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CHAPITRE I : Introduction

CHAPITRE 2 : Revue de littérature

2.6 Contexte Guinéen

2.6.4 Situation de la femme, travail du sexe et VIH

Les femmes constituent un groupe particulièrement vulnérable sur le plan sanitaire dans cette région du monde. En effet, comme dans la majorité des pays d’Afrique de l’Ouest, le processus de construction du statut de la femme et ses résultats entraînent des inégalités très grandes dans l’accès aux droits sociaux, à la scolarisation et aux activités génératrices de revenus. Ainsi en Guinée, seules 22% des femmes sont alphabétisées comparativement à 41% des hommes (Comité National de Lutte contre le SIDA, 2006). Si le droit moderne offre une place non négligeable aux femmes en Guinée, le droit coutumier continue toutefois de favoriser la concentration du pouvoir décisionnel entre les mains des hommes.

Ces éléments viennent influencer négativement la capacité des femmes à prendre les mesures adéquates de protection de leur santé et les rendent très vulnérables à l’infection. Par exemple, même si une femme pense que son conjoint a des relations extraconjugales, il lui sera difficile d’exiger l’utilisation du préservatif. De plus, les femmes sont moins rejointes, et ce, de façon moins efficace, par les campagnes de prévention en général, et particulièrement, celles qui ont trait au VIH/SIDA et aux IST. Il s’ensuit une vulnérabilité sociale qui, combinée à leur vulnérabilité biologique à l’infection (Wingood, Scd et al., 2000), les rend particulièrement à risque d’infection. Le rapport d’ONUSIDA de 2005 attirait d’ailleurs l’attention sur la féminisation croissante de l’épidémie et sur la hausse de la prévalence chez les femmes en Afrique subsaharienne (UNAIDS, 2005). La Guinée n’échappe pas à cette tendance puisque la prévalence du VIH chez les femmes entre 15 et 49 ans était de 1,9% soit plus du double de celle des hommes (0,9%) (Comité National de Lutte contre le SIDA, 2006). Dans la capitale, Conakry, le rapport de prévalence femmes /hommes dépassait 5 (3,4 versus 0,6%) (Comité National de Lutte contre le SIDA, 2006). Celui de la prévalence nationale des IST dans les douze derniers mois chez les personnes âgées de 15 à 49 ans était similaire : 19,5% de femmes déclaraient avoir souffert d’IST contre 3,2% des hommes soit un ratio de 6 (Comité National de Lutte contre le SIDA, 2006). Par ailleurs, la Guinée est un des pays où le taux de dépistage du VIH est le plus faible en Afrique de l’Ouest malgré la mise en service de nombreux centres de dépistage au cours des dernières années. Ainsi, la prévalence du dépistage du VIH à vie en Guinée en 2005 avec prise des résultats est de 6,0% des hommes et 2,1% chez les femmes (The World Bank, 2008).

Par ailleurs, ces conditions sociales, économiques et sanitaires difficiles peuvent mener certaines femmes à explorer d’autres voies pour accéder à des ressources financières minimales ou complémentaires, comme la prostitution. Cette dernière peut devenir une activité d’appoint, sans pour autant que les femmes ou leur entourage reconnaissent cette pratique comme étant de la prostitution, ou encore, que cela devienne un métier en soi. La

pratique de relations sexuelles en échange de faveurs ou d’argent est un enjeu important dans les pays en développement où elle devient un moyen de survie qui perpétue le manque de contrôle des femmes sur leur situation (David, 1997; Luke, 2005).

Si la prostitution n’est pas légale en Guinée, elle y est tolérée. En effet, la loi N°98/036 du 31 décembre 1998 du code pénal ne définit pas la prostitution et ne contient aucune disposition interdisant ou incriminant le fait de pratiquer le travail du sexe (Fraternité Médicale de Guinée and Association des Femmes Juristes de Guinée, 2007). Cependant, le proxénétisme, l’incitation des mineurs à la débauche et le racolage constituent des infractions au Code pénal selon les articles de loi précités. Au niveau social, la prostitution est cependant clairement réprouvée dans ce pays très conservateur et à forte majorité musulmane et les femmes TS sont victimes de stigmatisation (Mantoura, Fournier et al., 2003).

On retrouve en Guinée deux principales formes de travail du sexe: une forme clandestine, la plus fréquente, qui se pratique dans des bars avec ou sans chambres et, plus rarement, une forme affichée dans des maisons closes. Les femmes TS en Guinée constituent une population difficile d’accès qui œuvre dans un contexte d’extrême précarité, souvent sous la coupe de gérants de sites prostitutionnels qui les exploitent en pratiquant des taux prohibitifs de locations de chambres ou les protègent dans certains cas des mauvais traitements des clients qui y sont fréquents (Mantoura, Fournier et al., 2003). Des ONG se sont spécialisées dans le travail de proximité auprès de cette population pour leur habilitation en général et plus spécifiquement pour la prévention du VIH et des IST.

Si plusieurs groupes sont particulièrement à risque pour l’infection en Guinée comme le rapporte le tableau I, les femmes TS démontrent la plus forte prévalence soit 34,4% selon les données les plus récentes (The World Bank, 2008). Les femmes TS affichées auraient une plus forte prévalence du VIH (données non publiées).

Tableau I: Évolution de la prévalence du VIH en Guinée dans différents groupes

Groupes Cibles Année 1996 a Année 2001 b Année 2007 c Femmes enceintes 1,5 % (n = 1850) 2,8 % (n = 3489) -

Donneurs de sang 2,2 % (n = 7322) 1,8 % -

Transporteurs routiers 5,0 % (n = 250) 7,3 % (n = 316) 5,5% Travailleuses du Sexe 32,0 % (n = 140; 1994) 42,0 % (n = 340) 34,4%

Consultants pour IST 4,0 % (n = 800) - -

Source: a) PNLS, "Programme annuel opérationnel 2000 du PNLS", février 2000 (pour l'année 1999), b) Enquête nationale sur la séroprévalence du VIH/SIDA en Guinée et c) Rapport de la banque mondiale sur l’épidémie en Afrique de l’Ouest (The World Bank, 2008) .

Plusieurs interventions ont ainsi été menées en Guinée pour prévenir l’infection au VIH chez les femmes TS.