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III.1 Contexte-Description de l’édifice

III.1.2 Situation géographique et risque sismique

a Localisation

Le village de Boudin, en figure III.8, est le plus élevé des nombreux hameaux qui composent la commune de Beaufort. Il se situe à mi-chemin entre Arêches à l’aval et le Col du Pré à l’amont sur une pente si raide que l’on a coutume de dire que les chiens doivent s’asseoir pour aboyer et qu’il faut ferrer les poules... Par ailleurs, ce village remarquable est classé "site protégé " par les Beaux Arts depuis 1943 et certains de ses chalets sont inscrits à l’inventaire du patrimoine. Lorsque depuis l’aval on observe le village, on s’aperçoit qu’il est installé sur une pente à forte déclivité entre 1230 m et 1380 m. Les chalets sont groupés et étagés en espaliers horizontaux, ils profitent tous du soleil et d’une belle vue sur la vallée. On compte environ cinq à six rangées de maisons. Le village est limité dans son extension horizontale par un couloir d’avalanches côté ouest, cela expliquerait sa forme générale étirée du bas vers le haut.

b Risque sismique

Nous n’avons pas d’accélérogramme enregistré sur place lors d’un événement sismique. En revanche, la commune dont fait partie Boudin ainsi que toutes les communes limitrophes sont classées en zones 4. Ceci est effectivement corrélé avec les cartes et les coupes géologiques de cette partie de la vallée et du massif. Comme on peut le voir sur les figures III.4, III.5 etIII.6, cette partie du Beaufortain est une entité extrêmement composite, révélant une histoire géologique complexe, avec une multitude de couches de terrain qui s’interpénètrent, fruits de déformations tectoniques répétées. On peut se reporter à la figure I.18 pour une vision d’ensemble des failles en présence répertoriées.

Fig. III.4 – Coupe structurale du Beaufortain au nord d’Arêches, [Gid77]

Le chapelle étudiée est donc dans un site soumis à un aléa réel. Le Haut-Faucigny et ses églises dont les clochers ont été détruits lors du séisme de 1905 (Argentières, Vallorcine) ne sont pas loin. C’est le même massif.

Fig. III.5 – Coupe structurale du Beaufortain à l’est d’Arêches, [Gid77]

Fig. III.6 – Coupe structurale du Beaufortain au sud d’Arêches, [Gid77]

c Histoire et Richesse de la chapelle Histoire

Autrefois, les hameaux du Beaufortain vivaient isolés surtout en hiver. La vie s’organisait alors autour de plusieurs pôles qu’étaient l’abreuvoir, le four à pain, l’école et la chapelle. Du fait de l’éloignement de l’église paroissiale d’Arêches, la chapelle Saint Jacques de Boudin servait surtout aux prières des habitants dont la foi était grande. Comme dans chaque hameau, les habitants ont participé, fournissant l’argent, matériaux et force de travail, à la construction et la décoration de cette chapelle. Cet état de fait était favorisé, comme nous l’avons vu, par une certaine aisance des habitants. Érigée en 1630, la chapelle de Boudin en a sans doute remplacé une plus ancienne en bois comme il en existait dans tous les hameaux y compris Arêches. Elle a été rénovée en 1867 après la révolution et en 1896, comme on peut le lire gravé sur la première dalle à l’entrée de la chapelle .

La décoration en trompe l’œil de la façade est typique du XIX ème siècle et date de la seconde rénovation. A noter, sur la façade, la présence d’un caisson en bois contenant Notre Dame de la Salette, car la Vierge serait apparue le 19 septembre 1846 à deux enfants du hameau. Le clocher est de type baroque avec sa flèche polygonale à double bulbe signe de la prospérité des habitants de l’époque. Il a été rénové en 1867 lors de la remise en état après la Révolution, comme l’atteste la date dans la charpente. Ce type de clocher à bulbe est très fréquent en Savoie, amené par les architectes de l’école italienne de Val Sesia, eux-mêmes influencés par

l’école de Ravenne qui elle-même a été influencée par l’architecture byzantine. Le bulbe serait alors l’adaptation de la coupole aux pays de neige. On le retrouve en effet aussi bien dans les Alpes qu’en Russie.

A l’arrière de la chapelle, on peut voir une niche sous le toit, qui servait probablement à entreposer les cercueils en hiver lorsqu’on ne pouvait pas les descendre à Arêches par des chemins rendus impraticables par la neige et que l’on ne pouvait pas creuser une tombe dans la terre gelée.

La gestion de la chapelle était assurée par le procureur du village, l’un des habitants du village. Il était choisi chaque fois dans une famille différente et élu pour trois ans par les chefs de famille. Chargé des affaires communes : l’eau, l’entretien des chemins, la chapelle, le four, l’école, il décidait des travaux à entreprendre, répartissait les tâches entre les habitants et gérait les fonds disponibles. A partir de 1792, la fonction de procureur a été remplacée par celle de conseiller municipal. Chaque hameau se devait d’avoir son conseiller pour défendre ses intérêts.

Décoration et richesses

La façade est enduite à la chaux et ornée de pierre d’angle en ocre jaune, de frises géo- métriques bordant la toiture et d’une partition noire surlignant l’inscription « Saint Jacques priez pour nous ». Les peintures murales sur les voûtes reproduisent les motifs les plus anciens découverts lors des travaux. Ce décor est l’œuvre d’un artisan Beaufortain, dont on n’a pas retrouvé la trace. Aux murs sont accrochées les 14 stations du Chemin de Croix du Christ en images d’Épinal. L’ameublement de la chapelle est sommaire, les deux rangées de bancs sont accompagnées de deux armoires, l’une près de la porte d’entrée et l’autre à droite de l’autel qui fait office de sacristie. Pour les froides journées d’hiver, un ancien poêle à bois en fonte se trouve au fond de la chapelle.

Comme dans d’autres chapelles de la région, l’influence baroque, remarquable au nombre de fenêtres qui éclairent l’édifice, est surtout sensible dans le retable qui décore le chœur et semble presque trop somptueux pour une chapelle si modeste. On y retrouve des volutes dorées, le mélange de ligne courbes et brisées, les têtes d’anges, ainsi que des colonnes torses, et un dais et un soleil au dessus du retable. Les couleurs sont vives, les ors fréquents. Le Christ, la Vierge Marie, les Saints sont largement représentés. Ils sont intercesseurs auprès de Dieu.

Le tabernacle de bois peint et doré date de la restauration de 1867 ou de 1896. Il représente une église à deux clochers ou même une ville fortifiée, sans doute la Jérusalem céleste. Deux statues en plâtre doré se trouvent au dessus du tabernacle : l’une de la Vierge Marie, l’autre de Saint Joseph. Elles ne sont plus en bois comme par le passé mais en plâtre, matériau moins noble mais peu prisé des pilleurs d’églises. Le tabernacle actuel masque le bas du tableau central. Ce tableau très ancien a pour thème la Vierge et l’Enfant. Ils sont entourés de deux saints dont on ne voit que la partie haute : Saint Jacques à gauche et Saint Christophe à droite. Saint Jacques de Tarentaise est le Saint Patron de la chapelle. Connu également sous le nom de St Jacques d’Assyrie, il a été canonisé sous le nom de St Jacques de Tarentaise car il a été le premier évêque de Tarentaise. Saint Christophe est un saint légendaire, très apprécié en Beaufortain. L’histoire dit qu’il a un jour fait traverser une rivière à un enfant, alors que celui-ci devenait de plus en plus lourd sur ses épaules : c’était le Christ qui portait toutes les misères du monde.