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2 Modélisation de la diffusion par dyna- dyna-mique moléculaire classique

2.1 La dynamique moléculaire classique

La dynamique moléculaire classique est une méthode de la chimie théorique qui permet, à partir des lois de la mécanique classique, de suivre l’évolution d’un système au cours du temps. Les propriétés du système comme l’énergie, la température, ou la pression sont calculées au cours de la trajectoire par une résolution numérique des équations classiques du mouvement. Chaque molécule est modélisée par un ensemble d’atomes dont les interactions mutuelles sont décrites par une fonction d’énergie potentielle : cela constitue le champ de forces. Une charge est associée à chaque atome pour représenter la distribution électronique.

2.1.1 Le champ de forces OPLS-AA

Le champ de forces utilisé dans nos calculs est OPLS-AA (Optimized Potentials for Liquid Simulations-All Atom) [49][50][51]. Il repose sur une représentation empi-rique de l’énergie potentielle pouvant être décomposée en deux contributions : intra-moléculaire (Ubonded) et inter-moléculaire (Unonbonded) :

U = Ubonded+Unonbonded (2.1) Ubonded = X l i ai sons kb(b − b0)2+ X ang l es kθ(θ − θ0)2 (2.2) + X i,dièdres [1

2V1,i(1 + cosφi) +12V2,i(1 + cos2φi) +12V3,i(1 + cos3φi)]

Unonbonded = X i <j [qiqj Ri j + [4ǫi j[(σi j Ri j)12− (σi j Ri j)6]] (2.3)

Les interactions intra-moléculaires

Les interactions intra-moléculaires Ubonded se composent des trois contributions décrivant entièrement la déformation (supposée harmonique) d’une molécule. Ces contributions sont sommées sur toutes les liaisons covalentes et tous les angles entre les atomes liés par des liaisons covalentes. La déformation des liaisons est représentée par l’expression :

Ul i ai sons= P

l i ai sonskb(b − b0)2 (2.4) où b et b0sont les longueurs de liaisons respectivement instantanées et à l’équilibre, et kbla constante de force associée (en kcal.mol−1. ˚A−1).

Celle des angles :

Uang l es= P

ang l eskθ(θ − θ0)2 (2.5) où θ et θ0sont les valeurs des angles respectivement instantanées et à l’équilibre (en

), et kθla constante de force associée (en kcal.mol−1).

La déformation des dièdres concerne trois liaisons covalentes consécutives et repré-sente la barrière d’énergie à franchir lors de la rotation autour d’une liaison. L’angle dièdre φ est l’angle orienté entre le plan formé par les deux premières liaisons et la troisième comme montré sur le schéma de la figure 2.1 :

2.1. La dynamique moléculaire classique

FIGURE2.1 – Angle dièdre entre trois liaisons consécutives

terme : Udièdres= X i,dièdres [1 2V1,i(1 + cosφi) +1 2V2,i(1 + cos2φi) +1 2V3,i(1 + cos3φi)] (2.6) où les Vi,j (en kcal.mol−1), sont les coefficients de la série de Fourier du terme énergé-tique (seuls les trois premiers ordres sont considérés).

Les interactions inter-moléculaires

Les interactions inter-moléculaires Uunbonded de l’équation 2.1 représentent les inter-actions entre les atomes appartenant à des molécules différentes ou distants de plus de trois liaisons covalentes. Elle se compose de deux termes :

— le premier décrit les interactions de van der Waals modélisées par un potentiel de type Lennard-Jones : UvdW = X i <j [4ǫi j[(σi j Ri j)12− (σi j Ri j)6] (2.7) où ǫi j et σi j sont les paramètres de Lennard Jones pour les interactions entre les atomes i et j : ǫi jreprésente la profondeur du puits de van der Waals et σi j, le rayon de Lennard Jones. Le terme en −R−6

i j représente la dispersion attractive de London entre deux atomes et celui en R−12

i j , la répulsion due à l’exclusion de Pauli.

— le deuxième décrit les interactions coulombiennes par un potentiel électrosta-tique :

UCoul=X i <j

qiqj

Ri j (2.8)

où qi et qj sont les charges partielles portées par les atomes i et j.

2.1.2 Le modèle d’eau

Afin de modéliser correctement une glace d’eau, il est important de bien en décrire les interactions intra- et moléculaires, par une bonne paramétrisation des inter-actions décrites section 2.1.1. Nous présentons ci-dessous différents modèles d’eau, et particulièrement ceux utilisés dans nos calculs ; l’étude de leur capacité à bien représenter notre modèle de glace est présentée dans la section 2.3.4.

Le modèle d’eau TIP3P

Le modèle TIP3P a été présenté par Jorgensen et al. [8]. Il est rigide et non polarisable, il décrit la molécule d’eau comme un assemblage non déformable de 3 atomes de charge totale nulle. Ces trois atomes portent chacun une charge q (positive sur les Hydrogènes et négative sur l’Oxygène) avec sur l’Oxygène, un site d’interactions de van der Waals. La molécule est présente une géométrie coudée avec des distances OH, dOH de 0.9572 ˚A , et un angle H-O-H de 104.52o. Les valeurs des paramètres utilisés (charge et paramètres du potentiel de Lennard Jones) ont été calculées pour reproduire au mieux l’enthalpie de vaporisation et la densité de l’eau liquide à pression et température ambiantes :

q = 0.417e (2.9)

ǫOO

kB = 6.54K (2.10)

σ = 3.1506 ˚A (2.11)

où kB est la constante de Boltzmann, e est la charge élémentaire de l’électron. Ce modèle, décrit d’une façon très simple la molécule d’eau mais il donne une mau-vaise température de fusion pour l’eau à pression ambiante et de façon générale reproduit mal les propriétés des phases solides de l’eau.

Le modèle d’eau TIP4P

Afin d’améliorer le modèle TIP3P plusieurs variantes ont été développées, parmi lesquelles le modèle TIP4P. Ce modèle d’eau a été proposé par Jorgensen et al. [8] [52] et décrit la molécule d’eau par 4 sites. Trois des sites correspondent aux atomes de la molécule disposés selon la géométrie du modèle TIP3P, et le quatrième site est un atome fictif M de masse nulle situé sur la bissectrice de l’angle H-O-H. Les charges positives q sont portées par les atomes d’Hydrogène tandis que la charge négative est portée par l’atome fictif M ; la valeur de cette dernière est fixée comme deux fois la

2.1. La dynamique moléculaire classique

charge portée par les atomes d’Hydrogène. Tout comme dans TIP3P, seul l’Oxygène est défini comme site d’interaction de van der Waals.

Plusieurs variantes du modèle TIP4P existent et différent par les valeurs des para-mètres du potentiel de Lennard Jones et des charges des atomes, dérivés d’ajustements sur des valeurs expérimentales, différentes pour chaque modèle. La table 2.1 donne ces valeurs pour quelques uns de ces modèles :

Modèle σ( ˚A) ǫOO kB (K) q(e) dOM ( ˚A) TIP3P [8] 3.1506 76.54 0.417 -TIP4P [8] 3.1540 78.0 0.5200 0.15 TIP4P/2005 [53] 3.1589 93.2 0.5564 0.1546 TIP4P/Ice [54] 3.1668 106.1 0.5897 0.1577 TIP4PQ/2005 [9][10] 3.1589 93.2 0.5764 0.1546

TABLE2.1 – Paramètres des différents modèles d’eau

Pour nos calculs de dynamique moléculaire classique nous avons utilisé le modèle d’eau classique TIP4P, ajusté sur les géométries de l’eau, de son dimère et sur la glace cristalline. Nous avons fait ce choix après avoir testé (section 2.3.4) son extension TIP4PQ/2005, optimisée, elle, pour traiter des propriétés des glaces cristallines à basse température.

2.1.3 Paramétrisation des molécules dans le champ de forces

Les molécules dont nous étudions la diffusion sont décrites par le champ de forces OPLS-AA. Les géométries, charges, paramètres définissants les interactions intra- et inter-moléculaires sont donnés ci-dessous pour chacune des molécules étudiées.

N H3

L’ammoniac est décrit comme une molécule à 4 atomes de symétrie C3v. Seul l’atome d’Azote est pris comme site d’interaction de van der Waals [49][55]. Ses paramètres de Lennard-Jones sont donnés dans la table 2.2 et les paramètres géométriques dans la table 2.3.

CO

Afin de décrire correctement le monoxyde de carbone, il est nécessaire d’utiliser un modèle à trois atomes. En effet, bien que la molécule soit neutre, elle est dotée de 19

Atome Masse (a.u.) Charge (e) σ(nm) ǫ k (K)

N 14.0067 −1.02 0.342 85.548

H 1.008 0.34 0.000 0.000

TABLE2.2 – Paramètres de Lennard-Jones du N H3

Liaison b0(nm) kb(kJ.mol−1) N-H 0.101 434 Angle θ0(o) kθ(kJ.mol−1) H-N-H 106.427 0.182 Dièdre φ0(o) kφ(kJ.mol−1) H-N-H-H 113.1468 0.0247

TABLE2.3 – Paramètres géométriques du N H3

deux sites nucléophiles. Aussi, pour bien la représenter au niveau électrostatique, elle est décrite par trois sites chargés : un atome fictif D situé au barycentre de masse de la molécule et portant l’intégralité de la charge positive et les deux autres atomes C et O auxquels est attribuée une charge négative. Seuls les atomes d’Oxygène et de Carbone sont choisis comme sites d’interactions de van der Waals [56]. Ses paramètres de Lennard-Jones sont donnés dans la table 2.4 et les paramètres géométriques dans la table 2.5.

Atome Masse (a.u.) Charge (e) σ(nm) ǫ

k (K)

C 12.011 −0.75 0.383 9.16

O 15.9994 −0.85 0.312 80.06

D 0.0 1.6 0.0 0.0

TABLE2.4 – Paramètres de Lennard Jones du CO

Liaison b0(nm) kb(kJ.mol−1)

C-O 0.1128 1002.528

TABLE2.5 – Paramètres géométriques du CO

CO2

Le dioxyde de carbone est décrit comme une molécule triatomique symétrique et linéaire avec trois sites d’interaction de van der Waals sur les trois atomes [50] [57]. Ses paramètres de Lennard-Jones sont donnés dans la table 2.6 et les paramètres géométriques dans la table 2.7.

2.1. La dynamique moléculaire classique

Atome Masse (a.u.) Charge (e) σ(nm) ǫ

kB (K)

C 12.011 0.7 0.375 52.84

O 15.9994 −0.35 0.296 63.41

TABLE2.6 – Paramètres de Lennard-Jones du CO2

Liaison b0(nm) kb(kJ.mol−1)

C-O 0.13674 476.976

Angle θ0(o) kθ(kJ.mol−1)

O-C-O 180.0 1.5

TABLE2.7 – Paramètres géométriques du CO2

H2CO

Le formaldehyde, est traité comme une molécule plane de quatre atomes avec deux sites d’interactions de van der Waals sur respectivement le Carbone et l’Oxygène [50][58][59][60]. Ses paramètres de Lennard-Jones sont donnés dans la table 2.8 et les paramètres géométriques dans la table 2.9.

Atome Masse (a.u.) Charge (e) σ(nm) ǫ

k (K)

C 12.011 0.45 0.375 52.74

O 15.9994 −0.45 0.296 105.5

H 1.008 0.0 0.0 0.0

TABLE2.8 – Paramètres de Lennard-Jones de H2CO

Liaison b0(nm) kb(kJ.mol−1)

C-O 0.1203 570.0

C-H 0.1101 367.0

Angle θ0(o) kthet a(kJ.mol−1)

H-C-O 121.75 80.0

H-C-H 116.5 35.0

TABLE2.9 – Paramètres géométriques de H2CO

2.1.4 Construction de la boîte de simulation

Nous décrivons ci-dessous la manière dont nous avons construit les boîtes de simula-tions qui nous ont permis d’étudier la diffusion de molécules (que nous nommerons parfois "soluté") dans une glace d’eau (que l’on appellera parfois solvant).

Mise en place du soluté dans la boîte de solvant

La molécule soluté est placée au centre d’une boîte cubique de dimensions choisies (dans notre cas, autour de 2.5 nm). Une procédure automatisée du logiciel GROMACS permet de remplir aléatoirement l’espace restant par des molécules d’eau dont le nombre dépend naturellement de la taille de la boîte choisie (généralement autour de 350 − 360 molécules dans nos boîtes de 2.5 nm).

Ensemble thermodynamique d’étude

Le système que l’on considère est caractérisé thermodynamiquement par plusieurs grandeurs : son nombre de particules, son énergie E, son volume V, sa pression P, sa température T.

Un des postulats de la thermodynamique statistique est qu’il existe une infinité de systèmes pour lesquels ces paramètres ont les mêmes valeurs (dans notre cas, une infinité de géométries accessibles, par exemple). Ainsi, afin de traiter correctement des grandeurs thermodynamiques, il est nécessaire d’introduire la notion d’ensemble statistique regroupant tous les systèmes conservant un même jeu de paramètres constants. Il existe ainsi différents ensembles pour chaque ensemble de paramètres conservés ; on présente ci-dessous quelques ensembles dont ceux utilisés lors de nos simulations.

L’ensemble micro-canonique L’ensemble micro-canonique regroupe par

défini-tion tous les systèmes n’échangeant ni énergie ni matière avec l’extérieur. Il est donc par construction, à volume, nombre de particules et énergie constante. Il est alors nommé NVE.

L’ensemble canonique L’ensemble canonique correspond à un système de volume

et de nombre de particules constants, mais en interaction avec un autre système appelé thermostat, avec lequel il échange de l’énergie pour maintenir sa température constante. L’énergie n’est donc a priori pas conservée. Cet ensemble est nommé NVT.

L’ensemble isobare Ce dernier cas est celui d’un système à nombre de particules

constant, et en interaction à la fois avec un thermostat comme pour l’ensemble canonique, mais également avec un barostat qui l’amène à modifier son volume pour maintenir une pression constante ; c’est l’ensemble nommé NPT.

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