. Effects of transcranial direct current stimulation (tDCS) on GABA level……...74

Figure 2. Correlations between risk taking, impulsivity and gambling craving and neural metabolites during active transcranial direct current stimulation (tDCS) in patients with gambling disorder………....76

DISCUSSION Figure 1. Exemple d’un montage de tDCS bilatéral versus unilatéral et des différents devis expérimentaux utilisés pour mesurer la connectivité fonctionnelle au repos (rsFC)………..90

Figure 2. Schéma représentant les effets de la tDCS chez les joueurs pathologiques : principaux résultats des deux études………...101

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LISTE DES ABRÉVIATIONS ET DES SIGLES

ACC : Cortex cingulaire antérieur ALV : Appareils de loterie vidéo ANOVA : Analyse de variance ASL : Marquage de spins artériels ATV : Aire tegmentale ventrale BART : Balloon Analogue Risk Task BDI : Beck Depression Inventory BIS : Barrat Impulsivity Scale

BOLD : Blood-oxygen-level dependent CGT : Cambridge Gambling Task

CIRRIS : Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration social OFC : Cortex orbitofrontal

Cr : Créatine

CRDQ : Centre de réadaptation en dépendance de Québec DDT : Delay Discounting Task

DLPFC : Cortex préfrontal dorsolatéral

DSM : Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders EEG : Électroencéphalogramme

EVA/VAS : Échelle visuelle Analogue FDA : Food and Drug administration GABA : Acide gamma-aminobutyrique Glu : Glutamate

Glx : Glutamine + glutamate

ICA : Analyse en composantes indépendantes IGT : Iowa Gambling Task

IRDPQ : Institut de réadaptation en déficience physique de Québec IRM/MRI : Imagerie par résonance magnétique

IRMf/fMRI : Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle IUSMQ : Institut universitaire en santé mentale de Québec M1 : Cortex moteur primaire

MRS : Spectroscopie par résonance magnétique MTG : Gyrus temporal médian

NAA : N-acetyl-aspartate NMDA : N-methyl-D-aspartate PCC: Cortex postérieur cingulaire PFC/CPF : Cortex préfrontal S1 : Cortex sensoriel primaire

SOGS : South Oaks Gambling Scale

SSRI : Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine rCBF : Débit sanguin relatif au repos

rTMS : Stimulation magnétique transcrânienne répétitive rsFC : Connectivité fonctionnelle au repos

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xiv

rs-fMRI : Imagerie par résonance magnétique de connectivité fonctionnelle au repos TCC : Thérapie cognitivo-comportementale

tDCS : Stimulation transcrânienne en courant continu TMS : Stimulation magnétique transcrânienne

VBM : Morphométrie voxel à voxel vmPFC : Cortex préfrontal ventromédian

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ÉPIGRAPHE

« Si je pouvais me contrôler pendant une heure, je serais en mesure de changer mon destin»

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xvi

REMERCIEMENTS

Tout d'abord, un grand merci à ma directrice Shirley Fecteau qui m’a accueillie dans son labo à mi-chemin du doctorat et qui m'a confié ce projet. Elle m'a poussée à devenir autonome, persévérer dans mes recherches et prendre du recul par rapport aux données, même si les résultats ne me convenaient pas toujours. Merci de votre aide et votre exigence tout le long du doctorat.

Merci aussi à mon ancien directeur de thèse, Emmanuel Planel, de m’avoir permis de quitter son laboratoire pour pouvoir poursuivre mes recherches avec Shirley avec des humains au lieu de souris. Merci à Frank, Maude, Isabelle, Anastasia et Françoise ; vous étiez des super collègues sans qui je n’aurais pas pu survivre ma première année au Canada.

Merci à Jean Leblond pour toute l’aide avec les analyses statistiques et pour tous ces moments passés à parler des joueurs et de LOTO Québec. Merci aussi de m’avoir mis en contact avec Francine Ferland au sein du CRDQ pour le recrutement des participants joueurs pathologiques

Francine, ton aide ainsi que celle de Sophie ont été précieuses. Merci de vous être intéressées à mon projet et merci de m’avoir encouragée à persévérer dans mes recherches de participants qui n’étaient pas toujours fructueuses. Je tiens aussi à remercier les comités de « Joueurs Anonymes » et « Gamblers Anonymes » pour leur intérêt dans mon projet de recherche et pour le recrutement de joueurs pathologiques. Un grand merci va de soi à tous les participants joueurs pathologiques de mon projet.

Je tiens à remercier aussi tous les étudiants de mon laboratoire. Merci William et Antoine, mes collègues de bureau ; on a ri et pleuré ensemble, mais sans votre support ça aurait été difficile de continuer. Merci Marine, pour ta gentillesse et ton sens de l'humour. Merci Jérôme de nous faire rigoler tous les midis et à nos pauses café. Merci Jean, pour les bons moments passés et pour la musique. Merci à Marilyne, Sarah, Christophe, Elsa pour les bons moments passés et toute votre aide. Merci aussi à notre assistante de recherche, Emmanuelle, de m'avoir guidée et conseillée dans les analyses de données.

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xvii

Un grand merci à mes très chers colocataires Nath, Nico et Karine. Ces 4 années et demie ont été intenses pour nous tous et vous avez toujours été là pour moi. Merci de m’avoir supportée lors de mes nombreuses crises existentielles pendant cette thèse, merci d’avoir profité de la vie à Québec avec moi, merci pour toutes les fêtes, tous les soupers et tous les bons moments passés ensemble. Même si nous n’habitons plus dans le même appart, ville ou même pays, nous resterons toujours colocs dans mon cœur.

Merci à mes supers amis, dont notamment Camille, la plus belle et la plus gentille, qui m’a aidée à corriger l’orthographe et qui est ma compagne d’aventures pour toute la vie ! Merci aux copains de Montréal, Mathieu, Ingrid et Nabil ainsi qu’à mon frère Alberto et sa copine Paule qui ont facilité mon intégration dans cette nouvelle ville. Merci à mes amis laissés en Europe qui me manquent tous les jours : Andrea, Melissa, Chichi, Caro, Florent, Simon, Laura, Anke, Rebeca et tant d’autres !

Merci à ma mère, toujours là pour moi avec ses nombreux conseils grano. Merci à mon papa, à ma belle-mère Cecilia, mon frère David et son épouse Mariana, ma sœur Sofia et son mari Brendan. Merci à ma grand-mère Chela et mes oncles Carlos, Pin et Rachel. Vous êtes tous loin, mais très présents dans mon cœur. Merci aux membres de ma belle-famille pour l’accueil chaleureux au NB et un peu partout au Québec. Enfin, merci à mon super chéri Marc. La distance n’a pas toujours été facile mais nous avons persévéré et pouvons enfin commencer notre vie ensemble.

Mes études aux cycles supérieurs ont été financées par la société Norampac, le Centre thématique de recherche en neurosciences (CTRN) et les Fonds de recherche du Québec– Santé. Des subventions de la Société Parkinson Canada ont permis la réalisation des projets.

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AVANT-PROPOS

La présente thèse porte sur les effets neurobiologiques et comportementaux de la stimulation transcrânienne en courant continu (tDCS) chez des joueurs pathologiques. Elle est composée de 6 parties, une introduction générale, deux chapitres portant sur les études expérimentales ainsi qu’une discussion, une brève conclusion et une section incluant les annexes.

La première partie introduit les concepts généraux et nécessaires à la compréhension des objectifs et hypothèses de cette thèse. La population clinique présentant une dépendance comportementale, soit les joueurs pathologiques, sera décrite. Notamment, certains des processus cognitifs déréglés tels que la prise de décision et le craving seront abordés ainsi que les substrats neuronaux associés au jeu pathologique. Par la suite, les traitements actuels pour le jeu pathologique seront énumérés. Puis, le concept de la tDCS et des effets que celle-ci peut avoir sur la prise de décelle-cision, le craving et les substrats neuronaux auparavant décrits seront abordés. Enfin, les objectifs et les hypothèses vis-à-vis de cette thèse seront présentés. La seconde partie (chapitre 1) présente une étude portant sur les effets de la tDCS sur la connectivité fonctionnelle au repos, sur la prise de décision et sur le craving chez les joueurs pathologiques. Cette étude sera présentée sous la forme d’un article en préparation pour être soumis prochainement dans la revue Neuropsychopharmacology.

La troisième partie (chapitre 2) est une étude portant sur les effets de la tDCS sur les niveaux de métabolites neuronaux préfrontaux et striataux. Cette étude, également sous forme d’article, a été récemment accepté dans la revue Neuropharmacology.

La quatrième partie de cette thèse présente la discussion générale. Elle fait une brève description des principaux résultats et discute de ses contributions théoriques et cliniques potentielles. Elle aborde les forces et les limites de la thèse en plus d’énumérer les nouvelles hypothèses de recherche et perspectives soulevées par les études.

La conclusion présente un bref résumé des résultats obtenus dans le cadre de cette thèse, les retombées les plus importantes ainsi que les avenues de recherche futures à suivre.

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xix

Research » en 2014 sera présenté. Il porte sur la possibilité d’utiliser la stimulation magnétique transcrânienne non invasive comme outil pour diminuer les symptômes chez des individus présentant des troubles de contrôle d’impulsions. Il s’inscrit dans le paragraphe de perspectives futures établies à partir des résultats obtenus dans cet ouvrage. Enfin, un article publié dans la revue Neurorehabilitation portant sur les effets de la stimulation transcrânienne magnétique (TMS) sur l’excitabilité corticale chez les personnes ayant souffert d’un traumatisme crânien, sera aussi présenté.

Contribution des coauteurs des articles présentés dans cette thèse :

Pour les deux études constituant les chapitres 1 et 2, j’ai contribué à l’élaboration de la recherche, à l’approbation du protocole par plusieurs comités de recherche (IRDPQ, IUSMQ et CRDQ), au recrutement des participants, à la collecte et l’analyse des données, à l’interprétation des résultats et j’ai rédigé les articles scientifiques en tant qu’auteure principale. Shirley Fecteau, ma directrice de thèse, a contribué à l’élaboration de la recherche (évaluation des participants), à l’analyse des données, à l’interprétation des résultats et à la rédaction et correction des articles pour tous les projets de recherche. Christophe Lenglos a contribué à la collecte de données (évaluation des participants) et à la rédaction et la correction des articles scientifiques des deux études. Emmanuelle Renauld a contribué à l’analyses des données et à la correction des articles scientifiques des deux études. Jean Leblond, statisticien du CIRRIS, a contribué aux analyses de données des deux études et à la rédaction et correction des articles scientifiques. Francine Ferland a contribué au recrutement de participants et à la rédaction et correction des articles scientifiques. Richard A. Edden a contribué à la rédaction et à la correction de l’article scientifique présenté dans le chapitre 2.

Contribution des coauteurs des articles présentés dans les annexes :

Pour le chapitre de livre présenté en annexe, j’ai contribué à la recherche de littérature et à la rédaction en tant qu’auteure principale. Shirley Fecteau et Antoine Hone-Blanchet ont contribué à la correction de la rédaction et la correction de ce chapitre. Pour l’article portant sur la TMS, j’ai contribué en tant que 3ème auteure à la rédaction, correction et publication de celui-ci.

(20)

1

INTRODUCTION

1. Jeu Pathologique

1.1. Du jeu normal au jeu pathologique

Déjà à l’époque des premières civilisations, il est possible de retracer diverses formes de jeux de hasard (Schwartz, 2006). Notamment, des pierres et des bâtons sont utilisés pour prédire le futur. Par la suite, les dés sont inventés en Chine en -3000 avant Jésus-Christ. Les échanges d’argent commencent aussi très vite avec les paris sportifs qui font leur apparition dans l’antiquité à l’époque des Grecs pour ensuite connaître un important essor à l’époque des Romains, environ 1 siècle av. J.-C. : les individus pariaient sur des courses (animaux ou êtres humains) ou des combats (gladiateurs), (Fig.1). Les cartes font leur première apparition en Europe, par le biais des invasions arabes au XIV siècle. Puis, la roulette est inventée en France au XVII siècle. À la fin du 19ème siècle, les premières machines à sous sont inventées aux États-Unis. Au courant du 20ème siècle, les versions électroniques des machines à sous et les appareils de loterie vidéo apparaissent, prenant une place importante dans les sociétés modernes. Au fil des siècles, une distinction entre deux types de fonctions du jeu est introduite : une fonction ludique et individuelle et une fonction sociale, collective et impliquant le déplacement d’argent. Cette dernière fonction jouera un rôle important dans l’économie et les États tiendront à utiliser son aspect financier en tant qu’« impôt involontaire » (Valleur and Bucher, 2006).

Figure 1. Représentation de combats de gladiateurs

(21)

2

Même si les jeux d’argent et de hasard ont toujours existé, c’est seulement lorsqu’ils sont devenus légaux dans les pays industrialisés qu’ils sont devenus plus accessibles et populaires. Au Canada, le jeu est légal depuis les années 1969 (Campbell, 2005) et c’est en cette année qu’il est devenu une institution gouvernementale au Québec avec la formation de la « Société des loteries », plus connue par son diminutif Loto-Québec, qui est devenue la principale promotrice des jeux (Caux, 2003). À elle seule, elle engendre des retombées économiques calculées à plus de 3.5 milliards de dollars (Rapport annuel Loto Québec 2015-2016 : http://lotoquebec.com/cms/corporatif/fr/la-societe/rapport-annuel). De plus, au Québec il est possible d’avoir accès à des machines à sous appartenant à Loto Québec non seulement dans les casinos, mais aussi dans des centaines de bars et cafés. Par ailleurs, des billets de loterie peuvent être retrouvés dans pratiquement tous les dépanneurs et bien sûr, tous types d’activités de jeux sont aussi disponibles sur Internet dont le monopôle est encore tenu par Loto Québec (http://jeuenligne.ca/).

Pour de nombreuses personnes, les jeux d’argent et de hasard sont une forme courante de divertissement sans effets négatifs ou à effets minimes sur leur vie. Cependant, pour certaines personnes, le jeu devient gravement inadapté, interférant avec leurs finances, leur travail, leurs relations interpersonnelles et leur santé mentale. Ce type de comportement inadapté est appelé jeu pathologique.

1.2. Diagnostic « Jeu pathologique »

1.2.1. Définition

Le jeu pathologique consiste en une pratique inadaptée, persistante et répétée du jeu de hasard et d’argent qui a des répercussions majeures sur les individus touchés, leurs familles et la société (Hodgins et al., 2011). Classé anciennement dans la catégorie des troubles du comportement impulsif dans le « Diagnostic and Statistical Manual of Mental

Disorders-IV » [DSM-Disorders-IV (American Psychiatric Association, 1994)], il fait partie aujourd’hui de la

catégorie « Troubles reliés à une substance et troubles addictifs » (en anglais «

Susbtance-related and addictive behaviors ») du DSM-5 [Tableau 1 ; (American Psychiatric

Association, 2013)]. Il s’illustre notamment par une constante préoccupation pour le jeu, un besoin constant d’augmenter ses mises, un besoin de jouer pour fuir ses problèmes et un

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3

retour fréquent au jeu pour tenter de regagner l’argent perdu (Clark et al., 2013). Ces critères sont en effet similaires à ceux présentés chez les personnes souffrant d’un trouble de dépendance aux substances, surtout lorsqu’on considère le besoin de consommer, la tolérance et le besoin d’augmenter les doses pour retrouver le même état d’excitation.

1.2.2. Évaluation clinique

En premier lieu, les critères du DSM-5 sont utilisés pour établir le diagnostic du jeu pathologique.

Tableau 1. Critères DSM-5 du jeu pathologique

Dans le DMS-5, il est possible de spécifier des critères de rémission :

-Début de rémission : critères absents depuis plus de 3 mois, mais moins de 12 mois. -Rémission prolongée/persistante : critères absents depuis plus de 12 mois.

Aussi, est possible de spécifier la sévérité : Léger : 4-5 critères ; Modéré : 6-7 critères ; Sévère : 8-9 critères.

Un autre outil très connu et utilisé pour déceler et coter la sévérité du jeu pathologique est le South Oaks Gambling Scale [SOGS, (Lesieur and Blume, 1987)]. Développée il y a plus de vingt ans, cette échelle se compose de 20 items basés sur les critères du DSM-III (American Psychiatric Association, 1987). Chaque réponse est dichotomique (oui / non) et évalue la fréquence et la gravité des problèmes de jeu. Elle peut être autoadministrée ou administrée par des enquêteurs professionnels ou non professionnels. Cet outil est

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complémentaire au diagnostic du DSM-5, car il permet aussi de savoir quelles sont les activités de jeu de prédilection, les plus grosses sommes d’argents jamais dépensés en un jour ainsi que les différentes sources d’emprunt, si applicables.

1.2.3. Prévalence

Le jeu pathologique semble affecter entre 0.2 et 5.3 % des adultes de la population mondiale (Pettorruso et al., 2014). En Amérique du Nord, la prévalence du jeu pathologiq ue a auparavant été évaluée entre 1 et 1.5 % (Shaffer et al., 1999; Kessler et al., 2008; Alegria et al., 2009). Au Canada, Statistique Canada a évalué en 2002 que sur un échantillon de 36 984 adultes, 2.8 % des participants étaient des joueurs à faible risque, 1.5 % des joueurs étaient à risque modéré et 0.5 % des joueurs étaient des joueurs pathologiques probables (Rush et al., 2008). Au Québec, une étude a indiqué qu’entre 2009 et 2012, 33.4 % des adultes étaient des non-joueurs, 61.8 % étaient des joueurs sans problème, 2.9 % étaient des joueurs à faible risque de développer un problème de jeu, 1.4 % étaient considérés à risque modéré et 0.4 % étaient des joueurs pathologiques probables (Kairouz, 2014).

1.2.4. Prédispositions

Les prédispositions interindividuelles présentes chez le patient jouent un rôle important dans le développement du jeu pathologique. Ces dernières sont notamment le sexe (les hommes étant plus susceptibles de développer un problème de jeu), l’âge (les personnes plus jeunes étant plus susceptibles de développer un problème de jeu), un niveau d’impulsivité et de recherche de nouveauté supérieur à la normale et un historique personnel ou familial de trouble de dépendances aux substances (Dannon et al., 2006). On note aussi que la proportion de joueurs à risque modéré et de joueurs pathologiques probables est plus élevée chez les personnes provenant de milieux défavorisés (faible niveau de scolarité, faible revenu, sans emploi). D’autre part, les estimations d'héritabilité du jeu pathologique vont de 50 à 60 %. En effet, une étude effectuée chez 95 joueurs pathologiques, 91 volontaires sains et leurs proches respectifs (537 pour les joueurs pathologiques et 538 pour les volontaires sains) a montré que la prévalence des problèmes de jeu était supérieure chez les proches des joueurs pathologiques (11 %) que chez ceux des volontaires sains (1 %), (Black et al., 2014). Enfin, il existerait des prédispositions génétiques. En effet, des études effectuées sur des jumeaux

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suggèrent que les facteurs génétiques peuvent contribuer plus que les facteurs environnementaux aux problèmes de jeu (Lobo and Kennedy, 2009). Des études moléculaires ont notamment montré que ces prédispositions génétiques seraient liées aux gènes codants pour certaines catégories de récepteurs à la dopamine (ex. D2, D3), (Leeman and Potenza, 2013; Lobo et al., 2015).

1.2.5. Comorbidités

La comorbidité est la concomitance de deux troubles ou plus chez la même personne. Le jeu pathologique est souvent associé à plusieurs comorbidités psychiatriques. Sans surprise, les comorbidités les plus courantes sont les troubles de dépendance aux substances suivis par les troubles de l'humeur et les troubles anxieux (Potenza and Hollander, 2002; Petry et al., 2005; Lorains et al., 2011). Plus précisément, les joueurs pathologiq ues présentent un taux de prévalence de 60.37 % pour un trouble de dépendance à la nicotine ; 47.79 % pour un trouble de dépendance à l’alcool ; 26.92 % pour un trouble de dépendance aux drogues dures (ex. : cocaïne) ; 60.82 % pour des troubles de la personnalité ; 49.62 % pour des troubles de l’humeur ; 41.30 % pour des troubles anxieux ; et 11.18 % pour un trouble de comportement impulsif (ex. : hypersexualité ou achat compulsif). Parmi les troubles de l’humeur, la dépression est la plus fréquente avec un taux de prévalence de 36.99 %. Aussi, un fort taux de comorbidité existe entre le jeu pathologique et le trouble déficitaire de l’attention [Fig. 2 ; (Petry et al., 2005)].

Figure 2. Modèle conceptuel proposé pour les comorbidités existant entre le jeu pathologique et d'autres troubles psychiatriques. PG : jeu pathologique. D’après Potenza et Hollander (2002).

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6 1.2.6. Conséquences

Une des conséquences les plus importantes est reliée aux finances du joueur. En effet, les dépenses peuvent s’élever à plusieurs centaines de milliers de dollars ce qui pousse les joueurs à emprunter de l’argent à leurs familles, proches et amis ainsi qu’aux institutions bancaires. De plus, un grand pourcentage des joueurs pathologiques a de la difficulté à tenir leurs responsabilités dans leur emploi ce qui mène souvent à la perte de celui-ci, aggravant davantage leur endettement. D’un point de vue familial et interpersonnel, l’endettement et l’obsession que subit le joueur peuvent causer des problèmes au sein du couple, menant souvent au divorce et parfois même à des actes de violence. Certains membres de la famille, dont notamment les conjoints, sont tellement affectés psychologiquement par ces répercussions qu’ils cherchent eux-mêmes du soutien psychologique pour s’en sortir. Par ailleurs, d’un point de vue individuel, les joueurs pathologiques peuvent développer des problèmes de santé associés au stress qu’ils subissent dans leur vie (Ferland, 2008). Un grand taux de suicide survient en raison du jeu pathologique. En effet, au Québec, la Bureau du coroner a enregistré en moyenne 154 suicides liés au jeu par année pendant la période de 2004 à 2013 (Bureau du coroner du Québec 2004 et 2013) et le Conseil canadien de la sécurité estime qu'il y a quelque 200 suicides causés par le jeu chaque année. En 2013, Loto Québec décide de ne plus publier les données par rapport à ce sujet. Enfin, l’endettement entraîne aussi une augmentation des crimes et divers comportements frauduleux, ainsi qu’un nombre élevé de personnes qui déclarent faillite ou qui volent de leur employeur pour récupérer ce qu’ils ont perdu et subvenir aux besoins de leur famille. Ainsi, il est estimé que les coûts sociétaux du jeu pathologique s’élèvent à près de quatre milliards de dollars comparativement à des revenus d’environ 3 milliards 500 millions au Québec (www.saca.gouv.qc.ca).

1.2.7. Type s d’activités

Les jeux de hasard et d’argent peuvent prendre plusieurs formes. Parmi les activités les plus populaires au Québec, on retrouve les loteries (65.2 %), les machines à sous (10.1 %), le poker (4.7 %), le bingo (4.6 %) et les appareils de loterie vidéo (ALV), (4.6 %). Ces dernières et les machines à sous (Fig. 3) appartiennent à la même catégorie et sont probablement la forme de jeu qui rend le plus dépendant dû notamment à leurs couleurs

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intenses et leurs lumières. De plus, les sons qu’elles émettent peuvent causer un conditionnement pavlovien chez les individus. Ainsi, un joueur normal peut devenir dépendant aux ALV en un an seulement, alors qu’il faut près de quatre ans pour devenir dépendant des autres formes de jeu (Collier, 2008).

Figure 3. Exemple de jeux préférés par les joueurs pathologiques

Le jeu pathologique est un trouble psychiatrique entraînant des symptômes handicapants chez les sujets qui en sont atteints au niveau clinique mais aussi au niveau cognitif et neurobiologique.

2. Caractéristiques

comportementales

associées au

jeu

pathologique

2.1. Prise de décision

Tous les jours, nous sommes confrontés à prendre des décisions. Certaines décisions sont simples à prendre, alors que d’autres sont beaucoup plus complexes (ex. choisir entre quelle tenue mettre versus choisir une carrière professionnelle). La prise de décision est un processus cognitif visant à faire la sélection d'un choix optimal parmi les options disponib les (Ernst and Paulus, 2005; Paulus, 2005). Elle exige donc une évaluation soigneuse des risques et des avantages de chaque choix, la sélection des choix et la prédiction et l'évaluation des résultats potentiels pour atteindre un choix cohérent avec la personnalité, les buts et les désirs

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de l'individu. La mauvaise prise de décision, que ce soit en raison d’une approche trop risquée ou trop prudente, ou encore d’une sélection de choix prématurée et sans vraiment réfléchir, peut avoir des conséquences néfastes pour la santé, la sécurité et le bien-être financier.

Ainsi, la prise de décision sous-entend plusieurs processus cognitifs et motivationnels , tels que la prise de risque, la recherche de récompense et l'impulsivité. Le jeu pathologiq ue représente un modèle de prise de décision mal adaptée du fait que l’individu affecté n’évalue pas les options disponibles de manière optimale ni ne prend en compte les conséquences négatives de ses choix. Par ailleurs, les processus cognitifs de prise de risque, de recherche de récompense et d’impulsivité sont affectés chez cette population clinique.

2.1.1. Prise de risque

Les comportements à risque impliquent le potentiel de danger ou de préjudice, tout en offrant la possibilité d'obtenir différentes formes de récompense (Leigh, 1999). Le choix de jouer représente en quelque sorte une prise de risque, surtout si on prend en considération les bénéfices immédiats acquis par le fait de jouer, et le fait qu’on ne considère pas les conséquences à long terme (Ladouceur et al., 1987). La prise de décision risquée est considérée comme un phénotype comportemental caractéristique des dépendances et joue un rôle crucial dans le maintien de la dépendance et la rechute.

À ce jour, seulement une tâche permet de mesurer la prise de risque sans facteurs confondants. Cette tâche est la Balloon Analogue Risk Task [BART, Fig. 4 ; (Lejuez et al., 2002)]. Ici, les sujets sont tenus de faire des choix dans un contexte de risque accru. Ils sont invités à gonfler un ballon illustré sur un écran d’ordinateur en appuyant sur un bouton simulant une pompe. Chaque clic fait gonfler progressivement le ballon en plus d’ajouter un montant à un compteur réglé à un seuil aléatoire qui fera exploser le ballon une fois ce seuil atteint. Ainsi, chaque gonflement confère un plus grand risque, mais aussi une plus grande récompense potentielle. Si le participant choisit de se retirer avant que le ballon explose, il peut collecter l'argent, mais si le ballon explose, l’argent est perdu. La mesure principale de la prise de risque est le nombre moyen de gonflements sur des ballons qui n'ont pas explosé (Lejuez et al., 2002; Fecteau et al., 2007b). L’avantage principal de cette tâche est qu’il n’y a pas vraiment de composante d’apprentissage. C’est une mesure de la prise de décision en

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conditions incertaines qui s’apparente le plus à la prise de risque dans la vraie vie (Lejuez et al., 2002; Rao et al., 2008).

Figure 4. Illustration de la Balloon Analogue Risk Task (BART). Figure extraite de l’article de

Fecteau et collaborateurs (2013).

Chez les joueurs pathologiques, la prise de risque telle que mesurée par la BART a été évaluée dans une seule étude. Ciccarreli et collaborateurs (2016) ont testé 54 joueurs pathologiques et 54 volontaires sains en évaluant leurs performances à la BART ainsi qu’en acquérant leur score d’impulsivité grâce à l’échelle de Barratt version 11 (BIS-11). Les auteurs ont observé que les joueurs pathologiques présentaient un plus gros nombre de « Nombre ajusté de pompes sur des ballons qui n’ont pas explosé » que les volontaires sains. En d’autres mots, ils avaient une conduite plus risquée. De plus, les scores d’impulsivité étaient positivement corrélés aux scores obtenus à la BART, indiquant clairement l’étroite relation entre les deux mesures chez les joueurs pathologiques (Ciccarelli et al., 2016).

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10 2.1.2. Recherche de récompense et prise de risque

Chez l’humain, les récompenses sont perçues comme quelque chose qui améliore la vie. Elles sont donc aimées, désirées et recherchées. Chez les joueurs pathologiques, la recherche de récompense est compulsive et constante et devient tellement inadaptée que la recherche de récompenses naturelles telles que le sexe et la nourriture sont délaissées pour celles liées au jeu (Clark et al., 2013). Deux tâches expérimentales permettent de mesurer la recherche de récompense. Toutefois, celles-ci comportent aussi une composante de prise de risque, ce qui les rend moins spécifiques que par exemple la BART, qui permet de mesurer un seul de ces processus cognitifs.

L’une d’elle est l’Iowa Gambling Task (IGT), qui permet d’étudier les processus de décision en situation complexe, conflictuelle, et incertaine où les conséquences des choix ne sont pas connues à l’avance. Cette tâche a été développée par l’équipe de Bechara et collaborateurs en 1994 (Bechara et al., 1994). Dans celle-ci, le sujet doit choisir un paquet parmi quatre paquets de cartes disponibles. Deux de ces paquets sont favorables puisqu’ils se traduisent par des gains modestes, mais aussi des pertes modérées conduisant à un solde final positif. Les deux autres sont désavantageux, car même si les gains sont plus élevés que dans les deux autres alternatives, les pertes sont aussi très élevées résultant en un solde négatif à long terme. L’IGT est l’une des tâches neuropsychologiques les plus fréquemment utilisées pour mesurer les perturbations de prise de décision dans un large éventail de maladies neurologiques et/ou psychiatriques (Bechara et al., 1996). Or, la tâche comporte une composante d’apprentissage, ce qui rend difficile de l’utiliser plusieurs fois chez le même individu. De plus, elle est peu spécifique au point de vue cognitif. En effet, des résultats contrastés chez une même population clinique surviennent à maintes reprises dans la littérature (Brevers et al., 2013a).

De manière intéressante, de nombreuses études comportementales ont été menées chez les joueurs pathologiques avec l’IGT (Brevers et al., 2013a). Des performances désavantageuses ont été observées de manière consécutive chez les joueurs pathologiq ues comparés aux volontaires sains (Goudriaan et al., 2005; Forbush et al., 2008; Dannon et al., 2010; Linnet et al., 2011b; Brevers et al., 2012; Brevers et al., 2013a; Brevers et al., 2013b; Linnet, 2013). Notamment, les joueurs pathologiques montraient continuellement une

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recherche de récompense anormale : ils avaient tendance à choisir les options les moins avantageuses et semblaient incapables d'anticiper les conséquences négatives associées aux choix risqués qu'ils faisaient. Au contraire, chez les volontaires sains, il y avait un changement de stratégie au courant de la tâche pour tenter de faire des choix plus avantageux (Cavedini et al., 2002; Goudriaan et al., 2005, 2006b; Dannon et al., 2010; Linnet et al., 2011b; Brevers et al., 2013a; Brevers et al., 2013b; Linnet, 2013). Les auteurs ont conclu que le jeu pathologique est caractérisé par une augmentation des comportements de recherche de récompense ainsi qu’une sensibilité diminuée à la punition ou à la perte.

D’autre part, la Risk Task ou la Cambridge Gambling task (CGT), (Rogers et al., 1999a; Rogers et al., 1999b) mesurent aussi la recherche de récompense et présentent des caractéristiques intéressantes, car elles impliquent très peu de stratégie et de mémoire de travail. Ici, les participants sont placés devant 10 boîtes pour la CGT (ou 5 dans la Risk Task) arrangées horizontalement de couleur rouge ou bleu. Le rapport des boîtes rouges/ boîtes bleues varie d'un essai à l’autre comme suit : 9 : 1, 8 : 2, 7 : 3 (ou 5 : 1, 4 : 3, 3 : 2, dans la

Risk Task ). Les participants doivent choisir la couleur de la boîte qui cache le jeton gagnant.

Pour chaque essai, le ratio entre les boîtes rouges et bleues (appelé « niveau de risque ») détermine la probabilité de trouver le jeton gagnant - par exemple, si le ratio est 9 : 1 (bleu : rouge), le participant a une probabilité de 9/10 d’avoir la bonne réponse si sa réponse est bleue, et seulement 1/10 si sa réponse est rouge. Les participants sont récompensés par des points lorsqu'ils devinent correctement la couleur de la boîte qui cache le jeton gagnant, mais sont également punis lorsqu'ils choisissent la mauvaise couleur (composante de recherche de récompense). Or, dans cette tâche, la prise de décision est mesurée explicitement, c’est à dire qu’ici les participants ont accès à toutes les informations à l’avance (récompense, risque).

Encore une fois, des mauvaises performances vis-à-vis de ces tâches ont été observées chez les joueurs pathologiques. Dans une première étude, les performances à la CGT de 21 joueurs pathologiques ont été comparées à celles de 21 volontaires sains. Les auteurs ont observé que les joueurs démontraient une prise de risque élevée et étaient plus sujets à faire faillite que les volontaires sains (Lawrence et al., 2009). Par la suite, une deuxième étude a employé la même tâche chez une plus grande cohorte de joueurs (N = 80) présentant des comorbidités ou non (dépendance à la cigarette, à l’alcool ou aux deux) et chez des

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volontaires sains (N = 108) (Zois et al., 2014). Les auteurs ont observé que tous les joueurs avec comorbidités ou non faisaient un plus grand nombre des choix irrationnels illustrant une plus grande recherche de récompense. De plus, ils démontraient une plus grande augmentation de la prise de risque comparativement aux volontaires sains.

2.1.3. Impulsivité

La définition de l’impulsivité varie selon les auteurs. Selon Nower et Blaszczynski (2006), la notion d’impulsivité recouvre différentes notions : action avec un manque de préméditation, décision rapide faite sans considération, absence de planification, prise de risque et recherche de sensation, activation motrice et manque de délibération (Nower and Blaszczynski, 2006). D’autre part, Moeller, Gerard et collaborateurs (2011) stipulent que l’impulsivité peut être réduite à trois éléments : 1) sensibilité moins importante aux conséquences négatives du comportement. 2) réactions rapides et non planifiées aux stimuli avant le traitement complet de l’information. 3) manque de considération pour les conséquences à long terme (Moeller et al., 2001). L’impulsivité est d’une part considérée comme un facteur de vulnérabilité au développement du jeu pathologique, mais elle est aussi perçue comme une conséquence de ce comportement (Ledgerwood et al., 2009).

L’outil clinique par excellence pour l’évaluation de l’impulsivité est la « Barratt Impulsiveness Scale » (BIS). Cette échelle consiste en un autoquestionnaire qui distingue l'impulsivité cognitive (prendre des décisions rapidement), l'impulsivité motrice (agir sans penser), et l'impulsivité de planification (absence de mesure des conséquences futures (Patton et al., 1995; Bayle et al., 2000). L’échelle contient au total 34 items dans la version BIS-10 et 30 items dans la version BIS-11 et les réponses sont fournies à l'aide d'une échelle de type « Likert » de 4 points allant de « rarement / jamais » à « presque toujours / toujours ». Plus les scores obtenus sont élevés, plus le niveau d’impulsivité est élevé. Une autre échelle d’impulsivité couramment utilisée est la « UPPS Impulsive Behavior Scale » (Whiteside and Lynam, 2001). Elle permet de distinguer quatre dimensions de l’impulsivité : (1) l'urgence, la tendance à agir imprudemment dans des conditions pouvant engendrer des conséquences négatives (2) la préméditation, la tendance à réfléchir sur les conséquences de nos actes avant d’agir ; (3) la persévérance, la capacité d'un individu à rester concentré dans cet acte ; (4) la recherche de sensations, soit la tendance à poursuivre des activités

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passionnantes et l’ouverture d’esprit à des nouvelles expériences qui pourraient être dangereuses. L’échelle contient 45 items au total.

Un niveau plus élevé d’impulsivité a été observé chez les joueurs pathologiques comparés aux sujets contrôles à l’échelle de Barratt (Clarke, 2004; Forbush et al., 2008; Dannon et al., 2010; van Holst et al., 2010a) et l’échelle « UPPS Impulsive Behavior Scale » (Kraplin et al., 2014a; Kraplin et al., 2014b) notamment dans la sous-catégorie « urgence ».

D’autre part, des tâches cognitives telles que la Delay-Discounting Task (DDT) permettent d’avoir une mesure comportementale de l’impulsivité. En effet, la DDT est un reflet direct du choix impulsif (Kirby and Marakovic, 1996). La tâche consiste à faire des choix hypothétiques entre une petite récompense immédiate ou une plus grande récompense différée. Par exemple : « Préférez-vous 14 $ aujourd'hui ou 25 $ dans 19 jours ? » Cette tâche illustre jusqu’à quel point une personne peut réduire la valeur accordée aux récompenses futures. Ce phénomène de choix inter-temporel suit une loi hyperbolique. Le critère d'évaluation de l'impulsivité sera la valeur k qui détermine la pente de la réponse hyperbolique du sujet testé (Hecht et al., 2013). Plus la pente est raide (plus le k est grand) plus les choix à petites récompenses immédiates sont favorisés par rapport aux choix à plus grandes récompenses différées. Ainsi, le ratio des choix immédiats sur les choix différés est aussi utilisé pour mesurer l’impulsivité dans cette tâche.

Dans plusieurs études un niveau d’impulsivité plus élevé a été observé chez les joueurs pathologiques comparativement aux volontaires sains, illustré par plus de choix à petite récompense immédiate à la DDT (Petry, 2001; Dixon et al., 2003; Madden et al., 2009; Petry, 2012). Des études ont aussi relevé que la performance à la DDT était corrélée à la sévérité du problème de jeu chez ces derniers (Alessi and Petry, 2003; Miedl et al., 2012; Kraplin et al., 2014b).

La prise de décision mal adaptée est une caractéristique du joueur pathologique. Celle -ci le conduit à prendre des risques élevés et à faire des choix impulsifs lors de la recherche de récompense pendant qu’il est en train de jouer, comportement menant souvent à de fortes conséquences négatives. Or, lorsqu’il n’est pas en train de jouer, il ressent tout de même une forte envie de retourner jouer, une sensation qui l’empêche de lâcher prise et qui le conduit à la rechute, le craving.

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2.2. Craving

2.2.1. Définition

Le craving est un symptôme commun à toutes les dépendances (Tiffany and Wray, 2012) et est maintenant reconnu comme un critère essentiel dans le diagnostic de trouble de dépendance aux substances. Une définition basée sur ce qui est connu dans le domaine du trouble de dépendances aux substances est celle d’une motivation à chercher un objet ou un sentiment particulier, impliquant un besoin, ou un désir intense (Tassin, 2007). Le craving peut être induit classiquement par l’abstinence, mais également par le stress et l’exposition à des stimuli environnementaux. Souvent, cet état d’esprit survient dans l’environnement où le sujet a déjà consommé auparavant (DSM-5 critère craving dans trouble des dépendances aux substances). Par ailleurs, c’est cette sensation forte de besoin qui mène souvent aux comportements de prise de décisions mal adaptées et pousse l’individu à aller se procurer la substance désirée.

Même si le craving n’a pas été retenu en tant que tel dans les critères du DSM-5 pour le jeu pathologique, d'autres critères de diagnostic et de dépistage tels que les efforts infructueux pour quitter le jeu et chasser les pertes, impliquent l'expérience psychologiq ue d'un désir intense ou de la contrainte subjective de jouer. De plus, de nombreux chercheurs, cliniciens et joueurs prétendent que le craving est un facteur prépondérant dans le développement et le maintien du jeu pathologique (Sharpe, 2002) et qu’elle serait un fort prédicteur de la rechute (Oei and Gordon, 2008) et de l’attrition au traitement (Smith et al., 2010).

2.2.2. Craving chez les joueurs pathologiques

Dans les études évaluant le craving, celui-ci est soit induit par l’abstinence soit par la présentation de stimuli reliés au jeu (« cue-induced craving »). Dans les deux cas, des questionnaires standardisés dans lesquels les sujets sont invités à évaluer leur niveau de

craving sur des échelles visuelles analogues (EVA) sont utilisés. Ces échelles comportent

habituellement des choix tels que « pas envie de jouer » et « extrême envie de jouer », et le sujet évalué est chargé de sélectionner un chiffre (par exemple de 0 à 10) pour indiquer le degré d'envie de jouer à ce moment. Les questionnaires peuvent contenir soit une seule

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question générale ou plusieurs questions associées aux habitudes de jeux (Ashrafioun and Rosenberg, 2012). De nombreuses études chez les joueurs pathologiques ont répertorié des hauts scores élevés à dans ces échelles, que ce soit lors du craving induit par l’abstinence (Raylu and Oei, 2004; Ladouceur et al., 2007; Oei and Gordon, 2008; Smith et al., 2010) ou « cue-induced » (Crockford et al., 2005; Goudriaan et al., 2010; Ashrafioun and Rosenberg, 2012; Gay et al., 2016; Limbrick-Oldfield et al., 2017). Par ailleurs, dans ces études, un grand nombre des joueurs testés identifiaient le craving ressenti pour le jeu comme étant une partie importante de leur problème de jeu. Ainsi, réduire le craving et y résister semble être un objectif clé pour prévenir les rechutes et maintenir l'abstinence chez les joueurs pathologiq ues et est d’ailleurs au cœur des traitements actuels pour le jeu pathologique.

3. Substrats neurobiologiques associés au jeu pathologique

3.1. Structures associées à la prise de décision et au craving

L’étude de patients avec des lésions cérébrales a permis de mettre en évidence l’implication du cortex préfrontal dans les processus de la prise de décision (Dreher, 2007; Tom et al., 2007). Notamment, les travaux de Bechara, Damasio et collaborateurs ont rapporté que les patients présentant des lésions au niveau du cortex préfrontal présentaient des forts déficits de prise de décision illustrés par des mauvaises performances à l’IGT et s’engageaient dans des comportements qui menaient souvent à des pertes financières (Bechara et al., 1994; Bechara et al., 1996; Bechara et al., 2000; Clark et al., 2008). Les auteurs ont conclu qu’en général, les patients présentant des lésions du cortex préfrontal gardaient la majorité de l’intégrité de leurs capacités cognitives, mais souffraient de troubles les empêchant de prendre des décisions adaptées à long terme. De manière intéressante, les premières études menées chez les joueurs pathologiques ont révélé des comportements financiers ainsi que des performances à l’IGT similaires à ceux observés chez les patients cérébro-lésés mentionnés ci-dessus, soulignant ainsi de possibles dérèglements du fonctionnement au niveau du cortex préfrontal chez ces individus (Cavedini et al., 2002; Goudriaan et al., 2006b, a).

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Le cortex préfrontal se compose de trois grandes régions très interconnectées, dont le cortex orbitofrontal (OFC) et le cortex ventromédian (vmPFC), le cortex cingulaire antérieur (ACC) et le cortex préfrontal dorsolatéral (DLPFC), qui interagissent les uns avec les autres ainsi qu'avec des structures sous-corticales pour influencer le processus de prise de décision (Rosenbloom et al., 2012). Nous allons faire une brève description de ces régions (Fig. 5). 1) Les parties plus médianes (OFC/vmPFC) attribuent une valeur émotionnelle aux stimuli et codent la valeur des choix possibles ainsi que le niveau de récompense par rapport à une décision particulière (Cohen et al., 2005). La distinction spécifique entre ces structures varie d’une étude à l’autre, même que l’ensemble OFC, vmPFC est souvent identifié comme étant le cortex ventromédial.

2) Le DLPFC est impliqué dans le traitement d’informations provenant de différentes régions interconnectées et construit un plan d’action afin d’optimiser la prise de décision (Miller et al., 2002; Ray and Zald, 2012).

3) Le ACC est impliqué dans les processus qui encodent le contrôle de l’action dirigée vers un but. Ainsi, il effectuerait un contrôle d’erreurs et permettrait d’avoir une représentation actualisée des actions motivées et de leur valeur avant l'exécution de la réponse comportementale (Miller et al., 2002).

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Les différentes parties du cortex préfrontal reçoivent des afférences et projettent vers différentes structures sous-corticales impliquées dans le processus de la prise de décision. Ces structures sont :

1) Le striatum, notamment dans sa partie ventral (noyau accumbens, noyau caudé ventral) évalue la quantité et la qualité de la récompense associée à chacune des options possibles (Balleine et al., 2007; Goulet-Kennedy et al., 2016).

2) L’amygdale a un rôle dans la détection des items ayant une forte connotation émotionnelle lors de la prise de décision (Gupta et al., 2011).

3) L’insula est impliquée dans la conscience des désirs et des besoins et participe à l’anticipation des récompenses et aux choix rationnels (Clark et al., 2008).

4) Le thalamus participe au tri des stimuli sensoriels. Il communique avec l’amygdale, l’hippocampe et le cortex préfrontal pour l’analyse et la modification comportementale en lien avec l’émotion provoquée par les stimuli (Herrero et al., 2002).

5) L’hippocampe est une région essentielle à la mémoire et à l'apprentissage qui code le degré d'incertitude lié à l'obtention ou non d'une récompense (Vanni-Mercier et al., 2009).

De manière intéressante, ces mêmes circuits corticaux sous-corticaux ont aussi été impliqués dans les « craving pathways » des troubles de dépendance aux substances, décrits notamment dans les travaux de Volkow et collaborateurs (Goldstein et al., 2004; Volkow et al., 2006; Koob and Volkow, 2010; George and Koob, 2013). Brièvement, le circuit reliant le cortex préfrontal au striatum ventral semble particulièrement critique dans la rechute et dans l’apparition du craving. De plus, les projections du cortex préfrontal, de l’hippocampe et de l’amygdale vers le noyau accumbens sont aussi principalement responsables de l’intégration des stimuli et de la régularisation du comportement orienté vers un but.

L’avènement de différentes techniques de neuroimagerie dans les dernières années a permis d’établir un tableau plus clair des substrats neurobiologiques de la prise de décision et du jeu pathologique. De plus, en combinant différentes techniques d’imagerie à des tâches de prise de décision ou de « cue-induced craving », il a été possible d’étudier les corrélats cérébraux de ces processus plus en profondeur. Nous décrirons ces techniques et travaux dans les sections suivantes.

Figure

Figure 1.  Représentation de combats de gladiateurs (http://lesparissportifs.e- (http://lesparissportifs.e-monsite.com/pages/histoire-1.html)
Figure 2.  Modèle conceptuel proposé pour les comorbidités existant entre le jeu pathologique  et d'autres troubles psychiatriques
Figure 3. Exemple de jeux préférés par les joueurs pathologiques
Figure 4. Illustration de la Balloon Analogue Risk Task (BART). Figure extraite de l’article de  Fecteau et collaborateurs (2013).
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