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Sources statistiques

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Pauvreté monétaire et inégalité : profils et évolutions

2. Sources statistiques

Source: d’après Jenkins, Lambert (1998).

intensité de la pauvreté, d’une part, sont respectivement appréhendés par les distances P0 et P1, alors que l’aspect inégalité (P2) est mesuré par le degré de concavité de la partie non horizontale de la courbe.

Les courbes TIP permettent de procéder à une analyse de dominance. Considérons en effet un seuil de pauvreté unique et deux distributions x et y avec les courbes correspondantes TIP (x, p) et TIP (y, p). Si TIP (x, p) > TIP (y, p) pour tout p appartenant à (0 ;1), alors

x TIP domine y TIP et donc Q (x / z’) > Q (y / z’) pour tous les seuils de pauvreté z’< z et pour tous les indices Q contenus dans Q. Autrement dit, la dominance de TIP (x, p) sur TIP (y, p), marquée par l’absence de points d’intersection entre les deux courbes, est une condition nécessaire et suffisante pour affirmer, sans ambiguïté, que la pauvreté est plus importante en x qu’en y.

2. Sources statistiques

L’ensemble des analyses quantitatives à venir repose sur les informations issues des enquêtes Russia Longitudinal Monitoring Survey. Il convient à cet égard de préciser le

contenu de ces bases de données et, par ailleurs, de spécifier l’indicateur de niveau de vie et le seuil de pauvreté retenus pour nos estimations.

A. Les enquêtes Russia Longitudinal Monitoring Survey (RLMS)

Avant la chute du régime communiste, l’évaluation du niveau et des conditions de vie des ménages se faisait à partir des données collectées par le Goskomstat55, dans le cadre des

« Enquêtes sur le Budget des Familles » (Family Budget Survey). La collecte des données suivait le principe de branche : seuls les salariés à plein temps des entreprises d’Etat enregistrées auprès de chaque ministère de branche étaient interrogés sur les conditions de vie de leur famille56. Un certain nombre de catégories sociales étaient donc exclues : les dirigeants du parti communiste, les militaires, les exclus du système, etc. Par ailleurs, l’échantillon d’entreprises n’était pas établi de manière aléatoire, comme en témoigne la surreprésentation des grandes entreprises urbaines. Aujourd’hui, les données du Goskomstat couvrent à peu près 49 000 ménages, et même si les autorités ont prolongé et amélioré les Enquêtes sur le Budget des Familles après l’effondrement de l’URSS, elles ne peuvent en aucun cas constituer un support fiable pour une analyse de la pauvreté57.

En 1992, en vue de pallier ces déficiences, le Goskomstat, l’Université de Caroline du Nord, le Centre Russe de Médecine Préventive et l’Institut Russe de Sociologie ont conjointement diligenté, avec l’assistance technique et financière de la Banque Mondiale et de l’Agence Américaine pour le Développement International, la première enquête de panel représentative à l’échelle nationale : les Russia Longitudinal Monitoring Survey (RLMS) [Clarke (1999a)]. Les enquêtes RLMS sont en fait constituées de deux phases. La première phase fournit des observations en quatre points du temps (rounds I à IV entre 1992 et 1994) pour un échantillon initial de 6334 ménages, correspondant à plus de 16 000 individus. La deuxième phase s’appuie sur un échantillon initial de 3973 ménages, c'est-à-dire plus de 11 000 individus interrogés cinq fois entre novembre 1994 et septembre 2000 (rounds V à IX). Les comparaisons entre les deux phases ne sont pas pertinentes dans la mesure où les panels et les méthodes d’échantillonnage diffèrent. De plus, la qualité de la collecte des

55 Institut National de la Statistique Russe hérité de l’époque soviétique.

56 Un échantillon séparé concerne les retraités de cet échantillon d’entreprises.

57 En vue d’améliorer la qualité de ses données, le Goskomstat, avec l’aide de la Banque Mondiale, a entrepris de redéfinir son échantillon à partir du milieu des années 90, afin d’augmenter sa représentativité. Néanmoins, les données ne sont toujours pas à la disposition des chercheurs. Au sujet des données du Goskomstat, se référer à Clarke (1999a) et World Bank (2004).

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données s’étant nettement améliorée entre les deux phases, l’ensemble de nos estimations s’appuie sur les données de la deuxième phase des enquêtes RLMS. L’échantillon a été déterminé par stratification multiple : quatre niveaux de stratification avec tirage aléatoire pour le dernier niveau de stratification58. Il convient de préciser que l’échantillon a été réapprovisionné en octobre 1998 pour compenser l’usure du panel initial. En vue de résoudre le problème d’irrégularité des dates de collecte, nous avons décidé de ne retenir que quatre vagues de données espacées de deux ans : les rounds V (novembre 1994), VII (octobre 1996), VIII (octobre 1998), IX (septembre 2000)59. Les données collectées au niveau des ménages fournissent des informations détaillées sur les conditions de vie (revenus, dépenses, composition démographique, conditions de logement, accès à la terre), alors que les données portant sur les individus concernent l’emploi, la santé et la migration. Les enquêtes RLMS peuvent être utilisées pour une analyse transversale, l’objet de ce premier chapitre, mais également pour une analyse longitudinale du fait de la structure de panel des données. Il convient enfin d’apporter deux réserves. D’une part, la plupart des informations collectées étant mensuelles, il apparaît difficile d’apprécier le caractère saisonnier de certains revenus et dépenses. D’autre part, la non représentativité des enquêtes RLMS à l’échelle régionale amoindrit la portée d’une analyse des disparités géographiques de pauvreté.

Précisons qu’à partir de 2003, le Ministère du Travail et du Développement Social et le Goskomstat ont mis en place une nouvelle enquête auprès des ménages, the Survey of Household Welfare and Participation in Federal Programs (NOBUS 2003), avec l’assistance technique de la Banque Mondiale. L’échantillon, représentatif à l’échelle nationale, comprend 44 500 ménages. Et les données collectées capturent différents aspects du bien-être des ménages et permettent, en particulier, d’évaluer l’impact des politiques sociales mises en œuvres par les autorités [World Bank (2004)].

B. Mesure du bien-être

L’appréhension de la pauvreté exige de définir une mesure du bien-être économique ou du niveau de vie des ménages. A cet égard, l’approche utilitariste (welfarist) propose un cadre conceptuel issu de la théorie microéconomique moderne qui semble à même de répondre à

58 Pour plus de précisions sur la méthode d’échantillonnage, voir Swafford (1997).

59 Taille des échantillons : 3763 ménages en 1994, 3562 en 1996, 3622 en 1998 et 3777 en 2000.

cette attente60. L’approche par l’utilité repose sur l’idée qu’il existe un classement des préférences pour les biens, pour chaque individu, qui peut être représenté par une fonction d’utilité U : U = U (B, K) avec B un vecteur de quantités consommées et K un vecteur de caractéristiques. La valeur statistique de cette fonction représenterait le bien-être de l’individu. Toutefois, dans la mesure où, en pratique, l’utilité n’est pas observable, l’approche utilitariste propose de mesurer le bien-être de manière indirecte par la dépense de consommation61. Il s’agit là d’une mesure du niveau de vie qui permet de relier l’approche utilitariste à l’approche monétaire de la pauvreté.

En Russie, les premières analyses de la pauvreté monétaire des ménages, durant la transition, ont fréquemment utilisé le revenu disponible comme indicateur de bien-être62. Cette approche est contestable à deux niveaux [Clarke (1999a)]63. Premièrement, les revenus ont tendance à être sous-estimés, surtout depuis l’explosion des activités informelles inhérente au processus de transition économique. Deuxièmement, les revenus sont très fluctuants, et ce particulièrement en Russie du fait des problèmes d’irrégularités de paiement des salaires et des transferts sociaux. Une manière plus satisfaisante d’aborder le phénomène de pauvreté consiste donc à appréhender le niveau de vie par les dépenses de consommation. Les ménages ont en effet tendance à lisser leur consommation dans le temps, ce qui explique que les profils de la consommation soient moins irréguliers que ceux du revenu.

Dans le cadre des enquêtes RLMS, l’indicateur de dépenses, exprimé en termes réels et évalué sur une base mensuelle, prend en compte toutes les dépenses monétaires en biens (alimentaires et non alimentaires) et services, ainsi que les transferts versés. Si la valeur des biens durables n’est pas prise en compte, pour des raisons pratiques64, l’indicateur intègre la valeur imputée de l’autoconsommation en produits alimentaires. Il inclut également le montant de l’épargne, suggérant par là même que l’on raisonne en terme de consommation potentielle et non de consommation courante [Ravallion et al. (1995)]65. En outre, la présente

60 Pour une discussion sur les éléments conceptuels relatifs à la mesure du bien-être, voir Ravallion (1992), pp. 4-8.

61 Il existe des arguments théoriques montrant que la dépense constitue une approximation correcte du bien-être.

En effet, la fonction de dépenses du consommateur représente le coût minimum pour un individu ayant des caractéristiques K d’accéder à un niveau d’utilité U sous la contrainte d’un vecteur de prix P : D = D(P, K, U) [Ravallion (1992), Lachaud (2001)].

62 Citons à titre d’illustration Mroz, Popkin (1995) et Lokshin, Popkin (1999).

63 Voir également Ravallion (1992) et Deaton (1997).

64 Voir à ce sujet Klugman (1997), p. 68.

65 D’après les données des enquêtes RLMS, la dépense potentielle moyenne (incluant l’épargne) excède le revenu moyen de 25 % à 35 % selon l’année considérée. Ceci confirme que les données sur le revenu disponible

analyse tient compte des écarts de dépenses de consommation liés aux différences de composition démographique des ménages. Pour passer au bien-être en équivalent adulte, il est nécessaire d’introduire une échelle d’équivalence, c’est-à-dire de tenir compte à la fois du coût relatif premier adulte / autres adultes (a), du coût relatif premier adulte / enfants (e), et d’un facteur d’économies d’échelle traduisant le gain d’un ménage de deux individus par rapport à un ménage d’un seul individu ()66. Formellement, l’échelle d’équivalence peut être exprimée comme suit : nombre d’enfants dans le ménage67. A l’instar de Klugman (1997) et Grootaert, Braithwaite (1998), et comme il est de coutume de procéder pour les pays en transition, nous avons décidé d’adopter l’échelle d’équivalence normative de l’OCDE caractérisée par l’équation (1-12) 68 :

7 d’importantes discussions. Celui intégré à l’échelle d’équivalence de l’OCDE présente une valeur conventionnelle de 0,7 égale à celle estimée par Lanjouw et al. (1998) et proche des valeurs de 0,62 estimée par Milanovic, Jovanovic (1999) et de 0,75 utilisée par Jovanovic (2000). Ce coefficient d’échelle signifie qu’un doublement de la taille du ménage correspond à un accroissement de 70 % de ses besoins. Les valeurs moyennes de la dépense des ménages exprimée en termes réels et en équivalent adulte pour la période 1994-2000 sont reportées en annexes, dans le tableau A-1-1.

C. Définition du seuil de pauvreté

en Russie ne reflètent plus le niveau effectif de la consommation. A ce sujet, voir World Bank (1999).

66 Le paramètre θ est compris entre 0 et 1. La relation entre sa valeur et les économies d’échelle est décroissante, autrement dit, plus θ est élevé, moins le ménage bénéficie d’économies d’échelle.

67 Voir Deaton (1997) pour une discussion sur le problème des échelles d’équivalence et pour un aperçu des

Une fois la mesure du bien-être économique spécifiée, la mesure de la pauvreté exige de déterminer une ligne de pauvreté. Plutôt que de se référer au seuil de pauvreté international de 4 dollars par jour, traditionnellement utilisé pour les pays en transition, nous avons choisi d’adopter le Seuil Minimum de Subsistance. Il s’agit de la ligne de pauvreté officielle soviétique créée dès 1918. Dans les années 30, il est abandonné puisque les autorités ont déclaré la pauvreté éradiquée en Union Soviétique [Iarygina (1994)]. Sous le régime de Khrouchtchev, néanmoins, un nouveau seuil minimum de subsistance est mis en place. Basé sur un régime alimentaire idéal et un ensemble de conditions de vie que pouvait espérer atteindre l’ensemble de la population soviétique, il définissait le niveau de vie minimum socialement acceptable69. Toute référence au concept de pauvreté étant occultée, les individus ou familles percevant des revenus inférieurs à cette norme étaient déclarés en état de « sous approvisionnement » [Mroz, Popkin (1995)]. Même si les valeurs de ce minimum de subsistance ne sont pas publiées, il sert de base au calcul du salaire minimum et des allocations familiales. Il faut attendre 1987 pour le retour officiel d’une ligne de pauvreté. En 1992, l’hyperinflation provoquée par la libéralisation des prix rend ce minimum vital obsolète dans la mesure où, virtuellement, la population entière perçoit des revenus qui lui sont inférieurs. Il est donc révisé dès 1992. En se basant sur la structure de la dépense des 20 % les plus pauvres, on a estimé la part de la dépense destinée aux produits alimentaires, non alimentaires, aux services, etc. Puis, la valeur monétaire du panier de biens garantissant le minimum nutritionnel a été déterminée à partir des standards caloriques contemporains de l’OMS et de la FAO70. C’est ce seuil que nous avons choisi d’utiliser. Il représente le montant monétaire nécessaire pour assurer le minimum nutritionnel et les besoins quotidiens d’un individu (fuel, loyer, énergie, etc.)71. Il est réévalué tous les mois pour tenir compte de l’évolution des prix72. Nos analyses se réfèrent au minimum de subsistance de novembre 1994 (mois de collecte du round V des enquêtes RLMS), calculé en équivalent adulte, à savoir 1828,6 roubles mensuels en termes réels73. Pour raisonner à partir de cette ligne de pauvreté

69 Pour une présentation plus complète de l’estimation de ce seuil, voir l’introduction générale de ce travail et Matthews (1986), pp.19-22.

70 Pour plus de précisions sur la construction de la ligne de pauvreté, se référer à World Bank (1995), Klugman, Braithwaite (1999), Clarke (1999a).

71 Précisons que la part destinée aux produits alimentaires est prépondérante : elle atteint 68,3 % pour seulement 19,1 % pour les produits non alimentaires, 7,4 % pour les services et 5,2 % pour les impôts et paiements. En 2000, le Ministère du travail et le Goskomstat ont proposé une nouvelle méthode de calcul du seuil minimum de subsistance accordant plus de poids aux produits non alimentaires et aux services. Il en résulte que le minimum vital selon la méthodologie de 2000 excède celui de 1992 de 15 à 20 %.

72 Pour les valeurs mensuelles du seuil minimum de subsistance, voir Russian Economic Trends (2000).

73 Ce qui correspond à environ 78 dollars par mois, soit 2,6 dollars par jour, en parité des pouvoirs d’achat. Les bases de données RLMS intègrent un seuil de pauvreté calculé sur la base des travaux de Popkin et al. (1992), mais celui-ci est spécifique à chaque ménage, compte tenu de sa composition démographique. Pour plus de

unique, il a fallu ajuster les dépenses de 1996, 1998 et 2000 aux prix de 1994 en utilisant le rapport des seuils de pauvreté comme déflateur.

En guise de conclusion à cette première partie, il importe de nuancer la portée d’un tel cadre conceptuel. Même si elle semble la plus opérationnelle d’un point de vue empirique, l’approche monétaire ne permet pas de proposer une mesure objective de la pauvreté, puisque soumise à trop de contraintes méthodologiques, relatives à la définition de l’indicateur de bien-être, du seuil de pauvreté et de l’échelle d’équivalence. En d’autres termes, les estimations proposées par la suite doivent essentiellement permettre de dégager des évolutions, des tendances et des faits stylisés relatifs aux conditions de vie, mais ne prétendent pas rendre compte de toute la complexité du phénomène de pauvreté. En vue de mieux cerner cette complexité, d’autres approches, dites non monétaires, sont aujourd’hui largement développées. Citons à cet égard l’approche par les besoins essentiels et l’approche par les capacités74. La pauvreté peut également être envisagée sous un angle subjectif en s’intéressant à la perception que chaque individu a de son niveau de vie. Cette dernière alternative a notamment fait l’objet de plusieurs études en Russie, à partir des enquêtes RLMS75.

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