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La situation d‟énonciation est constituée par l‟ensemble des paramètres qui permettent la communication : le locuteur, l‟allocutaire, la non-personne, le contexte et l‟énoncé. Nous allons procéder, dans cette partie de notre travail, à une présentation des paramètres de l‟énonciation, nous tenterons également de les mettre en relation avec le contenu des programmes et des manuels scolaires du secondaire.

7.1. Le locuteur

Dans le domaine de la linguistique de l‟énonciation différents termes sont utilisés pour désigner le protagoniste – émetteur du message : locuteur, sujet parlant, destinateur, énonciateur. Les plus fréquemment utilisés sont locuteur et énonciateur. Le locuteur se définit comme le sujet parlant effectif responsable de la production matérielle de l‟énoncé. Il peut être à l‟origine de l‟énonciation, comme il peut parler pour une autre personne, il ne fait alors que rapporter ses paroles. Il peut aussi être « une personne réelle ou fictive, un groupe quelconque plus ou moins défini, la sagesse des nations, l’opinion publique, le "on". » (Baylon & Mignot, 1994: 91). Ce concept fait intervenir obligatoirement un

allocutaire (Fuchs & Le Goffic, 1985: 144). Le locuteur a l‟initiative de la parole, ce qui lui permet d‟orienter le déroulement du dialogue (Baylon, Fabre & Mignot 2001: 169). L‟énonciateur quant à lui, est défini comme celui à qui est attribuée l‟énonciation de l‟énoncé (Fuchs& Le Goffic, 1985: 144), celui qui est entièrement responsable du message (Baylon& Mignot, 1994: 91). L‟opposition locuteur/ énonciateur démontre que il y a une part de nos propos dont nous ne sommes pas l‟énonciateur. (Fuchs & Le Goffic, 1985: 145). Le locuteur, énonciateur ou non, dès qu‟il se pose comme sujet parlant, « il

implante l’autre en face de lui. » (Riegel, 1994: 575) et le pose comme allocutaire.

Le locuteur adopte vis-à-vis de son énoncé une attitude déterminée par laquelle il s‟y inscrit ou au contraire s‟en évade complétement. Le locuteur entretiens des rapports avec son énoncé et avec son interlocuteur, exprimés à l‟aide des concepts suivants :

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-La distance qui définit l‟attitude du locuteur face à son énoncé. Le locuteur peut assumer entièrement le contenu de son énoncé.

-La modalisation dénote la manière dont le locuteur situe son énoncé par rapport à la vérité, la fausseté, la certitude, c‟est la composante du procès d‟énonciation permettant d‟estimer le degré d‟adhésion du locuteur à son énoncé.

-La transparence et l‟opacité se définissent par le rapport que le récepteur entretient avec l‟énoncé.

-La tension se rapporte à la relation qui s'établie entre les deux interlocuteurs, l‟énoncé étant le médiateur d‟un désir du locuteur, une tentative de saisir l‟allocutaire, de lui imposer un certain comportement, de provoquer une action de sa part, etc.

-La thématisation, syntaxique ou intonative, permet au locuteur de mettre en valeur l‟un ou l‟autre segment de la phrase.

Dans les manuels scolaires du secondaire, nous avons constaté que les termes les plus fréquemment utilisés pour désigner la personne qui parle sont ceux d‟énonciateur, destinateur, de scripteur et d‟auteur, nous avons trouvé également le terme d‟interlocuteurs.

7.2. L’allocutaire

Sur le plan déclaratif, Benveniste reconnaît l‟existence et l‟importance du destinataire, mais il lui attribue un rôle complètement passif. L‟existence du destinataire n‟est possible que « par la médiation du locuteur. » (Eluerd, 1985: 73).

« Dès qu’il se déclare locuteur et assume la langue, il implante l’autre en face de lui, quel que soit le degré de présence qu’il attribue à cet autre. Toute énonciation est, explicite ou implicite, une allocution, elle postule un allocutaire. » (Benveniste, 1970 : 14).

Cela ne suffit pas pour mettre en évidence le rôle de l‟allocutaire qui doit être considéré comme un partenaire à part entière, y compris en situation de réception. Cela veut dire que même si le locuteur organise ses paroles selon ses objectifs et sa propre stratégie, il sera obligé d‟adapter son discours, sa stratégie et les moyens mis à l‟œuvre.

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Comme dans le cas du locuteur, les différents termes employés pour désigner l‟allocutaire ne correspondent pas à la même réalité et ne représentent pas le même type de relation entre les deux interlocuteurs. Il s‟agit des termes: destinataire- allocutaire- récepteur énonciataire, co-énonciateur. Le terme de Co-énonciateur est utilisé pour mettre en évidence la position d‟égalité de l‟autre. (Maingueneau, 2003: 2).

Pour l‟allocutaire nous avons constaté que les termes employés dans les manuels scolaires sont ceux de destinataire et d‟interlocuteur.

7.3. La non – personne

Si le locuteur et l‟allocutaire forment la « sphère de la locution », cette locution renvoie à un univers extérieur celui de la non-personne qui correspond à tous les objets dont parlent « je » et « tu ». La non-personne peut s‟identifier au délocuté, ce dont les interlocuteurs parlent et dans ce cas, la non-personne désigne aussi bien des objets, des états de choses que des personnes.

7.4. Le contexte

Il s‟agit de l‟ensemble des conditions sociales et culturelles dans lesquelles se situe un énoncé : les partenaires de l‟échange verbal, l‟espace dans lequel cet échange a lieu et le temps de son déroulement. A cela il faut ajouter les données communes aux deux protagonistes de l‟échange verbal sur la situation culturelle et psychologiques, les expériences et les connaissances de chacun des deux : « les caractéristiques psychologiques, sociales, institutionnelles des protagonistes, l’expérience vécue dans laquelle l’énonciation est censée venir s’insérer. » (Fuchs & Le Goffic, 1985: 150-151), les différents types de

compétences (linguistiques, paralinguistiques, culturels, idéologiques…) des deux protagonistes. En un mot, tous les paramètres avec lesquels Kerbrat-Orecchioni a complété le schéma de la communication de Jakobson.

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Le contexte a un rôle important dans l‟interprétation du message, il permet à l‟allocutaire d‟identifier le référent ou les référents du message. On considère que le contexte « construit l’interprétation d’un énoncé élémentaire ou d’un texte à travers des

instructions extraites des divers plans du contexte ». (Maingueneau, 2003: 5).

Nous retrouvons cette définition du contexte dans les programmes du secondaire où on peut lire :

« en interrogeant ces traces d’énonciation, en se posant des questions sur : le contexte d’énonciation (lieu, temps de l’allocution), les modalités d’inscription du locuteur et de l’allocutaire dans l’objet texte […] l’information contenu dans un texte sera appréhendée à un niveau de réflexion qui fera prendre conscience au fur et à mesure à l’apprenant qu’un locuteur est déterminé psychologiquement, idéologiquement, culturellement comme il est lui-même » (Programme de 1ère A.S : 28).

On insiste dans cette partie du programme sur les différentes compétences à intégrer afin d‟acquérir la compétence de communication : compétence linguistique, textuelle, sémantico-sémantique, sociale, pragmatique, situationnelle. Nous remarquons, à ce niveau, l‟influence de la théorie de Kerbrat- Orecchioni à travers les différents paramètres qu‟elle a utilisés pour compléter et enrichir le schéma de la communication.

7.5. L’énoncé

L‟étude de l‟énonciation se présente comme une problématique des traces dans l‟énoncé de l‟acte de production, cet énoncé représente « la partie directement saisissable de l’acte de communication […] il comporte les traces de l’opération qui lui a donné naissance, l’énonciation. » (Baylon & Mignot, 1994: 90), il se caractérise par une double dimension,

d‟un côté, il transmet un contenu et d‟un autre côté, il décrit le procès d‟énonciation : « l’énoncé réfléchit sa propre énonciation » (Maingueneau, 2003 : 4); tout comme l‟énonciation, l‟énoncé se caractérise par un double aspect, général et particulier : « Le contenu véhiculé par un énoncé reste stable au-delà de la multiplicité des événements énonciatifs

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qui le rendent possible. » (Maingueneau, 1981: 6). Il s‟agit dans ce cas de « l’énoncé-type »

qui transmet toujours la même information, il a un contenu stable; en fonction des différents actes d‟énonciation qui peuvent le prendre en charge, différentes du point de vue des protagonistes et des conditions spatio-temporelles, l‟énoncé-type, tout en conservant son contenu, change de sens. On parle dans ce cas « d’énoncé occurrence ». (Maingueneau, 1981: 6).

Dans les programmes du secondaire et au niveau du glossaire on propose aux enseignants une définition de l‟énoncé :

« L’énoncé est le produit de l’acte d’énonciation. Nous l’employons dans un sens restreint : partie de texte sous-tendue par une intention de communication » (Programme de 1ère A.S : 50).

Nous constatons là aussi une relation étroite entre les travaux des linguistes et les définitions proposées dans les programmes et les manuels scolaires.