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2 Modélisation de la diffusion par dyna- dyna-mique moléculaire classique

2.2. Étude bibliographique des travaux effectués sur les glaces

2.2.1 Simulation de glaces

Différentes variétés allotropiques de glaces d’eau ont été étudiées en dynamique moléculaire classique comme calculs de référence pour comparer des modèles d’eau [52][53][54][74]. De même, des études de dynamique moléculaire ab initio ont été entreprises pour traiter des différentes propriétés structurelles et dynamiques des glaces cristallines [75].

En comparaison, assez peu d’études théoriques traitent des glaces amorphes (voir aucune aux basses températures qui nous intéressent) ; nous donnons dans la suite quelques exemples.

Mise en évidence de différentes glaces amorphes

Plusieurs types de glaces amorphes ont été mises en évidence expérimentalement. Elles sont résumées par Loerting et al. [18]. Ces glaces amorphes sont séparées en trois catégories en fonction de leur densité : les glaces amorphes basse densité low

density amorphous icesLDA, les glaces amorphes haute et très haute densité, high

density amorphous icesHDA et very-high density amorphous ices VHDA.

Par ailleurs les observations astrophysiques révèlent que les glaces observées dans l’espace qu’elles soient cométaires ou sur des grains, sont amorphes et de basse densité soit LDA [35]. Aussi, nous limitons notre présentation de la bibliographie aux glaces amorphes.

Les glaces amorphes basses densité LDA Expérimentalement, plusieurs types de

glaces LDA sont obtenues selon leur mode opératoire de synthèse. La glace ASW (amorphous solid water), est formée par déposition de vapeur d’eau. La glace HGW (hyperquenched glassy water) est obtenue par refroidissement lent de gouttelettes d’eau. Les glaces LDA-I et LDA-II correspondent à deux types de glaces LDA obtenues 39

à basses pressions respectivement par chauffage des glaces HDA au dessus de 130 K, et décompression de glaces VHDA à 140 K.

Les glaces LDA ont été étudiées expérimentalement par Bowron et al. [76] qui en ont décrit les caractéristiques que nous avons utilisées pour contraindre nos dynamiques. Bowron et al. donnent pour les glaces LDA une densité de 0.94 à 80 K qui est inter-médiaire entre la densité de la glace cristalline Ih (0.9) et l’eau liquide de densité 1. Les auteurs donnent également les fonctions de distribution radiale, avec lesquelles nous avons comparé nos résultats théoriques pour valider nos structures. Ce type de comparaison a également été effectuée par English et al. [77] qui ont simulé des glaces amorphes hautes et basses densité et calculé des facteurs de structure statiques et dy-namiques pour étudier la propagation de phonons dans ces glaces et leur conduction thermique.

Transitions entre les variétés allotropiques des glaces

Les transitions entre des phases cristallines et les phases amorphes ou entre différentes phases amorphes des glaces ont été modélisées. Par exemple, les transitions entre des phases cristallines et amorphes ont aussi été étudiées afin d’affiner la température de transition vitreuse et l’influence de la pression. English et al. [78] montrent par exemple que la transition HDA-Ih (glace cristalline hexagonale) est réversible ; ainsi, la glace cristalline s’amorphise sous l’effet d’une large pression, et réciproquement, une glace amorphe cristallise sous l’action d’une pression négative.

La transition sous chauffage entre la glace HDA et l’eau liquide a également été étudiée. Seidl et al. [79] calculent ainsi une température de transition vitreuse entre la glace HDA et l’eau liquide pour différents modèles d’eau.

Les transitions entre les différentes phases amorphes solides ont donné lieu à beau-coup d’études : certaines de ces transitions sont montrées dans la figure 2.7 ci-dessous extraite de Loerting et al. [18].

Ainsi, en fonction de la température et de la pression, différentes transitions sont possibles. Tse et al. [80] montrent cependant que ces différentes phases simulées ne sont pas toutes thermodynamiquement stables et que leur structure dépend donc fortement de leur relaxation et de leur mécanisme de formation.

2.2. Étude bibliographique des travaux effectués sur les glaces

FIGURE2.7 – Surfaces d’énergie potentielle des glaces amorphes à différentes pres-sions. les glaces LDA, HDA et VHDA sont dans le cas présent des états stables [18].

Propriétés des glaces amorphes

Différentes propriétés peuvent être calculées pour les glaces, ce qui permet de tester la validité de la modélisation des structures de ces glaces : les densités, les températures de fusion ou du point critique, la forme du diagramme de phases, les constantes diélectriques ou encore la tension de surface [81] [82].

Des propriétés structurales, comme des distances caractéristiques intermoléculaires [83], ou dynamiques, comme des coefficients de diffusion [75][84] ou la viscosité [73][85], peuvent aussi être calculées pour les glaces.

Propriétés de l’eau surfondue

Les glaces amorphes à haute température donnent naturellement une structure proche de l’eau surfondue qui a été modélisée par dynamique moléculaire [86] [87], pour en déduire différentes propriétés comme la cinétique de transition vitreuse [88] ou des spectres infra-rouge [89].

2.2.2 Diffusion

Dans cette section, nous présentons différentes études théoriques ayant trait à la diffusion dans l’eau ou dans des glaces. En premier lieu, les différents mécanismes de diffusion moléculaire sont présentés. Ensuite, quelques résultats issus de la littérature 41

seront mentionnés.

Mécanisme de diffusion

La diffusion dans des solides peut être décrite par deux mécanismes principaux que sont le mécanisme interstitiel et le mécanisme lacunaire.

Mécanisme Interstitiel Ce mécanisme considère que l’espèce diffuse dans un

inter-stice du réseau environnant, sautant d’un interinter-stice à l’autre. Cette diffusion par une série de sauts successifs est représentée sur le schéma de la figure 2.8.

FIGURE2.8 – Schéma représentant le mécanisme de diffusion interstitielle

Ce mécanisme concerne en général la diffusion de petites espèces, typiquement des impuretés, pouvant se trouver dans les interstices d’un réseau hôte. Il est supposé être plutôt rapide en raison des faibles forces d’interactions intermoléculaires entre le réseau et l’espèce diffusante. Ce mécanisme est proposé par Onsager et al. [90] comme celui responsable de l’auto-diffusion dans des glaces.

Mécanisme Lacunaire Ce mécanisme considère un réseau dans lequel des

imper-fections ont généré des lacunes, à savoir des sites inoccupés dans le réseau. Ces lacunes, induisent le mouvement des molécules voisines qui peuvent alors s’insérer dans cette lacune comme cela est schématisé sur la figure 2.9.

Ce mécanisme permet donc un mouvement des molécules de proche en proche via les défauts du réseau environnant. Cependant, contrairement au cas de la diffusion interstitielle, il nécessite de rompre des liaisons intermoléculaires fortes entre la

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FIGURE2.9 – Schéma représentant le mécanisme de diffusion lacunaire

molécule diffusante et le réseau, ce qui le rend plus lent. Ce mécanisme a été étudié par Gurikov et al [91] qui met en évidence les différentes géométries des lacunes dans la glace et déduit des coefficients de diffusion en fonction de ces géométries.

Diffusion dans l’eau liquide

La diffusion de petites molécules dans l’eau a été étudiée dans différents cas et par plusieurs méthodes.

En premier lieu, la solvatation de molécules dans l’eau a été étudiée. Citons à titre d’exemple une étude traitant de la diffusion d’ions d’actinides dans l’eau [92] et qui présente de nouveaux champs de forces dérivés de calculs ab initio pour traiter ces ions d’éléments lourds ; cette étude illustre ainsi complètement l’importance du choix et de la paramétrisation du champ de forces pour étudier des propriétés dynamiques comme la diffusion.

Les études de diffusion moléculaire dans des solutions complexes sont nombreuses. Citons par exemple l’étude de l’influence des mélanges binaires de solvants simples sur l’auto-diffusion par rapport aux solvants purs [55] ou encore la diffusion de petites molécules comme le dioxyde de carbone dans des solutions aqueuses ioniques [93]. La diffusion du CO2 dans des modèles de vins de champagne [72] a été étudiée très récemment afin de contraindre la vitesse de formation des bulles de gaz. La dépendance isotopique du processus de diffusion a aussi été mise en évidence pour le dioxyde de carbone dissous dans l’eau ainsi que pour les espèces en découlant comme

HCO

3 et CO32−[94] montrant que la masse moléculaire peut impacter la diffusion en induisant un freinage.

Enfin, les méthodes de la dynamique moléculaire ab initio (qui seront détaillées dans la suite de cette thèse dans le chapitre 8) ont aussi été utilisées pour étudier des phénomènes influençant la diffusion, comme le transport de protons [95] ou la dynamique des liaisons hydrogène [96].

Auto-diffusion dans des glaces

L’auto-diffusion est par définition la diffusion du solvant dans lui-même, à savoir dans notre cas, la diffusion des molécules d’eau dans les glaces.

L’auto-diffusion de l’eau en surface de glaces cristallines a été récemment modélisée par Gladich et al. [97], qui ont utilisé des simulations de dynamique moléculaire clas-sique pour étudier le mouvement de l’eau dans plusieurs directions caractéristiques de la surface de la glace pour des températures proches du point de fusion de l’eau. Les auteurs montrent que cette diffusion est anisotrope à basse température, mais devient isotrope à des températures supérieures à 240 K à mesure que la surface de la glace s’amorphise vers un état liquide.

Ikeda-Fukuzawa et al. [21], ont utilisé des trajectoires de dynamique moléculaire classique pour étudier la diffusion interstitielle dans la glace cristalline. Ils montrent que la diffusion interstitielle de l’eau se fait conjointement avec une légère distorsion du réseau et que les sauts de site à site dans la glace sont anisotropes et facilités dans l’axe de l’empilement hexagonal.

Diffusion de petites molécules dans des glaces

Comme pour l’auto-diffusion, la diffusion moléculaire dans des glaces est un pro-blème sur lequel un certain effort computationnel a été déployé avec plusieurs mé-thodes.

La diffusion à la surface des glaces repose sur l’étude des forces d’interactions entre la molécule adsorbée et la glace. Ainsi, l’adsorption de molécules a été étudiée dans le cas de glaces cristallines [59] ou dans le cas de glaces amorphes [98]. La diffusion sur des surfaces de glaces amorphes a été étudiée plus récemment par Karssemeijer et al. [24][25] et mise en parallèle de la désorption, afin de caractériser le rapport diffusion/désorption (en terme de constantes de temps notamment), pour pouvoir contraindre la probabilité de rencontre et donc de réaction des molécules adsorbées. Ces auteurs ont utilisé pour cette étude une méthode de Monte-Carlo cinétique adaptatif décrite dans leur article de 2012 [99] qui leur permet de traiter des échelles de temps très longues et ainsi de pouvoir décrire efficacement la diffusion jusqu’à des

2.2. Étude bibliographique des travaux effectués sur les glaces

températures aussi basses que 50 K.

Des études de dynamique moléculaire classique ont également traité la diffusion de molécules dans des glaces cristallines. Citons l’exemple des atomes d’Hélium [21] ou d’Oxygène [100], des molécules de diazote N2[101], ou même du formaldéhyde H2CO

[60] ; dans ces glaces, les deux mécanismes de diffusion sont observés en fonction des espèces, de leur interaction avec le réseau cristallin, ou de leur taille et leur masse. La diffusion dans ces glaces a pu être étudiée jusqu’à des températures relativement basses de 160 K. La dépendance en température des coefficients de diffusions calcu-lés, suivant une loi d’Arrhenius, a permis d’écrire l’équation de diffusion en terme d’une énergie d’activation dont l’ordre de grandeur est d’importance majeure pour la compréhension du mécanisme de diffusion, comme montré dans Varostos et al. [102].

Une structuration locale au sein de la glace peut se construire autour d’une molécule ce qui influence fortement sa dynamique. Par exemple, dans les glaces, est observée la formation de clathrates qui sont des structures cristallines locales formées par des liaisons hydrogène de l’eau, créant des cages qui peuvent contenir une molécule hôte. La diffusion dans de telles structures a été étudiée sur plusieurs exemples comme le dioxyde de carbone [103] ou le dihydrogène H2[104].

2.3 Résultats de nos simulations de dynamique