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Chapitre 4 : La fin des troubles

I- Une société face à la guerre et à la violence

La guerre, et plus particulièrement celle qui s’immisce au sein de la société civile, force les hommes à s’adapter aux contraintes qu’elle crée, et à vivre avec au quotidien.

I.1. Le poids des gens de guerre

I.1.1. La géographie des troubles

Carte n°5 : Troubles et garnisons citées en 1597

Afin de comprendre l’impact des gens de guerre sur la société, et en particulier sur les habitants des campagnes, premiers concernés par les troubles dans nos arrêts, il est indispensable de connaître la nature des perturbations subies, mais aussi de situer le quadrillage militaire constitué par les garnisons. Les 54 villes ou paroisses touchées et représentées sur la carte n’ont pas toutes été confrontées aux mêmes difficultés. Arrêtons- nous d’abord sur la partie la plus occidentale de la province. On le voit, les cas de troubles relevés dans les arrêts y sont beaucoup moins nombreux qu’en Haute-Bretagne. Seules deux

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garnisons sont mentionnées, celle du Taureau au large de Morlaix3, et celle de Concq ; deux cas particuliers, le premier s’inscrivant dans un contexte de tensions entre le corps de ville et le commandant du Taureau4, et le second concernant le comportement du commandant de la place de Concq5, soupçonné de malversations. Les cinq autres paroisses sont elles touchées par des faits de guerre. En effet, d’un côté, Châteauneuf-du-Faou, Huelgoat, Gourin6 et Carhaix7 sont occupées par des soldats qui y empêchent l’exercice de la justice et provoquent la fuite des habitants ; de l’autre, Douarnenez tenue par La Fontenelle est assiégée par les troupes royalistes du sieur de Sourdéac de mai à août 15978. En ce qui concerne le reste de la province à partir de la région de Saint-Brieuc, 27 arrêts portent sur des conflits entre paroissiens et soldats, qui se manifestent par des emprisonnements pour non respect des exigences d’une ou plusieurs garnisons, mais aussi par des exactions, comme des prélèvements indus ou des vols de bétail ; 11 arrêts sont liés au passage des gens de guerre, aux violences et aux pillages. Enfin, un arrêt traite d’une affaire de tentative de mariage forcé par un soldat de la garnison de Redon. En ce qui concerne les mois de janvier à mai 1598, on compte 12 arrêts portant sur des emprisonnements de paroissiens et des prélèvements pour les garnisons, dont 6 en avril et mai qui sont le fait d’anciennes places ligueuses, Dinan (4 arrêts) et le château du Bois de la Roche (2 arrêts) à la tête duquel se trouve le baron de Camors. Enfin, un autre arrêt mentionne l’insécurité provoquée par les soldats des deux partis sur les chemins.

Dans les arrêts du parlement de Rennes les garnisons les plus citées comme étant sources de troubles sont des garnisons royalistes, et sont au nombre de seize contre cinq identifiées comme ligueuses. On peut évidemment voir sur la carte que ces garnisons se trouvent principalement en Haute-Bretagne, avec un premier groupe assez dense formant une ceinture autour de Rennes. Parmi celles-ci, les plus « actives » sont Le Bordage, située en Ercé-près-Liffré au nord-est de Rennes, et citée dans cinq arrêts ; et La Guerche, au sud-est, citée dans quatre arrêts. Le Bordage est une garnison relativement modeste puisqu’elle

3 Cette garnison et celui qui la commande font l’objet d’un développement dans la seconde partie de ce chapitre. 4 ADIV, 1B f 83, 3 janvier 1597, n°97.

5 ADIV, 1B f 228, 29 janvier 1597, n°180. Il s’agit de Jan de Jegado, sieur de Kerhollen, neveu du sieur de

Lezonnet, le précédent gouverneur de la place.

6 ADIV, 1B f 83, 21 janvier 1597, n°149. 7 ADIV, 1B f 83, 29 mars 1597, n°126.

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compte en 1595 33 chevau-légers sous les ordres du sieur du Bordage9, et 50 arquebusiers à pied sous les ordres du capitaine La Ronce10. On peut évaluer son rayon d’action en situant l’origine des plaintes qui lui sont liées. Ainsi, des actes commis par la garnison du Bordage sont dénoncés par les paroissiens de Saint-Gilles11, de Billé et Javené12, de Saint-Aubin- d’Aubigné13

, et de Noyal-sous-Bazouges14, ainsi que par un individu15 dont on ne connaît pas l’origine ; des paroisses toutes situées dans un rayon de 25 km autour de la place. La Guerche quant à elle renferme une garnison plus importante, toujours en 1595, avec le régiment du sieur de Lignery composé de huit compagnies de 50 hommes chacune, et 30 arquebusiers à cheval16. Les quatre requêtes dénonçant les agissements des soldats du sieur de Lignery proviennent par deux fois de la paroisse de Moulins, une autre fois des paroisses de Drouges, Visseiche et Domalain et enfin des paroisses du Theil, d’Essé, de Martigné-Ferchaud et Thourie, toutes situées dans les alentours de La Guerche, et concernées par le paiement de la garnison. Les garnisons de Corlay, Quintin et Ploërmel, numériquement importantes17 sont mentionnées dans deux arrêts chacune, et dans des paroisses proches, surtout en ce qui concerne Corlay et Quintin. En effet, leur activité est signalée par les habitants du Bodéo, d’Allineuc et de La Harmoye, trois paroisses contiguës situées entre les deux garnisons à une dizaine de kilomètres. En revanche, la garnison de Ploërmel est allée chercher des prisonniers dans des lieux plus éloignés, puisque les paroissiens concernés viennent de Comblessac et de Guipry, respectivement à une trentaine et une quarantaine de kilomètres à l’est de Ploërmel ; deux paroisses astreintes à l’entretien de la garnison. En effet, les habitants de Guipry sont détenus faute de paiement du dernier terme des garnisons de 159518.

9 Pour des éléments biographiques sur ce personnage voir MAUGER, Martin, op. cit., p. 135.

10 BARTHÉLEMY, Anatole (de), Choix de documents inédits sur l’histoire de la Ligue en Bretagne publiés et

annotés par Anatole de Barthélemy, membre du Comité des travaux historiques, Nantes, Société des bibliophiles

bretons, 1880, p. 181. 11 ADIV, 1B f 85, 29 juillet 1597, n°162. 12 ADIV, 1B f 86, 12 septembre 1597, n°104. 13 ADIV, 1B f 86, 20 octobre 1597, n°37. 14 ADIV, 1B f 86, 8 novembre 1597, n°20. 15 ADIV, 1B f 86, 12 décembre 1597, n°42.

16 BARTHÉLEMY, Anatole (de), Documents inédits…, op. cit., pp. 180-181.

17 Ibid., p. 189 et p. 195 pour Ploërmel et Corlay. Quintin ne figure pas dans l’état des garnisons de 1595. 18 ADIV, 1B f 84, 9 juin 1597, n°17.

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I.1.2. Une trêve interrompue et mal respectée

Le 31 juillet 1593, le roi Henri IV et le duc de Mayenne, chef de la Ligue, publient une trêve de suspension d’armes pour trois mois étendue à tout le royaume19

. Avec quelques réticences, le duc de Mercœur, alors en train d’assiéger Moncontour, se résout à la publier en Bretagne le 14 août20. Si elle est respectée tant bien que mal21, elle est ensuite interrompue par les opérations militaires menées par le maréchal d’Aumont conduisant aux réductions de Morlaix et Quimper en 1594, avant qu’une nouvelle trêve de quatre mois ne soit signée le 26 décembre 159522 entre le duc et le sieur de Saint-Luc, alors lieutenant général pour le roi en Bretagne ; trêve prolongée tout au long de l’année 1596. Mais en quoi consiste cette trêve ? Les deux partis ayant évidemment besoin d’argent, l’accord de décembre 1595 prévoit le partage d’une somme de 160000 écus levée sur les contribuables de la province23

pour payer les gens de guerre, mais aussi le partage de droits sur le vin descendant la Loire24. Il ne s’agit pas seulement de s’accorder sur le partage des ressources, mais aussi de protéger le civil du soldat, et en cela elle s’apparente dans une certaine mesure aux trêves de labourage25

publiées dans le Midi toulousain à la même époque. Si le texte d’une prolongation de deux mois de la trêve signée en avril 159626 s’attarde essentiellement sur les levées de deniers prévues, un soin particulier est apporté à la protection du peuple qui a « ressenti peu de soullagement » en raison des exactions des gens de guerre qui ont continué malgré la trêve de 1595. En effet, l’un des articles est réaffirmé dans la prolongation, l’article « traeziesme » ordonnant aux gens de guerre des deux partis de se retirer aux garnisons et leur interdisant de « tenir les champs, ravager et fourager le plat pays ny se loger près les garnisons de party contraire plus près que de quatre lieues ». Ce « soullagement » évoqué signifie bien que l’un des objectifs de la trêve est de permettre aux populations des campagnes de reprendre une vie normale, et ainsi de

19 SOURIAC, Pierre-Jean, « Éloigner le soldat du civil en temps de guerre. Les expériences de trêve en Midi

toulousain dans les dernières années des guerres de Religion », Revue historique, 2004/4, n°632, p. 791.

20

LE GOFF, Hervé, La Ligue en Bretagne, op. cit., p. 234.

21 Ibid., p. 244.

22 POCQUET, Barthélemy, Histoire de Bretagne, op. cit., p. 276.

23 COLLINS, James B., La Bretagne dans l’État royal, op. cit., p. 151. L’auteur affirme que la levée n’est prévue

que dans les évêchés de Tréguier, Léon et Cornouaille, mais le texte présenté par dom Morice évoque bien tous les évêchés, voir note suivante.

24 MORICE, Hyacinthe (dom), op. cit., col. 1638-1639.

25 Pour un exemple de trêve de labourage voir SOURIAC, Pierre-Jean, « Éloigner le soldat du civil en temps de

guerre », art. cit., p. 816.

26 RAISON DU CLEUZIOU, Alain, « Documents inédits pour servir à l’histoire de la Ligue en Bretagne.

Extraits des archives du marquis de Lescoat », Bulletins et mémoires de la Société d’émulation des Côtes-du-

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pouvoir travailler la terre. Or, cette trêve de l’année 1596, encore prolongée pour toute l’année en août27, prend fin en avril 1597, faisant basculer la Bretagne dans une nouvelle période d’intensification relative des opérations militaires. Mais la différence est-elle vraiment perceptible pour les Bretons ?

En effet, comme nous l’avons dit, ces accords étaient mal respectés par les gens de guerre, les exemples ne manquant pas dans les arrêts des deux parlements, essentiellement dans ceux de Rennes. Dans son journal, maître Jehan Pichart mentionne qu’en janvier 1597, la trêve de 1596 à peine expirée, des soldats s’en prennent aux paroisses de Bédée et de Pacé, les habitants de cette dernière ayant retiré les barricades qu’ils avaient construites pensant la trêve toujours en cours28. Cela révèle l’état d’esprit d’une population épuisée par l’état de guerre et qui n’aspire qu’à la paix. Peut-on relever dans les arrêts des traces de cet état d’esprit ? Tout d’abord, on peut remarquer que les habitants des campagnes ont bien conscience des périodes de trêve, et qu’ils en profitent pour dénoncer ceux qui contreviennent à son application. En novembre 1597, les habitants de Matignon, Plévenon, Saint-Germain, Saint-Cast et Saint-Pôtan rappellent les clauses de la trêve entrée en vigueur en octobre. Il est en effet interdit de « courir sur les serviteurs du roy ny fere aulcun acte d’hostillite ny lever aucuns deniers que ceulx permis par ladite treffve »29. Quelques jours plus tard, les paroissiens de Noyal-sous-Bazouges se plaignent des levées en nature qu’on leur demande, et le parlement de Rennes interdit alors au capitaine concerné, et à quiconque, de contrevenir aux articles de la trêve, sous peine d’être déclarés « rebelles au roy et perturbateurs du repos publicq »30. On trouve également dans l’arrêt de novembre l’expression d’une exaspération assez forte. Les paroissiens déclarent effectivement espérer « avoir quelque repos et prandre allayne de tant de malheur », mais qu’ils sont « ravaigez » chaque jour de leurs chevaux et autres bêtes de « labeur » par les garnisons du Guildo et de Québriac, « si bien qu’il leur est impossible de tenir un morceau de pain en leurs maisons qu’il ne leur soit ravaige ». Ces quelques mots témoignent à la fois de la pression subie par les ruraux, de leur volonté de retour à la paix, mais aussi de l’espoir que le parlement puisse leur apporter son aide. Mais le peut-il vraiment ? Le 1er décembre 1597, suite à une demande du maréchal de Brissac et à une remontrance du procureur général du roi, le parlement envoie en Basse-Bretagne l’un de ses

27 PICHART, Jehan, « Journal de Jehan Pichart », in MORICE, Hyacinthe (dom), op. cit., col. 1751. 28 Ibid., col. 1751.

29 ADIV, 1B f 86, 27 novembre 1597, n°62. 30 ADIV, 1B f 86, 4 décembre 1597, n°13.

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conseillers, maître Nicollas Audebert, afin d’informer à la fois des abus, malversations et contraventions à la trêve31. Une volonté de réduire les abus existe donc bien, mais cela est-il suffisant ?

En 1597, 24 arrêts signalent des troubles entre le mois d’avril et la fin octobre, période d’interruption de la trêve, mais aussi 10 entre janvier et avril, et 12 d’octobre à décembre. Il est donc nécessaire d’observer la nature des rapports qui se sont établis entre les Bretons et les gens de guerre durant la dernière année du conflit.

I.1.3. Vivre la guerre à la fin de la Ligue

Que signifie vraiment vivre dans la guerre en Bretagne en 1597 et 1598 pour un habitant des campagnes ? Le basculement dans le conflit en 1589 a entraîné une forme de militarisation32 de la société dans le but de faire face aux soldats et de se défendre contre leurs attaques. Cette militarisation implique la mise en place de systèmes de défense comme la fortification des églises, mais aussi la construction de barricades, qui ont aussi pour objectif d’empêcher le séjour des gens de guerre. Un seul cas d’organisation « militaire » d’une paroisse rurale a pu être mis en avant dans les arrêts du parlement de Rennes. En février 1598, les paroissiens de Guichen s’adressent à la Cour, et disent avoir été « sucitez » par un certain Pierres Blouet, tavernier, à se barricader et à prendre les armes en leur paroisse en raison des troubles, Blouet ayant pris le titre de capitaine aux barricades depuis environ deux années33 « ou environ ». Si l’on se fie à la durée rapportée par les habitants, la mise place des barricades remonte à 1596, année de trêve ; ce qui souligne encore une fois que même en période de cessez-le-feu les habitants des campagnes ont une confiance limitée dans les gens de guerre. On ne sait si les habitants de Guichen avaient déjà mis leur paroisse en défense avant d’y être poussés par Blouet, mais cela nous dit en tout cas que la crainte des attaques a pu faire vivre des paroisses rurales en état permanent de guerre, et ce jusqu’à la fin du conflit. De plus, on peut remarquer que l’initiative de la mise en défense semble avoir été prise par le tavernier, ce qui soulève la question d’une éventuelle absence d’autorité supérieure dans la paroisse pendant la Ligue qui aurait laissé la communauté seule face à la nécessité de se

31 ADIV, 1B f 228, 1er décembre 1597, n°1.

32 CASSAN, Michel, « Le village au temps des guerres de religion : l’exemple limousin », in DESPLAT, Ch.

(éd.), Les villageois face à la guerre (XIVe-XVIIIe siècle), Presses Universitaires du Mirail, pp. 143-160. L’auteur

s’interroge sur le rôle politique des villages pendant les guerres de religion et sur la militarisation des campagnes comme réponse à l’état de troubles.

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défendre. Quoi qu’il en soit, ces défenses visent à se protéger contre les incursions des gens de guerre, en plus de la protection théorique demandée au parlement. En effet, en décembre 1597, les habitants des paroisses du Bodéo, Allineuc et La Harmoye demandent aux juges souverains d’interdire aux capitaines des garnisons de Quintin, Rohan, Corlay et autres d’exiger d’eux « aucuns deniers, vivres ny munitions », ni de loger ou séjourner en leurs paroisses, ce que fait la Cour, menaçant même les capitaines concernés de mort34.

Mais vivre dans les campagnes pendant la guerre signifie surtout être, au quotidien, une source de financement et de profit pour les garnisons qui quadrillent le pays. En effet, au- delà des violences, parfois réciproques35, le véritable poids de l’armée, des soldats, sur les campagnes bretonnes est celui de leur simple présence, et de la mise en coupe réglée du plat pays36. Comment se manifeste ces rapports de domination des soldats sur les campagnes ? Tout d’abord, les capitaines de garnisons font part de leurs besoins aux paroisses alentours en essayant de conserver certaines formes de la légalité, notamment en s’adressant aux paysans sous la forme de documents écrits, toujours susceptibles d’être utilisés par des paroissiens se pourvoyant en justice : des mandements ou brevet. En juillet 1597, les paroissiens de Drouges et Visseiche présentent justement au parlement des mandements envoyés par les capitaines Dorival et de La Plesse, qui commandent la garnison de La Guerche en l’absence de Lancelot du Chesnay, sieur de la Voue37. Dans un mandement envoyé aux paroissiens de Drouges, les deux capitaines leur ordonnent de payer la somme de 20 écus « faisant portion de ce qui est requis luy estre delivre pour le present »38 pour la nourriture de leurs soldats. Il s’agit en fait d’une avance sur les soldes qui n’ont pas encore été payées, et les capitaines s’engagent à rembourser, délivrant même une quittance aux paroissiens, signée du nom de Dorival. Il est aussi demandé aux deux paroisses de fournir 10 mines de seigle, et des hommes pour les fortifications. De même en septembre 1597, les paroissiens du Theil, d’Essé, de Martigné-

34 ADIV, 1B f 86, 29 décembre 1597, n°79.

35 Pour l’engagement des communautés rurales et les raisons de leurs prises d’armes voir HAMON, Philippe,

« For Whom the Bell Tolls : Rural Engagement During the French Wars of Religion : The Case of Brittany »,

Journal of Historical Sociology, Vol. 28, n°1, March 2015, pp. 11-25. ID, « Pourquoi nous combattons.

Réflexions sur l’engagement des communautés rurales dans les guerres de la Ligue », in La Ligue et ses

frontières : engagements catholiques à distance du radicalisme à a fin des guerres de Religion, Rennes, Presses

Universitaires de Rennes, 2015, pp. 95-109. Pour un bref exemple précis de violences de paysans contre des soldats voir CROIX, Alain, Moi, Jean Martin, recteur de Plouvellec : curés journalistes, de la Renaissance à la

fin du XVIIe siècle, Rennes, Apogée, 1993, p. 55 : des paysans s’en prennent aux soldats de la garnison de

Tonquédec en juillet 1596.

36 BOIS, Jean-Pierre, « Les villageois et le guerre en France à l’époque moderne », in DESPLAT, Ch. (éd.), Les

villageois face à la guerre (XIVe-XVIIIe siècle), op. cit., p.

37 Lui-même commandant en l’absence du sieur de Lignery. 38 ADIV, 1B f 85, 29 juillet 1597, n°165.

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Ferchaud et de Thourie signalent que le caporal Gascon de la garnison de La Guerche a envoyé un brevet aux habitants du Theil réclamant la somme de 84 écus39. Mais les contribuables sont parfois réticents à obéir à de tels ordres, et les capitaines ont d’autres arguments pour les convaincre.

Au mois d’août, les habitants de Broons dénoncent le capitaine Sigonnière qui leur a ordonné de lui porter au château de Broons, où est la garnison, les deniers de l’imposition de 2 écus 31 sous 9 deniers par feu de fouage, et « aultrement qu’ilz seroient couruz et travaillez tant en leurs personnes que leurs biens »40. La menace est ici un moyen de jouer sur la crainte d’une descente des soldats, mais elle ne s’avère pas suffisante puisque les paroissiens contestent cet ordre et la Cour leur donne raison. Les refus que peuvent opposer les habitants des campagnes aux paiements demandés par les garnisons ou par des gens de guerre de passage sont motivés par au moins trois raisons. La première est que les contribuables n’ont pas toujours les moyens de répondre aux exigences des capitaines. Les paroissiens de Drouges et Visseiche le disent, « il leur est impossible satisfaire » aux demandes. La deuxième tient tout simplement au fait que les paroisses peuvent être assignées au paiement de certaines