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Patrice Pelpel « Quand je vois que dans l'âge de la plus

1. De la spécificité des stages

Au-delà de la spécificité des lieux dans lesquels ils s'effectuent, du public auquel ils s'adressent, de leur durée, et même de leurs objectifs qui peuvent être sensiblement différents (cf. Le tableau 1) trois caractéristiques fondent l'unité de toutes les pratiques de stages :

– c'est à partir de l'enseignement ou de la formation qu'elles trouvent une raison d'être. D'une certaine manière, un stage est une activité qui trouve sa justification en dehors d'elle-même (ce qui impose une liaison forte entre les activités sur le terrain et l'enseignement). C'est pourquoi l'apprentissage, par exemple, ne rentre pas dans la problématique des stages.

Les stages se référent, d'une manière différente il est vrai, à la notion de pratique, et, plus particulièrement, de pratique

professionnelle. Même s'il est trop simplificateur d'opposer

l'enseignement aux stages comme la formation théorique par rapport à la formation pratique, il n'en est pas moins vrai que les stages complètent et enrichissent l'enseignement sur des points où il trouve ses limites et qu'il ne peut, dans le meilleurs des cas, que simplement évoquer. Quelles qu'en soient les modalités, un stage est une expérience vécue par chaque individu selon un registre beaucoup plus vaste et plus riche que ne l'est l'enseignement qui majore, lui, l'aspect intellectuel des stages.

Un stage enfin est une période limitée dans le temps dont chacun connaît dès le départ la durée. C'est un des aspects qui, sur le terrain, contribue à précariser le statut du stagiaire : il n'est que de passage parce que son lieu d'appartenance est ailleurs. Dans la plupart des cas, c'est l'enseignement, parfois, lorsque les stages marquent la fin de la formation, c'est le travail.

Tableau 1

Typologie des stages Nature de

l’activité Objectif moyenneDurée Exemples

ENSEIGNEMENT

Visite Concrétiser l'enseignement

Quelques heures

- Visite par une classe d'une centrale nucléaire ou d'une entreprise.

Stage de

sensibilisation Prendrecontact avec un milieu nouveau

Quelques jours à deux semaines

- Stage « ouvrier » des futurs ingénieurs. Stage d'observation Recueillir des données Quelques heures à une semaine

- Stages des futurs instituteurs dans les différentes classes primaires.

- Stages sur le terrain des élèves de lycées.

Stage en

situation S'essayer ensituation réelle

Plusieurs

semaines - Stages hospitaliers desfuturs médecins - Stages des professeurs avec les conseillers pédagogiques.

- Séquences éducatives en entreprise.

Stage en

responsabilité Prendre desinitiatives Être évalué Plusieurs mois TRAVAIL PRODUCTIF - Stage de l'élève- ingénieur en entreprise, du futur professeur en lycée.

- Internat des médecins. - Stages des étudiants en BTS et IUT.

Au-delà de ces points communs, ce sont leurs objectifs qui différencient les stages et qui leur assignent une place dans la formation.

Si l'on récapitule les différents types d'interactions entre l'enseignement et les milieux professionnels, plusieurs indications, nonexclusives les unes par rapport aux autres, se dégagent. On va en stage :

Pour voir ; qu'il s'agisse d'un stage d'observation ou de tout

autre type de stage, il s'agit de découvrir un milieu nouveau, de prendre la mesure d'un environnement spécifique, irréductible à celui de l'enseignement.

Pour faire ; avec plus ou moins d'initiative, plus ou moins de

responsabilité, le stage est un terrain d'expérience, le lieu où l'on peut confronter son action avec les contraintes de la réalité.

Pour voir faire ; sur le terrain, le stagiaire est en contact non plus

avec des professeurs, mais avec des professionnels au travail à qui est parfois confié un rôle d'accueil et de tutelle.

Pour faire voir ; dans un certain nombre de cas, les stages ont

une fonction probatoire, ils font partie d'épreuves de qualification. Dans ce cas, le stagiaire doit faire la preuve qu'il est arrivé à maîtriser à un niveau jugé satisfaisant les habiletés professionnelles caractéristiques d'une activité à laquelle il se destine.

Ainsi considéré, et à des degrés divers, un stage est un mélange complexe d'écoformation (la présence dans le milieu contribue en elle-même à la formation) ; d'hétérformation (certaines personnes, qui ne sont pas des enseignants, jouent un rôle privilégié dans la formation) ; d'autoformation (parce qu'une situation de stage est beaucoup moins structurée qu'une situation d'enseignement, elle comporte un aspect personnellement vécu par le stagiaire, largement imprévisible, mais qui constitue un facteur important de formation).

Autrement dit, lors d'un stage, il s'agit bien d'apprendre, mais il n'y a pas d'enseignant, et le milieu fonctionne selon une logique qui n'est pas organisée selon un principe didactique. Or on sait que l'enseignement est déjà une tâche difficile, qui engendre un certain pourcentage d'échecs. Comment alors apprendre en stage, dans un milieu qui, d'une certaine manière, n'est pas fait pour cela ? Disons-le clairement, alors que l'élève est au centre du dispositif d'enseignement, il n'en est pas de même du stagiaire dans l'entreprise ou, plus généralement dans un milieu de travail :

si l'on supprime les élèves, l'enseignement disparaît du même coup, et l'enseignant avec. Alors que si l'on supprime les stagiaires sur les lieux de travail, cela n'empêche pas l'entreprise de fonctionner : son activité n'est pas orientée vers la formation des stagiaires, mais vers la production. Il y a toutefois quelques exceptions à cette règle : à savoir lorsque le stagiaire, à un moment donné prend en charge, en responsabilité, le rôle d'un professionnel. Si, par exemple, les professeurs-stagiaires cessaient d'enseigner en responsabilité six heures par semaine, les établissements d'enseignement ne pourraient plus fonctionner.

Tableau 2

Le schéma précédent (figure 2) élaboré à partir de celui proposé par D. HAMELINE, puis par B. SCHWARTZ permet de

comprendre en quoi la logique de formation caractéristique des stages est la résultante plus ou moins équilibrée de trois autres logiques auxquelles elle s'apparente, mais dont elle se distingue :

La différence entre la logique didactique et la logique productique résulte du fait que l'une cherche à atteindre des vérités alors que l'autre cherche à obtenir des r é u s s i t e s . S'il s'agit plus particulièrement de l'enseignement scolaire, on peut pointer un certain nombre d'oppositions entre la logique qui l'anime et celle qui fonctionne sur les lieux de travail et, par voie de conséquence, en stage :

Enseignement Stage

Disciplinaire Pluridisciplinaire

Processus Résultat

Élèves en groupe Stagiaire seul

Professeur seul Professionnels en groupe Dominante cognitive Valorisation de l'expérience

La seule expérience que l'enseignement valorise, c'est l'expérimentation, c'est-à-dire une expérience structurée de telle manière qu'elle débouche sur une connaissance certaine (administration de la preuve). Par contre, dans le cas des stages, il s'agit de l'expérience vécue : à quelles conditions peut-elle être formatrice ?