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Evolution de la pauvreté nationale

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Pauvreté monétaire et inégalité : profils et évolutions

1. Evolution de la pauvreté nationale

L’effondrement de l’URSS et la mise en place des premières réformes visant à assurer le passage à l’économie de marché ont eu d’évidentes répercussions sociales. Dans une étude comparative sur l’ensemble des pays en transition, Milanovic (1998) estime que le nombre de pauvres en Russie serait passé de 2,2 millions en 1987-1988 à 74,2 millions en 1993-1995, soit une augmentation de l’incidence de la pauvreté de 2 % à 50 %76. Le tableau 1-1 présente les évaluations de Klugman (1997) relatives à la période 1980-1993. La pauvreté en Russie atteignait déjà un niveau significatif dans les années 80, puisque la proportion de pauvres dépassait les 10 %. Elle a toutefois considérablement augmenté à partir de 1992, l’incidence de la pauvreté atteignant près de 35 % en mars 1993. Malgré les nombreux doutes pesant sur la qualité de ces estimations, et en dépit des divergences dans les méthodes d’évaluation, ces résultats indiquent que le moment du passage du système socialiste à la phase de transition a été marqué par une profonde dégradation des conditions de vie. Il convient à ce stade de la présentation d’examiner l’évolution de la pauvreté durant la deuxième phase de la transition, c'est-à-dire entre 1994 et 2000, à partir des données RLMS.

Les valeurs des indices FGT pour 1994, 1996, 1998 et 2000, ainsi que les valeurs de la statistique  testant l’hypothèse de nullité des écarts de pauvreté pour les différents couples d’années, sont reportées dans le tableau 1-277. L’appréhension de l’évolution de long terme, dans un premier temps, montre que la pauvreté nationale s’est accrue très sensiblement entre 1994 et 2000. Ainsi, l’incidence de la pauvreté P0 a augmenté de près de 8 points de pourcentage (de 14,4 % à 22,3 %), l’intensité P1 de 2 points et l’inégalité P2 d’un peu moins de 1 point. La pauvreté s’est donc non seulement accentuée, mais est également devenue plus profonde et plus sévère. Ces premiers résultats semblent corroborer l’impact négatif des réformes sur la population. De toute évidence, la thérapie de choc mise en place conjointement par le FMI et les autorités russes a eu des conséquences sociales importantes ,en provoquant l’effondrement des salaires réels, la hausse du chômage et le creusement des

76 Ces estimations, qui doivent être prises avec beaucoup de prudence, ont été calculées à partir des données sur le revenu disponible par tête des « Enquêtes sur le Budget des Familles » du Goskomstat. La ligne de pauvreté de référence est le seuil international de pauvreté retenu pour les pays en transition, à savoir 4 dollars par jour.

77 Le tableau 1-2 affiche par ailleurs les erreurs types asymptotiques permettant de tester l’hypothèse de nullité des indices de pauvreté. La statistique t est égale au rapport de la valeur de l’indice et de l’erreur type. Dans le cas où elle a une valeur supérieure à 1,96, on peut rejeter l’hypothèse de nullité au seuil de 5 %. C’est le cas pour tous les indices présentés puisque t varie de 14,9 à 34,4 selon l’indice et l’année considérés.

Tableau 1-1 : Evolution de la pauvreté nationale (indices FGT) à partir des données des enquêtes sur le Budget des familles1. Russie 1980-1993.

1980 1985 1989 1990 1991 Janvier 1992 Mars 1993

Incidence P0 0,1130 0,1340 0,1100 0,1010 0,1140 0,3020 0,3470

Intensité P1 0,0234 0,0296 0,0224 0,0212 0,0203 0,0725 0,1048

Inégalité P2 0,0070 0,0094 0,0065 0,0063 0,0056 0,0245 0,0445

Notes : (1) A partir du revenu. Enquêtes sur le budget des Familles. Goskomstat. Seuil Minimum de subsistance.

Source : Klugman (1997).

inégalités78. Il est toutefois nécessaire de mener des investigations supplémentaires pour pouvoir conclure avec certitude sur une aggravation de la pauvreté. Premièrement, les écarts de pauvreté entre 1994 et 2000 sont significativement différents de zéro dans la mesure où la statistique  est supérieure à 1,96 en valeur absolue pour les trois indices de pauvreté.

Deuxièmement, le test de dominance de second ordre, à partir des courbes TIP présentées sur la figure 1-2, permet de classer la pauvreté en 1994 et 2000 sans ambiguïté79. En effet, étant donnée une ligne de pauvreté z de 1828,6 roubles par mois commune aux deux distributions, la dominance de TIP(2000) sur TIP(1994) est une condition nécessaire et suffisante pour affirmer que Q(1994/z’) est inférieur à Q(2000/z’) pour z’< z. En d’autres termes, le fait que les courbes TIP ne se coupent pas pour ces deux distributions signifie que la pauvreté en 2000 est plus élevée qu’en 1994.

Si l’on considère dans un second temps les évolutions intermédiaires, il apparaît que sur la période 1994-1998, la pauvreté a augmenté sensiblement puisque l’écart de pauvreté est statistiquement significatif pour les trois indices et que la courbe TIP(1998) domine la courbe TIP(1994). L’évolution n’est cependant pas uniforme. La hausse de l’incidence atteint 8,5 points de pourcentage entre 1994 et 1996 pour seulement 4,5 points entre 1996 et 1998. Cette différence de rythme est encore plus perceptible dans le cas de l’inégalité de la pauvreté P2

qui s’est accrue de plus de deux points entre les deux premières années avant de stagner entre les deux suivantes. Ceci explique que le test de dominance de second ordre ne nous permette pas de hiérarchiser la pauvreté en 1996 et 199880. Néanmoins, les indices FGT atteignent leur valeur maximale en 1998 (novembre), quelques mois après le déclenchement de la crise

Tableau 1-2 : Mesures de la pauvreté et statistique testant l’hypothèse de nullité des écarts de pauvreté1. Russie 1994-2000.

(2) Les erreurs types sont indiquées en italique. (3) Le calcul des statistiques  suit Kakwani (1990). Une (*) signifie que les différences de pauvreté sont statistiquement significatives au seuil de 5 %.

Source : à partir des bases de données des enquêtes RLMS.

Figure 1-2 : Courbes TIP en fonction de l’année. Russie 1994-2000.

,00 ,01 ,02 ,02 ,03 ,04 ,05 ,06 ,07 ,07 ,08 ,09 ,10 ,11 ,11 ,12 ,13 ,14 ,15 ,16 ,17 ,18 ,19 ,20 ,21 ,23 ,26

Somme cumue des écarts de pauvreté par tête

Année 1994 1996 1998 2000

Source : à partir des bases de données des enquêtes RLMS.

financière81. A partir de 1998, on assiste à une baisse marquée de la pauvreté. L’incidence P0

retrouve son niveau de 1996 (autour de 23 %), l’intensité et l’inégalité un niveau inférieur.

Ceci semble suggérer que les pauvres ont bénéficié du retour de la croissance en 1999 et 2000 lié à la dévaluation du rouble, au contexte favorable sur le marché des produits énergétiques et à la réorientation de la politique économique. Par conséquent, la crise de 1998 n’a eu qu’un impact de court terme sur les populations.

En définitive, même si nos estimations de la pauvreté confirment les tendances mises en exergue dans des études antérieures reposant sur les enquêtes RLMS82, force est de constater qu’elles diffèrent assez sensiblement des estimations officielles83. En effet, les mesures du

81 Résultat qui confirme les conclusions de plusieurs études : OCDE (2001), Klugman, Braithwaite (1999).

82 Voir par exemple Kalugina, Najman (2003). Le tableau A-1-2 reporté en annexes, affiche par ailleurs la valeur des indices FGT calculées à partir du seuil spécifique aux ménages intégré aux bases de données RLMS.

L’ampleur et les évolutions de la pauvreté sont, dans une large mesure, comparables aux estimations précédentes.

83 Voir tableau A-1-3 en annexes.

Goskomstat tendent à surestimer légèrement la pauvreté et montrent des évolutions bien différentes. Elles révèlent une quasi-stagnation de la pauvreté entre 1994 et 1998 et ne font pas apparaître la diminution intervenue après la crise de 1998. Ces écarts de niveaux et de tendances sont imputables à la qualité douteuse des données du Goskomstat, mais également au fait que ces mesures soient calculées à partir du revenu des individus et non de la dépense des ménages. En dépit de ces divergences imputables à des sources statistiques et des méthodes différentes, la part de la population Russe en situation de pauvreté est importante et s’est accentuée significativement tout au long de la période de transition84.

Dans le document Td corrigé 1 - Examen corrige pdf (Page 48-51)