• Aucun résultat trouvé

Entre solidarité horizontale et dévouement au chef pour faire corps

La vie de garnison ou la matérialisation d’un corps

1. Structuration de l’espace et du temps au service de l’esprit de corps

1.1. Entre solidarité horizontale et dévouement au chef pour faire corps

L’esprit de corps représente à la fois « la fidélité au corps et à ses chefs »1 et « le désir de constituer le meilleur corps »2. Il est censé pousser les hommes au dépassement d’eux- mêmes pour que leur unité puisse être considérée comme la meilleure. « Enfin l’esprit de corps, pendant toute la durée du régiment survit à ceux qui composent celui-ci dans la mesure où il garde une certaine homogénéité. Aussi est-il évident que les Anciens jouent un rôle

1

AndréCorvisier, Dictionnaire d’art et d’histoire militaire, op. cit., p. 278.

58 considérable dans sa formation et sa transmission. D’où l’existence du couple esprit de corps/traditions militaires. »3 Ainsi, à l’instar de la famille, la « maison », c’est-à-dire « la continuité d’une lignée »4

, « subsiste tandis que passent ses héritiers successifs »5.

Afin de mieux comprendre cette définition, il faut préciser ce que les militaires entendent par le terme d’Ancien puisqu’il peut avoir plusieurs significations selon le contexte dans lequel il est utilisé. Il désigne ici les militaires, souvent au grade de caporal-chef ou de sergent-chef6, ayant au moins huit à dix ans de service au sein du régiment. Ils ont une grande expérience des opérations extérieures et ont généralement participé à au moins une mission considérée comme difficile, c’est-à-dire pendant laquelle l’usage de la force a été nécessaire. De par leur âge et leur expérience du conflit, ils ont acquis une certaine sagesse car ils ont conscience de ce que représente le don de soi pour leur groupe. Par conséquent, ils entretiennent la mémoire de ces faits passés en mettant en avant le courage et le dévouement7 de ceux qui s’y sont sacrifiés.

La mémoire véhiculée leur enseigne également les extrémités qu’impliquent leur engagement et l’importance d’établir des liens solides avec leurs camarades pour y faire face. Le respect de cette mémoire passe par une volonté, de la part des militaires, d’adopter une attitude similaire dans leur dévouement afin de leur être digne. Ici, la notion d’honneur, qui peut être un sentiment personnel ou une marque d’admiration pour quelqu’un, joue donc un rôle important. C’est elle qui va, en partie, pousser les nouveaux engagés à se donner corps et âme à l’institution pour ne pas décevoir ou remettre en cause ce que les Anciens ont défendu parfois au sacrifice de leur vie. En effet, d’un point de vue anthropologique, l’honneur est associé à un certain nombre de valeurs dont la fonction n’est pas clairement définie. Il relève, selon Campbell, « d’une éthique de l’intégrité, de la noblesse du corps et de l’âme »8. L’armée utilise cette valeur dans plusieurs circonstances et sens différents puisqu’elle requiert de chacun de ses membres « d’agir avec honneur, franchise et loyauté »9. C’est un code de conduite fondateur de l’esprit de corps dans la mesure où il incite au dépassement de soi en

3 Ibid.

4 Philippe Laburthe-Tolra, Jean-Pierre Warnier, Ethnologie, Anthropologie, Paris, PUF (coll. Quadrige), 2003 [1e

éd., 1993], p. 59.

5

Ibid.

6 Les sous-officiers les plus anciens sont ceux issus du rang qui finissent généralement leur carrière au grade de

sergent-chef. Ils sont, avec les caporaux-chefs, les personnels qui ont passé le plus de temps au sein du régiment.

7 Ceux ayant mal vécu leur expérience de combat et qui, après avoir bénéficié d’un suivi psychologique, en

restent traumatisés, demandent généralement une réforme pour syndrome post-traumatique et quittent l’institution.

8 Pierre Bonte, Michel Izard (dir.), Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, op. cit., p. 341.

9 Code du soldat, article 7, en ligne : http://www.recrutement.terre.defense.gouv.fr/le-code-du-soldat. Le code du

soldat est un ensemble de devoirs moraux imposés aux militaires et présentés comme indissociables de l’exercice de leur fonction.

59 faisant principalement référence au courage, à l’esprit de sacrifice, à l’abnégation et à la maîtrise de la peur. C’est par son attitude honorable qu’une personne est digne d’avoir la confiance de ses camarades. En ce sens, l’honneur et l’esprit de corps sont liés et sont montrés comme des éléments utiles au bon accomplissement des missions. L’honneur découle de l’image que la personne renvoie aux autres membres du groupe. Ainsi, il ne peut exister sans le regard des autres et fait donc partie intégrante de l’identité. « Le regard des autres renvoie à chacun un visage, une personnalité, des rôles sociaux, que l’individu peut accepter ou rejeter mais par rapport auxquels il ne peut éviter de se déterminer. […] C’est dans le rapport à

l’autre que s’élabore le soi. »10

Le positionnement individuel de chaque marsouin nourrit l’image du groupe dans son ensemble. Ainsi, l’action de chacun est au service du collectif et alimente la notion d’esprit de corps. Non uniquement liée aux attitudes des uns et des autres, la notion d’honneur est très présente à l’armée qui « rend honneur » aux anciens combattants en portant une grande admiration à leurs faits, notamment dans « la salle d’honneur »11. Par ailleurs, les « honneurs militaires » sont rendus lors des prises d’armes pendant lesquelles les unités témoignent de leur respect au drapeau ou à un autre soldat, par exemple lors de cérémonies funèbres, afin de rendre hommage à celui « tombé au champ d’honneur » « espace symbolique où la mort peut être pensée comme une fin valeureuse. Le passage de la mort à la vie y devient possible »12. Ce soldat est alors prompt à mener ses successeurs au bon accomplissement de leur tâche, et à leur sacrifice suprême si cela s’avère indispensable13

. Ainsi, grâce à l’honneur, l’institution peut faire passer ses besoins au premier plan puisqu’il est fondé sur une grandeur des actes plus importante que celle des hommes par une prédominance de l’honneur sur la vie individuelle, dans le but de maintenir la vie du groupe. Afin de rendre possible ce dévouement à la communauté, la mémoire collective est fondamentale car elle permet la valorisation de certains faits historiques justifiant des attitudes spécifiques. Ainsi, elle consiste en « une stratégie favorisant la solidarité et la mobilisation

10 Isabelle Toboada-Leonetti, « Stratégies identitaires et minorités : le point de vue du sociologue », in

Carmel Camilleri, Joseph Kastersztein, Edmond-Marc Lipiansky, et alli. (dir.), Stratégies identitaires, op. cit., p. 44.

11 Sorte de petit musée, la salle d’honneur est le lieu où sont réunis les objets témoins des batailles auxquelles le

régiment a participé. Elle héberge également le drapeau régimentaire et communique généralement avec la crypte, lieu de recueillement qui recense tous les soldats morts au champ d’honneur au nom du régiment. Au RICM, chaque soldat tué y est représenté par un rond percé dans une plaque métallique qui recouvre l’intégralité du mur, en haut de laquelle sont inscrits les conflits successifs auxquels le régiment a pris part.

12 Claude Barrois, Psychanalyse du guerrier, Paris, Hachette, 1993, p. 197. 13

Cette notion renvoie à la devise du RICM, « Recidit Immortalis Certamine Magno » (Il revient immortel de la grande bataille), qui fait référence à la prise glorieuse du fort de Douaumont le 24 octobre 1916.

60 d’un groupe à travers un processus permanent d’élimination et de choix »14

puisque, outre la mise en avant de ces faits, elle en occulte d’autres.

De ce point de vue, la mémoire peut véhiculer des messages conformes aux volontés institutionnelles. Elle transmet des modes de penser et d’agir spécifiques, en lien avec la notion d’engagement armé. C’est une structuration des activités par l’imposition d’un ensemble de façons de faire qui conditionnent la stabilité des personnels. Elle est constitutive de l’identité des Troupes de Marine par le maintien des personnels sur une durée suffisamment longue et par une structuration des activités dans la mesure où « l’expérience du travail organisé produit des identités collectives perceptibles sous la forme de modèles culturels »15 marquant une particularisation du groupe par rapport aux autres. En effet, l’identité collective consiste en « un processus de totalisation tant par l’accumulation de traits différenciateurs […] que par [sa] capacité à construire des représentations collectives »16

propres.

La notion de transmission est donc un vecteur essentiel à son maintien et ne peut se départir d’une importante ritualité du fait des trois composantes de cette dernière : « cognitive à travers un mode de vie spécifique, un message délivré qui répond à des pratiques, des normes, des valeurs ; affective avec les rites qui suscitent vibration et émotion du psychisme ; conative, le mode de vie façonne la conscience, structure la personnalité à travers une tension vers l’action méthodique et vers la recherche d’efficacité »17

. En effet, les activités rituelles maintiennent une mémoire du groupe qui favorise son développement social et conditionne les relations entre ses membres par la mise en évidence de normes, notamment hiérarchiques et disciplinaires.

Par ailleurs, les impératifs opérationnels engendrent une certaine promiscuité des militaires qui impose également ce mode de fonctionnement puisque la vie de garnison est marquée, du moins dans les premières années d’engagement, par une communauté de vie. Celle-ci se perpétue pendant les missions, quelle que soit l’ancienneté des personnels. Du fait de vivre ensemble, découle une intimité entre les militaires d’une même unité. Cette vie commune se construit sur le modèle familial, avec la bienveillance du chef direct qui prend soin de l’équilibre du foyer. Il n’est plus seulement un supérieur hiérarchique mais il incarne

14 Patrick-J. Geary, La mémoire et l’oubli à la fin du premier millénaire, Paris, Aubier, 1996, p. 31, cité par

Joël Candau, Mémoire et identité, Paris, PUF, 1998, p. 43.

15 Renaud Sainsaulieu, Sociologie de l’organisation et de l’entreprise, op. cit., p. 190. 16

Daniel Chevallier, Alain Morel, « Identité culturelle et appartenance régionale. Quelques orientations de recherche », Terrain 5 | 1985, p. 3.

17 Claude Rivière, « Postface », in André Thiéblemont (dir.), Culture et logique militaire, op. cit., p. 332. Les

composantes cognitives et conatives sont traitées dans le présent chapitre. La composante affective sera l’objet du chapitre 3.

61 aussi la figure paternelle18, celle du chef de famille qui veille au bon entretien, tant moral que matériel, de son unité. Le chef est alors le garant des repères et des limites imposés par l’institution, dans le but de réguler les violences et de préserver l’équilibre du groupe. Il s’inscrit dans une continuité avec la famille, prend la place du père sans toutefois s’y substituer totalement. Ce type de fonctionnement se justifie, dans les unités combattantes, par la jeunesse des militaires les moins gradés qui, on l’a vu précédemment, acceptent, de ce fait, la subordination. Néanmoins, cette dernière s’en trouve facilitée par la présence de liens affectifs et l’aspect paternaliste du chef qui fait figure de protecteur de son unité face à l’adversité en lui procurant « un ensemble de repères et d’images qui sont autant de légitimations symboliques »19. Il exerce sur ses subordonnés une sorte de pouvoir favorisant l’instauration d’un fonctionnement conforme aux prescriptions institutionnelles, sous « la forme de l’influence : par ses idées, ses ressources, ses attitudes, ses humeurs »20

, autant que par sa capacité à prendre des décisions. Le peloton, ou la section, peut alors être considéré comme un groupe primaire, dans le sens où il « est la première forme de vie sociale qui se rapproche de la famille, en dehors des liens parentaux »21. Il est « un ensemble d’individus dont l’effectif est tel qu’il permet à ceux-ci des communications explicites et des perceptions réciproques, dans la poursuite de buts communs »22. Il est aussi caractérisé par des « liens personnels intimes, chaleureux, chargés d’émotion, entre tous les membres ; la solidarité et l’obtention des avantages mutuels y sont spontanés, non calculés »23

. Ainsi, il est un microcosme bienveillant qui s’appuie sur des fondements normalement associés à la famille, dont le champ lexical est présent dans le vocabulaire militaire officieux. Le capitaine commandant d’unité (escadron ou compagnie) y est affectueusement appelé « le vieux », dans une armée présentée comme « une grande famille ». Cette expression induit également qu’il a l’expérience et les connaissances nécessaires à son commandement. La référence à la famille apparaît également dans quelques dénominations officielles, avec « le Père de l’arme » qui désigne le général commandant l’EMSOME et qui est le « gardien des traditions des Troupes de Marine »24. Le chef direct, quant à lui, n’a pas de tels qualificatifs, bien qu’il soit, dans les

18

Cf. infra chapitre 5 pour l’analyse approfondie de cette notion.

19 Jean Delumeau, Daniel Roche (dirs.), Histoire des pères et de la paternité, Paris, Larousse, 1990, p. 235. 20 Éric Widmer, René Levy, Mesure et démesure du couple, cohésion, crises et résilience dans la vie des

couples, Paris, Payot, 2004, p. 65.

21 Claude Barrois, Psychanalyse du guerrier, op. cit., p. 236. 22

Didier Anzieu, Jacques-Yves Martin, La dynamique des groupes restreints, Paris, PUF (coll. Le psychologue), 9e éd., 1990 [1e éd., 1968], p. 36.

23 Ibid. 24

http://www.defense.gouv.fr/terre/formation-entrainement/formation/specialisee/ecole-militaire-de- specialisation-de-l-outre-mer-et-de-l-etranger

62 faits, le premier modèle auquel les plus jeunes puissent se référer, surtout lorsqu’il s’agit d’un « vieil » adjudant ou adjudant-chef, un peu moins lorsqu’il est un jeune lieutenant peu expérimenté. Dans ce dernier cas, les chefs de groupes (caporaux-chefs à sergents-chefs) tiennent ce rôle du fait de leur charisme et aussi de leur ancienneté. Ils incarnent la mémoire du régiment qui « vient conforter l’identité, tant au niveau individuel que collectif »25. Ils sont alors plus sollicités que les jeunes sous-officiers pour préciser certaines spécificités relatives au fonctionnement ou aux traditions26 montrant ainsi la prédominance sociale de l’expérience sur le grade. En effet, ce n’est pas, dans ce cas, un rapport hiérarchique qui s’établit, mais une relation d’initié à non-initié, d’expérimenté à non-expérimenté. Dans le même sens, lorsqu’un jeune sergent est nommé chef de groupe, il se réfère aux caporaux-chefs les plus anciens, bien qu’il soit leur supérieur hiérarchique. Cette relation d’anciens à nouveaux permet la diffusion des valeurs que porte l’institution puisqu’elles ne sont pas enseignées, mais transmises de génération en génération et qu’elles constituent l’une des assises identitaires du groupe. L’adhésion des hommes à leur chef est favorisée par ce type de rapports fondés sur une prise en compte des compétences de chacun. De plus, ce genre de relations permet au supérieur hiérarchique d’obtenir l’obéissance et le respect de ses subordonnés, deux valeurs indispensables pour faire valoir son autorité et maintenir l’organisation pyramidale de l’institution. Dans la mesure où le chef est, de par son grade, considéré comme ayant les compétences nécessaires aux responsabilités qui lui sont confiées, notamment la conduite de son groupe, et lorsque ses prises de décisions semblent justes et conformes aux yeux de chacun, sa relation avec ses subordonnés s’inscrit dans un climat de confiance qui facilite la soumission de ses hommes. Cette dernière contribue à l’harmonie collective puisqu’elle ne laisse pas de place à d’éventuelles discordances néfastes à l’activité opérationnelle.

Malgré tout, la mise en œuvre de ces stratégies d’adhésion par l’exemple et l’autorité ne suffit pas à garantir la conformité des engagés aux volontés institutionnelles et c’est également grâce à un système punitif précis et sévère que les personnels ont un comportement conforme aux normes imposées. Les sanctions sont de deux sortes. Il y a, d’une part, les punitions27 et d’autre part, un abaissement de la notation annuelle, freinant ainsi l’avancement professionnel de la personne pour l’empêcher d’accéder à davantage de responsabilités tant

25 Joël Candau, Mémoire et identité, Paris, PUF, 1998, p. 6.

26 C’est surtout vrai pour les caporaux-chefs de première classe, c’est-à-dire ceux ayant au moins six ans de

service. Cette distinction, aujourd’hui considérée comme un grade. Elle est visible sur leur galon où le chevron rouge supérieur est remplacé par un chevron d’or ou d’argent, matériau plus noble qui permet d’établir un lien entre la valeur accordée à l’individu et celle de ses galons visibles et lisibles de l’extérieur. Disponible sur

http://www.defense.gouv.fr/terre/bloc-les-essentiels/les-grades.

63 qu’elle n’a pas intégré certaines règles. Ces sanctions peuvent aller jusqu’à l’exclusion afin que le militaire en question ne déstabilise pas l’autorité hiérarchique. Toute déviance est lourdement pénalisée à la fois pour encourager le fautif à ne pas récidiver et pour que les autres membres du groupe ne soient pas tentés par des actions similaires. Ainsi, l’institution fait « en sorte que la représentation de la peine et de ses désavantages soit plus vive »28 que l’envie et le plaisir de transgresser les règles. Elle compte avant tout sur le pouvoir dissuasif de ce système où « les personnes qui dévient du consensus de groupe s’attendent à être évaluées de façon négative et à être rejetées »29 pour cause de non-conformité aux normes imposées. « La société militaire est une société “disciplinaire”, dans le sens où c’est un ensemble de procédés, de techniques visant au dressage des individus par le quadrillage de l’espace-temps, le conditionnement des corps, la codification des gestes »30 qui aboutissent à

une forme de « dressage »31 des engagés. Ce modelage s’effectue principalement pendant la formation générale initiale32 des militaires et perdure au moins jusqu’à la fin de la première année, voire jusqu’au passage au grade de caporal33

. Ensuite, les processus de domination apparaissent systématiquement lors des préparations opérationnelles. Le fait de structurer l’espace-temps d’une manière très précise limite considérablement les moments de liberté, l’oisiveté, mais aussi l’intimité également contrainte pendant les premières années d’engagement et les opérations extérieures où la vie de caserne est obligatoire. Cela génère un contrôle des personnels qui veillent mutuellement au respect de l’influence normative, dans la crainte qu’une « déviance de leur part soit considérée comme une menace contre les efforts du groupe »34. Compte tenu de cette communauté de vie des militaires, l’engagement à l’armée va donc beaucoup plus loin qu’un simple emploi dans une entreprise.

En effet, l’article 11 du code d’honneur du soldat stipule que « fier de son engagement, il est toujours et partout un ambassadeur de son régiment, de l’Armée de Terre et de la France. »35 En étant chargé de véhiculer une image précise de l’institution militaire et de la France, le soldat se voit confier une sorte de responsabilité face à l’État. En insistant sur cet aspect de sa mission, l’armée exerce une pression sur ses engagés pour qu’ils sachent quel

28 Michel Foucault, Surveiller et punir, naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975, p. 125. 29

Serge Moscovici (dir.), Psychologie sociale, op. cit., p. 31.

30 Jean Boulègue, « De l’ordre militaire aux forces républicaines : deux siècles d’intégration de l’Armée dans la

société française », in André Thiéblemont, (dir.), Cultures et logiques militaires, op. cit., p. 261.

31 Terme repris à Sébastien Jakubowski et Claude Weber, Être militaire dans l’Armée de Terre, op. cit., p. 71. 32 FGI, communément appelée « les classes », Cf. infra chapitre 9.

33

Ce changement de grade se fait généralement deux à trois ans après l’engagement, après l’obtention du CME, (Certificat Militaire Élémentaire), dont la durée est égale à celle des classes et qui permet à l’institution de s’assurer des acquis militaires, tant techniques que psychologiques du militaire.

34

Serge Moscovici (dir.), Psychologie sociale, op. cit., p. 32.

64 genre de relation ils doivent entretenir avec la société globale qui, inévitablement, porte une forme de jugement de leurs actions. Montrer des valeurs positives à la société civile apparaît alors comme étant un moyen de légitimer les actes imposés et contribue au processus de soumission des marsouins envers l’institution.