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Chapitre 4 : La fin des troubles

II- L’oubli et le pardon

Pour le roi Henri IV, l’instauration d’un climat de paix dans la province passe par la nécessité de replacer ses sujets dans une situation antérieure aux troubles115, que ce soit sur un plan matériel par la restitution des biens saisis pendant la guerre, ou sur un plan politique par le respect des institutions locales et des privilèges. Le souverain doit donc rétablir le lien entre lui et les sujets qui lui avaient fait défaut, et inscrire cette nouvelle relation dans le cadre de sa politique d’oubli et de pardon.

II.1. Le ralliement des villes au roi

En 1594, les villes de Concarneau, Morlaix, Quimper et Saint-Malo se rangent en l’obéissance du roi, de façon plus ou moins spontanée. Concarneau suit son gouverneur, le sieur de Lezonnet qui s’est détaché de la Ligue ; les bourgeois de Saint-Malo décident le

114 ADIV, 1B f 86, 26 novembre 1597, n°61.

115 DE WAELE, Michel, Réconcilier les Français. Henri IV et la fin des troubles de religion (1589-1598),

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ralliement, et Morlaix et Quimper se rendent devant l’avancée de l’armée royale. Le souverain renoue à partir de cette année 1594 en Bretagne et dans le reste du royaume avec les villes ligueuses par des traités, ou édits, de réduction116. Ces traités peuvent faire l’objet d’une double interprétation. D’un côté, ils peuvent être considérés comme de véritables contrats écrits, enregistrés par les Cours souveraines, et basés sur le principe du don et contre-don, par lesquels Henri IV recherche le consensus le plus large possible117. Ainsi, comme lors des entrées royales, la ville s’offre, ou se rend, au roi, qui en échange donne ou confirme à la cité ses privilèges118. Par cet acte, le roi gagne en légitimité en s’inscrivant dans la lignée de ses prédécesseurs119. À Morlaix, il suit l’exemple du roi Charles IX qui y avait établi un corps de ville émancipé des représentants du pouvoir royal par une ordonnance de 1561, même si un début d’organisation municipale avait déjà été mis en place avant l’union du duché au royaume120. D’un autre côté, le choix des mots de « réduction en l’obéissance » du roi vient souligner la soumission des anciens ligueurs, et un rapport de forces inégal, montrant ainsi que le roi n’est pas lié par le contrat121

et qu’il est en mesure d’adapter et de ne pas respecter tout ce qu’il a accordé, comme nous le montrera le cas de Morlaix. Ces questions de pardon et de ralliement de villes ligueuses ne sont pas très présentes dans les arrêts du parlement de 1597 et 1598, mais certaines affaires nous permettent d’observer l’application de quelques- unes des clauses de ces édits de réduction, ainsi que les contestations qu’elles ont pu susciter dans la province.

II.1.1. Effacer les fautes et accorder de nouveaux privilèges

La politique du roi est tout entière inscrite dans l’édit de réduction du duc de Mercœur, et consiste à oublier les fautes passées de ses sujets trompés par les ligueurs. L’article V de l’édit s’arrête particulièrement sur tous les actes de guerre commis et en efface la mémoire. De même, l’article VII décharge les ligueurs de toutes les impositions faites pour financer les

116 Sur ce sujet voir CASSAN, Michel, « La réduction des villes ligueuses à l’obéissance », Nouvelle Revue du

Seizième Siècle, n°22/1, 2004, pp. 159-174.

117 CASSAN, Michel, « Guerres de Religion, pacification, réconciliation », in COLLARD, Franck, COTTRET,

Monique (dir.), Conciliation, réconciliation aux temps médiévaux et modernes, Nanterre, Presses Universitaires de Paris Ouest, 2012, pp. 119-139. Consulté en ligne sur http://books.openedition.org/pupo/2032?lang=fr, voir paragraphe 7.

118 DE WAELE, Michel, Réconcilier les Français, op. cit., p. 192. Aussi ZEMON-DAVIS, Natalie, Essai sur le

don dans la France du XVIe siècle, Paris, Éditions du Seuil, 2003, 268 p., voir p. 141.

119 DE WAELE, Michel, op. cit., p. 230.

120 LE JEAN, Guillaume, Histoire politique et municipale de la ville et de la communauté de Morlaix, depuis les

temps reculés jusqu’à la Révolution française, Morlaix, 1846, 260 p., voir p. 76.

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dépenses de guerre, et les lettres patentes dont les bourgeois de Fougères, l’une des dernières villes à se rendre, demandent l’enregistrement en mai 1598122

n’en sont qu’une application particulière. Les lettres sont datées du mois de mars 1598 et ont été données à Angers, où le texte de l’édit a été rédigé le 21 mars ; nous ne savons donc pas si les habitants de Fougères les ont obtenues avant ou après la publication de l’édit. Mais là n’est pas la question, car l’important est bien pour eux d’obtenir des lettres particulières qui symbolisent le rétablissement de leurs relations avec le roi et leur soumission à son autorité. Cette soumission et le rapport de forces inégal qui en découlent sont parfaitement exprimés par les mots du roi, partiellement retranscrits dans l’avis du parquet attaché à l’arrêt. En effet, en s’adressant à eux en les appelant « ses biens amez les bourgeoys et habitants de sa ville de Foulgeres », le souverain se présente comme le père qui les accueille de nouveau et leur apporte la paix123, tout en leur rappelant que c’est bien par sa « puissance et authorite royal » qu’il les décharge de toutes levées de deniers « tant ordinaires que extraordinaires » faites pour l’entretien des garnisons et des gens de guerre, magasins et fortifications, mais aussi des coupes de bois qu’ils ont pu être amenés faire. Le parlement enregistre les lettres sans en contester le contenu dans son arrêt. Toutefois, il arrive que la Cour souveraine désapprouve certains privilèges accordés par le roi.

En avril 1598, les habitants de Quimperlé ont obtenu du roi, alors à Nantes, des lettres par lesquelles il les « admet et recoit » au nombre de « ses bons, fidelles et affectionnes serviteurs et sujets »124 en sa protection et sauvegarde, ce qui laisse deviner un ralliement tardif, ou en tout cas une officialisation de ralliement tardive. Tous leurs anciens privilèges sont confirmés, et leurs actes faits sans la permission et contre l’autorité du souverain sont oubliés. Mais le roi leur accorde pour prix de leur ralliement le privilège du jeu de papegaut pour « l’harquebuze », le vainqueur étant exempté du devoir d’impôt et billot et de tous autres subsides pendant un an. Or, si la Cour accepte d’enregistrer les lettres elle limite la portée de l’exemption accordée au vainqueur au nombre de « vingtz tonneaulx seullement ». Il ne s’agit ici que d’une simple modification, mais d’autres cas ont suscité une opposition farouche du parlement et même des états. C’est notamment le cas du traité de réduction de la ville de Dinan. Tout d’abord revenons rapidement au début du conflit. Le 3 mars 1590, le parlement

122 ADIV, 1B f 89, 13 mai 1598, n°42.

123 DE WAELE, Michel, Réconcilier les Français, op. cit., p. 200. 124 ADIV, 1B f 89, 19 juin 1598, n°74.

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ligueur enregistre des lettres du duc de Mercœur ordonnant le transfert de l’atelier des monnaies de Rennes vers la ville de Dinan125, la frappe des monnaies étant tout comme l’exercice de la justice ou la levée de l’impôt, un attribut de la souveraineté qu’il faut contrôler. En 1598, au moment de la réduction de Dinan, la conservation de cet atelier des monnaies est un objectif des habitants, qui essaient donc de l’obtenir du roi dans le traité qu’il leur accorde. Au mois d’avril, le procureur des états, maître Bonnabes Biet, exige que lui soient communiquées les lettres patentes en forme d’édit obtenues du roi par les Dinannais, afin de les présenter en l’assemblée des états qui doit se tenir à Rennes en mai126, et d’en

délibérer. Les habitants de Dinan cherchent toutefois à les faire enregistrer au parlement, qui accepte de le faire, mais qui n’approuve par l’article concernant l’établissement de cet atelier127. Les juges considèrent certainement que c’est aux états d’en décider, et la question est susceptible de faire débat, et de rencontrer notamment l’opposition des habitants de Rennes, qui se sont déjà opposés à la délocalisation voulue par le roi, pour le temps des troubles, d’une partie de l’activité de leur atelier à Saint-Malo128

.

Si les privilèges accordés par le roi peuvent effectivement susciter une certaine opposition, se pose également la question de le leur application et du respect des traités.

II.1.2. Le respect du traité : Morlaix et le château du Taureau

Le 25 août 1594, la ville de Morlaix se rend à Henri IV, représenté par le maréchal d’Aumont qui accorde à ses habitants un traité129

. Ainsi, pour répondre au don des Morlaisiens, le deuxième article de ce traité stipule que les habitants sont maintenus dans tous leurs privilèges, mais l’un d’eux en particulier fait l’objet d’un article séparé. En effet, l’article VII du traité concerne ce que l’on pourrait qualifier de privilège militaire des habitants, puisqu’il prévoit que « le fort du Thoreau sera manié selon les antiens usages et privileges de leur ville par tels que bon leur semblera ». Effectivement, les Morlaisiens avait

125 MEUNIER, Pierre, op. cit., p. 223. 126 ADIV, 1B f 88, 18 avril 1598, n°64. 127 ADIV, 1B f 88, 29 avril 1598, n°90.

128 ADIV, 1B f 86, 15 octobre 1597, n°28 et ADIV, 1B f 87, 30 janvier 1598, n°106. Dans les années 1581-1590,

Rennes est le premier centre de frappe monétaire du royaume, et est alimenté en argent par Saint-Malo. C’est certainement pour accélérer la frappe et réduire les risques liés au transport des métaux que le roi décide de transférer une partie de l’activité rennaise à Saint-Malo. Voir PRIOTTI, Jean-Philippe, Dynamiques d’une

mondialisation. Réseaux commerciaux, villes et États dans l’Atlantique franco-hispano-américain (1550-1600),

mémoire d’habilitation non publié, p. 223, note 721. Je remercie Philippe Hamon d’avoir mis ce mémoire à ma disposition.

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le droit de députer chaque année l’un d’entre eux pour commander ce fort et contrôler la baie, permettant ainsi aux habitants de se défendre eux-mêmes. Cependant, ce droit des Morlaisiens a été remis en cause au moment de la reddition de la ville, l’engagement politique de respect du privilège s’étant heurté aux réalités militaires du temps, et nous allons voir que cela n’a pas été sans conséquences sur le rétablissement de la paix. On peut donc se demander si le parlement dispose d’une autorité suffisante en cette fin de conflit pour faire respecter les engagements du souverain, et ainsi rétablir une paix toujours tributaire des circonstances locales.

II.1.2.1. Le château du Taureau et le sieur de Kerangoff

Arrêtons-nous d’abord sur les origines de cette forteresse. En 1521, débute la sixième guerre d’Italie opposant le roi de France François Ier,

et ses alliés, à une coalition regroupant l’empereur Charles Quint, le roi d’Angleterre Henri VIII et les États pontificaux130

. La Bretagne, non encore unie au royaume de France mais en cours d’intégration depuis 1491, est bien entendu principalement menacée du côté de la Manche par les Anglais. Effectivement, en 1522, une flotte anglaise de 108 navires attaque les côtes de la Manche, pillant notamment Cherbourg en Normandie, mais aussi Morlaix. La ville est alors mise à sac et incendiée131. Les habitants prennent alors en main leur propre défense pour éviter qu’un tel saccage ne se répète, et postent des corps-de-garde à l’entrée de la rade, plaçant également des batteries sur les passes de Léon et de Tréguier132. Mais pour une défense plus efficace et moins épuisante pour les habitants il est décidé de faire construire un fort au milieu de la mer, dans la baie, le fort du Taureau. Les travaux commencent en 1542 et s’achèvent véritablement en 1554, le fort étant habitable dès 1544133. Il ne s’agit évidemment pas d’une grande forteresse, compte tenu du lieu où elle est bâtie, et les habitants la décrivent comme faisant seulement « 60 pas en circuit »134. C’est par l’intermédiaire du duc d’Étampes135 que les Morlaisiens obtiennent du roi la garde et l’entretien du fort, le duc s’étant porté garant « qu’il n’en arriverait aucun

130 JOUANNA, Arlette, La France du XVIe siècle (1483-1598), 2e édition corrigée, Paris, Presses universitaires

de France, 1997, p. 180.

131 LÉCUREUX, Bernadette, Histoire de Morlaix des origines à la révolution, éditons du dossen, p.40.

132 DAUMESNIL, Joseph, Histoire de Morlaix, annotée par M. Aymar de Blois, continuée et publiée par M. A.

Allier, Les éditions de la Tout Gile, p. 112.

133 Ibid., p. 114.

134 BARTHÉLEMY, Anatole (de), Choix de documents inédits sur l’histoire de la Ligue en Bretagne publiés et

annotés par Anatole de Barthélemy, membre du Comité des travaux historiques, Nantes, Société des bibliophiles

bretons, 1880, 269 p., voir p. 247.

135 Gouverneur de la province depuis 1543. Voir POCQUET, Barthélemy, Histoire de Bretagne, t. V, La

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inconvénient »136. Bien sûr, une telle construction est coûteuse, et pour en faciliter la mise en œuvre, le dauphin, futur roi Henri II et de fait duc de Bretagne, accorde aux habitants des lettres d’exemption et leur fait don des devoirs d’impôts et billots pour l’entretien de la garnison, leur permettant également de choisir le gouverneur du fort et les soldats137. Le premier capitaine du château du Taureau, nommé en 1544, est Jehan de Kermellec, et il est à noter que s’il a prêté serment au commissaire du roi à Morlaix, il l’a d’abord prêté aux habitants, soulignant ainsi la prééminence de ces derniers138. Enfin, à partir de 1552, la garnison composée du capitaine et de 30 hommes est complétée par un lieutenant, un sous- lieutenant, un portier et trois dogues, les gages s’élevant alors à 1744 livres 16 sous par an139

. Mais qui est l’homme en charge du gouvernement du fort au moment où la ville de Morlaix se rend au roi en août 1594 ? Il s’agit de Guillaume du Plessis, sieur de Kerangoff, un homme impliqué depuis le début du conflit dans les affaires de la ville. En effet, il est membre de la chambre du conseil de la Sainte-Union de Morlaix, et apparaît sur la liste de ceux qui « sont deputtés par le corps de la ville pour de meshuy deliberer et ordonner sur les affaires de la ville »140 le 27 septembre 1589. Il occupe même en 1593, et pour une année, la fonction de procureur141, par laquelle il représente la communauté et gère les affaires de la cité. C’est en fait grâce à cette fonction qu’il se trouve l’année suivante à la tête de la forteresse du Taureau. En 1564, un changement intervient dans l’organisation du commandement du fort, puisque les habitants demandent que soit choisi pour capitaine de la forteresse le procureur de ville sortant, et ce pour une année142, alors que les premiers capitaines étaient parfois restés plusieurs années en charge. Le premier d’entre eux, Jehan de Kermellec était resté quatre ans, et ses cinq successeurs entre deux et quatre ans143. Guillaume du Plessis a donc la charge de surveiller la baie et de protéger Morlaix de toute attaque au moment où le maréchal d’Aumont se présente devant la ville. Dans un contexte où l’objectif est de rallier le plus de sujets possibles à la cause du roi, le maréchal d’Aumont adapte à sa manière le privilège de Morlaix sur le fort du Taureau, afin de se concilier son commandant. Si, comme nous l’avons vu, le

136 Ibid., p. 113. 137 Ibid., p. 114.

138 LE JEAN, Guillaume, op. cit., p. 210. 139 Ibid., p. 210.

140 BARTHÉLEMY, Anatole (de), « La chambre du conseil de la Saint-Union de Morlaix. Cayer pour les

affaires de la ville », RHO, t. 1, documents, mai 1885, pp. 37-48, voir p. 39.

141 LE JEAN, Guillaume, op. cit., p. 85. 142 Ibid., p. 211.

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traité de réduction prévoit bien que les habitants disposent du Taureau comme avant la guerre, le maréchal a cependant promis au sieur de Kerangoff le commandement du fort sa vie durant. Cette situation entraîne donc un conflit entre les habitants et le commandant du fort jusqu’à la fin de la guerre, et même au-delà jusqu’en 1604, pour le respect du privilège, mais aussi à cause du comportement et des exactions de Kerangoff.

II.1.2.2. Un retour à la paix troublé

Nous nous retrouvons donc ici en face des contradictions du pouvoir royal qui doit, dans le même temps, respecter ses engagements pour consolider sa relation avec une ville fraîchement ralliée, mais aussi composer avec la réalité du terrain et les ambitions personnelles du sieur de Kerangoff. Revenons sur les raisons de la discorde entre ce dernier et les habitants de Morlaix. Comme nous l’avons dit, le maréchal d’Aumont a fait la promesse au sieur de Kerangoff de lui laisser le commandement du fort du Taureau sa vie durant, et selon les Morlaisiens, il l’a fait « pout tenir ledict du Plessis en devoir craignant qu’il se revoltats »144. En effet, si la ville de Morlaix s’est rendue au mois d’août 1594, la garnison logée dans le château de la ville a résisté plus longtemps, la promesse relevant donc d’un choix tactique visant à éviter une attaque de Kerangoff pendant le siège du château. Fort de cette promesse, le commandant du Taureau parvient à obtenir des lettres patentes du roi « par surprise »145 le 20 septembre 1595. Mais que disent ces lettres mentionnées dans un arrêt du 5 décembre 1596 ? Le roi « commect et deputte »146 Guillaume du Plessis sous l’autorité de son lieutenant général en Bretagne, le sieur de Saint-Luc, et du sieur de Sourdéac, pour commander « sa vye durant », et pour son service, le château du Taureau et les gens de guerre qui y sont en garnison. Ces lettres entrent totalement en contradiction avec l’article VII du traité de réduction de la ville de Morlaix, accordé par le roi le 20 avril 1595 et vérifié au parlement le 23 octobre de la même année. Cependant, le roi est bien conscient de cette contradiction puisque ses lettres précisent que la commission, par définition révocable, est accordée sans qu’elle ne « puisse que pour ceste foys seullement deroger ne prejudicier aux privilleges des habitans de la ville de Morlaix, ains qu’ilz en jouissent cy apres comme ilz ont faict par le passe ». Il s’agit donc d’un compromis destiné à consolider l’autorité royale dans la région par le contrôle d’une place stratégique, à un moment où la Ligue n’est pas encore

144 BARTHÉLEMY, Anatole (de), Documents inédits…, op. cit., p. 247. 145 Ibid., p. 248.

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battue, et ce en récompensant Kerangoff pour son ralliement. On peut effectivement considérer que le roi trouve un intérêt dans ce maintien du commandant du fort, car par cette récompense il établit un lien personnel avec lui, et de cette manière détache le fort de la ville de Morlaix, et le rattache à son propre pouvoir, tout en continuant à le faire entretenir par la ville. Le roi marque alors symboliquement sa présence face à une ville anciennement rebelle, et signale aux habitants que leurs privilèges dépendent de son bon vouloir.

Cependant, les Morlaisiens ne se soumettent pas et entendent bien faire respecter le traité de réduction. Ils engagent alors une bataille judiciaire au parlement dont nous avons une description succincte dans l’arrêt déjà cité du 5 décembre 1596. Dans un premier temps, les bourgeois de Morlaix déposent une requête le 16 novembre 1595, par laquelle ils demandent que Guillaume du Plessis soit condamné à leur remettre le fort du Taureau qu’il détient « au mepris desdits privilleges »147, et obtiennent même un arrêt le 8 octobre 1596148, dans lequel des accusations sont lancées contre lui par Yves de Leau, sieur de Kerbabu, et Yves de